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Full text of "L'evangile analysé selon l'ordre historique de la concorde avec des dissertations sur les lieux difficiles"

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•1 


V 


Gipiiu  i  fi  i 


LÀ^» 


V    .  **  fat/g, 


/  t'ÉVANGI' 


JU  JL-i 


ANALYSÉ, 

SELON   LA    CONCORDE. 

TOME    QUATRIEME. 


L'ÉVANGILE 

ANALYSÉ, 

SELON 

L'ORDRE    HISTORIQUE 

DE    LA    CONCORDE, 

Avec  les  DiiTertations  fur  les  lieux 
difficiles. 

Par  le  R.  P.  Mavdvit ^  Prêtre  de  l'Oratoire. 
TOME     QUATRIEME. 


&-s)Mfc4* 


f  Ci 


tf^^ise 


A      TOULOUSE; 

Chez  Dupleix   &  Lap  orte,  Libraires/ 

acquéreurs  du  fonds  de  feu  M.  BirofTe, 

rue  S1.  Rome  ,  à  la  Bible  d'or. 


M.  DCC.  LXXII. 

Avec  Approbations  &    Privilège   du  RcL 


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C^Sà 


ANALYSE 

D  E 

L'ÉVANGILE 

SELON 

LA  CONCORDE. 

QUATRIEME    PARTIE. 
CHAPITRE    CXXVIII. 

QUATRIEME      PASQUE. 

Cène  pafchaU. 

Pascha.Ce- 

E  Jeudi    fuivant  arriva  le  **  »a*cam. 

vrai  1 4.  de  la  lune ,  fupputé 

fur  la  conjonction  avec  le 

Ufoleil,  &  la  veille  de  Pâ- 

que  ,  où  Ton  devoir,   félon  la  loi, 

immoler  l'Agneau  pafchal.    Je  dis, 

Tom.  IF.  A 


C  A  PU  T 

CXXVIII. 

A.  i«.  B.  14. 

C    11. 


i  Analyse 

A.1ÉB.T4.  félon  la  loi,  parce  que,  félon  la  tra- 

c-11'  dition  ,    les  Juifs  avoient  transféré 

la  veille  au  lendemain  Vendredi ,  & 

la  fête  des  Azymes  au  jour  du  Sab- 

A.  i6.Vr\-  bar.  Ainfi  le  premier  jour  des  pains 

m.Utuemdie  fans  levain  ,  félon  les  Evangélittes  ,  eft 

Azymorum  ,  ,  r   •       \  1  • 

c.  in  quans-  le  jour  ,  au  loir  auquel  commençait 
ceffe  cratoc-  pufage  de    ces  pains  :  au  lieu    que 

adiPalcha.         .     &  i>      r   11        1       • 

laint  Jean  1  appelle  le  jour  avant 
la  fête  de  Pâque  ,  parce  qu'il  parle 
de  cette  fête  ,  félon  que  les  Juifs 
la  firent  cette  année.  On  peut  con- 
fidérer  dans  ce  Chapitre ,  I.  la  prépa- 
ration de  l'Agneau  Pafchai.  II.  La 
manducation. 

I.  Comme  toute  la  ville  de  Jéru- 
falem  étoit  pleine  de  Juifs  étrangers, 
qui  y  étoient  venus  de  toutes  parts 
pour  célébrer  la  Pâque  ,  ôc  qu'après 
Tordre  des  fouverains  Prêtres  pour 
arrêter  Jésus,  on  ne  pouvoir  pas 
fe  fier  à  toutes  fortes  de  perfonnes, 
A.Acceflc-  Pierre  ôc  Jean  demandèrent  à  Jésus 

xuntdifcipuli      \    -t  i  ■>  iiA     1  ' 

ad  jefum  di-  OLl  l*  vouloir  qu  on  al!at  lui  préparer 
cemes  :  b.  ce  qui  étoit  nécellaire  pour  manger 
mus?  &  pa-  la  Pâque.  Il  les  deftina  eux-mêmes 
rcmus  tibi  ut  pour    faire  cette   préparation    qu'ils 

manduccs        l  '  /*'  o       *i    1 

Pafci.a  ?        avoient   propoiee  ,   ce   il  les  envoya 
Et  miteit  Jans  Ia  Ville  chez  un  tel ,  dit  faint 

duos  ex  difei-  \  *       *  •  r  •  r 

puih  fui»,  c.  Matthieu  ,  en  lupprimant  ion  nom  , 


de  l'Evang.  Ch.  CXXVIII.  5 
parce  que  ce  Difciple  vivoic  encore  petrum  & 
îorfqu'il  écrivoit  fon  Evangile,  &  Joannem, di- 
qu'il  ne  voulue  pas  l'expofer  lui  Se  fa  J^i'Sg 
Emilie  à  la  fureur  des  Juifs.  Selon  PaYcha  ut 
feint  Marc  Se  fa%  Luc  ,  Jésus  ^duA""in£ 
die  a  ces  deux  envoyés  qu'en  entrant  ^ixcruntru- 
dans  la  Ville  ,  ils  trouveroient  un  œuJj  parc 
homme  chargé  d'une  cruche  d'eau,  Etdixkad 
qu'ils  n'avoient  qu'à  le  fuivre  îufques  eos.:  B- Iteia 
dans  la  maiion  ou  il  entreroit  ,  oc  c.  ecceincro- 
qu'ils  diroient  de  fa  part  au  maître  euntibus-  b, 
de  la  maiion  ,  qu  îldevoit  raire  chez  bis  homo  ia- 
lui  cette  Pâque  avec  fes  Difciples  :  |cnaîn  a4u* 

\        v  r      ,]    bajulans,fe- 

oe  pour  excuier  l  anticipation  qu  il  quimini  eum 
failoit  du  jour  de  la  Pâque  marqué  Ç  1,ld°»ura, 
par  la  tradition  des  Juirs,  il  ajouta  trat  ;  b.  & 
qu'il  étoit  preffe  du  temps  de  fon  dé-  ?uocura<iuc 
part ,  comme  s  il  diloit  qu  il  ri  avoit  cire  c.  pam- 
pas   le    loifir    d'attendre   plus  lone-  familias  do" 

>    i  •  i  i  mus, 

temps.  Qu'alors  il  leur  montrera  dans 
un  haut  étage  une  grande  chambre  magiftèc  "a! 
toute  préparée  ,  c'eft-à  dire  ,  meu-  TemPus  me 
blée  de  tables  Se  de  lits  (  car  alors  apuîT^fadÔ 
on  mangeoit  couché  fur  des  lits  )  p,arrcl,a1  cum 
èe  que  la  ils  préparaient  ce  qui  etoit  \&t  b.  ubieft 
nécelTaire  pour   faire    la    Pâque.    11  'eh<?!°mea- 

c  ii  •     J  B,  j     i     c        C-ub»cft  di- 

ralloit  avoir  du  courage  ce  de  la  rer-  verforium  ? 
meté  pour  obéir  à  cet  ordre  ,  Se  ubl  ,Pafch* 
pour  recevoir  même  Jésus  en  la  lu  meisman- 
maifon.    Les   Difciples    néanmoins  d; 

Aii 


luceni  ? 


4  Analyse 

a.kj.b.  14.  allèrent  dans  la  Ville  :  ce  qui  mon- 
c.  ii.  tre  qUe    JESUS    n'y   éroic   pas.    Ils 

b.  Et  ipfe  trouvèrent     toutes     chofes     comme 

vobis  démon-   t  i  *  '  v  o      1  1 

ftrabic cœna-  Jésus  les  avoit  prédites  j  &  dans  le 
cuium  gran-  temps   preicrit  pour   cela,  qui   étoit 

de.ftratumi    ■        ll        •       .      l  ,        r   ■       •     r      >\ 

&ii!icpara:c  depuis   trois  heures   du  loir  juiqua 
nobis.  fix  5   ils    préparèrent  ,    félon   Tordre 

Er  abierunt  Je    JESUS  tout     ce    qu>[[     falloir 

jus ,&  vene- pour  la  Paque  :  ce    qui  conhltoit  a 
runt  in  dvi- ruer    ['Agneau  ,    à    l'habiller,   &    à 

tatem:  Se  in-  .         A    .       o  '  ' 

vencrunt  fi-  le  rôtir.     Car  pour  la  recherche   de 
eut    dixerat  ja  confompncm  du   pain   levé  ,   c*é- 

toit  1  artaire   de  1  hôte  qui  leur  pre- 

&       parave-       •/-•/• 

runtPafcha,  toit  la  mailon. 
A.ficutconf-      \\t  Sur  le  foir  Jésus  fe  rendit  à 
fus.  '  la  maifon  avec  le  refte  de  Ces  Difci- 

b.  vefpere  p]es  .  &  l'heure   étant  venue  ,    qui 

autemfado,  V      •     \   r  l    *1  L'        m\    r  ^ 

venit     cum  etoit  a  loleil  couche  ,  il  le  mit  a  ta- 
duoHecim.c.  D}e     en  \em  difant  qu'il   avoit  tou- 

Et  cum  ratta  .  a  i    r        i 

effet    hora,  jours  eu   un   extrême  dehr  de  man- 
difeubuit,  &  ger  avec  eux  certe  pâque  avant  que 

duodecim  A- »  è  j       r^-rr  • 

poftoli   cum  de    louiînr.      "0)/££  la  JJiJJcrtatwn 

co-  XXIX.     La    raifon  qu'il   en   donne 

Etait iliis:    q.  qU'j[    n'en   mangera  plus   défor- 

Defidcno  de-  .T.  r      >\  r 

lîderavi  hoc  mais  ,    jufqu  a    ce   que  cette    figure 

Pafcha  man-  fa       £-  ±  &   fo       accompliire_ 

ducarevobii-  f 

cum     ante-  ment  dans  le  Royaume  de  Dieu.   Il 

quampatiar.  apreHe     ^g      fe   ^    granJ     chef_ 

pico  enim  d'œuvre  de  fa   puiffance   &  de  fon 

vobis  ,    quia  .         j-  *    p  /      i  \rr  J 

ex  hoc  non  amour  ,    je    dis    1  etablillement    dy. 


de  l'Evang.  Ch.  CXXVIII.     5 

myftere    adorable   de  l'Euchariftie  ,  manducabo 
c'eft-à-dire,  que  c'étoit  la  dernière  «llut|*  f°"c 

...    ,>  r       r^vr     impleatur  in 

Paque  qu  il  dut  manger  avec  les  Dii-  regno  Dei. 
ciples  avant  que  d'accomplir  l'agneau 
figuratif  par  le  véritable  qu'il  alloit 
fubftitner  en  fa  place. 

Après  la  manducation  de  l'Agneau     Et  acce?zo 
pafchal ,   il  prit,  félon  la  coutume,  calice  gracias 

i    •    '      i  *  M'J*  eeit  &c  dixic: 

une  coupe  pleine  de  vin  mêle  d  eau  ,  &l??iK    & 
&  ayant  rendu  grâces  à  fon  Père  de  diridiceintec 
ce  que  le   règne  des  ombres  &  des  vo*  : 
figures   étoit   palTé  ,   il   en  goûta  le 
premier  par   cérémonie  ,    &c  il  la  fit 
palier  dans   les  mains  des   Diiciples 
pour  en  boire  chacun    à  fon    tour  : 
Prenez j   leur  dit- il,   cette  coupe  _,   8c  Hîcoenïmro.' 

t  -t  ti      1  tT  bisquodnon 

la   vuide^    entre   vous.     Il    les   ail ura  tibam  de  ge- 
qu'il   ne  boiroit  plus  du  fruit  de  la  neratione  rî- 

•  .     r      ,\  L       i  i     r^'         tis   ,     donec 

vigne  juiqu  a  ce  que  le  règne  de  Dieu  regnum  Dci 
fut  arrivé,  ou,  ce  qui  eft  la  même  venia:* 
chofe ,  que  c'étoit  la  dernière  fois 
qu'il  buvoit  du  vin  ,  avant  que  le 
règne  de  Dieu  parût.  C'eft  ainfi  qu'il 
appelloit  le  changement  miraculeux 
du  vin  en  fon  fang  ,  comme  étant 
un  des  plus  grands  effets  de  l'empire 
de  Dieu  fur  les  créatures.  Ce  n'eft 
donc. pas  ici  l'inflitution  de  l'Eucha- 
riftie ;  ce  n'en  eft  que  la  promette 
exprimée  prefqu'en  mêmes  termes  à 

A  iij 


6  Analyse 

D.  ij.       l'égard  de  ces  deux  parties  ,    &  qui 
ne  tardera  guère  à  s'accomplir. 


s 


capitt  CHAPITRE     CXX1X. 

C  X  X  1  X. 

d.  m-  Lavement  des  pieds. 

JLotlo  pedumt 

Aint  Jean  feul  rapporte  les  préli- 
minaires de  l'inftitution  de  l'Eu- 
ehariftie ,  qui  ont  été  omis  par  les  au- 
tres Evangéliftes  ;&ony  comprend  , 
1.  les  vues  8c  les  motifs  de  Jésus  dans 
ce  grand  établiflement.  11.  La  pré- 
paration des  Apôtres  à  la  rece- 
voir. 

I.  Les  motifs  fe  prennent,  i.  de  la 

circonftance  du   temps ,  qui  fut    un 

jour  avant  la  fête  de  la  Pâque  Judaï- 

D.  ij.  An-  °lue'  V°ye\  la  Dijjertatlon  XXX.  Je- 

«  cticm  fcf-  sus  ne  pouvoit  pas  attendre  plus  long- 

tum  Pafchz  ,  \     •     n-  c  C 

feiens  jefus,  temps  a  mitituer  ce  Sacrement5  ia- 
quia     venit  chant  que  l'heut e  étoit  venue  où  il  de- 

hora  ejus,  uc         .         l    .        i  j 

tranfeâc    ex  voit  partir  de  ce  monde  pour  retour- 
hoc   mundo  ner  j  fon  Pere. 

ad  Patrcm  j  ^\      r  j       r 

2.  Ils  le  prennent  de  ion  amour 

pour  les  fiens  qu'il    lailïbit  dans  le 

monde  ,    orphelins   &   privés   de  fa 

préfence,  expofés  à  tous   les    périls. 

<um  dilexif-  Comme  donc  des  le  commencement 


de  l'Evang.  Ch.  CXXIX.     7 
de  fa  million  il  leur  avoit  témoigné  fctfuoi^fic- 

...  .  °   .,  ranc  m  raun- 

ion   amour  en    mille  manières  5    il  do ,  in  finem 
voulut  le  fignaler  encore  plus  à  la  fin  dilexitcos. 
de   fa  vie ,    &    leur    en  laifler    un 
monument    éternel   dans    ce    Sacre- 
ment ,  qui    ne    refpire  que  fon    a- 
mour. 

3.  Ils  fe  tirent  de  la  circônftance 
des  perfonnes,  c'eft-à-dire  ,  de  (es 
ennemis  ;  car  à  la  fin  du  fouper  ,  lorf-  fadt?c  c^ 
que  le  diable  avoit  mis  dans  le  cœur  diabolus  jam 
de  Judas  la  réfolution  de  le  trahir,  &  "^  J* 
que  les  Pharifiens  altérés  du  fa«g  de  dereceumJu- 
Jesus  traitoient  avec  lui  de  fa  liberté  uLto*?* 
&  de  fa  vie ,  il  redouble  fon  amour 

par  cette  opposition  ,  Ôc  il  donne 
aux  hommes  ,  &  en  particulier  à 
Judas,  fa  chair  à  manger  &  fon  fang 
à  boire. 

4.  Ils  fe  tirent  du  pouvoir  infini 
qu'il  avoit  entre  (es  mains  pour  exé- 
cuter ce  myftere  ,  puifqu'il  falloir 
changer  en  un  moment  une  créature 
dans  une  autre.  Aulli  il  fe  fouvient,.. 

-,  ,  ,    f  fciens      quia 

que  Ion   lJere  lui  a  donne  la  toute-  omnia  dcdic 

puifïance  ,    &   la  difpofition  abfolue  ei   Patcr  in 
a  u    r  o         »  >  r      •  manusv  '    & 

de  toutes  choies  ;  &  qu  étant  lorti  quia  à  Deo 

de  Dieu,  auquel  il  retournoit,  rien  Dcumvadit^ 

ne   lui  étoit  impoflibîe.    Toutes  ces 

chofes  confidcrécs,  il  fe  réfolut  en- 

Aiv 


8  Analyse 

D-jî*        fin  à  l'exécution  de  Ton  deflfein  ;  Se 
comme  il  falloit  commencer  par  pré- 
parer fes  Difciples   à  recevoir  un  fi 
grand  Sacrement, 
furgit  àece-       II.  11  fe   leva  de  table  pour  leur 
n*>  laver  les  pieds,  c'eft-à- dire ,  pour 

faire  au  fond  de  leurs  âmes  ce  qu'il 
alloit  faire  fur  une  partie  de  leur 
corps,  pour  purifier  leurs  affections 
dont  les  pieds  font  la  figure ,  & 
pour  nettoyer  leurs  confeiences  de 
toutes  les  taches  qu'ils  avoient  con- 
&  ponit  ver-  tractées.  11  quitta  fa  robe  de  deflus  , 
cimenta  fuaj  jQm   ja  }ongUeur  auroit  pU  l'embar- 

raffer  ,  ou  qu'il  auroit  pu  falir  ;  il 
te  cùm  acce-  fe  ceignit  d'un  linge  pour  effuyer 
pifTec    tinte-  }eurs  pieds  ;  &  ayant  verfé  de  l'eau 

um,  pra:cm-  r  7  .  J  , 

»itfe:d«inde  dans  un  baiiin,  il  le  mit  en  état  de 
micma.iuara  fa-re  cec  humble  office.   On  y  peut 

capit  lavare  coniiderer,  1.  la  necellite  delà  purih- 
pedes  difa-  catjon  intérieure.    II.  Sa  funSfance. 

pulorum  ,oc  ,      ...    ,  i     r     •      i      i 

extergerc  lin-  111.  L'utilité  &  le  fruit  du  lavement 
«'rLInôuV"  extérieur. 

venk  ergo  *•  La  neceiiite  paroit  en  ce  que 
ad  simonem  J  e  s  u  s  s'étant  adreiTé  à  Simon  Pier- 
dicir  ei  Pe-  re  Ie  premier ,  comme  étant  le  plus 
trus  :  Domi-  proche  de   lui ,  cet  Apôtre  le  refufa 

ne,   tu  mihi  St  r       j        r\      •        -C    •  J-  i 

lavas  pedes  ?  u  abord  :  Ç>#oz  j  Seigneur  j  dit  -  il , 
HcfpomîïtJe-  vous  me  laverie?   les  pieds  !  Jésus 

fm  ,  &  dixit  i         '  i     •       S     •    j-  >i  r 

ci  :  pour  le  réduire  lui  dit  qu  il  ne  iavoit 


de  l'Evàng.  Ch.  CXX1X.      9 
pas  encore  ce  que  figninoit  l'action  %**& 
que  lui  J  e  s  u  s  ailoic  faire  ,  ni  pour-  modo ,  fcies 
quoi  il  la  faifoit  ;  mais  qu'il  fauroit  a«emPoftea. 
bientôt  l'un  &  l'autre  .,   c'eft-à  dire ,     . 
la  néceflué  de  cette  pureté  intérieure  , 
que  marquoit  le  lavement  des  pieds  , 
éc   la  dignité  infinie  de  la  commu- 
nion   de  fon  corps  de  de  fon  fang, 
qui  étoit   la  raifon   de  cette  pureté. 
Ainfi   il  attribue  le  refus  de  Pierre  à 
fon  ignorance  touchant  une  chofe  11 
néceuaire. 

Cependant   il    ne    fe  rendoit   pas     DicicerPc 

*  .-  ,..  ,      ,    r  .     trus:  Nonla- 

pour  cette  railon  qu  il  ne  penetroit  vabis  mihi 
point,  &  il  protefta  qu'il  ne  fouffri-  F^esinster- 
roit  jamais  que  Jésus  s  abbaiisat  die  ci  jefus  : 
jufqu'à  lui  laver  les  pieds.    J  e  s  u  s  si non  lav,era° 

{    .  1,  ,..      r  .  te,    nonha- 

lui  répondit  que  s  il  ne  les  lavoit  pas,  bebis  parte 
il  n'auroit  point  de  part  avec  lui. mecuau 
C'eft  ainfî  qu'il  exprima  la  commu- 
nion de  rEuchariftie  ;  &  il  vouloir 
dire  que,  comme  dans  cet  état,  il 
n'étoit  pas  encore  difpofé  à  recevoir 
fon  corps  &  fon  fang  ,  s'il  ne  le 
lavoit  pas  ,  il  n'y  participeroit  point. 
Il  faut  l'entendre  ainfî ,  à  moins  que 
de  faire  de  ce  refus  refpectueux  un 
péché  mortel ,  qui  l'eût  éternellement 
féparé  de  Jesus-Christ:  ce 
qui  n'eft    point    vraifemblable.   On 

Av 


io  Analyse 

D'1)-  pour  tourner  cette  raifon  en  cette 
forme.  La  communion  de  mon  corps 
&.  de  mon  fang  vous  eft  nécefîaire 
pour  le  falut  j  or ,  la  purification  in- 
térieure ,  &  le  lavement  extérieur, 
qui  en  eft  le  figne  ,  vous  font  nécef- 
faires  pour  recevoir  la  communion 
de  mon  corps  6c  de  mon  fang.  L'une 
&:  l'autre  vous  font  donc  néceifaires 
pour  le  falut. 

II.  La  fuffifance  paroît;  car  ,  quoi- 
que Pierre  ne  comprît  pas  encore  de 
quoi  il  s'agiilbit  ,  il  conçut  néan- 
moins que  ce  lavement  étoit  myrte- 
rieux  ,  &  qu'à  le  refufer  il  y  alloit 
pour  lui  d'être  retranché  de  J  e  s  V  s 

Dicit  ei  Si-  ^  a  1  *l 

tnonPetrus:  en  une  certaine  manière.  Alors  il 
Domine, non  lui  offrit  à  laver  non-  feulement  les 

tantùmpedes  j  i         *  o      1 

mcos ,  fcd  &  pieds  ,  mais  encore  la  tête  cV  les 
mauus,&ca-  mains.  J  £  su  s,  qui  parloit  toujours 

rut.    Dicic  ei    r  i  ,  ,    •    /  l      ,  .'     « 

Sefus  :  Qui  lelon  la  vente  ,  marquée  par  le  la- 
locutui  eft  ,  vement  extérieur ,  lui  répondit  qu'il 
JJfc  ut  f èdei  fuflSfpit  de  laver  les^ pieds  à  celui 
l*ret  ,    fcd  qUi   avoit  déjà  été  lavé  ,   parce  qu'il 

cil     mundus    /      •  .  i-  i 

totus  :  étoit  net  tout  entier  ;  au  lieu  que  la 
poufîlere  s'attache  toujours  aux  pieds 
qui  touchent  la  terre ,  Se  elle  a  befoir* 
de  temps  en  temps  d'être  nettoyée , 
c'eft -a  dire  ,  que  quelque  jufte  que 
foit  une  ame ,  elle  a  toujours  befoin 


de  l'Evang.  Ch.  CXXIX.  1 1 
que  la  grâce  ,  comme  une  eau  vive  , 
purifie  ion  cœur  des  ordures  qu'elle 
contracte  dans  le  commerce  du  mon- 
de. Or,  (es  Apôtres  étoient  purs  par  &vosmundî 

I      r>         *  o  \        C   '  •fT  eltis,  fednoii 

le  baptême,  <x  par   la    roi  agiilanre  omnes  :  fcis- 
qu'ils  avoient  en  lui,  quoiqu'ils  ne  ba^     enj.m 

\      r    rc  >-i       •  qiiifnameflec 

le  rulienr  pas  rous  :  ce  qu  il  ajouta,  qui  tradcrec 
parce  qu'il  connoiiïoit  celui  qui  le  eum;pr°pte- 
trahiffoit.  11  laiiïa  à  fuppléer  la  con-  Non  cftii 
clufion  ,  qui  eft  qu'ils  n'avoient  be-  muncli  om- 
foin  finon  qu'il  leur  lavât  les  pieds. 
Après  avoir  achevé  cette  humble  céré-  Poftquam 
monie,  il  reprit  (es  habits  ,  &  fe  re-  jrgo  laYitPoc- 

,  .         r  deseorum,  Se 

mit  a  table.  accepit  vefti- 

III.  Avant  l'inftitution  du  Saint  Sa-  "!cnca   fua  : 

•11  r  -il-      1  •      Cum        recu" 

crement ,  il  leur  ht  recueillir  les  un-  buiflet    ùe- 
lités  ôc  les  fruits   de  cet  office  exté-  rum  ' 
rieur ,  en  les  faifant  réfléchir  fur  l'ac-  4ixice.\s  i.Scî" 

,.,  .      r  .  us  quid  fece- 

non  qu  il  venoit  de  raire.  rimvobis  ; 

Le   i.  fruit  eft  l'imitation  de  fon 
humilité ,  qu'il  preffe  par  cet  argu- 
ment du  plus  au  moins.  Il  établit  fa     vosvocatîs 
qualité  de  Maître  &  de  Seigneur  en-  %'%*&*". 

j  o  oc    Domine  i 

vers  eux ,  &  il  approuve  ces  noms  &  bene  di«- 
honorables  qu'ils  lui  donnent  ;  en  ^^^ £tc" 
quoi  il  n'y  a  ni  arrogance,  puifqu'il 
les  pofïede  à  jufte  titre,  ni  vanité, 
puifqu'ils  font  encore  infiniment  au- 
defTous  de  ce  qu'il  eft  en  effet.  Si  donc, 
tout  Maître  qu'il  eft  pour  les  inftruire,  hv/pcSe/v? 

A  vj 


12  Analyse 

D15.  &  tout  Seigneur  qu'il  eft  pour  leur 
fhos  qomi-  commander,  il  n'a  pas  laine  de  leur 
ïfteVffc^  *dver  ^es  V1Qds  >  ne  dcivent-ils  pas  à 
<ieberis  aiter  plus  forte  raifon ,  eux  qui  font  égaux 
KCpci;eSs!aVa  emr'eux  >  fe  rendre  les  uns  aux  autres 

cet  office  d'humilité  ?  parce  que  des 

Ixemplura    r^.r  .    ,  .    .  r   •  1»  1 

cnimdedivo- Dilciples  doivent  iuivre    1  exemple 
bis,uttqUem-  je  jetir  Maître  ,  &  faire  envets  leurs 

admodum        r  >-i       r  •    i 

ego  fed  vo-  rreres  ce  qu  il  a  rait  le  premier  envers 

ficiad&V°SeUX- 

Cela  ne  s'entend  pas  feulement  de 
la  cérémonie  corporelle ,  mais  cela 
s'accomplit  fpirituellement  lorfque 
nous  pardonnons  au  prochain  nos  of- 
fenfes  ,  &c  que  ,  par  nos  prières  ,  nos 
confeils,  nos  corrections  fraternelles, 
enfin  par  toute  la  fuite  d'une  vie  édi- 
fiante, nous  avons  foin  de  purifier  les 
affections  les  uns  des  autres. 
.  11  confirme  la  raifon   tirée  de  fou 

Amen  amen  r 

dico  vobis ,  exemple  ,  parce  qu  un  lerviteur  n  elt 
^??  efLff£  Pas  plus  grand  que  fon  Maître,  ni  un 

VU6       major  r      Ar         oj  ~1  '  ; 

domino  fuo ,  Apôtre ,  c  eft  -  a  -  dire  ,  un  Envoyé  3 

SC  ma°ofr  n'eft  Pas.de  Pluf  grande  condition 
efteoquimi- que  celui  qui  l'envoie.  Si  donc  le 
Maître  s'eft  abbaiffé  jufqu'à  rendre 
à  fes  ferviteurs  &  à  fes  Apôtres  un 
aulïi  vil  &  humble  office  qu'eft  celui 
de  leur  laver  les  pieds  ,  comment 
ieroit-il  poffible  que  les  ferviteurs  Se 


de  l'Evang.  Ch.  CXXIX.  ij 

les  Difciples  refufaflent  de  fe  le  ren- 
dre les  uns  aux  autres,  &  s'en  cruf- 
fent  déshonorés  /  Il  en  conclut  que     sî  hxc  CdJ 
s'ils  comprennent  bien  ce  qu'il  leur  tis,  beau  erî- 
dit,  &  ce  qu'il  vient  de  faire,  ils  *« fecetiti3 
feront  heureux  s'ils  le  mettent  en  pra- 
tique. 

Il  excepte  Judas  de  ce  bonheur  ,  3c       ï00  *0 

i  .     '  omnibus  vo- 

par  conléquent  de  cette  corujoiiiance  bis  die©:  Ego 
&  de  cette  a&ion.  Il  déclare  que  ce  *ioquosei«, 
qu  il  dit  la  ,  il  ne  le  dit   pas  d  eux 
tous.    Il    fait  qui   font   ceux  qu'il  a 
choifîs  pour  le  bonheur  éternel.  Que 
s'il   en    fouffre    quelqu'autre   en    fa 
compagnie  ,  &  même  à  fa  table  ,  c'eft:  J^ISr  fcri£ 
qu'il  faut  que  cette  parole  foit  accom-  tura  : 
plie    ;    Celui    qui    mange  avec  moi  j  ducatmecum 
lèvera  le  pied  contre  moi.  Il  a  accom-  panem,  Uva- 

i-    •    r      >•    •    i  ■    t  j    •     biteontrame 

ph  julquici  la  part  qui  le  regardoit  caicaneum 
dans  cette  prophétie,  en  donnant  du  frum. 
pain   à   Judas  j   mais  il   va   encore 

fiorter  plus  loin  fa  bonté  ,  &  pour 
ui  amafïer  des  charbons  de  feu  fur 
la  tête ,  il  lui  va  donner  fa  propre 
chair  à  manger.  L'original  porte 
lèvera  le  talon  j  comme  c'eft:  la  der- 
nière partie  du  corps ,  il  repréfente 
le  dernier  coup  que  Jud.is  méditoit 
de  lui  donner  en  le  quittant,  & 
comme  pour  lui  dire  adieu,  qui  étoit 


14  Analyse 

D-  '*       de  le  livrer  entre  les  mains  de  fes  en- 
Amodè  di- nemis.  11  fait  remarquer   aux   autres 

rovobis,  pri-  r>r     ,  /  in-  r 

ufquam  fiât  :  A^nciples  cette  prédiction  ,  ann  que 
uc  cùm  foc-  Ja  chofe  étant  accomplie  ,  ils  fe  fou- 

tum    fuînc ,      •  ni,         .     r   ,  ,.  „  ,., 

crcdariSjquia  viennentqu  il  1  avoit  prédite,  &  qu  ils 
ego  fum.  reconnoiflent  ce  qu'il  eft  ,  c'eft-à-di- 
re  ,  le  Fils  de  Dieu ,  &  la  fageiîe  du 
Père.  11  parloit  de  la  trahifon  pour 
les  empêcher  de  croire  qu'il  eût  été 
furpris  y  mais  ils  ne  comprirent  pas  ce 
que  vouloient  dire  des  termes  fi  gé- 
néraux. 

Au  refle ,  fi  faint  Jean  n'a  point 
écrit  l'inftitution  de  l'Euchariftie  , 
c'eft  qu'il  la  fuppofe  atfez  marquée 
par  les  trois  autres  Evangéliftes.  Il 
ne  laiflfe  pas  néanmoins  de  rapporter 
le  lavement  des  pieds  comme  une 
préparation  à  ce  divin  Sacrement. 
C'eft  au  moins  le  fens  le  plus  raifon- 
nable  qu'on  puiflfe  donner  à  cette 
cérémonie  ,  &  à  tout  ce  qui  la  pré- 
cède. 

Le  x.  fruit,  qu'il  ne  relevé  pas, 
mais  qui  fe  tire  clairement  de  la  fin 
de  cette  cérémonie,  regarde  les  Mi- 
nières de  fon  Eglife  i  Se  comme  il  a 
lavé  les  pieds  à  fes  Apôtres  pour  les 
difpôfer  a  la  communion ,  il  leur  re- 
commande aufïi  de  s'offrir  volontai- 


de  l'Evang.  Ch.  CXXIX.     15 

rement  aux  fidèles  pour  les  purifiée 

de  leurs  péchés  par  le  facrement  de 

Pénitence  ,   avant  que  de  leur  diftri- 

buer  les  facrés  myfteres.   A  cet  égard    yidefup.p: 

il  leur  dir  qu'il  leur  a  donné  l'exemple  Xi*» lt  ir-* 

qu'ils  doivent  imiter. 

Le  5.  qui  regarde  les  fidèles,  efl: 
qu'ils  doivent  conferver  ,  comme  les 
Apôtres  ,  la  pureté  &  l'innocence  de 
leur  Baptême  j  ou  fi  ,  avant  que  de 
s'approcher  du  corps  du  Sauveur  ,  ils 
apportent  quelque  matière  au  facre- 
ment de  Pénitence  ,  ce  ne  foit  que 
cette  pouffiere  qui  s'attache  à  la  plante  yi<kfup.p; 
des  pieds ,  c'eft-  à-dire,  ces  défauts  lé-  iîz>  i% 
gers ,  qui  font  inévitables  dans  le 
commerce  du  monde ,  de  non  cette 
perfidie  que  Judas  y  apporta. 


CHAPITRE    CXXX.       ca,.cxxx. 

A.  16.  B.  14. 

Eucharijlie. 


C.  ix.  D.  i). 

£uchénftia< 


APrès  ces  paroles  Jésus  infti- 
tua  l'Euchariftie  j  &  dans  cette 
action  nous  pouvons  confidérer  tou- 
tes les  circonftances  qui  l'accompa- 
gnent. I.  A  l'égard  de  la  consécra- 
tion du  pain,  II.  A  l'égard  de  celle  du 


iC  AtfALYSÎ 

C.  xi'  D  ,4'.  V^  '    ^Ul  ^0nC   ^eS  ^eUX   Par"es  ^e  CC 

'  myftere. 
t.  Confc-  it  Consécration  du    Pain, 

(ratio  partis.  J 

a.  i6.  cœ-  !•  La  première  circonftance  eft 
nantibus  au-  qvl'A  l'inftitua  après  la  manducation 
de  l'Agneau  pafchal  ,  &  lorfque  le 
fouper  duroit  encore ,  afin  de  faire 
fuccéder  dans  un  même  repas  la  vé- 
rité à  la  figure.  D'ailleurs  il  voulue 
finir ,  par  ce  Sacrement  ,  le  dernier 
repas  avec  fes  Difciples ,  pour  l'im- 
primer plus  profondément  dans  leur 
mémoire, 
uccepit  Jefos      La  2,  efl-   ciu*il  prit  entre  fes  mains 

panem,  ,  r        i  *  r  »-i      > 

du  pain  lans  levain  ,  parce  qu  il  n  y  en 

avoit  pas  d'autre  fur  la  table,  ni  dans 

toute  la  maifon  :  cette  forte  de  pain 

étant  ordonnée  pour  la  manducation 

de  l'Agneau  pafchal. 

La  z.  eft,  qu'il  rendit  grâces  à  fon 
CcC.  gratias  ]  \  1.  ,..,    .  B  ,  , 

egic,  Père  du  pouvoir  qu  il  lui  avoit  donne 

de  diipofer  de  Terre  des  créatures  , 

pour  les  faite  feivir  a  fes  myfteres.  11 

employa  cette  action  de  grâces  avant 

les  deuxeonfécrations  du  pain  &  du 

vin. 

A.  benedixie,      La  4.  eft  ,  qu'il  bénit,  par  quelque 

gefte  fenfible  ,  le  pain  qu'il  tenoit , 


de  l'Evang.  Ch.  CXXX.     17 

pour  y  rendre  fes  Difciples  attentifs  , 
Ôc  par  cette  bénédiction  efficace  Ôc 
route-puiftante  ,  il  le  changea  réelle- 
ment en  fon  propre  corps.  Voyc\  la. 
Dijjertation  XXXI. 

La  5 .  eft ,  qu'il  rompit  ce  qu'il  ve-  ac  fregïcj 
noit  de  bénir  &c  de  changer  ,  ÔC  qu'il 
en  fit  treize  pot tions  ,  autant  qu'ils 
étoient  de  perfonnes  à  table ,  ou  peut- 
être  il  les  fit  à  mefure  qu'il  les  diftri- 
buoit ,  en  rompant  à  chaque  fois 
une  partie  de  ce  qu'il  tenoit  entre  les 
mains.  Fraccion  d'autant  pius  rifée  , 
que  les  pains  azymes  étoie  c  fort 
plats. 

La  6.  eft,  qu'après  avoir  pris  pour 
lui   la  première   portion    ôc    l'avoir 
mangée  ,  il  diftribua  les  autres  à  (es  deditquedîf. 
Difciples  fans  en  excepter  Judas ,  en  cipulii  fuis , 
leur  difant  :  Prene^  &  mange^_y   cejl  ^\  *&  "£ 
ici  mon  Corps  qui  ejl  donné  pour  vous  ;  medite  : 

»  1  •  c  C.  Hoc  eft 

ce  qu  on    peut    expliquer,  qui  lera  corpus    me- 
facnfié  à  la  croix  pour  vous  ;  ou  qui  um  »  ,  ^u,oti 

n  t  J-n.     t_     !      r>     provobisda- 

vous   elt  prelentement  diltribue.  Ce[Ur: 
fécond  fens  eft  conforme  à  cette  le- 
çon de  faint  Paul  ,  félon  l'original  , 
qui  vient  d'être   rompu  pour  vous    le 

donner.  .     c   .     . 

t  a  »-t    1  j    hocfac,re  ,n 

La   7.   elt ,  qu  il  leur  commanda  meam   com- 

de  faire  la  mcme  action  en  mémoire  nçe™toratio* 


i8  Analyse 

a.  i<5.  b.  14.  de  lui.  Commandement  qui  s'étend 
"  jufqu'à  la  fin  des  fiecles,  félon  le 
même  Apôtre ,  qui  nous  apprend 
que  toutes  les  fois  que  nous  mange- 
rons de  ce  pain,  &  que  nous  boirons 
de  ce  calice,  nous  repréfenterons  la 
mort  du  Seigneur  jufqu'à  ce  qu'il  re- 
vienne. 

à.  Confie-  1.  Confécration  du  Vin, 

(ratio  vini» 

similitcrA.       \\    La  ï    circonftance  de  la  confé- 

6c    accipiens  ,  .      , 

calicem ,        cration  du  vin  ,  eit  qu  il  prit  de  même 

c.  poftquam  le  calice  après  fouper.  Saint  Luc  ayant 

.omis cette circonltance  de remps avant 

la  confécration  du  pain  ,  il  l'a  remife 

ici  pour  avertir  que   la  cène  légale 

étoit  paffée,   &  que  l'Euchariftie  fut 

inftituée  en  fa  place. 

La  2.e(l,  qu'il  répéta  l'action  de 

A.  gratias  e-  grâces  &  la  bénédiction ,  pour  faire 

git  \  àc  dédit  p    rr  »i     1  •  j 

Siis ,  dicens  :  volr  c[ue  *  e"ec  cl11  "  devoit  produire 
fur  le  vin  étoit  diftinct  '  de  celui  qu'il 
avoit  produit  dans  le  pain. 
om^s"  hÎc  La,3  •  eft ,  qu'il  en  but  le  premier  , 
eftcnim  fan-  &  qu'il  invita  tous  fes  Difciples  à  en 
ftS;;  boire  après  lui,  en  leurdifant:  Cefi 
ci ,  qui    oro  ici  mon  Sang  j  le  fans  du  Nouveau 

mulris  efuin-   t   n  ■   r  /  /       \    »     /->      • 

detur  in  re-  *  ejtament  qui  Jera  répandu  a  la  Lrozx 
miflîoncm      pour  pluf.eurs  en  la  rémijfion  de  leurs 

peccatoruru. 


de  l'Evang.  Ch.  CXXX.  i9 
péchés.  A  quoi  il  faut  joindre  les  pa- 
roîes  qu'ajoute  faint  Luc  ,  &  qui , 
fans  doute,  furent  aufli  prononcées  : 
Ce  calice  efi  le  Nouveau  Teftament  dans     p«  H»c  cft 

f,       J         ,  i        i-  n  r  Calix,novum 

mon  oang  _,    lequel  calice  ejt  prejente-  Tdiamen- 
ment  répandu  pour   vous.    Exprelîion  tum  in  fan" 
par  le  prêtent ,  ielon  1  Original ,  qui  qui  pro  vobis 
fait  voir  clairement   que   le  Sang  du  fandetur. 
Nouveau  Teftament  étoit  réellement 
dans  le  calice  ,  ôc  que  l'erTufion  pré- 
fente   du  calice  dans  la   bouche  des 
Aoôcres,  étoit  un  vrai  facrifice.  Koye^ 
la  Dijfertaùon  XXXIL 

La  4.  eft ,   que  tous  les  Difciples  ,     B-  Et  bibe* 
lans  excepter  Judas,  en  burent  dans  granei. 
le  même  calice. 

La  5. eft,  que  Jésus  les  aflura  que, 
comme  c'étoit  la  premiete  fois  qu'il 
buvoit  fon  Sang  avec  eux,  ce  feroit 
auffi  la  dernière  jufqu'après  la  réfur-    A.  Dîcoau- 

__JEL!  17  .  tem     vobis  : 

rection.   ht  pour  exprimer  cette  pen-  nonbibama- 
fée  il  les  a(ïura  qu'il  ne  boiroit  plus  modo  de  hoc 

dr     •      j      1          •  /    »    n.    ^    j*        eeni'mine  vi- 

e  ce   rruit  de  la  vigne  (celt-a-dire  fis  ufquc  jn 

de  fon  Sane  ,   parce  qu'ainfi  qu'il  le  diem  j""".» 

di        i-in.1-  \  •    r    cùm  illud  bi- 

îra  plus  bas  ,  il  elt  la  vraie  vigne  )  jul-  bam    vobif- 


qu  au  joui  ou  il  le  boira  tout  nouveau  cum  novum 

11  1      r        n  ia  regno  pa- 

avec  eux  dans  le  règne  de  Ion  Père  ,  triS  n^i, 
c'eft-à-dire  ,  tout  renouvelle  par  fa 
réfurrect-ion  ,  qui  eft  l'effet  du  règne 
&   de  la  fouveraineté  de  fon  Père. 


20  Analyse 

a.  te*,  h.  Voyez  la  Differtation  XJXIII. 
c.  11.D.  13.       r^]C'         »       *    c      >r      ~ 
Cela  rait  voir  qu  après  la  returrec- 

tion  Jésus  a  célébré  i'Euchariftie 

avec  fes  Difciples ,  comme  il  eft  clair 

par  l'hiftoire  d'Emmaiïs ,   fi  ce  n'eft 

qu'alors  il  ne  confacra  que  le  pain  , 

pour  montrer  que  la  communion,  fous 

les  deux  efpeces ,  n'étoit  pasnéceflai- 

re.  Ainfi  il  ne  faut  pas  confondre  ces 

paroles   avec   celles  qu'il  dit  après  la 

coupe  légale.  11  les  a  dites  deux  fois  : 

la  1.  pour  avertir  qu'il  ne  boiroit  plus 

de  vin ,  jufqu'au  règne  de  Dieu,  qui 

étoit  l'établiirement  de  I'Euchariftie. 

La  2.  pour  donner   un   fécond  avis 

qu'il  ne  boiroit  plus  fon  Sang  avec  {es 

Apôtres  jufqu'après  fa  refurrection  , 

qui  eft  encore  le  temps  du  règne  de 

Dieu. 


ca.cxxxi.       CHAPITRE     CXXXI. 
c!  t*.D.  rj!        Désignation  du  Traître,  &  fa 


Notatio,&  fortie. 

tgreflus  prodi- 


tons. 


I.  Traître  marqué. 


d.  13.  Amen     A    Vantque de  changer  de  difeours, 

amen       dico     h\     -i  i  j  '    1  i     • 

bis  ;  Qui  ac-  M  -L  "  leur  dcclara  que  celui  qui  rece- 


DE    l'EvàNG.  Ch.  CXXXI.     2  1 

voit  un  de  fes  Apôtres  le  recevoit  lui-  ciPîc  fi  <luem 

A  l  i    •  •    «  mifero  ,    me 

même  ;  mais  que  celui  qui  le  rece-  accipit  i 
voit,  comme  ils  venoient  de  faire  par 


temme 


la  communion,  recevoit  celui  qui  1  a-  iuiaV 
voit  envoyé,  ceit-a  dire,  ion  rere,  pit  eum  qui 
dont  il  étoit  l'Apôtre.  rae  mifu* 

Il  n'avoir  parlé  de  la  trahifon  qu'en 
palTant ,  &c  d'une  manière  dont  il  n'y 
avoit  peut-être  que  Judas  qui  eût  pu 
s'en  appercevoir.  Il  en  reprend  ici  le 
difeours,  i .  pour  toucher  ce  miférable, 
s'il  en  étoit  encore  capable  ,  &  pour 
lui  faire  quitter  ce  deflein,  envoyant 
qu'il  étoit  découvert,  i.  Pour  ôter 
tout  lieu  aux  autres  Difciples  de  croire 
que  Judas  l'eût  trahi  à  fon  infçu,  ÔC 
de  conclure  de  cette  entreprife  que 
toutes  les  fuites  de  cette  trahifon 
avoient  été  ,  à  fon  égard ,  involon- 
taires ôc  forcées.  I.  11  découvre  clai- 
rement la  trahifon.  II.  Il  défigne  feu- 
lement en  fecret  la  perfonne  du  traître. 
III.  Il  l'oblige  à  fortir. 

I.  Lorfqu'on  étoit  encore  à  table  &c  .    c^  hxc 

,  l  r  -  dixiflcc     Je- 

qu  on  mangeoit,  pour  raire  mieux  fus ,  curbatus 
éclater  l'indignité  de  l'attentat,  &  eftrPiritu:  & 
1  accompliliement  de  la  prophccie  ,  il  e/i .-  b.  i4.  & 
fe  troubla  foi-même  tout  d'un  coup  ;  <*ifcumbenti- 

Qr   ]     '  c  li  jt       bus    cis>  &c 

ce  il  témoigna  ion  trouble,  en  dilant  manducanti- 

qu'il  voyoic  à  table  avec  lui  un  hom-  bus  *     aic  * 


12  Analyse 

A.  i*.  b.  14.  me   qui  le  trahilïbit;  &  il  les  aflura, 

qu  un  d  entr  eux  le  trahiroic.  Les  Dii- 
rumtamcnec-  ciples  tour  troublés ,  ne  fâchant  de  qui 

cemanustra-  [[  parloir ,  prirent  divers  moyens  pour 
demis     me ,  ,    r  ^  r  /         r 

niecum  eft  in  le  connoure. 
menfa:D.A-      lo^  jjs  £Q   reeardoient  les  uns  les 

mpn    .      dlCO  O 


men  , 


vobis  ,  quia  autres  ,  en  partie  de  la  lurpriie  qu< 
unus  ex  vo-  jeur  caufa  cette  nouvelle,  en  partie 
bis  ,  b.  qui  *      •     F    ■  1 

manducat      pour  oblerver  s  11  paroitroit   iur  le 

^D^radet  v^age  ou  dans  ^es  paroles  de  quel- 
le. Afpicie-  qu'un  d'eux,  quelqu'indice  de  la  rra- 
bantergo  ad  hjfon  ^[^'ls  cornme  Judas  faifoit  fans 

invicem  dii-  f  " 

dpuli ,  hacfi-  doute  l  étonne  plus  que  les  autres  , 

di«rct!e  <1U°  ^s  ne  Purent  r^en  connoître  par  cette 
voie. 
a.  Et  con-      2°.  Tout  affligés  de  cette  perfidie , 
triftativaide,  ^  priei:em  J  Es  y  s  de  dire  tout  haut 

cœperunt  un-          r     / 

guli  dicere:  qui  c'etoit  ;  3c  pour  l  y  obliger,  cha- 
goTâfDo:  cun  lui  dit  à  fon  tout  :  Eft- ce  moi  > 
mine»  Seigneur  /'Jésus,  qui  vouloit  gar- 

der l'honneur  du  coupable ,  &  laitier 
accomplir  la  prophétie  ,  n'avoit  gar- 
Ati  feref-  ^e  ^e  ^es  ^tisfaire.  Il  exagéra  feule- 
pondens ,  aie  ment  l'énormité  du  crime.  Un  de 
«duodeUcimS,  mes  <*ouze  Apôtres ,  dit-il ,  un  hom- 
a.  qui  imin-  me  qui  met  la  main  au  plat  avec  moi , 
SanuminpT-  m?  «***"  &c  me  livrer  à  mes  enne- 
rofide  ,    hic  mis  !  Cette  marque  étant  commune 

me  tta  et.       ^  tQUS    j£s    ^ouze  ne  déflgnoït  auCUll 

ïiliusdui-  en  particulier.  Il  ajouta,  i°.  La  rai- 


de   l'Evang.  Ch.  CXXXI.  2$ 

fon  pourquoi  il  ne  le  nommoic  pas  dcmhomînis 

publiquement  ,  qui  etoit  f  obeuiance  fcriptum  cft 

aux  ordres  de  fon  Père ,  qui  l'obli-  dc  iUo  : 

geoit    d'aller  fon    train,  fuivant    ce 

qu'il  étoit   écrit  de  lui.    iQ.  Le  fup- 

plice    du   traître  :  que  cette  foumif-  v*autemho- 

(ion  n'empcchoit  pas  que  le  malheur  nûaiilli,pei 

1       T c*'    1  A'    1    y        1  1     <luem    Flhu$ 

éternel  ne  hit  deltine  a  celui  qui  le  hominis  tra- 

trahiroit ,  &  qu'il  auroit  mieux  valu  delur  :  b.°" 

.     .  ,  \  r  .  num  erac  ci  , 

pour  lui,   qu  il  ne  rut  jamais  venu  au  fi  nauis  non 
monde.  [^ez  homo 

Comme  Jésus  dit  ces  paroles,  avant 
que  tous  eulfent  achevé  de  lui  deman- 
der chacun  a  fon  tour  fi  c'étoit  lui  , 
Judas,  pour  ne  fe  pas  découvrir  par  Refpondenc 

r        r\  iii-  autem  Judas, 

ion  hlence  ,  ne  manqua  pas  de  le  lui  qui   n-adidie 
demander  après  les  autres.  Il  eut  l'im- eum  •  £ixit  '■ 

.  1      1     •    i-  1  Numquid   e- 

pudencede  lui  dire  comme  les  autres  :  gofum.Rab- 
Efl-ce  moi  ,  mon  maître  ?  Jésus  lui  ÎL1  !  jizJni  : 
ht  entendre  par  un  ligne  de  tcte,  que 
c'étoit  lui-même  ,  ou  s'il  le  lui  dit ,  ce 
fut  fi  bas  qu'aucun  ne  l'entendit:  ce 
qui  étoit  en  effet  alfez  difficile  dans 
une  table  environnée  de  treize  perfon- 
nes. 

*°.  Rejettes  encore  de  cette  voie  ,    -."".- 
ils  prirent  celle  de  l  information  ,  &  c<rperunc 
les    principaux  Difciples  (  fur -tout  qua^ere  m~ 

I  r  r         v  v  ter   le  ,   quis 

Pierre  )   commencèrent  a   queftion-  effet  ex  ds , 
ner  les    autres  ,    &  peut-être  avec  ^^j^0* 


/ 

24  Analyse 

a.  is.b.  14.  quelque  dureté,  pour  voir  fi  quel- 
"  qu'un  ne  fe  couperoit  point  dans  fes 
réponfes.  Ils  n'avancèrent  pas  plus 
par  cette  voie  que  par  les  autres  ; 
&  ce  qui  les  éleignoit  de  ioup- 
çonner  Judas  étoit  la  confiance  que 
Jésus  lui  avoit  témoignée,  en  lui 
commettant  la  garde  des  aumônes  : 
ce  qui  demandoit  un  homme  fi- 
dèle. 

II.  4.  Enfin  Pierre   impatient  de 
découvrir  ce  fecret,   profita  de   l'a- 
vantage que  lui  donnoient  la  place 
de  Jean  de  la  fienne.  Ils  étoient  tous 
deux  aux  deux  côtés  de  J  n  s  u  s  qui , 
étant  couché    fur   le   côté ,  tournoit 
D.ïrater- le  dos    à  Pierre,  8c  le   vifage  vers 
KuCsC«d£  Jea»  >   qui  étoit  ainfi  dans  le  fein  de 
cipuiisejusin  Je  s  u  s ,  c'eft-à-dire ,  dans  la   place 
queîn  dilige-  qu'on  nommoit  le  fein  du  Père  de 
batJefus.      famille  ;  fur  quoi  voye^la  Differta- 
innuit  ergo  tion  XXXIV.  Pierre  donc  fe  levant 

Pcrrusf&dl1-1111  Peu  derrière  Jésus,  fit  fi- 
xît  ei:  Quis  gne  à  Jean  de  lui  demander  de  qui 
cftdequodi-^  parioit#   Ce  Difciple  appuyant  fa 

itaquecùm  tète  contre  l'eftomac  de  Je  s  u  s  ,  lui 
recubuiffec     dit   tout  bas  ,  Seigneur  j  gui  ejl-ce  ? 

iile  fupra  pe-  T  i    •       /  1  •      j  a 

ans  jefu,  di-  J  e  s  u  s  lui  répondit  du  même  ton , 
xitei:L>omi- mais  avec  défenfe  d'en  parler,  que 
»c#*iu"e  •  c'^toic  celui  i  qui  il  alloit   donner 

un 


de  l'Evang.  Ch.  CXXXÏ.     25 

un    morceau   de    pain    qu'il  avoir  „  Répondit 

/     1  1  ar     1»  ^efus   :    lllc 

trempe  dans   le   plat  ,    6c    1  ayant  eft ,  cui  ego 

fait  ,  il  le   donna    à   Judas.    Cette  totinôump* 

dilhndtion  éloigna  encore  plus  les  xero.  u  cùm 

foupcons    qu'on  auroit  pu  former  innnxi<r"ec 

contre  lui.  Il  mangea  ce  morceau  ,  jud^simonis 

&"  aufîi-rôr  Satan    entra    dans   fon  nrcanoJfù 

.     r  .  ,  _  Ec  poil  buc- 

cœur    pour  lui   taire  exécuter  Ion  ceiiamincroi- 
deiTein.  Ainfi  Jean  ne  rendant  point  ln   in  eura 
de  reponle  a  Pierre  ,    celui-ci   de- 
meura malgré  lui  aufii  incertain  qu'il 
étoit. 

III.  J  e  s  u  s  voyant  Judas  con-     Et  dixitej 

r         /    1  C         n.         t   1  Jefus  :  Quod 

hrrne  dans  cette  runeite  relolunon,  faC£S  ^  faccj. 
lui  dit  doucement  qu'il  fe  hâtât  de  tius- 
faire  au  plutôt  ce  qu'il  avoit  réfolu 
de  faire.   Ce    n'étoit   pas  lui  com- 
mander le  crime,  mais  lui  marquer 
fa   difpofition    à   mourir.     Aucun     Hocautem 
néanmoins  ne  connut   pourquoi  il  "5mo  ,fcivic 

.  ,  •     *    t      1         /~<  clifcumben- 

avoit  donne  cer  avis  a  Judas.  Corn-  tium  ai  quid 
me  il  porroir  la   bourfe  ,  les  uns  diXcnz  C1- 
croyoïent  qu'il   lui   avoir  ordonné     Quidam  e- 
acherer  ce    qui  etoir    nccellaire  banc,  quia  lo- 
pour  la  fête  ,  qui  par  conféquent  culos    habe- 

r  w      •  ^        r  ,  ^  bac     Judas  , 

n  croit  pas  encore  commencée  pour  quèddixiffec 
les  Juifs:  les  autres ,  qu'il  donnât  eiJefus:Eme 

1  A         A  1      ea  <\ux-    °pus 

aux  pauvres  quelques  aumônes  de  funenobisad 
l'argent  qu'il  avoit  en  dépôt.  Quoi  dk-m  fcftum  •. 

;  I  V    .  N  -     t  -,     aut  ege  is  ut 

qu  il  en  loit ,  après  ces  paroles    &  aliquiddaret, 
fom.  IV,  B 


iy  Analyse 

a.  i6. b.  14.  Je  morceau  qu'il  avoit  mangé  ,  il 
c.  ii.    .  13.  fort^t  lorfqu'il  écoit  déjà  nuit. 

Cum  crgo  l  ' 

acccpifTetille 

buccilam  ,  c-  2#  Sortie  de  Judas. 

xivit     coiui- 
nuo  :  crat  au- 

tcmnox.  Après  fa  fortie  Jésus  voyant  fa 

s.  Egrefus  paflion  ouverte  par  une  démarche 

Cûm  crgo  q^i  fervoit  d'engagement  à  toutes  les 

exifTec ,  aixit  fuites  ,  s'écria  dans  la  vue  de  fa  ré- 

^«ifica^uT  furredion  qui  en  et  oit  la  principale  ; 

cil  Filius  ho- qUe   jufqu'ici  le  Fils  de  l'homme 

ScusS  clarifia  avoit  été  glorifié  par  les  miracles  & 

catus  eft  in  par  fa  doàrine  j  &  que  Dieu  avoit 

co*  été  glorifié  par  lui.    Mais  que   s'il 

si  dcus  da-        ■  eiorifié  Dieu  ,,  déformais  Dieu 

îihcatusettin  .  5  .x  r   .        A 

eo,  &  Dcus  alloit  aulii  le  glonher  enloi-meme, 
clarificabac    comme  il  le  lui  avoit  promis  dans 

euminlemet-  •        r   •     1    r         J' 

ipfo  -,  &  con-  le  1  emple  par  la  voix  qui  deicendit 

S?6eUrifi"  ^u  ciel>  &  Clue  daI1S  PeU  il  sac.cluit" 
tera  de  fa  promette,  en  le  glorifiant 

par  fa  réfurrettion. 


# 


de  l'Evang.  Ch.  CXXXII.    27 


CHAPITRE  CXXXII.        ca,ut 

CXXXII. 

Conteftation  ,   renoncement  A- ig-  B-  «* 

'  C.11.D.  x5. 

prédit. 

*  Ccntentio , 

prad:6iio  ne- 

/.  Seconde  difpute  touchant         gatUmù. 

la  primauté.  ,.  s^w* 

CEpendant  les    Apôtres  ,    quiJiolorum    de 
lorique    les    trois    ou   quatre 
principaux  faifoient  l'information 
touchant  le  traître,  n'avoient  fongé 
qu'à  fe   difculper  d'un   fi  horrible 
attentat  ,  furent  bleiïés  de  cette  au- 
torité qu'ils  s'ctoient  donnée  fur  eux, 
&  réveillèrent  pour  la  troiiiemefois     c.  zz.Fac- 
a  queition  delà  primauté  ,  comme  &  concencio 
d'un  droit  qu'aucun   ne  prétendoit  inccreos,quis 

dr       r    •  1  eorum   vide- 

er  lur  loi  a  quelque  autre  que  ce  retureffenw- 

fùt.  jor. 

Pour  les  appaifer  Jésus  fit  deux 
chofes.  I.  Il  leur  expliqua  la  nature 
des  Charges  de  fon  Royaume  pour 
cette  vie.  il.  Il  leur  promit  dans  le 
ciel  toute  l'égalité  qu'ils  pouvoient 
fouhaiter  dans  les  honneurs  &  dans 
la  félicite. 

I.  11  leur  répéta   ce   qu'il   leur    p^aute» 

fiii 


vos       autcm 


18  Analyse 

a.  16.  b.  14.  avoic  déjà  dit  dans  une  autre  occa- 

lion  ,  qu  11  y  avoit  cette  différence 
gentium  do-  entre  les  dignités  du  monde  &  cel- 

minantur  eo-  [qs  fe   (Qn  fa^         ■    eft  f         £    yç 

rum  j  &    qui  .  1  O  » 

potcftatcm     que  les  Rois  des  JNanons  gouver- 
habent  fuger  ne       ieurs  fujets  aVec  empire  ,  8C 

eos ,  bencnci  /  .  •*  1 

vocaïuur  :     que   les     peuples    les    traitent   de 
bienfaiteurs  &  de  Pères  ,  lors  mê- 
me qu'ils  exercent  fur  eux  leur  do- 
mination.   Mais  qu'il  n'en  fera  pas 
«oc  fie,  fed  ainfi  parmi  eux,  parce  qu'il  y  doit 
ri  njajor &  jj    égalité  d'efprit   8c 

in  vobis,  nat        t>  t>  ^i 

ficut  minor  i  de  mœurs ,  que  celui  d  entr'eux  qui 

«florUeftFrfi-  ^era  ^e  P^US  §ran<i  >    doit  devenir 
cm miniftra-  comme  le  plus  petit,  8c  que  celui 
qui    gouverne  doit    fe  confidérer 
comme  le  ferviteur  de  tous  les  au- 
tres. 
Nam  quis      11  le  démontra  par  fon  exemple  j 

major  eft,  qui  &  j|   Jeur   demanda  qui    eft   }e    plus 
recumbic,  an  ,  i.  .  r 

qui     minif-  conliderable  de  celui  qui  eit  a  ta- 

trat?   nonne  ^  j     celui         •  |e  f^   jj    ^ 

qui     recum-  '  1  , 

bit  ?  ngo  au-  pondu  pour  eux  que  c  elt  lans  dou- 
tc"îinmr^te  celui  qui  eft  à   table.   Or  quoi- 

veitrum  lum,  u  A  J       m 

ficur  qui  mi-  qu'il  fut   leur  Maître  8c  leur  Sei- 
mftrat  :        gneur  ,  il    étoit  au   milieu    d'eux 

comme  un  domeftique  qui  les  fer- 

viroit. 
vos     aurcm      II.  Il  reconnoîr  leurs  fervices, 
narîStam*»  ^  ^  ^ewr  en  Promet  ^  récompenfe. 


de  l'Evàng.  Ch.CXXXII.   19 
1.  Il  avoue   qu'ils  ne   l'ont   point cum  *■  ten* 

;     i  r  '-loJ  tacionibus 

abandonne  dans  les  périls  ce  dans  meis. 
fes  peines ,  qu'il  appelle  fes  tenta- 
tions ;  mais  que  toujours  ridelles 
ils  s'étoient  inviolablement  atta- 
chés à  lui  :  voilà  leur  mérite.  2. 
Q'aufli  pour  récompenfer  leur  Etegodif- 
fidelité,  il  leur  avoit  deftiné  le  me-  Pono  v?bis  > 

Rr         n  .     .  .      lient     clllpo- 

oyaumeque  ion  lJere  lui  avoir  ruîrmihi  Pa- 

préparé  ,    &  qu'il  parrageroic  avec  ter  mcus  res* 
eux  la  rehcite  &  la  gloire  ;  la  féli- 
cité ,  en  les  faifant  féoir  à  fa  table  ut  edatis  & 

bo  j  r        bibatis  furec 

oire    &   manger  dans   ion  menfam  4. 

Royaume  j  fa  gloire  ,  en  les  faifant  a™  in  r=c-;o 

/*/  r  1  <\  .  meo  ,    6c  fe- 

leoir  lur  douze  trônes  pour  juger  ^eatis   ruper 
les  douze  Tribus  d'Ifrae'l  :  c'eft  ainfi  thronos  judi- 

>\  m  1  xt  cantesduode- 

qu  il    appelle    toutes    les   rsations  cim  tribusic- 
chrétiennes.  Qu'ainfi  leur  contefta-  «"*!• 
tion  touchant  la  primauté  écoit  en- 
tièrement frivole  ,   6c  leur  jaloufie 
fans  fondement. 

Mais  afin  qu'ils  ne  fe  fifTent  pas 
un  grand  honneur  de  leur  fidélité  , 
il  y  met  deux  terribles  exceptions. 
La  I.  pour  eux  rous  en  général. 
La  II.  qui  regardoit  Pierre  en  par- 
ticulier. 

I.  H  prédît  à  tous  que  cette  nuit-   a.  i*.  Tune 

là  même  ils  prendroient  de  lui ,  de  fa]  'omnH 

de  ce  qui  lui  devoir  arriver ,  une  vos  fcandaiû 

n  •••  patieminl  i** 


30  Analyse 

a.is.b.  i4.  occafion  de  chûre  &  de  fcandale, 
Chute  prédite   par   le  Prophète  , 

meiniftano-   _     •  r^  r  1     r»    r 

ae:  fcripcum  cim  porte  que  Dieu  rrappera  le  Pal- 
eftenim.Per.  teur,  Se  que  les  brebis  du  troupeau 

cutiam  pafto-   r  i- r        r>         a  •    r  1 

rem,  &  dif-  leront  diiperiees.  Ainli  que  leur  pe- 
pcrgentur  o-  ché  ne  feroit  pas  tant  dans  leur  fuite, 

Vcs  gregis.  1  1  •       •  1  r    • 

que  dans  le  principe  de  cette  ruite  , 
qui  étoit  un  amour  excellif  de  la 
vie  ,  Se  une  extindion  de  la  roi  Se 
de  l'efpérance  qu'ils  avoient  en  lui. 
Poftqaam  u  ajouta  pour  les  confoler  qu'il  les 

autem  relut-        U       ,  .    r    •         n  ,•.    .       •    il 

rexero,  pra:-  rallembleroit ,  Se  qu  il  iroit  les  at- 
ccda.nvosin  tendre  dans  la  Galilée  ,  qu'il  leur 

Cailla:*!».  .  .  \      r 

donnoit  pour  rendez  vous  après  la 
réïurre&ion.  Les  Apôtres  louffri- 
rent  humblement  ce  reproche  de 
leur  lâcheté. 

rofidftâ.  *•  Prkre  de  JESVS  ?our  !a  f°l  de 

Madatumno-    Pierre.  Commandement  nouveau. 


vum. 


Refpondeni      II.  Mais  Pierre  eut  du  chagrin 

autem     .I,c   de   fe  voir    mêlé    avec   les   autres 

'  dans  la  même  caufe   de   foibleffe 

ttfi  omnes  Se  de  lâcheté  :  il  s'en   voulut  dif- 

fcandali2ati  n.  ~  J 

fucriaclntc    tlngu^r  ,  en  proteltant  que   quand 

ego      num-  tous  les  autres  prendroient  de  lui 

nrau>r^an  a"  Jésus  un  fujet  de  fcandale    Se   de 

~    ..        fuite  ,   il   ne    le  prendroit  jamais. 

C.  Ait  au-  '  t  > 

tem    Doa^i-  Jésus  pour  rabattre  un  peu  cette 


de  l'Evang.  Ch.  CXXXII.    1 1 

fierté  ,    lui    répondit    que    Satan  "us-  sîmon  » 

•        i  j/Ni>'         ?  Simon,   eccc 

avoit  demande  a  Dieu  le  pouvoir  fatanascxpe- 
de  les  tenter  tous,   afin  de  mettre  nv[cvos»  "c 

\    i,/  i  cnbrarec    h- 

a  1  épreuve  leur    courage  &c    leur  eue  niticum> 

fidélité  ,     &    qu'il    s'étOlt    vanté  de  'goaucemro- 
i  gavi  pro  ce  m 

les  féparer  les  uns  des  autres ,  com-  ut  non  defi- 
me   le  vent  fépare  la  paille  &  le  £acficlest": 

r  r  cctuahquan- 

bon  grain  \  mais  que  dans  cette  de-  do  conVertus 
route  il  avoit  prié  pour  lui  en  par  tres^uoi/"" 
ticulier  ,  afin  que  fa  foi  demeurât 
toujours  ferme  ,  &  ne  tombât 
point  en  défaillance  :  feulement 
qu'il  devoit  fe  fouvenir  après  fa 
converfion  de  confirmer  dans  la 
foi  &  dans  leur  devoir  fes  frères  , 
encore  tout  ébranlés  de  leur  difper- 
fion. 

Enfuite  laiflant  fonger  Pierre  au 
fens  de  ces  paroles  qu'il  ne  péné- 
troit  pas  bien  ,  il  s'addrelTa  à  tous 
pour  les  confoler  de  la  difgrace 
qu'il  venoit  de  leur  prédire ,  & 
les  traitant  par  careife  de  fes  pe-  d.  13.  Fi- 
tits  enfans  3  il  leur  donna  deux  ' 
avis. 

Le  1.  qu'il  n'avoit  plus  que  peu  adhuc  modî- 

de  tems  à  paflfer  avec  eux  ,  &  qu  V  cum    vrobif" 

v     •,        r         t         -i    1      1     *  1       cum     fum - 

pres  1  avoir  perdu  ,  ils  le  cherche-  qmretisme, 

roient   pendanr   (on  abfence  par  le 

regret  &par  la  uifteffe.  Mais  qu'il  &  ficuc  dixî 

Biv 


32.  Analyse 

a.  i.6.  b.  i4.  leur  répétoît  ici  ce  qu'il  avoit  dit 

C.  a.  D.  13.  ,    fc  1      ,  . 

Judsris,   quo  aUX  jUlh  '  4Ue  danS/CeNt  Ctat /de  fo1" 

cgo    vado  ,  bleffe  &:  de  timidité  où  ils  étoient, 

uftis^Tnke  •  ^s  ne  p°u  voient  pas  venir  avec  lui 

où  il  alloit. 
te  vobis  dico      Le  2.  eft  ,  qu'il  leur  commandoit 

modo  :  Man-  ,  1  1  >  >    • 

datum    no-  tout  de  nouveau   de   s  entr  aimer  , 
vum  dovo-  comme  il  les  avoit  aimés  ,    c'eft-à- 

bis  ,    ut  dih-    j.  ,,  r   .    .         . 

gacis     invi-  dire  ,  é  un  amour  tout  ipirituel ,  oc 
cem,ficutdi-  jufqu'à  préférer  ,   comme  il  avoit 

lcxi  vos ,    ut  >c  .  *    .       r  ' 

&vos  dihga-  rait,  le  ialut  de  leurs  frères  a  leur 
ns  javicem.    pl0pre  vie  •  &  que  c'eft  à  cette  mar- 
in hoc  cog-  que  de  leur  amour  réciproque  qu'on 

nofeent  oui-  a  vit  r 

nés,  quia  d-if-  reconnoitra  qu  ils  iont  vraiment  les 
cipaii  mcî  ef-  Difciples. 

tis  ,  iî  dilec-  l 

tionem     ha- 

bueritis     ad         *.  Préfompticn  de  Pierre. 

invicem.  '  J        x 

s.rrafump-  .  , 

ùo  Pétri.  Pierre  qui    entrevoyoït  dans  ce 

difeours  quelque  chofe  de  lugubre, 
&  mortifié  d'ailleurs  de  ce  que 
Jésus  n'avoit  pas  compté  fur  fa  fidé- 
lité ,  même  après  l'afïurance  qu'il 
lui  en  avoit  donnée  5  voulut  appro- 
fondir ce  qu'il  venoit  de  dire  qu'ils 

Dicit  ei  Si-  -1  ,,  \ 

mon  Petrus  :  ne  pouvoient  pas  1  accompagner  ou 

Domine,  qu6  j]  all0it  ;   &   il   lui  dit  :  Où  alle%- 

.    vous   donc  Seigneur  ?     Jésus  lui 

RcTpondit      ,     ,  ,-i   1  •     j-     \ 

jefus  :  Que  répéta  ce  qu  il  leur  avoit  dit  a  tous, 
T*a°  y  que  préfentement  il  ne  pouvoitpas 


tzo 


de  l'Evang.  Ch.  CXXXIÎ.    33 


jores  me 


le  fuivre, mais  qu'il  le  fuivroitdans  nonJ?c_ 

r  «>•  i     ■        i      r  modo  lequi  ', 

Ion  tems.  Pierre  roue  plein  du  len-  fequêns  au- 
timent  de  fa  bonne  volonré  pour  temPoftea- 
Jésus  ,   mais    qui  ne  fenroir    pas     WdteiPe- 
encore  la    roiblelie  ,   ni  combien  non   poirum 
l'amour  de  la  vie  étoir  plus  enra-  »  fcciui  m°- 

i  r  \y  i      doîC.Domi- 

cme-^n  Ion  cœur  que  1  amour  de  ne,  tecumpa- 
fon  Maître,   lui   die   hardiment  ,  racus  fuin& 

Pr  .  in  carcerem  , 

ourquoi  ne  puis-je pas  vous  Juivre  &inmo:tem 

à  prêtent?    Seigneur  .   je  Cuis  prêt  ire*  D-  ani" 

»  mam     mcam 

a  aller  avec  vous  en  prifon   &    à   la  ponam    pro 
mort.   Je    donnerai    ma    vie   pour  CCj 
vous. 

4.  Prédiction  du  renoncement.  4.  Pradïe- 

tio      negcuïo- 

Vous    donnerez    votre    vie   pour     Refpondit 
moi  ?    répliqua   Jésus   ,     Pierre ,  eijeîus:  Ani- 

j  >   1  >  1         r     marn      tuam 

je    vous    déclare     qu  avant    la   Jin  pro   me  po. 
du   jour  ,   &  dans   cette   nuit    me-  «es  ?  Amen., 

y  /  ■     amen  dico  ti- 

me  j   vous   m  aure%    renonce     trois  bi   c.Pecre, 
fois  avant  que  le  coq  ait  chante' pour  n°n  canubit 

I  r  j       r  •         il  r  J*     hodie  gallus, 

la  Jeconde  jois.    11    ne    le    rendit  donecterab- 
pas  pour  une  prédiction  fi  précife  :  ne&es    nofrc 

,1      /•    a    •  1  r        1  1  me.:  B.  quia 

II  loutint    de    plus   en     plus    ce  tu  hodie,  in 
qu'il      avoit     avancé.     Quand    il  nodc_    ,hac  » 

/•       ,  , .      .  «  .  priufquam 

audroit  >  dit -il  _,  mourir  avec  vous ,  gaiius  vocem 

je  ne    vous    renoncerai  jamais.  Les  bls  dedenc , 

rA.r  .     .  J         ,         /  ,        ter  me  es  ne- 

autres  Dilciples,  pour  ne  le  céder  gaturus. 
pas  à    Pierre  en  courage    &    en    .Aci,lleam" 

B    V  batur  : 


34  Analysé 

A.  t*.  b.  14.  fidélité ,  ne  manquerenc  pas  de  faire 
C.11.D.  13.  1         *  n.     •  j  1 

tous  la  même  proteitanon,dont  ils 

A.  etîamfî  r  \     -         c 

oporrueric  turent,  comme  lui  ,  fort  mauvais 
me  mori  te-  garants  dans  l'occafion. 

cum  ,   non  te 
negabo.  Simi- 

liier&onmes       c.  Prendre  fbn  fac  ,  Ce  munir 

difeipuli  :  di-         J  ,/        J,    ,J 

*«runc.  «  ^e  *p^. 

/.  SacculuS 

ptra  y  gUdius      JESus  voulut  donc  leur  appren- 

dus.  cre  de  quoi  11  s  agidoit  a  le  luivre, 

ôc  qu'il  n'y  avoir  plus  déformais  de 

itdmtcis:  fLirecé  pour  eux.  Pour  cela  il  les  fie 

Quando  nnh  r 

vos  îïne  fac-  fou  venir  du  tems  qu'il  les  envoyoït 
cuio.&pcra,  en  mjflîon  fans  argent  ,  fans  fac,  &: 

& calcearaen-  ri-  -i  i  1     C 

tis,  numquid  fans  foulters  \   Se  il  leur  demandai! 

fuïï^vobfs6?  ^ans  certe  Réparation    il  leur  avoir 

At  iin  dixe-  manqué  quelque  chofe.  Rien  ,  lui 

mm  :  Nihil.  dirent -i ls  ,   parce  que  ceux  qui  lui 

étoient    affectionnés     les    avoienc 

reçus  avec  joie  dans  leur  maifon.,  & 

leur  avoient  fourni  toutes  les  chofes 

neceffaires. 

Dîxit  efgo      Mais  il  les  alTura  que  dans  cette 

eisrSednunc   r  i      r>  ■  u/  i  t      r 

quihabetfac-  'econde  feparation  I  état  des  choies 
ctiium  toiiat,  étoit  bien  changé  Que  celui  qui 
peram   :    &  avoit  une  bourie  ce  une  belace  de- 

<jui  non  ha-  VOlt  s,en  fervjr  &  que  poul-  fe  dé- 
bet ,  vcmftic  c       .         ,  1         /    •  1  T   •  > 

tunicam   fu-  rendre  dans  le  péril  ,  celui  qui  n  a- 

am,  &cmat  vojt    pomc    d'épée    devoit   vendre 

juiqu  a  ion  manteau  pour  en  acné- 


de  i/EvAKG.Ch.CXXXII.    35 

ter  une.  La  raifon  en  elt  ,  que  la      P.ico  enîra 

r»         ,    /   •  ,  i    j     *    a  vobis,   quo- 

Prophetie  qui  porte  qu  il  doit  être  niam  adhuc 
rnis  au  ran^  des  fcélerats ,  &  toutes  J?oç      ^u°d 

3  .  ,  fcnptura  elt  , 

les  aurres  qui  le  regaidoient,  etoient  oportec   im- 
furle  point  de  s'accomplir:  c'eft-à-  Pleri  inmne.: 

,-i  -a  /          /  ^C  cum   îni- 

dite  ,  qu'il  alloit  ctre  exécute  corn-  quis  députa- 
nte un  voleur  5  &  comme  les  corn-  g^î  *J£ 
plices  des  voleurs  font  traités  corn-  funt  de  me 
me  eux,  il  leur  fait  entendre  que  le  J^J™ 
même  fort  qu'il  va  éprouver  les  re- 
garde.   Cette  menace    n'étoit   pas 
vaine  ,  les  Pharifiensavoient  donné 
charge  de  prendre  avec  lui  les  onze 
Apôtres  ,  pour  étouffer  tout   d'un 
coup  cette  nouvelle  fecte  _,  dès  fa 
naiHance  ,  &  pour  ainfi  dire   dans 
fon  berceau.  Les  Apôtres  dirent  à     At  illi  df- 
Jesus  qu'il   y  avoir  là  deux  épées.  «mnt:  Do- 

r»    n     éi  l'j  /       1  '  mine,    cccc 

C  ejt  a}}£\  parle  de  cela^  leur  repon-  duo     gladii 
dit  il.  hîc-  At  ilic 

T  r  -,  >  1      1  j  dixireis:  Sa- 

Le  conieu  qu  il  leur  donnoit  ùsefl. 
n'avoir  lieu  que  pour  le  tems  de  fa 
mort  j  en  cas  qu'ils  voulurent  fe 
retirer  chacun  chez  foi ,  &  pour- 
voir à  leur  fureté.  Ainfi  ce  n'eft 
qu'une  vive  expofition  du  péril  où 
il  le  trouvoient  à  le  fuivre.  Pierre 
néanmoins  prit  ce  confeil  au  pied 
de  la  lettre  ,  &  il  fe  munit  d'une 
cpée   à  tous  évenemens  ,  bienré- 

Bvj 


3^  Analyse 

a.i*.b .14.  f0iu  ae  défendre  fon  Maître  s'il 
etoit  attaque. 


'ca,ut        CHAPITRE  CXXXIII. 

CXXXII  I. 

D.I4.      Sermon     après    le    dernier 

Sermo  poft  foiipe. 

ccenam. 

i.Confoia-         i,  Confolatïon  des  Apôtres. 

tïo  Apojîolo- 


rum. 


CE  qui  refle  du  difconrs  de 
Jésus  jufqu'à  fa  prière  ,  &  qui 
occupe  les  trois  Chapitres  fuivans, 
fe  peut  divifer  ,  I.  en  confolation  , 
II.  en  exhortation  ,  III.  en  diverfes 
déclarations  du  préfent  &  de  l'a- 
venir. 

Il  confola  fes  Apôtres  en  trois 
manières.  I.  En  dillipant  leurs  er- 
reurs &  leurs  foupçons.  II.  En  leur 
promettant  le  Saint-Efprit.  III.  En 
leur  laiflfant  fa  paix  pour  adieu. 

I.  Plusieurs  raifons  leur  don- 
noient  de  juftes  fujets  de  trouble  ; 
mais  rien  ne  les  alarmoit  davantage 
que 

i.  L'impuiffance  de  le  fuivre 
qu'il  leur  avoit  dénoncée  à  tous  , 
&  mcme  à  Pierre  le  plus  brave  Se 


de  l'Evang.  Ch.CXXXIII.  37 
le  plus  intrépide  de  leur  troupe. 
Ils  craignoient  de  le  perdre  pour 
toujours  ,  &  avec  lui  le  fruit  de 
leurs  travaux  8c  leurs  plus  douces 
efpérances.  11  commence  par  les  d.  14.  No» 
ra(îurer  contre  ces  erreurs  ;  &  com-  turbetur  coc 

11  1  ,  ,       ,  /      veltrum  Crè- 

me elles  venoient  de  ce  qu  us  s  e-  ditis  in  De- 

toient  accoutumés   à    le    reeatder  um,&inme 

1  ..  P  crédite, 

comme  un  pur  nomme  ,  il  les  ex- 
horte à  croire  en  lui,  comme  ils 
croyent  en  Dieu  même  ,  8c  à  at- 
tacher les  yeux  de  leur  efprit  fur  fa 
Divinité  ,  8c  fur  la  fermeté  inébran- 
lable de  fes  promelTes  ,  parce  que 
c'étoit  le  feul  remède  à  leur  dé- 
fiance. 

Le  1.  fujet  de  crainte  pour  eux, 
étoit  qu'ils  ne  fuflTent  prévenus  par 
d'autres  ,    qui  occupaient  la  place 
qu'il  leur   avoit  promife    ci  de(ïus 
dans  fon  Royaume  &  à  fa  table.  Il 
leur  répondit  que  dans  la  maifon  „    *.n  dom* 
de  Ion  rere   il   y   avoit    plulieurs  mandoncs 
rangs ,    &  pour  le  dire  ainfi  ,  plu-  ^  ~£ 
iieurs  appartemens  ,   qui    étoient  dixiffem  vo- 
diftribués  félon  le  mérite  des  per-  $0^^ 
fonnes  ,   8c  que    les    uns    n'occu-   bh  Iqcu», 
poient  jamais  la  place  des  autres. 
Que  s'ils  ne  l'en  croyoient  pas  ,  il 
les  en  auroit  aifément  perfuadés  , 


33  Analyse 

»•  H-        en  leur  témoignant  qu'il  le  cîevoît 

bien  favoir  ,  lui  qui  alloit  leur  pré- 

Er  fiabie-  Parer    ^a    place,    il  les  aflura   que 

ro,  &prazpa-  îorfqu'il  feroit  parti  ,  tk  qu'il  leur 

C"m  H-  *urolt   Prép^é   la    place   qui   leur 

rum  venio,  étoit  deitinée  (  il  fdloit  parler  ainu* 
vosa^imciu"  Pour  s'accommoder  à  leur  porcée) 
rum,  ut  ubi  il  reviendroit  les  prendre  avec  lui, 

ium  ego       &  >  i  i     •        1        •  J1 

rosiitis.  ce  qu  il  entendent  du  jour  de  leur 
mort  j  &  qu  'ils  demeureroient  éter- 
nellement dans  le  même  lieu  où  il 
feroit. 

Comme  ils  fe  figuroient  encore 

une  idée  fort  groiïiere  de  ces  rangs 

&  de  fa  demeure  ,   il  leur  donna 

Itquoego  lieu  de  l'interroger  ,  en  leur  fuppo- 

vado  ,  feiris.  fant  ce  qUi  n'étoit  pas  ,  qu'ils  fça- 

«c  viam  ici-  fl        »  ^     1      n  o     1 

tiS.  voient  lans  doute  ou  il  alloit,  oc  le 

Dicit  ci  chemin  qu'il  falloit  tenir  pour  y  ar- 

Thomas  :       river.  Thomas  prit  cette   occafion 

Domine,  nef-    j      i        j  j  >-i^ 

dmus       quo  "e  *U1  "ire    aU    nom  de    tous    Cl11  "S 

vadis.k  quo-  ne  favoient  où  il  alloit ,   8c  qu'ainiî 

moio  poilu-     I  y  •  è         '        la 

mus  viam  fei-  1,s  n  en  pouvoient  pas  lavoir  le 
■»J  chemin. 

Dicit  ei  Je-      Jtsus  commença  par  fatisfaire 

îu'/^vcrT  d  fa   demalîcie  j   &  il  lui  répondit 

us,  ôcvitaj  qu'il  étoit  la  voie  ,  la  vérité  ,  Se   la 

vie.  Ce  qui   peut  fignifier  qu'il  eft 

la  voie   véritable  de  vivante  ,  ou  la 

voie  qui  par  la  vérité  conduit  in- 


dï  i/EvANG.Ch.  CXXXIÏI.  w 
failliblement  à  la  vie.    Et    enfuite 
joignant  enfemble  la  voie    &    le 
terme  ,  il  ajoura  que  nul  n'alloit  â  ncmo    vcnU 
ion  Père ,  qui  etoit  le  terme  de  ion  ad   patrem , 
voyage  ,  que    par  lui  qui  en  étoit  D™  pcr  m6# 
la  voie  tant    à   Ton  regard  ,  puif- 
qu'il  eft  retourné  à  Ton  Père  par  fa 
Paiîion  ,   qu'à  notre    égard  ,   puif- 
qUe  nous  n'arrivons  à  Dieu  que  par 
lui  j  c'eft-à-dire ,   i.  en  croyant  fa 
doctrine  j  2.  en   fuivant  fes  exem- 
ples j   3.    en  nous    appliquant    Ces 
mérites. 

Enfuite   il  marqua    l'origine  de 
l'ignorance  de  Tes  Apôtres  à  l'égard 
de  (on  Père  y  c'eft  qu'ils  ne  le  con-  vifreiisme",^ 
noiffoient  pas  parfaitement  lui-mê-  Patrem   me- 

i-i/  .,       1  urn       iitiquc 

me  en   tout  ce  qu  11  ecoit  ,  &c  dans  cognovifle- 
fa  nature  divine.   Car  on    ne    peut  ti$  : 
connoître  le  Verbe  ,  la  parole  ,   la 
fageiTe ,  &  la  fplendeur  du    Père, 
qu'on  ne  counoifle  le   Père  ,    dont 
il  q'1  le  Fils  ,  la  parole  &"  la  fplen- 
deur.  Mais  il  fe  promet  que  comme  &  amodo  co- 
lis l'ont  déjà  connu  par  fjs  miracles,  gno,cetis  ;  Ç 
dans  peu  ils  le  connoitronr  plus  par-  cis  eum. 
faitement  par  la  defeente  du  Samt- 
Efpric.  .    .„,. 

Philippe   le  pria  de    perredtion-  iiPpUs  :  i>0. 
ner  dès-lors  cette  connoiirance  con-  œine>  ofteu* 

■ 


4°  Analyse 

d.  i4-        fufe  ,  en  leur  montrant  clairement 

de  nobis  Pa-  le  Père  ;  ôc  comme  ils  le  connoif- 

fidtnobi$?f"  ^°ient  déjà  lui-même  ,  rien  ne  leur 

manqueroitdececôté-là. 

Comme  il  ne  s'agifToit  point  de 

la  claire  vue ,  qui  eft  réfervée  pour 

le  ciel ,  mais  de  la  créance  ou  de  la 

DîcitcïJe-  connoifTance  parla  foi,  Jésus  leur 

fus  ^rTavl°  reprocha  que  depuis  tant  de  tems 

trmpore   vo-        r       ,      .   1  Y 

bifcumfum,  qu  il  etoit  avec  eux  ,  ils  1  avoient 
noviiîis  me8?  men  Peu  connu.  Philippe  deman- 
doit  à  voir  le  Père  j  c'eft-à  dire  à  le 
connoître  avec  certicude.  Jésus  le 
lui  montra  par  deux  argumens  in- 
vincibles. 
Philippe ,       i°.  En  fa  perfonne.  Car  qui  voit 

*8£?Uf2  le  Fils  volt  le   Pere  >  c'eft  à-dire, 
«cm.  quiconque   fait  certainement    que 

Jésus  eft  le  Fils  de  Dieu  ,  fait  avec 
la  même  certitude  que  Dieu  eft  le 
Pere  de  Jésus  :  puiîque  les  corre- 
latifs    font  inféparables  dans    leur 
Quomodo  nature  &  dans  leur  idée.  Sur  cela  il 
**  J***  9r  in  fuite  en  quelque  forte  à  Philippe, 
Patrcm  ?        &  il  s'étonne  comment  il  ofe  de- 
mander qu'il  lui  montre  fon  Pere, 
c'eft  à- dite  qu'il  lui  prouve  qu'il  a 
,.  .    un  Pere. 

non   creHius  ..  ,     r   .  .  - 

quia  ego  in       *  .  H  le  lui  montre  dans  (es  pa- 
Pauc ,  ôc  Pa-  roies  j   ^r  illui  demande    s'il  ne 


de  l'Evang.  Ch.  CXXXI1I.  41 
croit  pas  qu'il  eft  dans  fon  Père  ,  &:  ter  in  me  eft? 
fon  Père  dans  lui.  Il  le  lui  prouve  eg"  aioquor 
au  moins ,  parce  que  les  paroles  qu'il  y°,.bis  »  à  "*c" 

r.,  ,A  l  *■     .      ipfo   non  lo- 

prononce  ,  il  ne  les  prononce  pas  de  qU0r  :  Pater 
lui-même  ;  c'eft  le  Père  qui  en  eft  autem  in  ™e 

t,  rr    1  •  1  r      «anens    jpie 

1  auteur  aulli-bien  que  de  toutes  les  fade  opéra, 
actions. 

3  °.  Il  le  lui  montre  dans  (es  œu- 
vres j    Se  Ci  les  Difciples  ne    l'en 
croyent  pas  fur  fa  parole,  il  les  prie     non  crc(lî- 
au   moins   de  croire  par  les  mira-  tis ,  quia  ego 
clés  prodigieux  dont    ils    ont    été  p1^""*,^ 
fpectateurs , qu'il  eft  dans  fon  Père,  eft?  Aiioquin 
&  fon  Père  dans  lui ,  par  L'unité  de  [n^crcS* 
fa  nature   &c  des  opérations  exté- 
rieures. 

4°.  Car  il  leur  promet  avec  fer-     An}en  »  a" 

~  \  men  dico  vo- 

ment  que  celui  qui  par  les  œuvres  bis:  Qui  cre- 
miraculeufes  qu'il  a  faites  le  croit  dit*n  me'  °" 

*■         1*  .  pera  quac  ego 

Fils  de  Dieu  ,  en  fera  de  pareilles,  fado.&ipfe 
&  même  de  plus  grandes  ,  foit  facict  *  J* 
dans  la  iubitance  du  miracle ,  ioit  rum  fadet  : 
dans  la  manière  ,  parce  qu'allant  p^^ado. 
s'affeoir  à  la  droite  de  fon  Père  ,  &  Et  quodeum- 
prendre  polTeilîon  de  fon  empire  Ç£JSÎÎ 
fur  toutes  les  créatures ,  il  leur  ac-  mine  meo , 
cordera  comme  Fils  de  Dieu,  &  hoc  fâciaœ; 
fera  même  par  leur  main  tout  ce 
qu'ils  demanderont  à  fon  Père  en 
fon  nom  ,  afin  que  le  Père  foit  glo- 


4i  Analyse 

*>•  T4-       rifié  par  le  Fils ,   lui  qui  étant    le 
ut  giorificc-  premier  auteur  des  miracles  a  don- 

tur   Pacer  m  r  ,  r  .         r         r.. 

Filio:  siquid  ne  tout  ton  pouvoir  a  ion  rils  ,   ce 
pecicricis  me  autorjfe  tour  ce  qu'il  fait.  Mais  ne 

in       nomme  r  *  .  cr  »      a 

mco,hocfa-  iera-t-il  pas  permis  auiii  aux  Apo- 

oam.  tres  ^e  s'^^relfer  immédiatement 

au  Fils  ?   Oui  fans    douce  \  &    il 

leur  promet  que  s'ils  lui  demandent 

rjuelque  choie  en  fon  nom  ,    il  le 
era. 


fie 


i.Spmtus        *•  Efprit  de  vérité.  Amour 
ventaiis.  Di-  obéi  (Tant, 

kxio.    M  an-  M 

data. 

Le  3.  fujet  de  terreur  pour  les 
Apôtres  ,  étoit  Fabandon  où  ils  fe 
voyoient  réduits  par  la  perte  de  leur 
Maître ,  expofés  fans  fecours  &  fans 
confolation  à  toutes  les  attaques  du 
monde. 

II.  11  leur  ôte  cette  inquiétude  par 

deux  promettes  pleines  de  confola- 

si  «iiîigitis  tion.   La  I.  eft  >  que  s'ils   l'aiment 

mca^t^c1  &  ^nl  marcluent  cet  amour  parl'ob- 
itcgo  roga-  fervation  de  fescommandemens,il 

i°uPm  rC^'ra&  Priera  fon  Pere  de  leur  donner  un 
ciyrum  dabit  autre  confolateur  que  lui ,   c'eft-à- 
vo     »         dire  l'Efprit  de  vérité  ,  ou  le  Saint- 
Efprit ,  avec  des  circonftances  très- 
favorables. 


ut       mancat 
um   in 


DE  i/Evang.  Ch.  CXXXIII.  43 
La  i .  eft ,  qu'au  lieu  que  lui ,  qui 
eft  leur  premier  conlolateur  _,  eit  vobifc 
obligé  de  les  quitter  quant  à  la  pré-  aucrnum. 
fence  feniible  \  le  Saint-Efprit  ne  les 
abandonnera  point,  mais  il  demeu- 
rera toujours  avec  eux. 

La  2.  eft ,  qu'au  lieu  que  le  mon-    spîritumve- 
de  ne  peut  recevoir  ce  divin  Efprit,  r»ca»s,4uem 

r     ,..  .  .  .  1      mundus   non 

parce  qu  il  ne  le  voit  point  par  la  poccA  accipo- 

Foi  ,  ni  ne  le  connoît  par  la  raifon  ,  r*j  <luianon 
-,    ,  a  \y         o    p       Vldct    eum> 

ils  le  connoitront  en  1  une  &  1  au-  necfciteumt 

tre  manière  ,  &  de  plus  par  le  goût  vo<autemco- 
mexplicable  de  la  douceur  :    parce  um,  quia  a- 
qu'il  ne  demeurera  pas  feulement  j^itV0SôTin 
chez  eux  ,  comme  un  ami  chez  fon  vobis  cm. 
ami  j    mais  au  fond  de  leur  cœur, 
comme  l'Efpnt  de  leur  efprit  ,  & 
l'Ame  de  leur  ame.  Comme  cette 
promelfe  ne  diffipoit  pas  encore  touc- 
a-fait  leur  frayeur. 

La  II.  achevé  de  les  rafïurer.  C'eft     Non  relîn- 
que  lui-  même  il  ne  les  lailfera  point  <3"am  TOS  fr- 

!•     r  •  j  V  ,    a    phanos  :  ve- 

orphelins  j  mais  que  dans  peu  ,  c  eit-  niam  ad  vos. 
à-dire  dans  trois  jours  il  reviendra 
à  eux  ,  de  qu'en  cela  il  mettra  une 
infigne  différence  entre   eux  &  le 
monde.  Dans  peu  les  hommes  du     Adhucmo- 
monde  ,  qui  l'ont  vu  jufqu'icicon-  ^Sdat'  J» 
verfant  familièrement  avec  eux  ,  ne  jam  non  vi-~ 

1  i  x  m    •  det  :  vos  au- 

le  verront  plus  jamais.Mais  pour  eux  tcœ    yi<ictti 


44  Analyse 

Bi,4*       ils  le  verront  s  parce  qu'il  vivra  de 

g"o  'vivo3  &  nouveau  après  (a  mort;  &:  que  pour 

vos  vivctis.    eux  ,  loin  de  mourir  avec  lui ,  ainiï 

qu'ils  appréhendoient  ,   ils   feront 

„    •     ,.   encore  tout  pleins  de  vie  ,&  en  état 

I»   illodie   j      .  »  A> 

voscognofce-  de  le  revoir  ;<x  ils  connoitront  alors 
tis ,  quia  ego  ce  qu'^s   avoient  maintenant  tant 

fum  in  Pâtre    ,        J    .  v  ,..        - 

meo,  &:  vos  de  peine  a   croire,    i.    Qu  il  eit 
m  me,  &  c-  dans  fon  pere  par  punité  d'une  mê- 

Çomvobis.  r. 

me  nature.  2  .  Qu  lis  iont  dans  lui 
par  l'unité  des  membres  avec  leur 
chef.  30.  Qu'il  eft  dans  eux  par 
l'influence  du  chef  dans  fes  mem- 
bres. 
„  .  ,  .        PourlareconnoiflTancedecesdeux 

Qui  habet  .    r  v-r-  -\       ■>  jj 

mandata  mea  îniignes  bienfaits  ,   il  n  exige  d  eux 
&  fervat  ea ,  autre  chofe  finon  qu'ils  l'aiment; 

îlleeltquidi-  ,..,.,  .    *  .         .  ' 

ligic  me  :       oc  qu  ils  lui  témoignent  leur  amour 

par  l'obénTance  à  (es   commande- 

mens.  Et  afin  d'accabler  encore  leur 

.    reconnoifîance  par  deux  nouveaux 

qui  autem  di-  i  •        r  •  ■  i  i  i     • 

Sgic  me ,  di.  bienraits  ,  il  leur  promet  que  celui 
îigetur  à*Pa-  qU[  l'aime  j  i°.  Son  Pere  &  lui  qui 

trc  meo  ;  &  ^     «       .  ,    •  i  l 

ego   diligam  parle    lui    rendront    amour    pour 
eum   &  ma-  amour.  2°.  Que  de  (on  côté  il  fe  dé- 

nircitabo    ei  .        v  ,     .    r  .         -...., 

meipfum.       couvrira  a  lui  lelon  la  divinité. 

DidceiJu-  Judas  frère  de  Jacques  &  coufîn 
?ras'-n°n,.llc  de  Jésus  lui  demanda  d'où  venoic 
Dominc,quid  cette  différence  11  grande  entr  eux 
faûum   efl ,  &  je  inonde  ^  qu'il  ne  dût  point  fe 


de  i/EvANG.Ch.  CXXXIII.  45 
découvrir  au  monde,  mais  feule-  quiamanifei- 

v  itaturus       ei 

ment  a  eux.  nobis     teip- 

Jesus  lui  répondit  que  la  rai  Ton  *um,[&non 
de  cette  différence  etoit  1  amour  des      Dr      ,. 

*     a  ,       •     •  Refpondic 

Apôtres  pour  lui  ,   &   la  haine  ou  Jefus ,  &  di- 
l'indirrcrence  du  monde.  Parce  que  5m-!Ï! Siquis 

/  r       cliLigit     me , 

l'amour  produifoit  l'obeillance  à  les  fermonem 
paroles ,  Ôc  que  cet  amour  obéilTant  ^UI^fePravCer 
dans  quelque  fidèle  que  ce  foit,  foit  meus  diligec 
Apôtre  ,  foit  (impie  Difciple  ,   lui  c»2  '  vtu- 
attiroit  l'amour  du  Père  Ôc  le  fien  :  mus,  &man- 

Q>-i  /*    j  '  r        fionem  apud 

u  ils  ne  le  decouvnroienr  pas  leu-  cum     fa^ic. 

lement  à  lui,  mais  qu'ils  viendroient  mus. 
tous  deux  à  lui  par  un  nouvel  ac- 
croitfemenc  de  grâces  &  de  béné- 
dictions ,  &  qu'ils  établiroientdans 
lui  leur  demeure  jufqu'a  une  par- 
faite perféverance.  Qu'il  en  eft  tout  Qui  non  di~ 
au  contraire  du  monde   ôc  de  fes  llglc  mc'  fer" 

.r  ,~  .  .  mones   meos 

partilans.  Que  celui  qui  ne  l'aime  non    fervar. 
point,  ne  garde  point  fa  parole;  &  J^Hg 
comme  fa  parole ,  je  dis  celle  qu'ils  noneftmeus, 
entendoient  actuellement,  n'étoit  ^fame  ?2 
pas  de  lui,  mais  du  Père  qui  l'avoit  tris, 
envoyé  _,  en  méprifant  fa  parole  de 
lui  Jésus,  ils  méprifoient  celle  de 
fon  Père. 


4^  Analyse 

».  14- 

3.  Parade-     $m  Efprit-Saint  tnfeignant  toutes 

tus  omnid.  do-  „t     r 

aurus.Pax.  Ckojes. 

Hacc  locu-       Voilà  ce  qu'il  a  jugé  à  propos  de 

tus  fum  vo-   i  •«  i  j-i   /      • 

bis,apudvos  leur  dire  pendant  qu  il  ecoit  encore 

niancus.  Pa-  avec  eux  ,  laifTant  le  refte  à  dire  à 

"m7  spiricus  l'Efprit-Saint  Confolateur  ,  que  le 

fan&us  ,  pere  Jeur  devoit  envoyer  j  qui  leur 

qucm  mittet         r  .  i      r  o  1 

Pater  in  no-  enieignera  toutes  choies,  oc  qui  les 
mine    mco,  fera  fouvenir  de  tout  ce  qu'il  leur 

ille  vos  doce-  ,.  * 

fc.it  omnia,  &  aura  dit. 

fuggeret  yo-       \\\%  Le  4.  fujet  de  crainte  de  de 

bis     onima  ,     1       ,  /      •     1  >  1        11     • 

qujtcumquc    douleur  etoit  la  perte  qu  ils  alloient 
dixerovobis.  faire  en  fa  perfonne  ,  de  leur  Pere  , 

de  leur  Pafteur  ,    de  leur  Maître  j 

&  ils  en  furent  vivement  touchés  , 

Pacem  m-  lorfqu'en  leur  difant  adieu ,  il  leur 

Jinquovobis,    fofa  j  •  nQn         s    |ft  pajx    Ju 

paeem  raeam  r  '  r  r 

do     vobis  :  monde  ,  rauile ,  fragile,  extérieure, 
non  quonio-  ternporelie  •  mais  la  fienne  ,  c'eft-à- 

do     muudus  1  ?     .       ,    .  ; 

dat ,  ego  do  dire  une  paix  intérieure,  véritable, 
robis.  éternelle  :  ni  en  la  manière  que  le 

monde  la  donne  ,  par  des  paroles 
fktteufes  ,  ou  des  fouhaits  ftériles 
&  inefficaces  ;  mais  par  des  fou- 
haits folides  &  durables  :  enfin 
non  pas  telle  que  le  monde  la  fou- 
haite  ,  dans  la  fan  té  ,  dans  la  lon- 
gue vie  >  dans  les  autres  biens  ten> 


c 


»r  l'Evang.  Ch.  CXXX1II. 
poK  bu-ns  fpirituela 

ciel  le  bonheur  cter- 

loire. 

A  cet  adieu  h  touchant  les  Ap< 

ae  pui  Etait  leurs  larme 

1     os  les  pria  de  troubler    v.       , 

oint,  ni  de  s  allarmer  comme  s  il  cm  cm  vcf- 
abandonnoit   pour  toujours.   Il  SJijî 
les  coafola , 

i.   Par  la  promptitude  de  ion  re- 
our  cela  il  les  ht  iouvenir  de 
ce  qu'il  venait  de  leur  due  qu'il  ne  *v   »■««  *J 
s'en  alloit  que    pour  revenir  a  eux 
dans  peu  de  teins. 

l\ir   l'avantage  qu'il    y   avoir 
kf  lui   .  oc    qui   leur 

devroir  donner  de  ia  joie  ,  l'ili  l'ai  ':ct* 

nioient  lincetemenc  oc  Uns  intérêt  ;  di    uu^uc 

puifqi;  a  l'on    \\ le  qu'il    s'en  ,aJ 

alloit,  a  celui  qui  l'aimoit   unique- 
doQI  il  ctoit  toute  la  com- 
plailai 

5.    Par  la    jultice  de  te   départ, 
puii'que  (on  P«  ic  plus  grand  q«u     1 

l'on  humain: 

raifoanable que  l'intérieur  a.. 

ICO  •  Uài  qui  .isgiand  que 

lui. 

4.  Enfin   par    l'avis  me  me  qu'il 

1  1  i  ;  riuf- 

kur  donnoit   de   Ion  depatt.    Lai      t  ^ 


4^  Analyse 

••  T4-  s'il  n'a  pas  voulu  les  quitter  fans 
gj  f™  ies  avertir  ,  &  fans  leur  dire  adieu, 
tis.  ce  n'a  pas  été  pour  les  affliger  par 

la  nouvelle  de  fa  mort  ;  mais  pour 
leur  en  faire  tirer  ce  fruit ,  qu'ayant 
tout  prévu  ,  &  leur  ayant  tout  pré- 
dit ,  ils  croiront  que  rien  ne  l'aura 
furpt is ,  &  au  même-tems  que  l'ac- 
complifTement  des  chofes  les  affli- 
geta  par  {qs  fouflfrances  ,  il  les  af- 
fermira dans  la  foi  par  la  confor- 
mité des  évenemens  avec  la  prédi- 
ction. 

En  ce    même  moment  ,    Jésus 
jam  non  voyant  en  efprit  que  tout  fe  pré- 

multa  loquar        '    .         «  A   ..    ,    -1  ,         L     . 

vobifcum:  paroit  chez  Caiphe  pour  le  venir 
venic    cnim  prendre  }    dit  aux   Difciples   qu'il 

Princeps  *       .  1         •        i 

mundihujus,  ne  leur   parleroit  plus  guère,  parce 

que  le  Prince  de  ce  monde  le  de- 

habentmquiin  m«n    venoit  contre  lui.  Ce    n'ell: 

quam  :    fed  pas  ,  ajouta-t-il  ,  qu'il  ait  aucun 

ut  coenofcat  r  • 

mundus,quia  pouvoir  fur  moi  :  mais  quoique  je 
diligo      Pa-  puide  le  repouffer ,  afin  néanmoins 

tiem  ,   &  fi-  i  jri  •>    '       ~ 

eue  manda-  °iue  'e  monde  lâche  que  j  aime 
tum     dédit  mon  pere  ,  Ôc  que  je  veux  jufqu'à. 

mihi    Pater ,  (  x    ••  '  i-t  * 

fie  facio  ,  *a  mort  accomplir  ce  qu  il  m  a 
furgite ,  ea-  commandé  ,  levez-vous  ,  fortons 
mushinc.      j'lci  ^  &•  allons  au-devant  de  mes 

B,,f:*chy™"  ennemis.  Tous  fe  levèrent  ,  ÔC 
runt  in  mon- après  avoir  chante  le  rieatime 
WOUvarû.  d'action 


de  i/Evàng.  Ch.  CXXXIV.  49 
d'action  de  grâces,  ils  allèrent  au 
Mont  des  Oliviers.  Voye\  la  Dïjfer- 
tation  XXXV. 


CHAPITRE     CXXXIV.       cxxx^v. 


CONTINUA- 
TIO    SlKMO- 
IS. 

D.    if 


Continuation  du  Sermon. 

i.   Jesus-Christ    véritable  vigne  ,N 

&  nous  fes  branches.  "'cUi/tu, 

vitis  ,    nos 

II.  TUfqu'ici    Jésus    a    confolé patmitci- 

J  fes  Difciples ,  ôc  il  les  a  ar- 
més contre  le  premier  effet  de  fa 
mort  qui  étoit  la  douleur.  11  les 
prévient  maintenant  par  fes  exhorta- 
tions contre  d'autres  abus  bien  plus 
dangereux,  qui  étoient,  I.  L'in- 
conftance  dans  la  foi  11.  Le  refroi- 
difTement  dans  la  charité.  111.  L'en- 
nui &  l'impatience  dans  les  perfé- 
cutions. 

I.  Il  les  exhorte  à  fe  tenir  même 
pendant  fon  abfence  étroitement  unis 
à  lui  par   la   foi  ,   &   par   l'amour. 
Pour  cela  il  fe  compare  à  un  fep  de    d.  ij.  Ego 
vigne  ,  fon  père  à  un  vigneron  ,   &  faT  v&  paYter 
fes  Difciples   aux    branches.    Il    fe  meus  aguco, 
nomme  la  vraie  vj^ne  ,  parce  qu'il   a  c 
influe   plus   véritablement  dans  les 
Tome  IK  C 


50  Analyse 

v.  xj.       fidelles  qui  font  les  membres  de  fou 
corps ,  que  la  vigne  dans   (es  bran- 
ches. 11  faut  qu'une  branche  de  vi- 
gne ,  i .  demeure  arrachée  à  fon  fep. 
2.  Qu'elle  ne  foit  pas  ftérile,  mais 
qu'elle  porre  du  fruir.  3.  Et  qu'elle 
en  porte  abondammenr. 
omnem  pal-      11  en  elt  ainfi  des  Chrétiens  qui 
:S;t™  tom  «**&  à  tut  par  la  foi.  Les 
fruûum,toi-  branches  qui  étant  dans  lui  ne  por- 
tent aucun  fruit  de  bonnes  œuvres, 
le  Père  les  retranchera  de  fon  corps, 
comme  des  farmens  inutiles ,  &  c'eft 
ce  qui  arrive  tantôt  pa,r  l'héréfie  6c 
le   fchifme  ,   où   Dieu  permet  que 
ces  Chrétiens  tombent ,    8c    tantôt 
par  la  mort  qu'il  leur  envoie.  Celles 
&omnemqui  qUi  portent  déjà  quelque   fruit,  le 
purgabitcum  1  ere  les  taillera  pour  les  purger  de 
ut  fructum    tout  le  fuperflu ,  afin  qu'elles  en  por- 
tent  davantage  :  &  cette  purgation 
ne  fe  fait  pas  feulement  par  les  inf- 
pifarions  intérieures  j  mais  par  les 
adverfirés  de  cerre  vie,  &  par  les 
perfécutions  qui  épurent  les  bonnes 
âmes  ,  de  qui  les  délivrent  de  tout 
ce  qui  leur  fert  d'amufement. 
j3m  vosmû-       Jésus  appliquant  cette  compa- 

di  eltis  piop-  r  \     r         r\- r  •    \  * 

terfermonë,  raiion   a  les   Ditciples  ,    reconnoit 
quim  locu-    qu'ils   font   déjà  des  branches  tail- 

rus  lum  vo-  •  /  >    n\    j-  t        j 

bis.  lees>  c  elt- a  dire  purgées  de  toutes 


de  l'Evang.  Ch.  CXXXIV.  5 1 
les  fuperfluités  du  monde,  comme 
il  leur  a  dit  en  leur  lavant  les  pieds. 
11  ne  leur  relie  plus  qu'à  porter  beau- 
coup de  fruit.  Le  feul  moyen  eft  de 
demeurer  inviolablement  attachés  à 
ui ,  &  lui  a  eux.  C  eft  a  quoi  il  me  &  cg0  in 
les  exhorte  ,  en  leur  représentant  vobis  : 
trois  grands  avantages  qu'ils  en  tire- 
ront. 

Le  1.  fera  une  fécondité  abon- 
dante; car  comme  une  branche  fépa-  f;cut  PaImcs 
ree  ne  peut  par  elle-même  porter  ferre  frac- 
aucun  fruit ,  mais  qu'elle  doit  être  JJJ»  J  fe™e: 
attachée  au  fep  :  aufîi  ne  peuvent-  manferît  in 
ils  en  porter  j  s'ils  ne  demeurent  en  ™e  :nifin{£ 
lui  par  une  vive  &  ferme  foi  j  puif-  me  manferi- 
qu'il  eft  la  vigne,  &  eux  les  bran-  ^  futn  vî_ 
ches  ;  &  qii'ainlî  il  n'y  a  que  ceux  tis,  vos  pal- 
gui  demeurent  en  lui  par  une  vive  m"n"  jnmL" 
toi  ,   &c  lui  en  eux   par  une  conti-  Stegoineo, 

Un  1      V  •  hic  terc  fruc- 

e    influence  de  la  grâce,  qui  tummulcurai 

portent  beaucoup  de  fruit ,  en  met- 
tant à  profit   tous   les  momens  de 
leur  vie,  au  lieu  que  fans  lui  &  fans  JJ^^SJ 
le  lecours  de  fa  grâce  ils  ne  peuvent  faccre; 
rien  faire,  ni  dans  les  autres,  ni  en 
eux -mêmes.  Or  il  n'influe  cette  gra- 
ce  féconde  de  fructifiante  que  dans 
ceux  qui  font  unis  à  lui.  Il  explique 
cela  par  le   contraire.  Car  li  quel-  si  quîs  inm« 
qu'un  ne  demeure  peint  en  lui  par  no:1  maLlfc" 

C  ij 


52  Analyse 

D-  '*•      la  foi  &  par  les  fruits  qu'elle  doit 

faïmcs'Ta- Porre^    il    fe™   retranché    de  Ton 
refcet,& col- corps,  comme    un  farment  infruc- 

lieent   eum  ,  „  \  rr  \ 

&  in  igaem  tueux  ?    on    Ie    ramaliera    pour    le 
mittenc ,  &  joindre  à  d'autres  pécheurs  de  fon 
caractère,  on  le  jettera  au  reu  éter- 
nel, &  il  brûlera  fans  jamais  fe  con- 
fumer. 

Le  2.  avantage  fera  l'accomplifle- 
si  manferitis  ment  de  toutes  leurs  prières.  Car  s'ils 
b^mca'I""  demeurent  en  lui,  &  que  ces  paroles 
vobismanfe-  demeurent  en  eux  ,   non-feuiemenr 

tint  :   qaod-  r  r  J    l 

cumque  vo-  Par  un  iouvenir  ndele ,  mais  par  un 
luericis  pcte-  amour  obéilTant  Ôc  religieux  ,  ils  de- 
vobis.  manderont  a  L>ieu  tout  ce  qu  ils  vou- 

dront ,  c'eft-à-dire,  tout  ce  que  doi- 
vent louhaiter  des  fidèles  j  &  leurs 
demandes  ieront  accomplies, 
inhocclâri-       Le   $.  avantage  eft  la  gloire  que 
^mcut'u;  reçoit  le   Père  de  l'abondance   de 
frua.un  plu-  leurs  bonnes  œuvres,  &:  de  les  voir 

rimùm    affe-    1  •  r>  J  '    '   C 

raris  &effi-  devenir  par  cette  recondite  les  vrais 
ciamini  mei  Difciples,  puifque  le  Chriftianifme 
n'ell  pas  feulement  une  fecle  d'opi- 
nion ,  mais  une  école  de  pratique 
de  d'actions  conformes  aux  fenti- 
mens. 

•1.  Perfevc-        1.  Perfévérer  dans  la  Charité. 

tan  lum  in 
Charuate. 

Le  11.  abus  ou  ils  pouvoiem  torn- 


de  l'Evang.  Ch.  CXXXIV.  53 

ber  par  Ton  abfence  étoit  le  refroi- 
difTement  de  la  charité,  i°.  A  fon 
égard.  2°.  Envers  le  prochain. 

i.  11  les  exhorte  à  demeurer  fer-  sicut  diIexît 

i  r  r       p  I     me  Parer ,  ôc 

mes  dans  Ion  amour  ,  iur  i  exemple  ego  dilejî 
de  fon  amour  pour  eux  :  tout  de  me-  Tss*..,Ma?ece 

,  ,    ,  r  t       r        i'  i      in  duectioae 

me  qu  il  les  a  aimes  iur  1  exemple  mea. 
de  L'amolli  que  fon  Père  a  eu  pour 
lui  fon  Fils.  Après  l'exemple  il  leur  £*£;*£ 
préfente  pour  modèle  de  leur  amour,  "ôs,  mane- 

^Ia  ■>■{  /*        n  bitis  in  dile- 

celui  qu  il  a  pour  ion  Fere  j  car  corn-  ftioilt;  mea . 
me  il  lui  a  témoigné  fon  amour  en  *»cut  &  ego 

i  /*  \-  r  r        r^  Pacris    mei 

obiervant  religieulement  les  Com-  prxceptafcr- 
mandemens  ,  ils  demeureront  aufli  vavi>  &  ma- 

dr  '111  BCO     >n    eJUS 

ans    ion    amour  ,  s  ils  gardent  les  diledione. 

fiens.  Il  leur  en  parle  ainfi  pour  deux 

raifons.   iQ.  Afin   que  la   joie  qu'il  "*c  loKcurus 

1  /  1  fumvobiSjUC 

reçoit  d  eux  foit  durable  &  conitan-  gaudium 
te.   i°.   Afin  que   la  joie  qu'ils  cmtJSg^jf- 
de  lui  appartenir,  croiife  ôc  fe  per-  gaudium  vc- 
fedionne  jufqu'a  la  fin.  ftnupiibpléa, 

2.  Il  paffe  a  l'amour  du  prochain,  Hoc  eft  prae- 
&  il  leur  fait  un  commandement  mcuîtTutdi- 
particulier  de  s'entr'aimer    les  uns  Ugatis  invi- 

l  ri  j    i        j       p        cem,  ficuc  di- 

les  autres,    iur    le  modèle  de   1  a-  jexi  vos  Ma. 
mour  qu'il  a  eu  pour  eux.  Or  il  les  j°rem    hanc 

/     .     r      >  \     i  r        •  dilcctionem 

a  aimes  julqua  donner  la  vie  pour  nemohabec, 
eux  ,  comme  il  eft  tout  prêt  de  le  ut  aninfam 

£•       *  «     -  i  \       rc       fuam  ponac 

aire,  ce  qui  elt  le  plus  grand  erret  quisproann< 

de  l'amour  qu'un  homme  puiffe  a-  cis  fuis- 

voir  pour  fes  amis.  Auffi,  i°.  Il  les     Vos  ^^ 

C  iij 


54  Analyse 

D-  m-     a  traités,  &  il  les  regarde  encore 
mci  cftis ,  fi  comme  (es  amis   intimes ,  pourvu 

fecericis  aux         >-i  y  cT  »-i     i 

eço  Pr*cipio  ^u  "s  accomplilient  ce  qu  il  leur 
robis.  commande  touchant  cet  amout  mu- 

jam  non  di-  tuel  &  les  autres  devoirs»  i.  Il  leur 
cam  vos  fer-  en  donne  je  nom  &  ja  qualité ,  par- 

fervus  nefeit  ce  qu  il  leur  a  déclare  comme  a  les 
quid  facuc    am-  c  ce       »-|       appris  de  fou 

Dominas    e-  1  rr    .    , 

jus  :  vos  ;u-  Père,  lit  il  ne  les  a  pas  traites  com- 
iem  dm  ^  mQ  £QS  ferviteurs  auxquels  le  Maî- 

wuos  ,   quia  1  . 

oir.nia  qu*-  tre  ne  confie  pas  les  delieins  oc  iqs 

Clinique    au-   /'        p><î 

divi  à  Pane  *ecrera. 

meo  ,  non        Mais  afin  qu'ils  ne  fe  falTent  pas 

feci  vobis.     ttn  ^ujec  je  vanjt£  du  rirre  glorieux 

Non  vos  me  je  fes  amis    ^  [es  fait  fouvenir  que 

eïc£iicis  :  ied  .  ,,  ,      •  r 

egoclegivos,  ce  n  eit  pas  eux  qui  1  ont  choili  pour 
6c  potui  vos  s'attacher  à  lui:  mais  que  c'eft  lui 
fruaum  atfe-  qui  les  a  prévenus  par  ion  choix  ,  oc 
rkris,&fruv      •  jes       Jeftinés  pour  aller  (  il  ne 

étus  veltet         ].  i  1 

maneac  :       dit  pas   encore  par  tout  le  monde  > 
de  quoi  ils  n'étoient  pas  encore  ca- 
pables )  &  pour  porter  du  fruit  qui 
m  quodeum- dure  éternellement,  afin  que  par  cet- 
quepeticritis  ce  abondance  de  fruits  &c  de  bonnes 
wmiwmeo,  ouvres,  ils  acquièrent  cette  coiifian- 
det  vobis.     ce ,  que  tout  ce  qu'ils  demanderont  à 
fon  Père  en  fon  nom  ôt  par  fes  mé- 
rites,  leur  fera  accordé,  il  termine 
Hscc  mando  cec  endroit  par  le  Dpmmanderoenc 
vobis  uc  diii- qu'il  leur  répote  de  s'entr'aimer ,  ôc 
gam  iavi-     jej*e  donner  mutuellement  en  toutes 

Ifllli 


de  l'Evang.  Ch.  CXXXIV.    55 

occasions  toutes  les  matques  d'une 
amitié  fincere  ,  jufqu'à  mourir  les 
uns  pour  les  autres. 

3.  Monde  ennemi  des  fidelles.        ^.Mundusfi- 

dclium  hoflis. 

Le  III.  abus  à  éviter  étoit  la  crain- 
te excelîive  des  perfécutions.  Il  les 
arme  contre  cette  timidité,  &>les 
encourage  par  trois  puiilantes  confi- 
dérations. 

I.  Par  fon   propre  exemple.  Car     simundus 
fi  le  monde  les  haït ,  ils  doivent  con-  vosodic,fci- 

rj,  l  1        ,,       1     ..    1     •      toce  quia  me 

liderer    que  le  monde   I  a  haï  lui-  priorem  vo- 
meme  avant  eux  ,  tout  innocent  &  £is .odio  h** 
tout  bienfaifant  qu'il  a  été.  Or  qui 
ne  feroit  confolé  dans  fes  peines,  en 
voyant  qu'il  les  foufrre  après  lui  Ôc 
avec  lui  ?  Ils  fe  doivent  fouvenir  de 
ce  qu'il  leur  a  dit  autrefois,  que  le  Vlde  l±*  p' 
ierviteur  n  eit  pas  de  meilleure  con- 
dition que  fon  Maître.  Si  donc  les.  ride  inf-  L 
Juifs  l'ont  perfécuté  ,  s'ils  ont  tendu  "1% 
des  pièges  à.  toutes  fes  paroles ,  [es 
Difciples    doivent    bien    s'attendre 
d'en  être  auiii  épiés,  obfervés,  per- 
ecutes. 

II.  11  les  fontient  par  les  caufes 
mêmes  de  la  perfécution  ,  qui  feront 
étrangement  înjufles.  Il  en  marque 
trois ,  tant  prétextes  que  caufes  réel- 
les. C  iv 


56  Analyse 

D-  m-  La  i.  eft  leur  féparation  du  mon- 

si.ck  mun£,°  de.  Car  s'ils  étoient  du  monde  ,  &C 
mundus  qu  ils  rutient  demeures  dans  le  mon- 
quod  fuum  ^e    comme  ils  en  étoient  autrefois , 

eratdi  Iiscrcr; 

quia  veio  dé  le  monde  n'auroit  que  de  l'amour 
mundo  non    p0ur  ce  qUj  \ul  appartiendroit  :  mais 

eftis ,  fed  ego  r  J  ff  1 

elegi  tos  de  parce  qu  Ils  ne  lqnt  plus  du  monde, 
mundo,  pro-  depuis  qUe  fon  choix  les  en  a  fépa- 

pterea      odit      ,  r  1  .  r 

vos  mundus.  tes ,  le  monde  les  a  pris  en  aver- 
Memcntote  gou  Qr  l'injuftice  de  ce  prétexte 
mei ,  quem  elt  pour  eux  un  iujet  de  le  conloler , 
&°  dM  l„voâ  &  de  s'armer  d'un  courage  intrépide 

bis  :  Non  elt  .  rr 

remis  major  pour  en  foufîrir  tous  les  eftets. 

(domino  fuo. 

Si  me  perfecuti  funt ,   6c  vos  perfequentur  :  fi  fermonem  meum 

fervaverunt ,  ÔC  veftrum  fervabunt. 

sed  hic  ona-       La  2t  eft  Ignorance  des  perfécu- 

nia  racieni  °  •  ,-p  '  •     • 

vobi^propter  teurs ,  qui  ne  connoili.int  pas  celui 
nomen  quj  pa  enVoyé  ,  les  pourfuivront  à 

mcum  -,  quia    -1  J  \   r         r  • 

nefciunteum  toute  outrance  a  Ion  lujet;  cette 
qui mifît me.  ignorance  pourroit  en  quelque  forte 

Si  non  venif-    »  r  •     .   1>  ^-i      w 

fem,&iocu-  excuier  ces  1  yrans  înjultes ,  s  il  n  e- 
tus  fuiflem   ton  ponn  venu ,  félon  la  promeuve 

eis  ,    pecca-    -         r         .  *        ,..       ,       *■  . 

tum  non  ha-  des  Prophètes  ,  &  s  u  n  avoit  point 
berent:nunc  prouvé  aux  Juifs  fa  million  par  (es 

aurem  excu-  '  _  r  . 

fationetn  difcours  8c  par  les  miracles.  Mais 
n*n  habent  apr£s  fa  venue  &  fes  prédications  , 

fuo.  leur  incrédulité  elt  entièrement  m- 

excufable ,  &  c'eft  un  fujet  de  con- 
fiance pour  fes  Difciples. 
La  3.  eft  la  haine  aveugle  &  opi- 

Quimcodit,n^tre  des  Juifs  contre  lui,  &  par 


de  l'Evàng.  Ch.  CXXXIV.    57 

conféquent  contre  fon  Père,  jufqu'à  &  pa»e»    , 

.  ^  \       rr  i  rr  meum    odm 

les  porter  a  erracer  les  împreliions 
que  (es  miracles  dévoient  naturelle- 
ment faire  dans  des  efprits  raifonna- 
bles.  Et   il  eft  vrai  que  s'il  n'avoir  ?  °Lera  °OQ 

-  .  ."  *  .  feciilem   in 

pas  fait  devant  leurs  yeux  des  mira-  eis,quae  ne- 
cles  tels  dans  le  fond  &  dans  les  ^roali"' f!' 

,  ,     .       cit  ,    pecca- 

circonitances  j  qu  aucun  autre  n  a  ja-  tum  non  ha- 
rnais faits  avant  lui ,  leur  haine  con-  bcrentr 
rre  lui  auroit  quelque  lieu  d'excufe. 
Mais  ils   ont   vu  de  leurs  yeux  ces  nunc  autem 
merveilles  prodigieufes,  5c  ils  n'ont  fc  vider  une 

i     rr>    i      i      i     ■•    i    ■    o     r       n  oc  oderiint  8c 

pas  lailie  de  le  haïr  lui  oc  ion  Père,  me,  8c  Pa« 
qui  agilToit  par  fes  mains.  Il  ne  faut  trem  meunB* 
pas  s'en  étonner  :  il  falloit  que  cet  Scd  ut  a1im- 

•    i        i       l  i  a      f  l  pleatur(ermo 

article  de  leur  loi  eut  Ion  accom-  qui  in  iegc 
pliiTement  :  Ils  m'ont  haï  fans  fujet.  cor«ra  ferip- 

iii      n     1  1  tus  eft  .Quia 

111.  Il  Aqs  encourage  par  la  pro-  0di0  habue- 
melfe  du  Saint-  Efprit  à  ne  céder  ranemegta- 
pas  à  la  perfécution.  Il  leur  prédit  cùm  àurem 
que  cet  Efprit  de  vérité  qui  procède  vencrir  Para* 
du  Père ,  oc  qu  il  leur  envoyera  de  la  ego  miuam 
part,  oppofera  fon  témoignage  aux  vobis  .a.Pa" 

■     .  ITT  1°J  '     "«■•»  Spintum 

calomnies  des  J  uirs ,  colorées  du  pre-  veicatis,  qui 

texte  du  zèle  de  la  gloire  de  Dieu.  *  patre  .p.ro" 
TJ     ,  i-       r  •  cel,t  '  llle 

Il  témoignera  en  diverles  manières  tcitimonium 

que  lui  Je  s  u  s  eft  le  Fils  de  Dieu,  Pleerl;ibcbudc 

par   la   voix   de   fes  Difciples  ,  par 

les   miracles   qu'ils   feront  ,  par   la 

converfion  d'un  grand  nombre  de  fes 


58         Analyse 
**•  ffm      ennemis  ,  qui  en  feront  convaincus. 

&  vos  «m-  ^ux  m^mes  ^es  Apôtres  qui  ont  été 
monium  per-  les  témoins  de  [es  adtions ,  &  les  au- 
h,b^,u1:* lS'r-rt  direursde  tes  difcours  depuis  le  corn- 
mecum  eïlis.  mencement  de  fa  million ,  ils  ren- 
dront aufîi  témoignage  à  la  Divinité 
&  à  ion  innocence. 

4.  Prxditlio       4.  Prédiction  des  perfccuùons. 

perJecut:o-        ^ 

num.  f 

Après  ces  confédérations  u  puif- 

fantes  pour  les  armer  de  zèle  &  de 

p.  i5.  h*c  courage ,  il  leur  prédit  les  perfécu- 

locutus  ium.      .  ©    '  r,  r 

vobis ,  ut     rions   qu  ils    dévoient   fournir,    de 

non  fcanda-  e  ue  jes  éprouvant  contre  leur 
luerai.  ri  r 

attente,  cette  lurprile  ne  les  jettac 

dans  le  trouble  &  dans  le  découra- 

Abf^uefyna-oement.   11  en  réduit  le  détail ,   i°. 

eogis  facient  °  •  j  i       t    •  f 

vof  j  aux  excommunications  dont  les  J  uirs 

uferont  pour  les  charter  de  toutes  les 

«^.TriLÎIîS  Synagogues.  1.   A  la  mort;   mais  il 

ta   ut  omnis     j       o    ©  .  •  # 

qui  imcificit  leur  adoucit  un  peu  cette  idée ,  en  di- 

tretur^obfe-  ^ant    °IUe    ^ans    PeU    ^eS  J11^  qu>   ^eS 

quium  fc  feroient  mourir,  s'en  feront  un  mé- 
It*h«cDfa-  rite  >  &  regarderont  leur  mort  com- 
cient  vobis,  nie  un  facrifice  agréable  à  Dieu    11 

q\iia  non  no-      .  /  /*  ■  ^ 

vcrunt  Pa-  ajoute  néanmoins  polinvement ,  que 
trcm,  neque 'es  Juifs  les  traiteront  ainfi  ,  parce 
locucus  fum  Llu  îlsneconnoiHoient  ni  quel  elt  Ion 
vobis,  ut     Père,  ni  lui  qui  eft  fon  Fils.  Mais 

cùm    vcncrit  >  i    i  i  r 

horacorum,  4U  "  leur  en  parle  par  avance  >  ann 


cum  eram. 


de  l'Evang.  Ch.  CXXXV.  59 

que   ce  tems  de   perfécution   étant  reminîfca- 

1  '\      r     r  •  »  i   i  miniquia  ego 

venu,  ils  le  iouviennenr  qu  il  leur  a  dixi  vobis. 
tout   dit.  Que  s'il  ne  les  en  a  pas  Haf:  a"re.m. 

n  t       a  ,    n  ,  r        vobis  ab  îni- 

înltruits  plutôt ,  c  eit  qu  ayant  enco-  tio  non  dixi , 
re  du  tems  à  demeurer  avec  eux,  il  J^fJJ^* 
n'étoit  pas  nécetfaire  de  les  eftrayer 
avant  le  tems. 


CHAPITRE  CXXXV.         cxx'xv. 

U«     I  6 . 
A  L  T  E   B.  A 

Seconde  fuite  du  Sermon.     SftiSw 

TIO    SER.MO- 
NIS. 

i.  Confolateur  promis.  »•   Promifio 

J  £  Paracleti. 

IL  leur  annonce  donc  qu'il  s'en  Etnuacvado 
xi-  •    t>  /ai    eum   qui 

retourne  a  celui  qui  1  a  envoyé  j  mifn  mCj 

&  pour  les  divertir  un  peu  de  la 
douleur  qu'ils  en  reffentent ,  il  leur 
repréfente  ce  départ  comme  un  (Im- 
pie voyage  ,  &:  il  s'étonne  de  ce  que ,  &  ncmo  ex 

r  i  'i  j  -i  vobis    imcr- 

lelon    la  coutume  des  amis,  ils  ne  rogat  me  t 

s'informent  point  de  lui,  ni  à  quel  <v*6  vadis  î 

deflein   il  l'entreprend,  ni  ce  qu'il 

fera  chez  [on  Père  ,  ni  quel  avantage 

il  en    recevra;  Mais  qu'au  lieu  de  fcd  quia  hsc 

Cette  louable  curioflté,  ils  fe  laiffent  vobi^ttm- 

abattre  à  la  douleur  par  la  première  tia  implevit 

n       î      r         j  /  r\  cor  vcftruni» 

nouvelle  de  Ion  départ.  Un  ne  peut 
afTez  admirer  la  douceur  &  la  bonté 
du  Seigneur  qui  allant  à  la  mort  fe 

C  vj  / .      . 


Co  Analysh 

D-  l6-      donne  le  foin  d'égayer  la  triftelTe  de 
fes  Dirciples. 

Sedegoveri-         \[   Jeur     montre    qu'il    leur  eft    <Je 

robis  :  expe   la  dernière   importance    qu  il    s  en 
dit  vobis  ut  alue     par        is  raifQns# 

ego    vadaau        t        r     i  a 

La  i.   les  regarde    eux-mêmes. 

Comme  l'efFufion  du  Saint-  Efprit 

fur  les  hommes  doit  paroître,  ainfi 

qu'elle  l'eft,  le  fruit  de  fa  mort  & 

abfe^Pa^.  l'ef*et  de  fa  réfurredion ,  s'il  ne  s'en 

detus  non    va  point ,  le  Saint- Efprit  ne  defeen- 

SieniutcinVOa-  dra  P°nit    fUr   eUX  >  aU    ^ieU    ClUe    S  ^ 

biero,  mit-  s'en  va,  il  le  leur  envoyera.  11  eft 

tam  eum  ad  donc  dg  -^   j^^  ^^  ^   aiUe> 

Etcùmvene-  La  2.  regarde  le  monde ,  &  ce 
guet^munV"  que  le  Saint-  Efprit  doit  faire  contre 
dum  de  pec-  lui.  Il  le  convaincra  de  trois  cho- 
$5rfi*  *  fes  ,  du  péché  ,  de  la  juftice ,  &  du 
de  judicio  :  jugement,    i.  Du  péché  3   que    les 

de   peccato      '*     ■  r  • 

quidem,quia  J^urs  ont  commis  en  ne  croyant  point 
non  credide-  en  [ui    &  en  portant  leur  incrédu- 

iunt  in  me:  |.    /     .     r      >\    i  m  r' 

lice   julqua  la   cruelle   perlecution 

qu'ils  lui  ont  faite,  &  jufqu'à  lader- 

de  juftitia     niere  extrémité,  i.  De  fa  juftice  ôc 

Id°Pairemia  de  *°n  innocence    de  lui  Jésus, 

vado.ôcjam  par  une  preuve  auffi  évidente  qu'eft 

,»n  yidebici.  fon   ^^    ^    fon  pere  &   f(m  rf- 

de  judido  cenfion  glorieufe.  3.  Du  jugement 
phncep'slhu*  du  rnonde  j  car  (i  le  Prirîce  du  mon* 
jusmundi  dç  eft  déjà  condamné  ,  c'eft-à  dire, 
liTeiL  K    fi  par  la  juftice  de  J  t  s  u  s  il  doit 


m  l'Evang.  Ch.  CXXXV.  6ï 

être  dépouillé  de  l'empire  qu'il  exer- 
ce fur  les  hommes  ,  8c  être  précipité 
dans  l'abîme  ;  à  plus  forte  raifon  le 
inonde  ,  qui  lui  eft  atfujetti  par  le 

Î>éché  j  doit-il  être  enveloppe  dans 
a  condamnation  de  fon  Prince.  Ces 
confidérations  fi  glorieufes  à  J  esu  s 
n'obligent  pas  feulement  fes  Difci- 
ples  à  confentir  qu'il  s'en  aille,  mais 
même  à  hâter  fon  départ  dont  elles 
dépendent. 

La  3.  raifon  regarde  encore  les 
Apôtres ,  &  elle  fe  tire  de  leur  foi- 
bleffe  &  de  leur  ignorance  qui  a- 
voient   befoin   de  remède.    Car   il  Adhucmulr* 

1  1        1      f        x  habco   vobiâ 

auroit  encore  beaucoup  de  choies  a  <iicere .    fe(j 
leur  dire  :  mais  l'état  de  leur  foi-  non  poteftis 

1  1    rr         ir  >  •  poccare  xno- 

bielle  prelente  n  en  pourroit  pas  por-  £0. 
ter  le  poids.   11  elt  donc  obligé  par 
un   ménagement   charitable  de    les 
leur  diflimuler  pour  un  tems.  Mais  £eu™ricaJ{"m 
lorfque  l'Efprit  de  vérité  fera  venu  spimusreri- 
pour  eux  ,  il  les  revêtira  d'une  force  yfros  ora- 
&  d'un  courage  à  toute  épreuve  ,  Se  nem  vema-. 
il  leur  apprendra  toutes  les  vérités , 
comme  a  des  gens  qui  en  feront  ca- 
pables. Il  femble  que  ces  hautes  vé- 
rités font  la  Trinité  des   perfonnes 
dans  une    feule  nacure  ,    Penfimte- 
ment  d'une  Vierge  ,  l'abrogation  de 
la  loi,    ia  réprobation  des    Juifs 


tem. 


6l  AtfALYSI 

jufqu'à  la  fin  du  monde  ,  la  voca- 
tion des  Gentils. 

11  ajoute  pour  autorifer  le  témoi- 
Noncnimlo- gnage  du  Saint  -  Efp.rit ,  id.  Qu'il 
nieripfo*  Ced  fera  "ès-véritable  :  parce  qu'il  ne 
quaecumque    parlera  pas  de  lui-même  j  mais  qu'il 

audict  lociue-  i  i  >i 

tur,  &cqu£  ne   leuI"  révélera  que  ce  qu  il  aura 
vencura  func  appris,  ôc  qu'il  leur  annoncera  111- 

annuntiabic     r  -ni  \  1  L     r       x 

yobis.  humblement  les  choies  a  venir. 

2°.  Qu'il  lui  fera  très  -  glorieux 
illemeclan- ^  juj   JESUS      non- feulement    parce 

ncabir     quia  .  * 

dcmeo* acci-  qu'il  le  rendra  célèbre  par  toute  la 

nanriaWtvô"  terre  >  mais  Parce  <lu'!1  recevra  de 
bis.  fon  fonds ,  tout  ce  qu'il  leur  annon- 

cera :  ce  qui  fait  voir  que  le  Saint- 

Omma  aux     _r     .  .         l      ,       i      i     •     x  V    • 

cumque  ha-  clpnt  procède  de  lui.  Mais  pour  ne 
bct  Pater,    rien  déroger  à  fon  Père,  il  s'expli- 

mea   funt  :  °,  l 

proptereadi-  que  en  ajoutant  que  tout  ce  que 
xi ,  quia  de  p0(rede  fon  Père   jufqu'à  la  Nature 

meo  accipi-     r...  n\i^        o  »   •    r  *i 

er,  se  an.  divine  eft  a  lui  }  &  qu  ainli  il  peut 
ïuiuiabitv°- dire   que    le  Saint  -  Efprit   prendra 

bis.  r        c      i  i  '   •    ' 

dans    Ion  ronds    toutes    les  ventes 

qu'il  recevra  du  Père  pour  les  an- 
noncer. 

£$S2&     *•  ^omeffe  de  la  joie  éternelle. 
Modicum,       ïl  |eur  dit  adieu  de  nouveau  ,  Se 

ce    jam    non    -\   \  rr  j  "11 

Tiiebirismej  il  les  allure  que  dans  peu  ils  ne  le 
«ciurum  verroient  plus,  mais  que  peu  après 
Tidcbiùsmej  ils   le  reverroient  encore  :  1  un   oc 


de  l'Evang.  Ch.  CXXXV.  6t  quîava(J<)a(j 
l'autre,  parce  qu'il  s'en  alloit  a  fon  i'atrem. 
Père.  Il  entendent  le  premier  de  la  g6  ex  difci_. 
mort,  8c  le  fécond  de  fa  réfurrec-  puiis  ejus  ad 

invicem   : 
HOU.  ^  Quidefthoc. 

Comme  cette  expreflion  étoit  ob-  quoJ  dicic 

fi        rvf   •    i         -r     i  i  nobis:Modi- 

cure,  les  Lhiciples,  le  demandèrent  cum,  &  Vi_ 

tout  bas  les  uns  aux  autres,  ce  que  dcbitis  mc> 

•  ..••■  i  •     i        £citerummo- 

vouloit  dire  ce  peu  de  tems  qui  de-  dicum ,  ôc 
voit  précéder  fon  abfence  &  fon  re-  n.on  videbi- 

1     ,  .  .  tis  me  :    K 

tour.  Jésus  qui  ne  les  avoit  pas  quiavadoad 
entendus,  prévint  leur  demande,  &  Patr«m?  Di- 

l  i       r    •         J      i  i  cebant  ergo  : 

leur  marqua  le  lujet  de  leur  doute.  Quidefthoc, 
Mais  de  peur  de  les  affliger  il  ne  leur  <luo,d  âio{z  > 
expliqua  point  la  mort  clairement.  11  nefeimus 
fe  contenta  de  leur  dire  touchant  fon  <luld  lolul- 
abfence  ,  que  dans  peu  ils  pleure  Cognovitau- 
roient  de  douleur,  Se  répandroient  tem  JeiJus 

.  f  quii   vole- 

qqs  larmes  ameres  j  pendant  que  le  bant  eum  in* 
inonde  triompheroit  de  joie  :  &  Jf^ST^,, 
pour  fon  retour,  que  dans  peu  leur  De  hoc  qua- 
trifteiTe  fe  tourneroit  en  une  joie  in   J^-JJ"  Jfr 

comparable.  xi  ,  moii- 

cuin  ,  &.  non 
Yidfbitis  me  ;  6c  iterum  modicum  ,  Se  videbkis  me-  Amen  amen 
dico  vobis  :  quia  plorabiris  &  flebiris  vos  ,  mundus  autem  g.m- 
debic  :  vos  auicm  contriltabimini  ,  fed  triftiria  veftia  vertetur  ia 
gaudium. 

Il  exphque  ces  deux  états  par  la    Muiicr  cùm 

r  f  l        .,  r  l  parie  triititia 

comparulon  dune  femme  en  cou  habet,  quia 
che.    Lorfqu'elle  enfante,    elle    eft  vcnir  hora 

.  \  h     <r  f  ejus:cumau. 

dans  la  triiteile  ,  parce  que  Ion  ter-  tempepereri* 
me  eft  venu.    Mais   lorfqa'elle    eft  P«roœ*  j«" 

.,.        ,       ,     r        c  .1        r    r  non  menimit 

delivrce  de  ion  fruit ,  elle  ne  le  lou-  prdlur*  juo. 


^4  Analyse 

D-  "'      vient  plus  de  Ces  douleurs  palîées,  à 
rtcr  Cau-      caufe  de  la  joie  qu'elle  a  d'avoir  mis 

dmm   :   quia  r  1        »         i        1  i 

natus  cil  ho-  un  enranc  au  monde.  La  douleur  de 
mo  in  mun-  l'enfantement  eft  paftagere.  La  joie 
qui  le  fuit  eft  ferme  &  durable.  Tel- 
le vos  igicur  le  fera  la  douleur  &  la  joie  des  Apô- 

trifth?am"h™  tres-  ^s   ^eronr  accablés  de  triftefte 
betis:  en  le  voyant  mourir,  ôc  comme  en- 

fanter les  fidèles  par  les  douleurs 
tem  wdebÔ  ^e  f°n  agonie.  Mais  peu  après  il  les 
▼os  :  &  gau-  verra  de  nouveau  _;  leur  cœur  en  fe- 

debiteorvef-  i  i  /    j  o  •  ~ 

trum,&gau-  ra  comble  de  joie,  6c  cette  joie  ne 
dium  vcf-      leur  fera  jamais  ôtée;  elle  fera  im- 

trum  nemo  n      '  r  11  • 

toiiccàvobis.  niorrelle  comme   la  nouvelle  vie  , 

comme  l'homme  nouveau.qu'il  aura 

le  in  iiio  die  reproduit    dans     le   monde.    Alors 

me  non  roga-  1  1      r      r     1    •  i« 

bicis  quid-     voyant  les  choies  h  clairement  expli- 
quant quées  par   l'événement,  ils  ne  fon- 
geront  plus  à  lui  faire  des  queftions 
touchant  ce  peu  de  te  ras  qu'ils  ne 
comprenoient  pas. 

4.  Promifio      3.  Promeffe  des  faveurs  du  Père» 

heneficentix 
Pairs. 

Amen, amen       Enfin  il  leur  promet  que  tontes 

dico    vobis  :    1  >•«  ■/•  r 

fi  qui:!  perfe-  'es  prières  qu  ils  feront  en  Ion  nom 
ritis  Parrem  à  fQn  Père  feront  accomplies.  Il  leur 

in    nomine       r  ■  •  1  >  1  » 

meo  ,   .iabic  *aIC  un  doux  reproche  qu  ils  n  ont 
vobis  ufque  encore    ofé  rien  demander    en  Ion 

modo   non  ti    1        •        •         \     c  ■         \>  > 

peuftis  quid-  nom.  11  les  invite  a   raire  l  épreuve 
quam  in  no-  Je  fa  promeffe ,   ôc  à  demander  à 

Dune  mco  :  *  ' 


de  l'Evang.  Ch.  CXXXV.  £5 

Dieu  quelque  chofe ,  afin  d'avoir  la  petite,  &  ae- 

.    •        ,    •  a  r  •  i  •     cipicus  j     ut 

joie  pleine  oc  parfaite  de  recevoir  gaudium  ve- 

l'efFet  de  leurs  demandes.  num?fitple" 

Jufqu'ici  il  leur  a  enveloppé  fous  h*c  in  pro- 

diverfes   paraboles  les  chofes  qu'il  verb*is  locu- 

i  r  x>f    •      i  1  '  J-       tus  fura  vo* 

leur  expliquoit.  Mais  il  leur  prédit,  bis:venk 

i°.  Que  l'heure  vient  qu'il  ne  leur  h°ra  •  ncû£ 

ii  ii  -i  'artt  non  ,m 

parlera  plus  en  paraboles  comme  il  proverbuslo- 

a  Suc  jufqu'ici  ;  ma1S  qu'il  leur  pat-  fô'^Zfa 
lera  clairement  Ôc  fans  figure  de  fon  Parrc  annoa- 
Pere.  C'eft  ce  qu'il  a  Sut  pendant  £&,$£ 
les  40.  jours  qu'il, a  paffes  avec  eux  nomme  mco 
après  fa  réfurrettion.  2.  Qu'alors  ,  JondiJo *o- 
c'eft-à-dire  après  (on  afcenton  ,  ils  bis^uiaego 
feront  a  Dieu  des  demandes  en  fon  ™g^  ^e  *^_ 
nom.  Qu'au  refte  il  n'a  pas  befoin  bis.Tpfeenir* 

di  j-  >  1          •        l   r         n  Pater  amat 

e  leur  dire  qu  il  priera   ion  lJere  vos  t  quia 

pour  eux ,  parce  que  fon  Pere  les  ai    v°s  me  ama- 

1  >  i     ,»  '      o  »'i     ftis ,  ÔC  credi- 

me  de  ce  qu  us  1  ont  aime  ,  oc  qu  ils  ^^IS  qui3i 
ont  cru  qu'il  étoit   forti  de  Dieu.  ego  à  De© 

£r  \         1  r    exivi. 

nhn  pour  commencer  a  exécuter  la    Exivi  à  Pa- 

promeiTe,  il  leur  déclare  fans  meta-  trc>  & ,vcni 

*  ,  3x      cl  r  1      r\-  '•!  mmundum: 

phore,  qu  il  elt  iorti  de  Dieu,  qu  il  uerumreiin- 
efl  venu  dans  le  monde  ,  qu'il  ciuitte  Suo  I"un~ 

1  1  0,         »-i      ,  l  v   dura,  fie  va- 

le  monde,   &  qu  il  s  en  retourne  a  doadPacrè. 

fon  Pere.  C'eft  ainfi  qu'il  exprime  fa 

naiiTance  éternelle,  fon  incarnation, 

fa  mort  prochaine,  &  fon  afeenfion 

future. 

Les  Difciples  lui  avouèrent  alors  plaint  eidif. 

qu'il  parloic  clairement  ôc  fans  para-  £CPcc  ' 


îpuli  C)l 

nunc 


66  Analyse 

D.  i<r.      \>o\q  y  qu'ils  recohnoiffent  mainte- 

palam  loque-  nanc  qu'il  favoit  ronces  chofes  ,  ÔC 

veVbiumnd"  ce^^s  même  qui  fe  palToient  dans 

lum  dicis.     TeTprit  des  hommes,  6c  qu'il  n'écoit 

Nunc  feimus  i      r    ■        j       iv 

quiafeisom- Pas   beloin  de  l  incerroger  _,   parce 
nia,  ôc  non  qu'il  pénécroit  le  douce  ,  &  préve- 

opus  eft  tibi         •     i>-  i        '  r 

utquistein-  noiC  *  interrogation  par  la  reponie, 
terrogee  :  in  comme  ils  venoienc  de  réprouver. 

hoccredimus  r\    *\  -i  •  >-\ 

quia  à  Dco    VLl  a  cecte  marque  ils  croyoïent  qu  il 

exiitf.  écoit  forci   de  Dieu  ,    c'eft-a-dire  , 

qu'il  étoic  fon  Fils ,  qui  comme  fon 

Père  connoilïoit  coûtes  chofes. 

Refponditeis      J  e  s  u  s  leur  fçut  bon  gré  de  ce 

Jcfus:  Modo  ,  ,      5  °  ... 

crcdiiis»       que  dans  cet  ecac  encore  tranquille 

ils  le  croyoient  tel  qu'il  écoic.  Mais 

il  leur  prédit  que  cecce  croyance  ne 

Ecce  venir  dureroic  pas  long-cemsj  que  l'heure 

hora,  &jam  venojr     ^  étoit   déjà  venue  qu'ils 

venit,usdif-     ,..-.*.  ,  >        r  A   \ 

pergamini      s  enruiroient  chacun  de  Ion  cote,  oc 
unu^aifque  j     laifrercient  tour  feui  ;  ouoiqu'a- 

w  propna,  -i  /*  ri 

&  me  folum  lors  même  u  ne  ieroit  pas  ieul ,  parce 

ftua"um  Clue  ^on  ^ere  l'accompagne  toujours , 
folus ,  quia  &  demeure  toujours  avec  lui.  Que 

Parer  mecum  ^y    ^  ^   ^  ^  ?  ce  ^    ^ 

pour  le  leur  reprocher  ;  c'eft  au 
H*c  locurus  contraire  pour  les  exciter  a  fonder 
fum  vobis  ,  en  lui  la  paix  &z  le  repos  de  leurs 

ur  in  me  pa-  *  i  /*       J 

ccmhabeacis.  âmes  j   parmi    les  traverles  de  cette 

vie,  en  confidéranr  que  comme  fon 

Père  eit  toujours  avec  lui  ,  il  fera 

in  muido  toujours    avec   eux.    Il  '  les  avercit 


he  l'Evang.  Ch.  GXXXVI.   £7 
qu'ils  fouffriront  de  grandes  perfé-  pretfuram 

1     ■  1  1  ?  ••11        habebitiî  ; 

cutions  dans  le  monde  :  mais  11  les  fed  confiai»; 
exhorte  à    prendre  courage.  Car   fi  egovici mun- 
ie monde  leur  ennemi  eft  plus  fort 
?|u'eux  j  lui  qui  les  défend  eft  pius 
ort  que  le   monde  ,   puifqu'il  en  a 
remporté  la  victoire. 


CHAPITRE    CXXXVI.         caput 

CXXXVI. 

Prière  de  Jefus   avant        pûno 

r     r\    rr  Chiusti  an- 

la  raliion.  te  passio- 

HEM      SU  AU. 

1 .  Oratio  pro 


1 .  Pour  J a  propre  glorification.       fua  giorifiCa- 

LOtfque  Jésus  eut  fini  ce  dif-    d.  17.  Uxc 
cours ,  il  leva  les  yeux  au  ciel ,  J°fuSri!s&efu. 
de  fit  cette  admirable  prière  â  fon  blevarii  ocu- 
Pere.  Il  la  diviia  en  trois  parties,  a^^1^ 
La  I.  pour  lui.  La  IL  pour  fes  Apô- 
tres. La  111.  pour  tous  fes  Elus.  Il 
la  prononça  tout  haut  pour  l'inrtruc- 
tion  des  premiers  ,  6c  il  l'a  fait  écri- 
re par  fon  Evangélifte  pour  la  con- 
folation  de  fon  Èglife. 

I.  Il  demande  pour  lui,  félon  (on  ?iter  '  7^ 

I  -,  X   ,  11         hora» cîarifi- 
numanire,  non-leulement  la  gloire  ca  filium 

de  fa  réfurrection  ,  mais  encore  la  tuun1, 

gloire  de  fon  nom  par  toute  la  terre. 

II  le  prie  que  l'heure  étant  venue 


6%  Analyse 

r>-17»  où  il  va  palfer  pour  le  plus  grand 
de  tous  les  fcélérats ,  il  le  relevé 
de  cette  infamie ,  &  qu'il  le  faiTe 
reconnoître  pour  ce  qu'il  eft.  Il  l'y 
engage  par  trois  puiflans  motifs. 
ut  fillus  tmia      Le  i.  eft  tiré  de  la  gloire  qui  en 

clarificec  te:  •       j  n      ~         *~t  /* 

reviendra  au  rere  même.  Le  2.  le 
fout  dedim  prend  de  la  félicité  ôc  de  la  vie  éter- 
eipotefta:em  nene  qu'j]  donnera  à  ceux  que  fon 

ut  omne        Père  lui  a  loumis  ;  comme  s  il  diloit  : 

S\ocld«diiiî  Si  vous  glorifiez  votre  Fils,  votre 
vitam  «ter-  Fils  vous  glorifiera  à  fon  tour.  Car 
Ha^'  eft  au-  vocre  gloire  confifte  à  être  reconnu 
te  vira  «ter  par  les    hommes   le  feul    véritable 
gnofcalittc    Weui  Se  la  mienne  confifte  à  être 
foium  D.-um  reconnu  feul  pour  le  Chrift  que  vous 
quen?inihfti  av^z  envoyé  dans  le  monde.  Or  M 
jefum  chri-  en   me  reiïufcitant  vous   m'avouez 
pour  votre  Fils  ôc  pour  le  Chrift,  je 
donnerai  aux  hommes  que  vous  m'a- 
vez donnés  le  moyen  infaillible  d'ac- 
quérir la  vie  éternelle,  lequel  con- 
fifte premièrement  en  cette  double 
connoiftance.  Et  par  mon  moyen,  je 
dis  par  la  gloire  du  Mellie  que  vous 
m'aurez  fait  rendre ,  ils  vous  con- 
noîtront    pour    le  feul   vrai    Dieu. 
Ainfi  ma  gloire  réjaillira  fur  vous, 
&  fera  pour  vous  une  fource  îné- 
puifable  de  gloire. 
Ego  te  clati-      Le  3.  motif  eft  la  reconnoiflance 


de  l'Evang.  Ch.  CXXXVI.    69 
que  ion  Père  doit  à  la  gloire  que  lui  ficavî   ruPet 

5  .  J  o      1    *  r  *     cerram  :  opus 

J  e  s  u  s  lui  a  rendue  oc   lui   a  tait  c©nfummavi 
rendre,  comme  à  l'auteur  de  fes  mi-  <iu°tl  deciiftî 

,  ,  /  ,  •  i        r        mihi   ut    ta- 

racles  ,  par  la  prédication   de   ion  dam  j 
nom,   &    par  la  consommation  du. 
grand  ouvrage  de  la  rédemption  des 
nommes  donc  il  l'avoir  chargé ,  8c 
qu'il  regarde  déjà  comme  accompli. 
Fondé  fur  ces  trois  motifs  il  prie  ion  & rnunc  cIa- 

Pi  /  J         r        1  r       i      rihca  me  tu , 

ère  de  répandre  iur  lui  par  ia  re-  patcr  apuci 

furrection  &  par  fa  féance  à  fa  droi-  temetipfum, 

r  i  ri  ■    i       \  *  claritate 

te    lelon  ion  humanité,    la    même  quam  habui, 
gloire  qu'il  avoir  dans  lui  avant  la  p"ufquam 

°   ,  ^   j  j  o       J      i      r  •        mundus  ef- 

creation  du  monde,  oc  de  le  raire  fet,apud te 
reconnoître  par  tout  dans  le  tems  , 
ce  qu'il  étoit  dès  l'éternité ,  vrai 
Dieu  ,  &  vrai  Fils  unique  de  Dieu. 
Gloire  incomparable,  dont  il  a  en 
quelque  forte  été  dépouillé  par  fon 
incarnation  ,  &  par  la  bafTelTe  de  la 
chair  qu'il  a  bien  voulu  prendre.. 

2.  Pour  le  falut  de  fes  Apôtres,       V  Oraùopr* 

J  J  r  falut  eApoJio- 

lorum. 

II.  Il  prie  enfuite  fon  Père  pour 
fes  Apôtres  qui  lui  dévoient  fuccé- 
der  dins  le  miniftere  de  la  prédica- 
tion. 11  commence  par  faire  leur 
éloge.  Après  qu'il  leur  a  manifefté  Manifeftavi 

1r  l   J      /*       n  y   n.    nomemtuum 

e  nom  perlonnel  de  ion  Père  ,  c  elt-  homiuibm 

à-dire  ,   après  qu'il  leur  a  prêché 


70  Analyse 

d.  i7«      comme  Père  ,  celui  qu'ils  croyoient 

déjà  le  feui  vrai  Dieu  du  ciel  de  de 

la  terre  ,  il  les  relevé  , 
quos  dedifti       i.  Parce  que  le  Père,  a   qui  ils 
«lihide  mun-  apparrenoient  par  la  création ,  les  a 

do:tuierant,  A  l       ,       ,  l    ,       Jv      .,,  , 

&  mihi  eo$  iepares  du  monde  des  l  éternité  par 
dediftts  &    l'élection,  &  les  lui  a  donnés  à  lui 

lermonem        T  ^  , 

tuum  ferva-  J  e  s  u  s-Lhrist    par  la  vocation, 
verunc.         pour   leur  prêcher   fa  parole   qu'ils 

ont  gardée,  &  pour  les  conduire  à 

la  vie  éternelle. 

2.   Parce  qu'ils  ont  répondu  aux 
Nur.e  cogno-  foins  qu'il  a  pris  pour  eux.  Car  ils 

oS '  q«  r°rU   très-PerrUadés  »   &  Par  la   foi  & 

,  itediftimihi,  par  leur  expérience  ,  que  le  Père  eft 
absteàuu:  [;auteur  je  toutes  fes  avions  &  ae 

toutes  (es  paroles  j  qu'il  produit  en 
quia  verba ,  effet  vifiblement  dans  lui.  Et  cette 
quçe  dedifti    perfuafion  vient  de  ce  que  leur  ayant 

mihi  ,  dedi    r  ,  _  i     n  1 

cis:&ipfiac- annonce  la  doctrine  que  le  rere  lui 
ceperunt,  &  avoit  confiée,  ils  l'ont  reçue  avec 

cognoverunc  r  r   •  ' 

ycrè  quia  à  une  ferme   roi,  entretenue  par  une 
te  exivi,  &  j^jelle  pratique  _,  &  ils  ont  reconnu 

quia   tu  me  iincerement  qu  il  etoit  venu  de  la 
mififu.  t  ju  pere  ^  fc  ^ue  |e  pere  l'avoit 

envoyé.    Ainfi  ils   l'ont  connu  vrai 

Dieu,  unique  Fils  de  Dieu,  &  vrai 

homme. 

igo  pro  eis      Ce  font  ces  avances  de  falut  dans 

'io°mundon  les  Apôtres  qui  le  portent  à  prier  fon 

»ge ,         Pere  pour  eux.  Il  ne  prie  point  pour 


de  l'Evang.  Ch.  CXXXVI.  71 
le  monde  qu'il  a  réprouvé.  11  prie 
pour  les  Apôtres  à  caufe  de  ces  trois 
confidéranons. 

La  1.  eft  que  le  Père  à  qui  ils  ap-  fcd  pro  hîs 

1         1    •  1  »       k      r  <luos   dedifti 

parnennent  les  lui  a  donnes.  Amn  mihi ,   quia 
le  Père  recevra  favorablement   des  tui  iunc  » 
prières  pour  des  perfcnnes  qu'il  a  11 
hautement     distinguées.    Quoiqu'il  &me*omnil 
ajoute  par  une  efpece  d'explication  3  cuameafunc4 
que  le  Père  qui  les  lui  a  donnés  , 
ne  laifte  pas  en  les  lui  donnant  de 
garder  toujours  le  même  droit  fur 
eux  ,  parce  que  tout  ce  qui  eft  au  Fils, 
eft  aulîi  au  Père,  &  qu'encore  que 
le  Fils  en  fa  nature  humaine  les  aie 
reçus  du  Père ,  ils   ne  laiiîent  pas 
d'appartenir  toujours  au  Père,  parce 
que  tout  ce  qui  eft  au  Père  eft  aulîi 
au  Fils  en  fa  nature  divine. 

La  2.  confidération  eft,  que  les  fie  clarifies- 
Apôtres   lui   ont   fait    honneur  par  ™s  fum   I:i 
TobéilTance   qu'ils  ont  rendue  à  [qs 
paroles ,   lorfqu'en    quittant   toutes 
chofes  ils  fe  font  attachés  à  fa  fuite. 

La  3.  eft  j  que  par  fon  retour  vers  £*  iam  nen 

fr.  \     ^  1  r  •  •  1      *um  in  mun- 

On  rere  _,  il  va  deiormais  quitter  le  do,  &  bi  ia 

monde  ou  ils  doivent  demeurer  en-  mundofunc, 

]    r  l  1 1       n.    j  &  ego  ad  ce 

core    pliiiieurs   années.    11  eit   donc  venio. 
jufte  qu'il  les  remette  entre  les  mains 
de  fon  Père,  de  qu'il  le  prie  de  les  Pater  fante; 
conferver,  &  de  leur  rendre  les  me-  n"^0^11 


7i  Analyse 

qu<^'  dJdifti  mes  am^ances  qu'il  leur  rendroit 
aiiii,         lui- même .,  sJil  ctoit  encore  avec 
eux. 

11  demande  pour    eux  plufîeurs 
chofes  donc  les  unes  regardent  leurs 
perfonnes  j  &  les  autres  leur  emploi 
Apoftolique. 
«cfincunum,       ^  jj  demande  pour  eux  refprit 
d  unité ,  c  elt-a-dire  ,  qu  il  les  ren- 
de entr'eux  une  même  chofe  d'ef- 
prit,  de  cœur,  &  de  volonté,  fans 
chifme  &  fans  divifion ,  comme  fon 
Père  &  lui  font  une  même  chofe 
dans  la  nature  ;  ce  qui  eft  une  com- 
paraifon   de  reifemblance ,  &  non 
d'égalité, 
cùmeffem       i.  \[  demande  pour  eux  la  perfé- 
ftr^abameos  vérance  jufqu'à  la  fin  dans  l'état  de 
in  nomme     grâce.  Tant  qu'il  a  été  avec  eux  il 
diftimîhi,cu-  les  a  fi  fidellement  gardés  en  fon 
ftodivi  -,  &  nom  &  par  fon  autorité ,- qu'aucun 

nemo  ex  eis     i,  >   n  J        11      > 

periit,nififi-  d  eux  ne  s  eit  perdu.  Il  n  y  a  que 
îius  perdiiio-  [e  f]|s  je  perdition ,  le  perfide  Judas 
wra  impica-  qui  eft  péri ,  afin  que  1  tenture  qui 
tur-  a  marqué  la  punition  de  fon  crime 

Nunc  autem   fS  y  i-  l  >*    •  1 

ad  te  venio  :  rut  accomplie.  Maintenant  donc  que 
Jésus  retourne  vers  fon  Père ,  il 
met  fes  Apôtres  fous  fa  protection  , 
afin  que  ce  malheur  ne  leur  arrive 
pas  ,  mais  que  le  Père  continue  les 
foins  qu'il  a  pris  de  les  conferver 

jufqu'à 


de  i/Evang.  Ch.  CXXXVI.  73 

jufqu'à  la  fin.  C'en;  ce  qu'il  témoigne  &    hxc   I(>* 

'        t  .  r  x  j      p  quor  in  mua- 

en  leur  preience  avant  que  de  ior-  do,  uchabc- 
tir  du  monde,  afin  que  la  joie  qu'ils  ant  gaudium 

.      r  ■     .     r      *•    •  r  r       nieum  împle- 

ont  eue  de  le  voir  julqu  ici  lous  les  tuminfemec- 
ailes,   foit   aufli    pleine  3c  parfaite  iPfls* 
après    fon   départ  comme    aupara- 
vant. 

3.  Il  demande  pour  eux  la  victoi- 
re fur  le  démon  &:  fur  le  monde  au 

milieu  de  fes  perfécutions.  Pour  s'ou-    Ego  dedî  d$ 
vrir  la  voie  à  cette  demande,  il  dit  [ur™n;ra  & 
qu'il  leur  a  confié  la  parole  év  la  do-  mW«  eos 
arme  de  fon  Père,  pour  la  répandre  odio  habai:' 
dans  tous  les  lieux ,  de  que  la  créance 
qu'ils  lui  ont  donnée  leur  a  attiré  la 
haine  du  monde,  l'ennemi  juré  de 
cette  fainte  parole  ,  parce  qu'ils  ont  quianonfuat 

1/    1       /  V   •  »-i         >  /       de     mundo . 

déclare  ,  par   cette  roi ,  qu  ils  n  e-  ^cat  &.  eg{^ 
toient  point  du  monde  ,  comme  lui-  non  fum  de 

*  >         /       •  1 1  1  1      mundo. 

même  n  en  etoit  point.  11  ne  demande 

/  v  r       r»  »•!  1  Non   rogo 

pas  néanmoins  a  ion  Perequ  il  lesre-  Ut  collas  eos 
tire  du  monde,  leur  ennemi,  comme  pd  J"11"^0  » 
la  chofe  fembloit  l'y  conduire ,  mais  eos  à  nuio. 
qu'il  les  garantiflTe  tellement  du  pé- 
ché parmi  les  tentations  du  démon  Se 
les  perfécutions  du  monde ,  qu'ils  de- 
meurent victorieux  des  unes  &  dos 
autres. 

4.  Enfin  il  demande  la  faveur  Se 
la  bénédiction  du  Père  fur  leur  mi- 

niftere  Apoftolique.  11  prend  Pocca-     De  round 
Tom.  IF.  D 


74         Analyse 
t>«'7.        (ion  de  cette  demande  de  ce  qu'il 

ïionfunc,fi-  vient  de  dire,  qu'ils  ne  font  point  du 
eut    &    ego  >  "i  r.  , 

non  fum  de  monde  ,  non  plusque  lui  j  mais  qu  il 
mundo.         jes  en  a  réparés  pour  les  employer  à  la 
sanaifica  prédication.  11  prie  donc  fon  Père  de 

eos  in  verita-  {        r      ^  c         j  i  l   •   l         «    a.    \ 

te.  les  lanctiner  dans  la  vente,  ceit-a- 

dire ,  de  les  deftiner  tk  de  les  confa- 
crer  lui-même  à  l'emploi  d'annoncer 

vedcTeu!"5  au  monde  la dodiine  delà  vérité  ,  & 
fa  parole  ,  qui  eft  la  vérité  elle-mê- 
me. 11  le  prie  de  les  rendre ,  par  l'on- 
ction intérieure  de  fa  grâce ,  dignes 
sicut  tu  me  £un  fi  faint  miniftere  ,  parce  qu'il  les 

mundum,&:  envoie  dans  le  monde  pour  la  meme 

ego  mifi  eos  fin  quefon  perel'y  a  envoyé  lui-mè- 

jn  mundum.  i  J  J  , 

icprocisego  me,  pour  y  publier  aux  hommes  la  ve- 
fanâificome-    •  é  &  j    paro[e  ju  pere>  Et  afin  de  les 

îpfun^uctmt  r  . 

&  ipfi  fanai-  coniacrer  plus  rehgieulement  a  cette 

wk?  m  Ven"  v^nt^  ?  ^  ^e  confacre  lui- même  au  fa- 
crifice,  il  fe  dévoue  à  fa  paflion. 

j.    Oratio 


rum. 


Nonproe-       ni.  Il  pa(Te  des  Apôtres  à  tous  les 

is  ,  autem  ro-   t-i  j  i      /     •        j        r      1 

go  tantùm  -,  klus  >  clul  5  dans  la  luite  des  hecles , 
fedôcprocis,  doivent  croire  en  lui ,   par  le  minif- 

qui  credituri  .     \  i        1 1    i  i 

funtperver-  tere  de  leur  parole.  11  demande  pour 
bum    eorum  eux  Jeux  grâces  incomparables  ,  l'u- 

in  me  :  °  .         ,,        l  •     r 

ne  pour  cette  vie  >  1  autre  pour  leiie- 
cle  à  venir. 

ut  omnes  u-         T  „  s 

numûnt,fi-      La  i.  eft  un    meme  cœur  oc  un 


de  l'Evàng.  Ch.  CXXXVI.  75 

même  efpiit ,   par  l'unité  d'une  me-  cur  ru>  **" 

r  •    /,   i,      l         a  |        ■    /  m  me  ,  ôc  ego 

me  roi  &  d  une  même  chante  ,  par  jn  re ,  Ul  <sc 
la  fuite  du  fchifme  qui  blette  la  cha-  'lPfi  in rRohn 

,       0  PL'    T  J-     T     1      f    *     unura  fint  > 

rite ,  ce  de  1  hereiie  qui  diviie  la  roi. 
Il  demande  pour  eux  cette  unité  en 
l'honneur  &  fur  le  modèle  de  l'unité 
du  Père  avec  le  Fils ,  &  du  Fils  avec 
le  Père  ,  afin  que  cette  unité  invio- 
lable de  fentimens  &  d'amour  dans 
les  Fidèles  ,  foit  une  démonftration  ut      crecUc 

l  J       '     C  J        rr.undus,quu 

convaincante  pour  le  monde  înhde-  tumcm12jE 
Je  ,  que  le  Père  l'a  envoyé  dans  le 
monde  ,  étant  impoiïible  que  tant 
de  peuples  difrérens  putfent  convenir 
dans  les  mêmes  fentimens,  fi  con- 
traires à  ceux  de  la  nature  corrom- 
pue ,  s'ils  ne  les  avoient  puifés  dans 
la  même  fource  de  la  vérité. 

11  ajoute  que  ,  pour  produire  cettç 

•    /     j        y-  j    1  i>  îtego  cU- 

unite  des   rideles,  comme  1  image  ritatem  , 
de  l'unité  des  perfonnes  divines  ,    il  <iua™  <led»fti 

i  c  ■  i       r       i-     •     •    /  i      niihi.  dedie- 

leur  a  rait  part  de  la  divinité  par  le  is  t  ut  fine  u- 
myftere  de  (on  corps  8c  de  fou  fane,  num>  ficut.& 

/.  r  •      i    •  i        r»-  t    t  »         nosunuiniu» 

qui  ne  raitde  tous  les  rideles  qu  un  mus. 
même  corps  ,  parce  qu'ils  ne  man- 
gent tous  que  d'un  même  pain.  Car     H°'mc'is» 

V  l  r  r  ,     .       8c  tu  m  me , 

étant  en  eux  par  la  propre  chair, 
de  le  Père  étant  en  lui  par  la  nature 
divine  ,  qui  eit  unie  à  fa  chair  d'une 
imité  perfonnelle  ;  le  Père  fe  trou- 
vant dans  tous  les  Fidèles  par  le 

Dij 


j6  Analyse 

D^7-        moyen  du   Fils  ,  &  tous  les  Fidèles 

ut  une  con-  unis  au  pere  ar  Je  p^Jg  feront  col,_ 
fummati     m  f  ,  r  .    ; 

unum    :    &  lommes  dans  1  imite.  Le  monde  en 

3du"auia  rirera  *ncoré  un  Sr™d  argument , 
cumcmiafti,  que  le  Pere  a  envové  fon  Fils,  &c 
^ffi^f  ^quiUaimé  les  Fidèles  qui  font  Tes 
me dilexifH.   membres  ,  comme  il  aime  fon  Fils 

lui-même. 
SSm'Ju.      La  *•  gra«  qu'il  demande  à  fon 
voio  uc  'ubi  Pere  pour  les  Fidèles  ,   eft  la  gloire 
âSTfîlt  me-  éternelle,  ou  qu'ils  foient  éternelle- 
cum;  ment  dans  le  même   lieu  que  lui  , 

c'eft-a-dire,  dans  le  ciel;  qu'ils  jouif- 
..       fent  de  la  vue,  de  la  gloire  &c  de  la 

ut      videant  j  •  ,  ,      n  ¥   •       j 

dadeatem  divinité  que  le  Pere  lui  a  donnée  , 
y?.1??  c*u,am  &  qu'ils  y  coniiderent  avec  admira- 
quia  diiexifU  tion  &  avec  joie  1  amour  inhm  & 
mcanteconi-  fans  Dornes  qlie  }e  pere  a  eu  pour  lui 

■mudi.         avant  la  création  du  monde.  C  eft  une 
raterjufte,  merveille  inconnue  pour  le  monde 
non1  cogno-  clu^  ne  connoît  point  le  Pere.   Mais 
vie,  lui  qui  eft.  fon  Fils  le  connaît ,  &  fes 

ego  autemte  Fidèles  connoiffent  au  moins  que  le 
coguovi  :  &  pere  pa  envoyé  ,   en  attendant  qu'il 

lu    cognove-  / .    '  .  \     . 

runc  ,  cjuia  leur  découvre  tout  ce  qui  les  doit 
tumemiû-fti.  rendre  heureux. 

Et  notum      Parce  qu'il  leur  a  fait  connoître 

mcntuum,  &  fon  nom  ,  c'eft- à  dire  ,  fa  bonté  Ôc 

notum  faci-  ]es  entrailles  de  fon  amour  &  de  fa 

j..  A.      miféricorde  ;  &  il  les  leur  fera  con- 

ut     dilcûio,  *..      J  |  1 

quâ  dilcxiûi  noure  de  plus  en  plus ,  ahn  qu  ecant 


DE  I/EVANG.  Ch.  CXXXVI.    77 

réellement  en  eux  par  fon  efprit ,   &  ™e  »  }n  î?1}* 
r  r      i     •     o    r       r  ..    ht ,  Scegow 

fur-tout  par  la  chair  &  ion  iang  ,  ils  ipfls. 

foient  les  objets  du  même  amour 
dont  le  Père  l'a  aimé  lui-même, 
puifqu'il  n'aime  les  hommes  qui 
CSLvJk  de  (on  Fils  ,  ou  plutôt  qu'il 
n'aime  que  ion  Fils  dans  les  hom- 
mes. 


CHAPITRE     CXXXVII.     caput 

C  XXXVII. 

Jardin  des  Oliviers.  a.  is.  b,  14. 

C.  zi.  D.  18. 

1.  Trtàeffe  de  Jésus.  Hortus' 

Chrijlu 

CErte    prière   ayant  été  achevée     d.  ig.Hxc 
en  chemin  ,  Jésus  pafla  avec  CTU™  dixifcc 
les  Dilciples  le  torrent   de  Cedron  cftcumdifci- 

oudes  Cèdres,  qui  coule  le  lonç des  puhs       fuis 

11      j-t'     ri       ^      ••-.'  %r\    transt°rrea- 
murailles  de  Jcrulalem  du  cote  d  (J-  tcmCcdron. 

rient  ;  &  ,  félon  fa  coutume ,  il  mon-     c.  ix.  Eté- 

ta  le  Mont  des  Oliviers  ,  &  vint  dans  g^Sj*" 

un    village  qui  y  e(t  fîtué,   nommé  confuecudi- 

Gs  r  'il  p  T      J"       nem  in  mon- 

etntemani.    Il  y  avoit  la  un  Jardin  tcm    oiiva- 

planté  d'arbres  ,  où  il  entra  avec  fes  rum  :  recu« 

Dilciples  ,   <k  ce  rut  la  première  de-  }num  &  dic- 

marche  qu'il   fit   vers    fa  Paffion.   Il  cipuli.  a.  ztr. 

Tune      venir 


:ne  qu 
en  a  voulu    ménager  en   telle  lorte  jefuscum  ii- 
toutes  les  circonftances ,  qu'il  parut,  lisinvUiam, 

1  »*i     r      <r  1  •  >     l11*    dicituc 

1.  qu  il   lourrroit  volontairement  oc  Cethfeiaaai, 

Diij 


7$  Analyse 

c'ii'd*  lt  **ans  conrrainre-  II.  Qu'il  fourTroit 
D.  ubi  'L[  innocemment  de  fa  part.  III.  Qu'il 
hortus  ,    in  foufrroit  par  amour  envers  les  hom- 

TiUteTpfcn,rr°i  mes'  H  n'a  rien  omis  pour  a(Turer  , 
difcipuli  s-  dans  tout  le  cours  de  fa  Paflion ,  fa  li- 
,us'  berté  ,  fon  innocence  &  fon  amdtir  : 

mais  comme  les  preuves  en  font  ré- 
pandues par  tout ,  on  ne  peut  pas  les 
réduire  chacune  fous  leur  chef;  il 
fuMira  de  les  remarquer  à  mefure 
qu'elles  fe  rencontreront  en  notre 
chemin. 
tem&jîi7«[  *•  Quant  à  la  liberté,  il  fe  rend 
qui  cractebat  volontairement  dans   un  lieu  où  il 

eum,  locum  :      >/       •      r  i  r      t-\"r  ■ 

quiafrequcn-  s  etoit  iouveiît  trouveavec  les  Dila- 
ter jw-fuscon-  pleSj   &par  conféquent  fort  connu 

venerat  îll  -:c    jtj  •    »  t_<r  •         il 

cum  difcipu-  de  Judas  qui  le  tranilioit.  Il  va  ex- 
âisiuis.  pres  l'attendre  où  il  favoit  qu'il  le 
devoit  chercher ,  pour  lui  épargner 
la  peine  d'une  plus  longue  recher- 
che. On  doit  considérer  ici  ,  I.  ce 
qui  précéda  la  prife  de  Jésus. 
11.  Sa  prife  même.  III.  Ce  qui  la 
fuivit. 

I.  Les  circonstances  qui  précédè- 
rent fa  prife,  furent,  I.  Son  trou- 
ble. II.  Sa  prière.  III.  Le  fommeil 
des  Apôrres. 
A  îc  f;i:::t       I.  Lorfqu'i!  fur  entré ,  il  dit  à  huit 
difcifuli*  fu-  de  fesDifciples ,  qu'ilsdemeuralfent 
bîc  ,   doacc  la  en  repos ,  &  qu  us  le  millent  en 


.cum  ; 


de  l'Evang.  Ch.  CXXXV1I.  79 
priere,depeur  de  fuccomberàla  ren-  yadamîlluc; 

*      .       '  c  r  ,  'l       il  &   otem:  C. 

tation  future,  pendant  qu  il    alloit  Crace  ne  ia- 
s'avancer   plus  avant  dans  le  Jardin  ueds  in  tcn" 
pour  prier  audi  de  Ion  cote.  Par  un 
fage  ménagement  de  leur  foiblefle , 
il  leur  épargna  la  vue  du  trouble  où 
il  alloit  entrer  ,  de  peur  de  leur  don- 
ner un  fujet  de  fcandale,  qui  les  eut  mifpftcrum 
affoiblis.  11  prit  pour  l'accompagner  ôcjacotmm, 
Pierre  ,  Jacques  de  Jean ,  qu'il  jugea  *  J 
plus  capables  de  porter  cette  épreu- 
ve ,  &  audi- tôt  il  le  livra  au  trouble 
qui  le  faille. 

Il  s'y  voulut  affujettir  ,  i°.  pour 
prouver  qu'il  étoit  vrai  homme  com- 
me nous.  2°.  Pour  porter  la  peine 
des  péchés  qui  le  commettent  dans 
le  cœur  par  les  pallions  ,  comme  il 
devoit  expier  par  les  tour  mens  du 
corps,  les  péchés  qui  fe  font  par  le 
corps.  3°.  Pour  fouffrir  tout  entier  & 
dans  les  deux  parties  de  (on  huma- 
nité ;  dans  fa  chair  par  les  douleurs 
qu'il  devoir  éprouver  j  dans  fon  ame 
par  les  pallions,  comme  par  des 
bourreaux  domeftiques  qu'il  excitoic 
contre  lui.  40.  Pour  confoler  les  Mar- 
tyrs qui,  en  fourTrant  pour  lui,  au- 
roient  regardé  comme  des  péchés 
cette  horreur  naturelle  de  la  morr , 
&  les  mouvemens  qu'elle  devoir  ex- 

Div 


8o         Analyse 
a.  te.  b.  14.  cirer  Jans  je  cœur  :  Quoiqu'il  y  ak 

enrr  eux  &  lui  cette  grande  diffé- 
rence, qui  les  a  excités  volontaire- 
ment en  lui  -  même,  ôc  qu'il  leur  a 
marqué  les  bornes  de  leur  violence 
ôc  de  leur  durée  j  au  lieu  que  les 
Martyrs  les  ont  éprouvés  par  nécefîi- 
té  ,  Ôc  comme  des  fuites  naturelles 
de  leur  infirmité.  50.  Pour  faire  voir 
combien  fa  Paflion  ,  dont  il  voyoic 
en  efprit  toutes  lescirconftances,  de- 
voit  être  cruelle. 

Il  fouleva  donc  en  fon  cœur  trois 
parlions  très- violentes  j  la  1.  fut  une 
crainte  horrible.  La  2.  une  profonde 
trifteiïe.  La  3.  ne  fe  peut  mieux 
nommer  qu'une  défolation ,  qui  eft 
l'état  d'une  ame  qui  voit  un  malheur 
prêt  à  fondre  fur  elle  ,  ôc  qui,  de 
quelque  part  qu'elle  fe  tourne,  ne 

.        .        voit  aucun  moyen  de  l'éviter.  L'ima- 
ic  cccpit  pa-  / 

vere ,  ge  menaçante  a  une  mort  cruelle,  que 

i'efprit  de  Jésus  propofa  à  fa  chair  , 
la  frappa  d'une  terreur  qui  rappella 
tout  le  fan^  auprès  du  cœur.  Mais  la 

comriftari,  relolution  ferme  de  la  volonté  a  la 
fourrrir,  la  fit  regarder  comme  déjà 
préfente ,  ôc  par  cette  certitude  chan- 
gea la  crainte  en  une  trifteiTe  incon- 

fc.  lUcf*  folable.  Enfin  l'une  ôc  l'autre  paflion 
fe  joignant  enfemble  cauferent  la  de- 


de  i/Evang.  Ch.  CXXXVII.  8 1 
folation  de  route  fon  humanité  fain- 
te.  Je  dis  de  fa  chair  par  la  nécelîité 
de  mourir ,  &  de  fon  ame  par  la  part 
qu'elle  prenoit  dans  la  douleur  de  fa 
chair  innocente. 

n,  \    r  •     tv  r  •        Tune  ait  iî- 

temoigna  a  les  trois  Uilci-  \-li:  Triftiseft 

pies  le  trouble  intérieur  qu'il  fentoit  :  anima    mea 

Mon  ame  _,  leur    dit-il,  ejl  plongée  mortem:fuf- 

dans  une  trifleffe  mortelle:  demeure?  tinetehk,8c 

.    .       c         -i,  >  vigilate  me- 

ici  _,  &  veille^  avec  mou  cum. 

2.  Jésus  priant  &  agoni  fane.        i.Chrjftuso* 

£  °        J  rans  Angélus. 

Agonia. 

H  s'avança  hors  de  leur  préfence  Ecprogref- 
à  la  portée  d'un  jet  de  pierre  ,  pour  ^^ 
leur  cacher  à  eux  -  mêmes  ,  quoique  ab  cis  quao- 

x  C  CL 

plus  forts  que  les  autres,  ce  combat  Ja^us.1 

qu'il  alloit  éprouver  ,  Se  qu'ils  n'au- 

roient  pu  voir  fans   fcandale.    Il  fe 

mir  à  eenoux  ,  î  °.  pour  expo  fer  a  fon      EtL  VoCn'ls 

n         I       J    r       J    r       L  genibus   ora- 

Pereles  delirs  delà  chair  innocente  ,  bac,  dîcenss 
qui  demandoit  d'être  exempte  d'une  Pater>fiv«» 

r   r  n  r»r»  i     •      rr  •      i       "ansfer  cah- 

mort  ii  hinefte.   2°.  Pour  lui  ortrir  le  cem  iftum  à 
defir  de  fa  volonté  raifonnable   qui  me> 
fourneteoit  à  fon  bonplaifir  celui  de 
la    nature.  Mais  3    ajoute- t-il,  eue  verumramen 

,         /  r  •    r   '  c  i     non  mea  vo~ 

votre  volonté  Joit  jaite  j  &  non  pas  la  îunras  ,   fed 
mienne.  tua  fiac* 

Un  Ange  vint  du  ciel  pour  le  for-     r  APParuîÇ 

.  ~  o  r  ,  autem        illi 

riher.    i.  Par  la  gloire    munie  que  Angcius    de 
pieu  en  devoir  recevoir,  i.   Par  la  CŒ!°  "m"" 

»$s  eum. 

D  v 


Si         Analyse 
c.'^a'g;  gl°ire  qui  lui  en   dévoie  revenir  â 
lui-même.    3.  Par  le  falut  d'une  in- 
finité d'ames  que  fa  more  dévoie  ra- 
itB.proci-  cherer.  11  fe  profterna  néanmoins  le 

di:  iuper  ter-      ■  r  '  , 

ram,   a.  in  Vllnge  contre  terre,  8c  pendant  ce 
facieitj  fuam  combat  entre  la  volonté  raifonnable 

orans  j  Se  G.  •     i  n     , 

faitus  in ago-  q111  acceptoit  Ja  mort  ,   oc  la  nature 
nia  proiixiùs  qui  la  refufoit ,   il  prioit  encore  avec 

orabat,  B.  ne    a,  ,,•     a  ,..    ,       .  n,, 

fi rL- ri  portée,  Pius  d  inttance,  que  s  il  etoit  poiuble 

cranfirci    ab  cette  heure  pafsât  fans  nuire   à  fa 

vie   :  Mon  Père  j  difoit-il  ,    routes 

'ba  fel^'   vous  font  pojjlbles  ,  éloigne^ 

Si     pombiic  de  moi  ce  calice.  Faites- le  palTer  fans 

eft ,    ttarïfeat  _         •       i     i  r   •  / 

àmecalixif-  (\UQ  Je  *e  boive;  mais  j aires  en  cela 
te  :  B.  omnia  ce  qu  il  vous  plair  ,    &  non  ce  que  je 

tibi  po/Tïbilia         1  r  7         J 

funt,transfcr  Veu-X. 

caîiccm  hune      Cette  condition  ,  s'il  efl  voffible  j 

a     me    :    fed  j  >  j  j»  j  i         ■      j 

nonquodec;o  dependoit  d  accorder ,  avec  la  vie  de 
voio  ,    fed  J  e  s  u  s  ,  1.   toutes  les  figures  qui 

fluod.m.  ■  r  "r 

marquoient  la  mort.  2.  1  outes  les 
prophéties  qui  Tannonçoient.  3.  Tou- 
tes les  prédictions  qu'il  en  avoit  fai- 
tes lui-  même  à  fes  Apôtres  &  aux 
Juifs  4.  Le  décret  éternel  de  fa  mort. 
5.  L'économie  du  falut  de.  tous  les 
Elus  attaché  a  la  mort  du  Rédemp- 
teur. Il  s'amfïoit  d'allier  tout  cela 
avec  l'exemption  de  la  mort  de 
Jésus.  Cependant  il  comprend  tout 
cetalfemblage  dans  cettepropobtion 
univerfelle  :  Toutes  c  ho  fes  vous  font 


de  l'Evang.  Ch.  CXXXVII.  8$ 

pojjibles.  On  peut  fur  ce  fondement 
fe  former  une  jufte  idée  de  la  toute- 
puiflance  de  Dieu. 

Alors  la  violence  du  combat  inté- 
rieur, qui  fe  palïoit  en  lui,  fut  fi 
grande,  que  le  cœur  généreux  re- 
pouffant  avec  force  aux  extrémités  le 
fang  que  la  crainte  avoit  ralfembié 
autour  de  lui ,    les  pores  s'ouvrirent    c:Et  faôa* 
par  tout  le  corps ,  ce  îliortit,  avec  çlcut    glK'taï 
la  fueur  ,   des  eouttes  de  fanç  fi  pref-  fa!1gu>nis  de- 
iees  ,  &  en  h  grande  qumtire,  qu  el-  terram. 
les  découlerentjufqu'en  terre. 

3.  Apôtres  endormis.  *£*** 

3.  S'étant  levéde  la  prière,  il  vint  Etcùmfur- 
à  fes  Difciples  qu'il  trouva  abbattus  ration"*  & 
de  fommeil ,  par  la  trifteffe  dont  ils  vcnifTer     ad 

:/  /     /      /        /->>    n.         »  '    '   difcipulos  fu- 

etoienr  pénètres.   C  eit  qu  ayant  ete  0s,  invenice- 
long-tems  attentifs  aux  chofestriftes  os  dormien- 

d°    -,    1  1  tes  pra: cciili- 

ont  11  les  avoit  entretenus ,   la  na-   tia. 

ture  épuifée  cherchoit  à  fe  réparer 

par  le  fommeil   II  leur  reprocha  leur     Etaitiilîs, 

pefanteur  ,   Se  leur  commanda  de  fe  9JlcI rdormi- 

lever  &  de  le  mettre  en  prière,  pour  orate ,  ncin- 

n'êrre  point   furpris  par  la  tentation  ucns  in  ten" 

qu  ils  alloienc   éprouver.    Puis  s  a- 

\      rr         v    n  \        I  /     •  1     j         B.  EtaitPe- 

drelianta  Pierre  le  plus  intrépide  de  tro  t  Simon- 
tous   :   Ouoi  .  dit- il  ,   Simon,  vous  dormis?  A.fic 

/  •>!   m  •     /*  non  potuiflis 

aormei  ?  hit- ce  ainli  que  vous  accom-  uaà  hoù  vi- 

D  vj 


$4  Analyse 

A.16.B.J4.  p^ffez   ces  magnifiques  promefTes? 
c.  xi.  d.  18.  r  ,  b       i        r 

„.,„„  /^c^j    «  ave?    r>a    veiller  une   heure 

guarc       me-  x    x 

cum  ?  Vigila  feulement  avec  moi  ;  veille^  j  votf.? 
In    tentario-  combe  r  à  /a  tentation  qui  Je  prépare. 

Sri»     qui-   V^TiX      ^      ^"^     ^     ^*VÎ    PGUr 

dem  promp-  s'oflrir  à  la  mort,  quand  le  péril  eft 

lutcm'infi^  éloigné,    &   qu'on    ne  voit  encore 

ma.  rien  à  craindre  \  mais  quand  on  eft 

au  milieu  du  danger  ,  &  que  la  mort 

eft  préfente  ,  la  chair  3  quifentfajoi- 

blejfe  j  défavoue  bientôt  la  bravoure 

B.itircrùm  de  l'efprir ,    &  l'entraîne  malgré  lui 

abkns    ora-  dans  fa  foibleîTe. 

vit .  eumcîem  1t  !•         J      1 

fermonemdi-  11  retourna  au  lieu  de  la  prière  , 
cens:  a.  Pa-  fa  ]\  Ja  recommença  en  mimes  ter- 
ter  mi,  h  non  ,-         „  \-      \       r  t- 

potefthicca-  mes  :  Mon  Fere  3  dit-il,  Ji  ce  calice 
hx  tianhre     ne  pCUÎ  paf[er  fans  que  je  le  boive  .  que 

nifi       bibam  £  ,  <     r     r    rr      ti  \   r 

ilium  ,  fiât  votre  volonté  Je  Jajje.  11  revint  a  les 
îrountasrua.  Djfciples  qu'il  trouva  encore  endor- 

Ic  venir  ue-  1  r  o       LU 

rùm,6c  inv«  mis,  les  yeux  appelantis  &  abbattus 
nie  eos  dor-  je  f~0 m m e i  1 .  11  leur  dit  quelque  cho- 

mienres    :   e-    r  .  ,  v    i  • 

rant  enim  o-  le  pour  les  préparer  a  la  tentation 
cuii     eotum  qui  s'approcnoit.    Mais   comme  ils 

gravaa    :   B.  "1  .    i       rt  , 

&c  ignora-  ne  lavoient  que  lui  repondre,  il  les 
bantquidre-  j  j^    dormir,   &  retourna  faire  la 

{pondèrent  fc  ' 

ei.  même  prière  pour  la  troilieme  rois. 

a.  Et  rchc-  Cependant  comme  Judas,  avec  fon 

•rumabiir,  &  elcorte,  etoit  prêt  d  entrer  dans  le 

toravit  terriô,  Jarcjm  x\  revmt  i  fes  DifcipleS  : 
etimi  em  ter-  •>  ■.  '        M        — 

monem    du  Dorme?  maintenant  j  leur  dit-il ,  il 

cens. 


de  l'Evang.CL  CXXXVII.  85 

vous  pouvez,  &  prenez  du  repos.  B\EtTemJ 
C  etoit  un  reproche  de  leur  parelle  ,  difcipuiosfu- 
accompagné  d'une  piquante  ironie.  ?*.'  B_&  a!c 
Puis  leur  parlant  lerieulement  j  C  eji  te  jam,  &re- 
<z//^  «to/rair.,  dit- il ,  l'heure  eji  venue  Jgg*  ;e_ 
o#  /d  /z/j  ^e  L'homme  va  être  livré  nizhor a  :  ec- 
£/2rr£  /ej-  /7Zûi/2j  ^<rj  méchans.  Allons  >  ^^ll"jJ^ 

/^V^-VOZ/Jj  Ce/tfi  ^tti  /72é  trahit  eji  tur  in  manus 
,.,,,,  «,-^^A^  peccacorum. 

tout  proche.  £urgice^  ea. 

mus:eccequi 
4.  Acceffus 

II.  Il  parloit  encore  lorfque  Judas  %**"* 
d'ifcanot  entra  dans  le  Jardin,  à  la     B.Etadhuc 

ai»  j  '       1»'      eoloquente, 

tête  d  une  grande  troupe  armée  d  e-  A  eCcejudas 
pées  &  de  bâtons ,    de  précédée  de  b.  ifcariotes, 

0       1     n         1  rn      '  unus  de  duo- 

lanternes  oc  dehambeaux.   hue  etoit  decim. 
compofée   d'une  cohorte   Romaine    D.cùmac- 

•   /       •      1         •  cepinec      co- 

toute  entière  ,  qui  etoit  de  cinq  cens  hoaem,  &  à 
hommes,  &  d'un  grand  nombre  de  Pomificibus, 
lerviteurs  des  fouverains  Prêtres  &  miniftro$,ve- 
des    Phanfiens    qu'ils   avoienc   en-  nit  ill"c  »  A# 

'  O      I  \/T  A  &      CUm       CO 

voyes  ,  eux  &  les  Magiitrats  ,  en  cas  turbamuka, 
que  les  Difciples  de  Jésus  ,  ou  ceux  "?l|.,l^1l,*  • 

,  r-    1       r  r   •  r    &ruftibus,D. 

du  peuple  qui  le  ravonloient ,  le  Cum  ïamcr- 
miitent  en  état  défaire  réfiftance,  &  ?"  »  &  faci~ 

J      1      J'f      J  1  '  bus,     8t   ar- 

de  le  détendre  par  les  armes.  mis.  a.  Mif- 

Comme  les  Romains  ne  connoif  {j  a  Ç^f 

#  bus  baccrao- 

foient  point  Jésus  ,  &  que  les  1er-  tum  ,  a.  & 
viteurs  mêmes  qui  Pavoient  fouvent  fS^n?-'*  c" 
vu  ,  pouvoienc  le  tromper  dans  les 


S6  Analyse 

à.  ts.ft.  14.  ténèbres  ,  en  prenant  quelqu'autre 
c.  ii.  d.  18.  r .  .  1       1  , 

pour  lui  ,  qui  lui  auroit  donne   Iieti 
de  s'échapper  ,  on  éroir  convenu  , 
Dedcrarau-       i°,  QL1e  le  Traître  leur  donneroic 

tenu  traditor  r  1  1 

ejus   fi^num  un  ligne  ,  pour  ne  pas  tomber  dans» 

cm,  dkcns  :  cette  erreur  ,  &  que  ce  figne  ne  fe- 

rott   pas  de  le  montrer  au  doigt  ,  ce 

quiauroit  encore  été  fujetà  quelque 

équivoque  ;  mais  de  le  joindre  de  fi 

près   qu'on   ne  put  s'y    méprendre. 

Qucmcum-  C'ejl  celui  de  la  troupe  j  leur  dit  ce 

«jue    «tfcula-  rçaîcre       qu€  je  baïfcrai  :  faififfer- 

Ceeil  5  ceatcc  vous  de  lui  j  6*  /  emmené^  fort  sure- 
eum,  &du-  ^^  •  proteftant  qu'après  Ion  indice 
il  n  en  repondoit  plus,  avis  qu  il  ju- 
gea nécefîaire  à  caufe  de  ce  qui  étoit 
arrivé  à  Nazareth.  Que  comme  ils 
avoient  ordre  de  prendre  avec  lui 
fes  Difciples ,  les  foldats  fe  dévoient 
rendre  maîtres  de  la  porte,  afin  qu'- 
aucun ne  s'échappât  à  la  faveur  de 
la  nuit  qui  éroir  déjà  bien  avancée, 
ïtcùm  vc-      Judas  donc  fe  détachant  delatrou- 

teitfLc ,  C.  an-  >  1      1  •  \    /  », 

«cccdcbat  e-  Pe  s  avança  vers  le  lieu  ou  etoit  Je- 

"•*■  sus,  avec  les  trois    Difciples    qui 

A.  Et  con-  l'accompa^noient.     Il  le    rencontra 

fcitim    acce-  •  ro  ,  1      1     •     ti       > 

àeas  ad  Je-  qu*  venoit  au  dtvanr  de  lui.  11   s  ap- 
fum    b    uc  procha  de  lui   pour  le  baifer  ,  &  il 

ofcularetur      r         ,,.  .  i       i     •      i  i 

cura,  a  dixic  -Lit  l  impudence   de  lui  dire   en  le 
Av.    Kai.i ,  :  ^1jfanr  .  je  vous  ra[ue     mon  Maître. 

CC     orcu  utils     r  i      •      1-  11-  xjr 

cft  cuai.  vi-  Jésus  lui  dit  en  le  plaignant  :  Mon 


de  i/Evang.  Ch.  CXXXV1I.  87 

ami ,  à  quel  deffein  ètes-vous  venu  jîtqueiljiJé» 
iciT  comme  s  11  lui  diioir,  quel  écran-  adquidveni- 
ee  ufage  faites-vous  ici  de  votre  fer-  ft*?  f'^îî 
vice  tk  de  votre  accès  auprès  de  mor  hominis  «a- 
Juias  j  vo^j  tivrtr  donc  le  Fils  de  dis  * 
V homme  par  un  baïfer  ? 

5.  /a//}  renverfés  par  terre.  /•  JudxU*- 

dentés  in  ter~ 


ram. 


Cependant  le  Tribun  avec  fes  fol- 
Jars  toujours  occupé  à  garder  la  por- 
te ,  avoir  fait  peu  d'attention  à  tout 
ce  qu'avoic  fait  Judas.  D'ailleurs 
Jésus  ne  voulant  pas  que  fa  prife 
parût  un  effet  de  fa  trahifon  ,  fe  J^£h 
débaraffa   de   lui  s    6c    fâchant   par-  omaia    qu* 

f*  1     •     1  venturaeranx 

alternent  tout  ce  qui  lui  devoit  arn-  f        eu 

ver  ,  il  alla  vers  les  gens  de  guerre,  proceffit , 

lorsque  Judas  étoit  déjà  retourné  à 

eux  pour  fe  plaindre  de  ce  qu'on  ne  &  dkkdti 

1  avoit  pas  luivi  ,  <x  que    par   leur  tjs>  Refpon- 

faute   ils  n'avoient  pas  exécuté  fon  deruntei:Je- 

4  1  t«  y^k     •      1  rum  Na2are- 

projet.   Jésus  leur  dit  :  {Jui  cher-  nwn,DicitcM 
cher-vous  ?   Jésus   de    Kararerh  ,  J-fus  :    ES° 

,        «■  ..  -,         ,->,    n  .         f  fum.     Saoat 

lui   dirent-ils.    L  eft  mot   ,    leur  re-  amem  ôc  Ju- 
pondit-il.   A  ces  deux  mots  pronon-  <J« ,  qui  tra- 

'  1     \r    \      a     rv  1    debat  eum' 

ces  par  le  Verbe  de  Uieu  ,  toute  la  cttmipfis.  ux 

•troupe  avec  Judas   même  s'en  alla  à  ergo  dixie  c- 

r  is:  Ego  fum-, 

la  renverie  ,  ce  ils  tombèrent  tous  abiemne  re- 
par  terré.  ircrium ,  & 

11  leur  ht  éprouver  ce  léger  eliai  tercam. 


88  Analyse 

a.  i<?.b.  î4.  de  fa  toute- puilfance.  1.  Pour  les 
C.  xi.  D.  18.  ,      pr  5 

avertir  de  1  attentat  horrible  qu  ils 
alloient  commettre  en  fa  perfonne. 
2.  Pour  leur  faire  voir  que  les  armes 
&  la  violence  étoient  fort  inutiles 
contre  un  homme  qui  pouvoit  les 
renverfer  d'une  feule  parole  ,  du  feui 
fouftle  de  fa  bouche.  3.  Enfin  que 
s'ils  ne  laifloient  pas  .de  fe  faifir  de 
lui,  &  de  le  charger  de  liens  ,  ils  ne 
dévoient  attribuer  fa  prife  &  fa  cap- 
tivité ni  à  leur  force,  ni  à  leur  grand 
nombre  ,  mais  à  fa  pure  volonté. 
Ils  fe  relevèrent  fans  faire  aucune 
icerùm  er-  de  ces  réflexions  j  &  J  e  s  u  s  leur 
goinurroga-  fct   de  nouveau  :  Qui  cher  cher -vous 

vu  cos:  Qu-  T         c  1  a  '  r 

cm  quxririsc?  donc  f  ils  hrent  la  même  reponie, 
m.  autemdf-  qU'[[s  cherchoient  J  e  s  u  s  de  Naza- 

xcruiu   :    Je-     1  J >  \    j-  V 

fumNazare-  rerii.    Je  vous  ai  déjà  du  j  rephqua- 

num.        Ref-  t    J  £    £ eft    m0l.  m^me%      \\    leur 

pondu  Jefus:  '     7       ,        J  ; 

Dixi  vobis ,  reprochoit  ainli  leur  împuiliance  a 
cuiaegofum:  f   r     autre  chofe  contre  lui  que  ce 

li     ergo     me  t  .  ,    j 

qujericis  ,  fi-  qu'il  leur  permettoit.  <Si  ctjt  donc 
nue  hos  a  1-  mQ-  ^  ajoura-t-il,  que  vous  cherche^ 
laifie^  aller  ceux-ci  en  paix.  Ces 
ut  impie-  paroles  furent  une  défenfe  efficace 
querii  dî^h  aux  Soldats,  de  mettre  la  main  fur  (es 
Qjia^uosde-  Apôtres  ,    &   il   accomplit   ainfi    ce 

di.ti      mihi  ,  >■  i  j-      j  r  >i 

non  pcriiii  '-l11  "  avoit  dit  dans  la  prière  ,  qu  il 
ex  eis  quem-  n'avoit  perdu  aucun  de  ceux  que  fon 
quam.  peïe  ^  avoir  donnés  :  ce  qui  s'en- 


de  lTvang.CIi.  CXXXVII.  S9 
tend  de  la  perte  éternelle  ,  parce 
qu'alors  telle  étoit  la  foibleffe  des 
Apôtres ,  que,  pour  fauver  leur  vie, 
ils  euffent  renoncé  Jesus-Christ  , 
&  que  ce  renoncement  peut-être  ne 
la  leur  eût  pas  fauvée. 

6.  Oreille  coupée.  c.Auricui* 

abfcijja. 

Alors  les  foldats  s'approchèrent  de   A.  Tune  ac- 
Jésus,  de  s'étant  jettes  fur  lui  ils  ceflermu  ,  & 

1>        *.  '  manus    inie- 

arrêtèrent   f  cerunc  in  je- 

Ceux  qui  étoient  avec  lui  voyant  fam  >  &  ce- 

.     i    A     .  .  i*i  i        nuerunteura. 

ce  qui  devoit  arriver,  lui  demande-      c.  Video. 

rent  s'ils    fe   défendroient  à  coups  tes  auteiî1  hi* 

j"    '      o,  r  j      i  r     SUI  circa  !P" 

d  epee  :  &:  ians  attendre  la  reponie,  fum    erant, 

Simon  Pierre  ,  qui  avoit  fait  la  de-  <iuod    fut"" 
i  i     ^  •     x  ,,/    /       0         rumerat li- 

mande, mit  la  main  a  1  epee,  &  en  xerunt     ci: 

frappa  un  des  ferviteurs  du  Prince  Domin.c  »  fî 

des  Prêtres,   dans  le  deiiein  de  lui  ingiadioîD. 

fendre  la  tête.  Mais  dans  cette  foule  5,imon  .Acr&° 

quelqu  un  1  ayant  poulie  par  halard  ,  nus    ex    his 

le  coup  gauchit  un  peu,  &  il  tom- f ;eranccurn 

ba    lur  l  oreille  droite  qu  il  lui    COU-  densmaamn, 

pa.  Ce  ferviteur  fe  nommoit  Mal-  SS^ruw- 

chus.  &  percuciens 

La  demande  Se  le  coup  font  attri-  £$£«££ 
bues  par  trois  Evan^éliftes  indéter-  tum,  d.  ab- 

*    î  *  * „  \  1»        j      "Tv  r  '    1  feidic  auricu- 

minement  a  1  un  des  Uilciples,  parce  jam  cjUS(jcx. 
que  Pierre  vivant  encore  lorfqu'ils  teram.    Erac 

/  a  ri  aurcm  nomen 

ecrivoient,  on  eut  pu>   iurleurrap-  fcrvo    Ma|, 

chus. 


5)0  Analyse 

a.  i6.  *  T4   porc  ]e  rechercher  de  cette  révolte 

9.1&.D.  i*.  lia-         xx  r  • 

contre  la  Jiutjce.  Mais  comme  laine 

Jean  écrivit  fon  Evangile  environ  29 
ans  après   fa   mort  ,  il  ne  crut  pas 
nous  devoir  cacher  cette  marque  de 
fon  courage  intrépide  ,  qui  lui  avoic 
fait  défendre  tout  feul  Ion  Maître  , 
contre  une  cohorte  Romaine,  com- 
polée  de  500  hommes,  fans  comp- 
ter les  gens  des  Piètres  qui  Paccom- 
pagnoient. 
c.Rpfpon-    Jésus  arrêta  cette  première  fougue  : 
jffus   aU>m  ^eifc\*  dit-il,   &  ne  pajfei  pas  plus 
simte'ufque  avant  ;  fk  comme  il  n'étoit  pas  en- 
huc.  Ercùm  core  lié  ,   il  toucha  l'oreille  de  cet 

tengiflct  au-   ,  .  A 

rkuiamejus,  nomme  qui  tenoit  peut-être  encore 
ftiuvic  eum.  un  p6ll  par  l'exrrêmité  ,  &  il  la  gué- 
rit. Mais  parce  que  cette  bravoure  à 
contre- temps  pouvoit  donner  cette 
opinion  que  Jésus  s'écant  fait  dé- 
fendre par  fes  Difciples  ,  avoir  fuc- 
combé  fous  le  nombre  de  fes  enne- 
mis ,  elle  faifoit  tort  a  fa  liberté ,  Se 
D.Dîxiter-  fa  patience  en  fut  bleflee.    11  com- 

fo  Jefus  Pe-  r    ,     y  n.  j  r         ,     , 

tto  :    mitre  manda  a  Pierre  de  remettre  ion  epee 
giadium  tu-  au  fourreau ,  de  quoi  il  lui  donna 

um   m  vagi-      ,    r  .  1  ^ 

nam  :  pluneurs  râlions. 

i.  Parce  que  tous  ceux  qui  pren- 

A.  omnes  , ,  ,     /     x  1     •   j     I 

tnim  qui  ac-  nent  1  epee,  comme  lui  de  leur  auto- 
erpenne  gia-  VUq  privée,  pour  répandre   le  fane 

diu  n ,  gladio   .  '  *ï  v    v,     ,  ,? 

pcribuuc.       numam,  périront  pa*  1  epee,  ou  de 


DE  i/EvANG.Ch.CXXXVII.  9t 

Dieu  ou  des  hommes:  ce  qui,  à  Té- 
gard  des  hommes ,  marque  toujours 
le  droit  ou  le  mérite  ,  &  très-fouvenc 
l'événement. 

2.  11  n'a  pas befoin  de  fon  fecours ,  An  putas  ; 
&  s'il  vouloir  il  n'auroit  qu'à  en  de  <luia non Pof- 
mandera  ion  lJere  ,  qui ,  pour  douze  patrem   me. 

hommes  qu'ils  étoient ,  lui  enverroit  um  »  &  exhLi: 
x  pi  1  a  i      j    j  î  '  beb,c     m,hi 

a  1  heure  même  plus  de  douze  légions  mode    pluu 

d'Anges  de  6ooo  chacune a  pour  le  qy^duode- 
défendre.  Mais  il  n  rturoit  garde  de  Angelorum  y 
s'en  fervir  ,  ni  de  retracler  par  une 
nouvelle  prière  l'engagement  volon- 
taire où  il  s'étoit  mis  de  fourTrir  la 
mort. 

La  $.raifon  fe  tire  de  l'intention 
de  Pierre,  qui   en  le  déçacreant  des 
mains  des  loldats  ,   l'empcchoit  d'o- 
beir  au  commandement  de  Ton  Père. 
Comme  s'il  difoit ,  eit-ce  que  vous     D.Calicem 
prétendez,  a   quelque   prix  que  ce  ^  Pacer- 
ïcir ,  m'arracher  des  mains  le  calice  nonbibajniU 
de  ma  Paffion  que  mon  Père  me  pré-  um 
fenre  maintenant  à  boire  j  &  n'avez- 
vous  point  horreur  d'un  crime  auflî 
grand  qu'eli  la  réfiftance  aux  ordres 
de  Dieu  ? 

La  4.  fe  tire  de  l'Ecriture  par  ce   A.Quom*- 

•r  11     r  \r   1  &b   ergo  im- 

railonnement.    Il   raut  ablolument  picbu.uur 
que  les   Prophéties  ,  qui  predifent  Scripcurae, 
r     r»   iv         u1    r  r  •  quia  fie  opoc- 

la  Paiiion  &   la    mort,  ioicn:  ac-;ctfic£ii 


92.  Analyse 

c  15*d  lf  comP^es  5  ^  faut  donc  ,  pour  les  ac- 
"  complir,  qu'il  iouffre  &  qu'il  meu- 
re. 
d.  18.C0-      Cependant  le  Tribun  avec  fa  co- 

hors  ergo ,  Se  1  0,1  '  1 

uibunus ,  &  norte  &  ies  gens  envoyés  par  les 
miniftri  Ju-  Juifs  s'étoient  déjà  faifisdej  esus, 
comprdien-  &  ils  ^e  lièrent.  Mais  après  la  cor- 
derunc  Je-re&ion  de  ce  zèle  indiferec  de  fon 
gaverunt  e-  Difciple  ,  il  la  fit  aux  Princes  des  Prè- 
um*  très,  au  Magistrat   du  Temple,   & 

aux  Sénateurs  du  peuple ,  qui  étoienc 
venus  en  perfonne  ,  pour  ne  Ce  fier 
qu'à  eux-mêmes  de  la  conduite  d'u- 
ne fi  grande  entreprife,  6V  pour  Pau- 
torifer  par  leur  préfence  contre  les 
partifans  de  Jésus  qui  voudroient  s'y 
oppofer. 

jr.  B*m-      -.  Reproches  de  Je  fus  aux  Juifs. 

bravo  Chnjti         4  l  ■  J 

in  Judaos. 

a   initia      Jésus  leur  reprocha,    i°.  qu'ils 
horadixkje-  étoient  venus  le  prendre  armés  d'é- 

quî^S  Pées  &  de  bâtons  >  comme  pour 
ad  fc ,  Prin-  prendre  un  voleur  public  :  sûretés 
do"mSaCe&  f°rt  inutiles  contre  un  homme  qui 
magiitratus  ne  fe  défendoit  point,  z.  11  leur  re- 
fen^ores':  piocha  leur  foiblelTe  ,  lorfqu'enfei- 
quafi  ad  la-  anant  dans  le  Temple  ,  il  femettoit 

tronem  exif-  Va  i  o,        »*1 

tis  cum  gia-  » ui-mcmeentre  leurs  mains ,  &quils 
diis  &  fufti-  n'oferent  l'arrêter ,  quoique  toujours 

bus    A.  corn-  r  /        i      i  *  r 

prehendere     traniportes  de  la  même  rureur  con- 


de  l'Evang.  Ch.CXXXVlI.  9  5 

tre  lui.    *.  Il  les  avertit   qu'ils  ne  metquoddie 

J  i         r  •/*  apud  vos  le- 

devoient  pas  regarder  la  paie  com-  dcbam  dô- 
me un  effet  de  leurfrrata^eme  ni  de  "l15  !J  tem" 

,?  plo,    &:  non 

leurs  armes  \  mais  qu  ils  dévoient  me  ccnuifti*. 
l'attribuer  au  décret  de  Dieu,  qui  ,    3  Scdh*f 

...        ,-      •  i  eit  hora  vei- 

pour  accomplir  les  tentures  ,  leur  «a  ,  &  po- 
avoit  donné  cette  heure  &  cette  puif-  îefta*  tenS" 
lance  d  accomplir  leur  deliein  de  te-  uc  impiean- 
nebres.  ™r   Scnptu" 

111.  Tout  cela  arriva  en  effet  pour     A.Hocau- 
accomplir  les  Prophéties.  Alors  tous  SÎS?  « 
les  Difciples  l'abandonnant ,  fe  mi-  adimpieren- 
rent  en  fuite,  &  Pierre,  auffi-bien  ^S"* 
que  les  autres ,  qui  juftifia  malgré  lui  rum.  B.Tunc 

1  '  l' JX'  J      T  N     1  11     diîcipuli  ejus 

la  prédiction  de  Jésus  ,    a  laquelle  reIinfm'es 
ils'étoittant  oppofé  touchant  la  dif-  eum,  omnes 
perfion  des  Difciples.    Mais  ce   ne  uscrunc" 
fut  pas  fans  un  miracle  fenfible  de  la 
Providence  ,  qu'onze  perfonnes  puf- 
fent  échapper  à   5  ou  600  hommes  , 
quiavoient  ordre  de  les  prendre,  &c 
de  les  amener  prifonniers  avec  Jé- 
sus. 

L'Evangile  en  rapporte  une  preu- 
ve bien  particulière  :  Un  jeune  hom- 
me du  village  de  Gethfemani ,  fans 
doute  affectionné  à  Jésus  ,  s'étanc 
éveillé  au  bruit  de  tant  de  gens  de 
guerre  qui  paffoient  fous  fes  fenê- 
tres, foupçonnaeeque  c'étoit  :  il  fe 
leva  auiîi-tôt,  &  leur  marche  pré- 


94  Analyse 

A.  te.  b.  14.  cipitée  ne  lui  donnant  pas  le  loifir  de 
C.  ii.  D.  18.      r     ,       r     ,    ,.        ..  /  .    r 

prendre  les  habits,  11  le  couvrit  leu- 

Adolefcens  i  J      r       1  •  i       o    r   •    •     i 

autem    qui-  ornent  de  ion  linceul ,  &  luivit  J  e- 
damfequeba-  sus  pour  voir  où  on  le  menoit.  Les 

tureum,ami-  11  r 

&us    fidone  garçons  de  la  troupe  le  tournant  cou- 
fupet  nudo  ;  rurent  après  lui ,  ôc  l'attrapèrent  par 

Se  tenuerunc  r        r  1  -i  1  1    •  rr     r 

•uni.  Aciiic  ion  linceul;  mais  il  leur  lailia  lage- 
rejeaâ    fin-  mentfon  linceul  entre  les  mains  ,  Ôc 

done ,  nudus  -i     >       r   •  j     1  r  -r 

profugit    ab  "  s  enfuit  tout  nud  dans  la  mailon. 

ds*  Ils  avoient  encore  plus  de  facilité  de 

fe  failir  de  tous  les  Apottes  enfer- 
més dans  le  jardin.  S'ils  ne  le  firent 
pas,  c'efl  que  Jésus,  en  leurdéfen-. 
dant  de  les  arrêter  ,  leur  avoit  lié  les 
mains ,  avanc  qu'ils  euflfent  lié  les 
Tiennes. 


cCxxxvin.        CHAPITRE  CXXXVIIl. 

A.  16.  B.  14. 

c.  ii.d.  18.      kxamen  oc  Jugement  de 

Examen  &  r^    ..     1 

judiaum  Cai-  v^  a  îp  ne . 

i.jefusdu-  7.    Jefus  mené  chc\  Anne-  &    che^ 

dus    ad  An-  /"•    ••    z.„ 

nam   &    Cai-  Cdiphe. 

A  Près  que  Jésus  a  donné  des 
marques  alïurées  de  fa  liberté 
dans  fa  prife ,  tk  par  conféquent  dans 
tout  le  cours  de  fa  Paflion  qui  n'en 
fut  qu'une  fuite  ,  il  va  faire  triom* 


©e  i/Evavg.  Ch.  CXXXVÎIT.  95 

pher  fon  innocence  dans  les  trois  tri- 
banaux  où  il  a  para.  Le  L  fac  celai 
de  Caïphe  où  il  fut  condamné.  Le 
IL  celai  d'Hérode  où  il  fur  renvoyé 
abfous.  Le  111.  celui  de  Pilate  où  il 
fut  abfous  Ôc  condamné  tout  enfem- 
ble. 

1.  D'abord  on  mena  Jésus  chez     d.  i&.  Et 
Anne  ,    comme  étant  le  beauperede  eUmJXaeju^. 
Caïphe  le  Grand-Prêtre  de  cette  an-  namprimum; 
nee-la,  de  ce  memeCaipne  qui  avoir  cet  Caïpha, 
fuggérc  ce  confeil  aux  Juifs  ,  qu'il  quieratPon- 

/       •  >         r      i    i  tifex  anni  il- 

etoit  avantageux  qu  un  ieul  nomme  lius<  Erat  au<p 
mourut  pour  tout  le  peuple.  Mais  ^™  caïphas, 

1  <  ■    "il      j  qui  confilium 

on  ne  le   mem  a  ce  vieillard,   que  3eaecac    ju- 
fon  grand  âge  difpenfoicd'allifter  au  <*a:is  :  Q"ia 

r  -1   \  i  r  j  expédie       u- 

conleil  a  une  heure  li   incommode,  nlfni   homi- 
que  pour   lui   donner  en  palfant  la  nem      m°ri 

r        C  n.'  J  t  *    '     Pro  populo. 

latisracuon  de  voir  Jésus   arrête.  r    r  r 
Delà  on  le  conduidt  chez  Caïphe,      a.  i*.  At 
qui  demeuroit  peut-être  dans  le  me-  LH  tenences 

i  C  Jeium,  duxe- 

me  Palais  que  Ion  beaupere.  Corn-  rum  ad  caï- 
me  la  fête  prochaine  ,  l'occafion  fa-  £^™DJt 
vorable,  le  penl  du  délai  les  prel-  tins,  ubi  b. 
foietit .  &  qu'il  n'y  avoir  point  de  ZlZâtt. 
temps  à  perdre,  laie  trouvèrent  déjà  ba*,  &fenio- 
aflemblés  les  Prêtres ,  les  Doéteurs  r 
de  la  Loi ,  &  les  Sénateurs  du  peu- 
ple ,  qui  avoient  envoyé  leurs  gens 
avec  la  cohorte  Romaine  ,  &:  qui 
auendoiem  chez  Caïphe  lefuccès  de 


neiauc. 


5>6  Analyse 

a.  15.  b.  14.  cette  expédition.  Le  refte  de  la  nuit 
rut  employé  a  raire  le  procès  a  Jésus, 
dont  les  trois  parties  furent ,  I.  l'exa- 
men cV  l'information.  II.  La  con- 
damnation générale.  111.  Les  prélu- 
des de  l'exécution  par  toutes  fortes 
d'outrages. 

t.  Alapa.  1,  So uffle t, 

fexDergonii!-  *•  Le  Grand  -  Prêtre  interrogea 
terrogavit  Jésus  touchant  fes  Difciples  Se  tou- 
cipuUsdfu1sif;  chanc  la  do&rine;  deux  points  qu'il 
&c  de  doan-  voulut  diftinguer  ,  dans  l'efpérance 
na  CJUS*  qu'il  lui  échapperoit  quelque  chofe  , 
fur  quoi  on  pourroit  l'accufer.  11  lui 
demanda  par  quelle  autorité  ilaffem- 
bloit  des  Difciples ,  &  quelle  étoic 
la  doctrine  qu'il  leur  enfeignoit  : 
mais  viiîblement  ces  deux  points  re- 
viennent à  celui  de  la  doctrine  ;  car 
fi  on  n'enfeigne  que  la  vérité ,  il  n'y 
a  point  de  loi  qui  défende  de  faire 
des  Difciples.  Cela  obligea  Jésus 
à  réduire  la  queftion  qui  regardoit 
les  Difciples ,  à  la  queftion  touchant 
la  dodfcrine,  &  à  renvoyer  celle  de 
la  doctrine  aux  témoins.  Il  répondit 
que  ce  n'étoit  pas  à  lui  à  qui  le 
Grand -Prêtre  devoit  faire  cette  de- 
mande. 

1.  Parce 


DE  L'EvANG.Ch.  CXXXVII1.  97 

i.  Parce  que  dans  cet  examen,  il 
ne  s'agifîoit  pas  des  fentimens  qu'il 
avoir  alors  ,  &  dont  il  ne  devoir 
rendre  compte  à  perfonne  ;  mais  de 
la  doctrine  qu'il  avoir  prêchée  ,  afin 
de  l'en  punir  (i  elle  étoit  mauvaife. 
Cr  toute  l'aflurance  qu'il  pourroit 
leur  donner  qu'il  n'avoir  enfeigné 
qu'une  doctrine  faine  &  orthodoxe, 
ne  les  perfuaderoit  pas  ,  parce  qu'en 
effet  un  Accufé  n'eft  pas  recevable 
à  dépofer  en  fa  faveur.  C'eft  donc 
aux  témoins  qui  l'ont  écouté  ,  de 
non  à  lui-même  ,  qu'il  faut  s'a- 
drefler  ,  pour  favoir  ce  qu'il  a  en- 
feigné. 

Mais  peut-être  qu'il  n'a  dogma- 
nie  qu  en  lecret ,  pendant  la  nuit ,  ÔC 
à  des  Difciples  afridés. 

2.  11  répondit  au  contraire  ,  qu'il  Rebondît 
avoir  toujours  parle  en  puDhc  ,  &  palam  locu- 
à  tout  le  monde;  qu'il  avoit  toujours  tusfumn^n- 

<v    L  /     i  .        À  ',  do  i  ego  fem- 

preche  dans  la  synagogue  ce  dans  Pcr  docui  in 
le  Temple  ,  où  rous  les  Juifs  ont  îynag°ga,fc 
accoutume  de  s  aliembler  ,  oc  qu  il  quo  omnes 
n'avoir  rien  dit  en  fecret ,  qu'il  ne  JuciaTIConv5- 
voulut  bien  qu  on  publiât  ,  comme  occulto  îocu- 
étant  conforme  à  ce  qu'il  avoir  envï™{  lum  m~ 
feigne  &  publié.  Pourquoi  donc  le 
Grand-Prêtre  qui  pouvoir  interroger  interroga 
autant  de  témoins  qu'il  avoit  eu 
Tarn.  IV,  E 


me 
$  î 


5>8  Analyse 

a.  i&  b.  18.  d'auditeurs  ,  c'ett-à-dire  qu'il  y  avoit 

C.  ix.  D.  18.     ,        1       r      2  1     i-k         • 

des  j  uirs  dans  toure  la  Province ,  s  a- 
vifoit-il  de  l'interroger,  lui  dont  les 
réponfes  ne  fer  voient  de  rien  pour 
r.ibfoudre  ,    ni  pour  le  condamnera 

JF^XS'  Que  n 'interroge- t-ii  ceux  qui  l'ont 

ruacquidio-  entendu  .<* 

«tusfimip-       Mais  QÙ  ira_c„on   les  cherchera 

Le  tems  preflTe  ,  &:  on  n'a  pas  le 
loifir  de  faire  de  fi  longues  informa- 
tions. 

5.  Pour  lui  épargner  la  peine  de 

les  chercher  bien  loin,  il  lui  en  mon- 

eccchifciunt  tra  dans  Talfemblée  :     Voilà  dit-il, 

quae  dixeiim  devant  vos  yeux  des  gens  qui  favent 

cs°*  ce  que  j'ai  prêché. 

Rien  n'étoit  plus  raifonnable  ni 

plus  dans  l'ordre  que  cetee  réponfe. 

Hscautem  Cependant  après  ces  paroles   d'une 

unus  affiitcns  genereule  liberté  ,  un  des  Omciers 

Miniftrorum  qui  croient- la  ,  donna  à    Jésus  un 

dédit  alapam  1    r      m  >i  1 

jcfu,diccns:  grand  iourrler  qu  il  accompagna  de 
sic  refpondcs  ce   reproche  infolenr  :   h  il- ce  ainfi 

Poutiiàci  î  r     ,  c,  •      n  d'       1 

que  tu  répons  au  souverain  Jrretre  : 

comme  cet  homme  juftifioit  cet  ou- 
trage p.ir  la  faute  prétendue  dont  il 
l'accuioir  ,   Jésus   qui   eut  gardé  le 

Refpondic  fîjence  pour  l'iniure ,  répondit  à  Tu- 
ciJefus:  o     \  i>  rr  r 

ne  &  a  1  autre  pour  aiiurer   ion   111- 

simaièiocu-  nocence.    Il  l'avertit  donc   que  s'il 

tus  fum  ,  te-  .  ,  1  /  ,  /  \     1     • 

ftimoiiiuHi     avoit  mal  parle  ,   c  etoit  a  lui  qui 


dïl'Evans.CH.  CXXXVIIL    99 
i'accufoit  de  le  faire  voir  ,  &  de  mar-  FerJ»be     de 

•  -,  •        •    i  /  i  r      r>   ma'°  î   "  au- 

quer  en  quoi  il  avoir  viole  le  relpect  rem  benc, 
dû  au  Souverain  Pontife.  Que  s'il  *ukl  me  c«- 
n  avoir  rien  dir  que  de  jjutte  &  de  eum  Armas  ii- 
bon  ,  il  avoir  rorr  de  prévenir  en  le  &ac.um      aci 

r  ,  'XL*  J       r     r  Caipham  , 

frappant  ,  la  conviction  de  la  raute  Poncificem. 
&  la  condamnation  des  Juges. 

3.  taux  témoins.  jieSt 

L'interrogation  caprieufe  n'ayant 
pas  réulli  ,  ils  fuient  contraints  ,  fé- 
lon l'avis  de    Jésus  ,    de    recourir  „  .    . 

,  ,  _       .,          A.   Pnnci- 

aux  témoignages  contre  lui  \  &  ils  pes  autemsa- 
n'eurent  point  de  honte    d'en  cher-  cerciocum,ôc 

,  1      r  •  rr         omne  conci- 

cher  par  tout  de  taux  ,  qui  eullent  Hum ,  quz- 
néanmoins    affez  de   vraifemblance  Sebantrt. fal" 

....  lum  ccltuno- 

pour  colorer  la  calomnie  par  une  ap-  ninm  courra 
parence  de  droit.   Mais   ce  qui  elt  Jefi"?weœn 

1  .  a  morn    crade- 

convainquant  pour  1  innocence  de  rem  :&  non 
Jésus  ,  quoique  plufieurs  faux   té-  ,:^cncrunc  > 

.         r  *•       ,  i         Çp  .,  cura      mulri 

moins  fe  prelentaflent  ,  ils  ne  pu-  faifl  teftes  aè- 
rent jamais  trouver  contre  lui  des  cciniïcnt- 
charges  qui  allalfent  à  la  mort.  Ce  c  Muicje. 
n'eft  pas  que  plufieurs  ne  dépoiallent  nûn  teftimo- 
contre  lai ,  pat  exemple  ,  qu'il  avoit  tcV^Z- 
violé  le  fabbat,  qu'il  avoit  condamné  veii'us  eum, 

1      t  J      \  A    "C  I  IL       C     &  convenien- 

la  Loi  de  Moite;  mais  leurs  dépoli-  da  tcftiœonia 

tions  n'étoient  pas  funSfantes  pour  le  n  on  crant. 
faire  mourir. 

On  en  peut  juger  par  deux  faux     a. Novir% 

Eij 


ioo  Analyse 

a.  i6.  b.  14.  témoins  ,   qui  s'étant  préfentés  les 

C.zi.  D.  18.    ,         •  j>1     r  >l    1     • 

derniers,  depolerentqu  ils  lui  avoienc 

jnèautemve-      .••    »■  >-i  w        •        1 

mrunt    duo  oul  dire  »  4Ll  ll  pouvoir  détruire  le 
faiiï    telles ,  temple  de  Dieu  ,  ce  qui  étoit  une 

B.  &.  fuisen-   •  -  1    1  0,1  t_A^-       J 

tes,     falfum  lmPiete    >      &     *e    reDatir    dlMS    trois 

teftimonium   jours  ,  ce  qu'il  ne  pourroit  que  par 

ferebam    ad-  r      j  ■       •        \         C  ' 

verfus    eum  art  magique  :  Je  détruirai  ,   lui  rai- 
dkentes:       foient-ils  dirent,  ce  Temple  bâti  de 

Quoniamnos    ,  •        /        ;  c     j  ..„    • 

audivimus      >-a    main  des  hommes  _,   cy  dans  trois 
eum    dicen-  jours  j'en  rebâtirai  un  autre    où    la 

tem:  A.  Pof- /        .     '  y  ,  y  j 

fum  deftrue-  main   des    nommes    n  aura  point  de 

re     templum  par£, 

trid'uum  re*-      C'eft:  cette  prédiction  obfcure  qu'il 
ditîcareiiiud  aVoit.£iite  trois  ans  auparavant ,  tou- 

B.  Egodiiîol-     .  ,  ,.,/,  j  . 

vam templum  chant    lii  mort  qu  ils  lui  dévoient 
hoc  manu  fa-  donner,   Se   à  laquelle   ils  travail- 

ôum ,  Se  per  n        h  /-»       ' 

triduum    a-  loient  actuellement.  Ce  témoignage 
liudnonma-  néanmoins  étoit   doublement  faux  , 

nu  hi&um  x-  T^  ,  .  ,..,,. 

dificabo.  i°.  Dans  les  paroles  qu  îlsalteroient. 
Car  Jésus  ne  s'étoit  pas  chargé  de 
la  deftruction  du  Temple,  mais  feu- 
lement de  la  réparation  de  celui  qu'ils 
auroient  détruit. 

1.  Dans  le  fens  ;  ce  qui  étoit  la 
principale  falsification.  Car  ils  attri- 
buoient  au  temple  matériel  ce  que 
Jésus  avoit  dit  de  fon  corps  ,  com- 
me du  temple  de  la  Divinité.  Mais 
Et  non  état  quand  il  eut  été  vrai,    il    n  eut  pas 

conveniens     été  fuffifant  pour  le  faire  condamner 

teliimoniura     \  %  \       1  /    \  •  •         •  .« 

iiiorum.       a  la  mort  j   la  déclaration  vraie  ou 


de  lTEvang.CH.  CXXXV1II.  lot 

fau(Te  que  chacun  fait  de  fon  pouvoir, 
ne  fait  tort  à  perfonne. 

Comme  Jésus  ne  répondoit  Et  exurgeû$ 
point ,  le  Grand-Prêtre  qui  ne  vou-  fummus  Va- 
loir pas  perdre  le  fruit  de  ces  témoi-  4^' toter- 
gnages  qu'il  méprifoit  lui-même,  fe  rogavk  Je. 
leva  brufquement  ,  tk  lui  demanda  ^^  rèfponl 
s'il  n'avoit  rien  à  répondre  aux  faits  des  qaid- 
dont  on  le  chargeait.  Mais  Jésus  ^tibiob- 
n'oppofa  que  le  filence  à  ces  accufa-  Hciuntut  ab 

•     j-  j  /  r  t?'1  his  •  Ule  mu- 

tions indignes   de  reponie    :    ht  il  tem  tacebac , 

lailTa  Caïphe  ,  &  tous  fes  autres  Ju-  &  n'^  «f-. 

ges    dans    toute    la    liberté    de  les po1 

faire  valoir   autant    qu'il  leur  plai- 

roit. 

On  pourroit  s'étonner  pourquoi 
les  Prêtres  $c  les  Phariliens  5  qui  dès 
long-tems  avoient  réfolu  ,  à  quelque 
prix  que  ce  fût  ,  de  perdre  Jésus  , 
n'ayent  voulu  le  faire  que  fur  des 
dépofitions  de  témoins ,  qui  ne  fuf- 
fent  ni  ouvertement  fauffes ,  ni  en- 
tièrement frivoles;  puifque  tout  pré- 
texte étoit  plus  que  fuffifant  pour  des 
gens  comme  eux  qui  avoient  juré  fa 
perte. 

Deux  raifons  les  obligèrent  à  cet- 
te formalité.  La  i .  fut  le  foin  de 
leur  honneur  qu'ils  avoient  à  ména- 
ger ,  &  la  crainte  de  paffer  plutôt 
pour   les  bourreaux    de  l'innocence 

Eiij 


îoi  Analyse 

A.itf.B.14.  opprimée,  que  pour  les  juftes  ven- 

*.n,D.iS.      rr         1      1    ^D    i-    •  util  •    r 

geurs  de  la  Religion.  11  fallut  ainli 
couvrir  leur  haine  d'une  fautfe  ap- 
parence de  Jugement  ôc  de  procé- 
dure juridique.  La  2.  fut  que  pour 
fe  difculper  de  fa  mort  devant  Dieu 
3c  devant  les  hommes,  ils  ne  vou- 
lurent point  le  faire  mourir  par  eux- 
mêmes.  Us  déférèrent  volontiers 
cette  commirTion  à  Pilate  ,  avec  tout 
le  crime  devant  Dieu,  &  toute  Phor- 
reur  devant  les  hommes  que  cette 
mort  leur  devoit  attirer.  Or  ils  pré- 
voyoient  bien  que  Pilate  ne  condam- 
neroit  pas  à  la  mort  un  homme  aufli 
fameux  que  Jésus  ,  fur  des  accusa- 
tions frivoles  j  il  lui  falloit  quelque 
caufe  plusfolide  que  des  accusations 
tirées  de  leurs  traditions  &  de  leurs 
cérémonies. 

Le  texte  de  faint  Luc  nous  donne 
lieu  de  croire  que  le  confeil  des  Juifs 
ne  pouvant  rien  avancer  centre  Jé- 
sus ,  chacun  fe  retira  jufqu'au  ma- 
rin ,  pour  fe  donner  quelque  repos, 
&  le  loifir  de  lui  drelfer  quelque 
nouvelle  batterie  ;  &  peut-être  que 
pour  être  plus  prêts  à  rentrer  dans  le 
confeil ,  ils  palferenr  chez  Caiphe  le 
relte  de  la  nuit  ,  arln  de  terminer  au 
plutôt   cette  grande    affaire    qu'ils 


DE  l/EvANG.Ch.CXXXVllI.  I05 

avoienr  lailfée  imparfaite.    Ils  aban- 
donnèrent cependant  Jésus  à  la  merci  qui  'ceneba;u 
des  valets ,  qui  lui  rirent  fourTnr  tou-  wwa  ,  UU*- 

,  1    l         ,  1  -1  deban;ci,cse« 

tes  les  indignités  ,  dont  ils  purent  aen:cs  .  & 
s'aviser.  Ils  le  frappèrent  d'abord  à  vgfaKom 

,  rrr  .  r     .  eum&percu- 

coups  de  poing',  eniuite  pour  le  jouer  tiebanc  fa- 
de ia  qualité  de- Prophète  ,  ils  lui  çiemejus,  & 
banderenr  les  yeux  avec  un  mouchoir,  banc  cum,  di- 
te en  lui  donnant  des  fcmfflets  ou  des  c?nt"  :  Pro" 
r        1  r  n        l     -r     Phetlfa    Su,s 

coups    iur    le    vilage  :   Fropnetije-  eft  quiteper- 

nous  .  lui  difoient-ils  ,  qui  t'a  frappé.  CXXÏY  '  ^J1*? 

IT  «    .    1  ,-  1        •     .  mulca     blal- 

Jls  lui  dirent  enhn  toutes  les  injures,  phcmantes 
&  vomirent  contre  lui  tous  les  blaf-  cllcebanc    in 
ph'mes  que  le  démon  leur  put  fug- 
gérer. 

4.  Examen  &  condamnation  4.  Examen 

Ào    loCr  &  condemna- 

de  JeJUS*  tio. 

Le  jour  commençant  à  paroître  ,  Et  ut  fac- 
iès Sénateurs  ,  les  Princes  des  Pic-  convenu «ne 
très  &  les  Docteurs  de  la  Loi  fe  raf-  fcniorei  p!e- 

r       Ll  o  '    T  bis  ,  ôc  1-rin- 

iemblerent  ,  te  ayant  mené  Jésus  ci  '  Saccr_ 
dans  leur  confeil ,  ils  lui  dirent  d'à-  Awinu  ,  & 
bord  familièrement  pour  le  faire  par-  duxcfunt  u- 
ler;  Si  vous  êtes  le   C  lui  fi  ,    dite?- le  lum  in  con- 

,    .  ii  1      •/■  1      cih'.im  fuuin, 

nous  clairement.  Us  s  avilerenr  de  dicences  :  si 
cette  demande  à  laquelle  ils  jueerent  tueschriâuc 

,•1  x  1       /  1         du  nobii. 

qu  il  ne  manqueroir  pasdeiépondre, 
te  dont  l'aveu  leur  furîiioit  pour  le 
condamner. 

Eiv 


104  An  A  LYS! 

e.'  x^.'d!  \t.  .    Si  je  vous  l'avoue  j  leur  répondir- 
ïtaitillis:  *1j  vous  ne  me  croireipas  _,   &  fi  je 
sivobisdixe-  yeux  vous  le  prouver  par  les  quef- 

ro  ,  non  cre-      .  r        •     » 

«letis  mihi  :  fi  ^o/?j  que  je  vous  rerois  a  mon  tour , 
aurem  &  in-  rowJ  ^  prendre?  pas  la  peine   de  me 

terrogavero  ,  ,    -  r     l  l  j  /»        ■ 

non  refpon-  répondre  j  &  vous  ne  m  elargire^ 
debicismihi,  ^j  pour  cela  :  il  efi  donc  inutile  aufïî 

neque  dimic-  £         F.  ;  n     1  r    • 

tetis.  que  je  vous  reponde.    II   les   acculoit 

par-là  de  ne  chercher  dans  cette  ques- 
tion ,  qu'un  prétexte  pour  le  con- 
damner ;  aufli  il  leur  répondit  en 
cette  manière  qui  les  lailToit  encore 
en  fufpens , .  pour  ne  pas  donner  lieu 
de  croire  qu'en  donnant  cet  aveu 
fans  néceffité  ,  &  fur  une  interro- 
gation familière  ,  il  cherchât  de 
gayeté  de  coeur  i'occaiion  de  mou- 
rir. 

Cette  réponfe  néanmoins   en  di- 

foit  allez  pour  les  obliger  à  n'en  de- 

.  -  -  .     meurer  pas  là.  Aufli  Caïphe  ne  lai(Ta 

A.EtPnn-  Y  Y 

cepsSacerao-  pas  échapper   cette  occalion    de    le 

%£££  F°u|Ter  '»  mais  »|  s'efforça  par  cette 

&  dixit  ei:  interrogation  juridique  de  tirer  de  fa 
P«DdeLm°vI!  bouche  une  confeiïion  plus  prccife , 
vum  ,  ut  di-  Je  vous  ordonne  ,    lui  dit-il  _,  par  le 

cas  nobisfî  tu     t-x  •  •  j  j-„,   /;  *+*~ 

es  chtïitus  Dieu  vivant ,  de  nous  dire  Ji  vous-etes 
niiusDei.B.  [t  Chrijl  le  Fils  de  Dieu.  Etes-vous 
FUiusDd bc-  le  Chrijl ,  le  Fils  de  Dieu  éternelle- 
nedtâi  ?   A.  ment  béni  ?   Vous  l'avez  dit  9    lui  ré- 

Dicic  illi   Je-  i-      t  c       j  t  1      H    1 

fus:  Tu  dixi.  pondit  Jet  us  ,    &   dcjonnais  Le  tus 


de  L'EvANG.Ch.CfXXXVHI.  105 

de  l'homme  fera  affls  à  la  droite  de  la  ai e- lxho* 

•rr  j     n-  A     iC     É  auteme-nh- 

puijjancede  Dieu.  Aulii-tot  tous  en-  iiUS  hominis 
femble  prirent  la  parole ,  &  pour  lui  fedens  à  dcx* 

c  .  rr  r  f         1  /        tns     vircucis 

taire  confirmer  cet  aveu ,  ou  iuppleer  Dci.     Dixe- 
ce  qui  pouvoit  manquer  à  cette  ex-  ruQt    Luceni 

rr     *      rr         *         j  1     ■    J'  omnes.Tuer- 

preiiion  :  Vous  êtes  donc  ,  lui  dirent-  g0  es  Filins 
ils  9  le  Fi/s  de  Dieu  ?  Fous  l'aver  dit  Jeiï<*ui.a.it! 

1  J*     -1        •      1     r  •  JE      Vos   dlcms* 

encore y  leur  dit- il  3  je  le  Juis  en  effet,  quia  ego 
Il  efl;  vrai  que  l'état  où  je  fuis  n'a  au-  fura* 
cune  proportion  avec  cette  dignité 
infinie.  Mais  je  vous  le  répète  :  Un  a.  Verum- 
jour  vous  verrez  vous-même  le  Fils  tamen  dico 
de  l'homme  afîis  a  la  droite  de  Dieu  d6  videtmii 
tout-puiirant  ,   Se   venant    dans    les  FiHum ,homi- 

,   l     ,        •    1     Ti  1     •      1       •  |      nis  lederuem 

nuées  du  ciel.  11   parloir  du  jour  du  à  dcxcrisvir- 
Jueement  ,    où  ces  Juçies    injuftes  ™ns  .  Dei  * 
comparoitront  ians  doute,  &  le  ver-  jn     nubibus 
ront  de  leurs  propres  y  eux.  Il  oppofoit  cccl1, 
l'état  de  fa  gloire  à  l'état  de  fon  hu- 
miliation ,   Ôc     le    jugement    qu'il 
exercera  fur  eux  à  fon  tour,  au  juge- 
ment  in  j  ufte    qu'ils  ufurpoient  fur 
lui.  11  a  rendu  cette  confelîion  ,  pour 
fervir  d'exemple  a  tous  les  Martyrs  , 

r      ,-,       n    r  ,  J  TuncPnn- 

puilqu  il  eit    mort  le  premier  pour  cepsSaccrdo- 
îa  même  vérité  qu'ils  ont  confeiTée,  tumfcidicve- 

.  .  ni  J  '1  itimentafua, 

oc  pour  laquelle  us  ont  donne  leur  dicens  :  Biaf- 

\\Qt  phsmavit  ; 

j  ~  r-        j  n  *        J'u-      r       »       ^uid    adhuc 
Le  Urand-rretre  déchira  les  vête-  egemus  cefti- 

mens   de  coleie   ,    en    fe   donnant  bjs       lic.e 

j.r        rjiJTr  rr  mme  audiius 

diipenie  de  laderenie  exprelie   que 

E  v 


io6  Analyse 

à.  zen  14.  lui  en  faif0it  la  Loi.  Il   s'écria  :  il  a 

L.  i  1.  1).  18. 

blafohemi-      blafphcmé  !  Quel   befoin  avons- nous 

am:quidvo-  déformais  de  lui   confronter  des  té- 

isvidetur?    mo-}ns  p      Vous  venc%  d'entendre   le 

Ar  iin  ref-  blafphtme  contre  Diea  ,   dont   il  fe 

pondencesdi-     ,.  ",'     t ,. ,  .       „/    .  , 

xerunc : Rcus  ciitlerils  :  contre  le  Chrut   ,    donc 
cft   *H^tw  ;  il  ufarpe  le  nom  <Sc  les  droite.  Apres 

C  Qtiil  ad-  *■  -T 

hue  defïdera-  cela  que  vous   en  femble  î  Ils  opine- 
mu  s  teitimo-  rent  rous  a  Ja  mort  ;  Pourquoi  s  di- 

nium    î     iph  7  ,        : 

enim  audivi-  rent-ils  ,  chercher  d  autres  témoigna- 
mus  de  orée-  ^j?  /2o^j  venons  d'entendre  fon  cri' 

jus.    B.    Qui   ^  •* 

omnes    con-  rae  ^  fa  propre  bouche.  Et  far  cela 

demnaverunt 
eum  effet  ré- 
uni morcis        mort. 


ils  jugèrent   tous    qu'il  méritoic  la 


f.  Sputa  , 

colaphi  y  uiu-     ^  §  Crachats  _,   foufflets  ^  outrages. 

A.  Tune  B.  ai  -t         j  -il 

cœperuiu  Alors  ils  n  eurent  point  de  honte 

quidam conf-  d'in^er  l'infolence  de  leurs  valets. 

puere.  ,  T  1 

a.  in  fa-  Les  uns  lui  crachèrent  au  viiaçe.les 
ciemejus,  b.  autres  iuj   donnèrent  des   coups  de 

6c  velare   fa-  r, 

ciem  ejus  ôc  poing  par  la  tête  ,  les  autres  lui  ban- 
coiaphis  es-  ^rent  les  yeux  ,  8c  lui  donnant  des 

clere  :  A.  Ain  /  '.  . 

aurempalmas    foufTletS  ,     US    lui  dlloieilt  .'     Cnritt  , 

!"  5acilcm„ V  prophétife-nous  qui  eft  celui  d'entre 

iusdedcrunr,    I       *         .    }  I 

dicences  :        nous  qui  t  a  rrappe  :  les  valets  le  me- 

nobis  chrif-  lant  avec  leurs   maîwes  dans  ce  jeu 

te,  o;uis  efl  inhumain  ,  lui  donnoient  des  fouf- 
Et!  b.  &mi-  ^ecs  ^ans  Par^ei%  comme  pour  le  jetter 
niihi    alapis  d;  ns  l'erreur  par  cette  diviiion  }  s'il 

eum      C£ue-      «  1      j 

banc.  eLt  voulu  deviner. 


de  l'Evaug.  Ch.  CXXXIX.  107 
11  ne  faut  pas  confondre  ces  outra- 
ges du  matin  avec  ceux  de  la  nuit. 
Car  ceux  ci  font  attribués  aux  gens 
qui  tenoient  Jésus  :  Viri  qui  tene- 
bant  ïllum.  Et  ceux-là  aux  Juges 
mêmes  qui  venoient  de  le  condam- 
ner :  Et  cxperunt  quidam  confpuerc 
eum.  D'ailleurs  faint  Marc  diilingue 
dans  les  féconds  outrages  la  part  des 
valets  de  celle  des  maîtres  \  lorf- 
qu'après  avoir  dit  que  quelques-uns 
commencèrent  à  le  falir  de  leurs  cra- 
chats ,  il  ajoute  que  les  valets  lui 
donnoient  des  fourllets. 


CHAPITRE     CXXXIX. 
Renoncemens  de  Pierre. 

1.  Premier  Renoncement. 

IL  faut  retourner  fur  nos  pas  juf- 
qu es  dans  le  Jardin  pour  rappor- 
ter l'hiftoire  de  ce  qui  arriva  a  Pier- 
re. Après  avoir  remis  fon  epeedans 
les  mains  de  quelque  autre,  il  fui- 
voit  Jelus  de  loin  ,  par  un  mouve- 
ment mêlé  de  l'amour  qui  l 'animoir, 
&  de  la  cm  m  te  de  la  mort  qui  le 
retenoit.  11  fe  joignit  à  un  autre  Dif- 

E  vj 


14. 
18. 


Camit 
CXXXIX. 

A.  16.  B. 
C.  il,  D. 

Kegationcs 
VetrL 

1.  Prima 
negatio. 


Perrus  au- 
tem  fcqucba- 
tur  eum  à 
longé  , 


D.  6c  alius 


i©8  Analyse 

a.  i6.  b.  14.  eiple  ,  qui  éroit  connu  du  Grand- 
difdpulus. i  ietre  y  &  clul  a  la  raveur  de  cette 
Difcîpuius     connoiirance  entra  avec  Jefus  dans 

ET"  notu;  la  faile  de  fa  maifon.  Lorfqu'il  fut 
Pontifici ,  &  entré  ,  la  portière  qui  ne  connoifïoic 
je^Tn'aai-  P*s  Pierre  ,  lui  ferma  la  porte,  &  il 
um    Ponttfi-  demeura  dehors  ,   attendant  qu'elle 

cis.  »  1       >  r 

s  ouvrit  par   quelqu  autre  occalion  , 

Petrus  au-  qui  lui  donnât  lieu  d'entrer.  Ce  pre- 
temftabatad  mier     Difciple     s'appercevant     que 

oitium  tons.       .  »  r  *,    .    .       r       .    x  , 

ixivic  crgo  Pierre  ne  l  avoit  pas  iuivi ,  lortit  de 
aiicipulus  a.  ja  fa|[e  pour  parier  a  }a  portière  ,  ÔC 

hus,  qui  erar  r        .  r  r 

notus  Ponti-  lui  ayant  rait  ouvrir  ,  Pierre  entra  a 
oftiar^dlX&  ^a  con^dération  ,  &  s'avança  jufques 
iutroduxit     dans  la  falledu  Grand  Prêtre. 

Petrum.  Qn  n£  f^  p0jnr  ^ul  £to{:  CQ  £)j{l 

ciple  introducteur.  On  en  peut  feu- 
lement affurer  ces  trois  circonftan- 
ces  j  i°.  Qu'il  n'étoit  point  du  nom- 
bre des  douze  ,  puifqu'il  étoit  connu 
chez  le  Grand- Prêtre  ,  &c  qu'il  en 
étoit  même  confédéré.  2.  Que  parla 
même  raifon  il  étoit  Difciple  fecret, 
autrement  il  eût  couru  le  même  péril 
que  Pierre.  3.  Qu'il  devoit  être  une 
perfonne  de  marque  par  fa  qualité 
ou  par  fes  richeflTes.  Quel  qu'il  foit, 
il  rendit  quoiqu'innocemment  un 
mauvais  office  à  Pierre  ,  qu'il  mit 
dans  Toccafion  de  renoncer  trois  fois 
fou  Maître.  Ses  renoncemens  allèrent 


m  l'Evang.  Ch.  CXXXIX.  105? 

toujours  en  enchériiïant  l'un  fur 
l'autre.  Le  1.  fut  un  fimple  menfonge. 
Le  II.  y  ajouta  le  ferment.  Le  111. 
ajouta  encore  au  parjure  un  nouveau 
poids  ,  ôc  ce  fut  une  horrible  impré- 
cation contre  lui-même.  Voici com-  d.  dîxîc 
roent  la  chofe  fe  pa(Ta  3U  *£ 

I.  La  fervante  qui  fit  entrer  Pier-  fia  b.  unact 
re  ,  fut  frappée  d'abord  de  l'ait  de  ZfZZZ 
fon  vifage  qu'elle  crut  reconnoître  ,  tis.  d.  Num- 
&  lui  dit  en  partant ,  avec  quelque  Jj^te  « 
doute  :  N'êtes  vous  point  des  Difci-  hominis  ifti- 
ples  de  cet  homme  ?  11  pafTa  fans  lui  aU4m  f^u! 
répondre  comme  s'il  ne  l'eût  pas  tus  eft  eum 
entendue  ,  &  entra  dans  la  falle  du  \.nl  fattoîm 
Grand-  Prêtre.    Cependant  les  gens  atrium  fum- 

ai       •      l      j  «  r   -i   mi    Sacerdo- 

e  ceux  qui  etoient  dans  le  conleil  tis.   D    Sca. 

firent  un  feu  dé"  braife  au   milieu  de  bant    auceai 

1      r  11  ••!  r  *r   *1  C    *J        o     lervi  &  mini- 

la  ialle,  parce  qu  urailoit  rroid  ,  &  ftri àd ptunag 

s'étant  allis  à  l'enrour  ,  ils  fe  chauf  quia  frigus  e- 
foient  en  attendant  leurs  maîtres.  facicbant  fe. 
Pierre  fe  trouva  au  milieu   de  cette  c-    Accenfo 

,  ,  n-       1  r    auremignein 

troupe  ennemie  ,  &  s  étant  aliis  il  le  medîo  ami 
chauffoir    comme   eux  ,    pour    voir  &  circumfe- 

,,        .  ir-  ..  .  .     l  j  dentibus    u- 

quelle  îlluc  ou  quel  tram  prencroit  ijs ,  erat  re- 
cette affaire.    Ainfi  il  faut  remarquer  "usinmedio 

,  T  ,  l  .         corum    A.  uc 

que  pendant  que  Jésus  eroit  avec  les  viderct  fi- 
Prêtres  &  tout  le    confeii  dans   une  nem,B.&fe- 

1        L      L  r»  t  u      dchac      cura 

chambre  haute  ,  Pierre  etoit   en   bas  minifiris    ad 

dans  la  première  falle  qui   donnoit  jsjem  ; &  cra* 

.        r  1  leraciebac  le. 

ûanslaCour.  Etcùmeffet 


no  Analyse 

a.  KîB.14.      La  portière  y  avoit   fuivi  Pierre  , 
c.  ix.d.  18.       ,,    r  c\,  ,  s  ,.r    y  y 

D.r.     a  f     ex  1  ayant  conlidere  tout  a  loinr  a   la 

Petrus  A.fo-  7 

nsB.  inatrio  lumière  du  reu  ,    elle  le  conhrma 

acccffiTad  c-  ^ans  ^on  °pini°n>  &  dit  à  tous  ceux 
umunaancil-  qui  étoient  là:  Cet  homme  étoit  avec 

vidiiïl-? Cpï>  ^'  >  ^  s'adrellant  à  lui-même  ,  elle 
trum  c  fc-  lui  foûtint  qu'il  avoit  été  avec  Jtsus 
tST&  dejÔaWte  11  n'y  eut  pas  moyen  de 
fuifTec  intui-  {d>ïç  encore  femblant  de  n'avoir 
cientem  Xe  point  entendu  :  il  fallut  néceifaire- 
c.  dixù  .  Et  ment  répondre  j  mais  comme  il  n'y 

hic    cum  i!!o  1  1  >  1 

erat  A.Ectu  avoir  point  de  preuves ,  le  parti  qui! 
cum  jefuGa-  put  fut  de  niertout ,  Femme  _,  dit-il, 

lilxo  etas.         •  p  •  •         1     r      t\  •  r  •     1 

je  ne  Juis point  dejes  Dijciples  ,  je  ne 
gavit  coram  &  connoïs  pas  même  _,  cv  j e  ne  fçai 
omnibus,  en-  abfohmentce  quevous  me  voulez  dire. 

ce  n  si  O .  Non  *        .  .  *• 

fum.c.Mu-  Comme  il  le  vit  découvert  ,  il  crai- 
Kf!l«noan?*  snit Ja  fuite,    &  perfuadé  qu'il   ne 

▼nllum,   B.  p  l        n  1  -i    r 

neque    fcio,  railoit  pas  bon  la  pour  lui  ,   il   lortit 

nequ,-    novi  ^Q  |a  falle  dans  la  cour  nom  s'en  aller, 

■quitHicas.Et  y»      a     1  1       r 

exiirfoiasan-  <x  auln-tot  le  coq  chanta  pour  la  pre- 

teaii.im,,*   mieref0js. 

gallus  canta- 

vir. 

2.  Secundo.  2.  Second  renoncement. 

negatio. 

a.  Excnntc       H,  Mais   maiheureufement  pour 

AUtem  îi.-o  ja-  1  r  .     r, 

miam    vMh  lui ,  une  autre    tervance  entroitdans 

cumaiia  an-  la  folle  commeil  en  forroir  ;&  Pavant 

ci  1  la      &.  J 

bis  qm  erant  bien  remarqué  ,  elle  du  à  c  jux  qi  i  y 
ibi:  ôc  hice-  étoient.  que  cet  homme  là  avoit -été 

rat  cum  Jefu  T  1      vr  1      /^ 

wazareno.     avec  Jésus  de  JNazareth.  Ce  contre- 


de  i/Evang.  Ch.  CXXXIX.  I  I  I 
tems  lui  fit  changer  de  mefure  , 
&  l'obligea  de  rentrer  pour  ne  pas 
faire  paroître  qu'il  eût  voulu  fuir 
après  certe  aceufarion  *,  car  il  crai- 
gnoir  que  la  portière  qui  i'avoit  re- 
connu refufât  de  lui  ouvrir  la  porte  , 
&  que  cependant  fa  fuite  ne  le  fir 
palfer  pour  convaincu.  Il  fallut  donc     D.  Eratau- 

r  il  tem       Simon 

le  remettre  avec  les  valets  ,  comme  Petrus  uans, 

pour  fe   chauffer  .    de   faire    bonne  &caletacicns 
r  •  fe- 

mme. 

Il  n'y  fut  pas  long-tems  ,    qu'un      c.  Etpoft 

de  la  troupe  lui  dît  :  Fous  êtes  donc  p^nTn  *~ 

de  ces  gens-là  ?    Les    autres   fe  joi-  um  ,  dixit  : 

gnirentà  lui  ,   &c  dirent  à   Pierre  :  ^V^ufxï 

A\OUC{    la    vérité  :  N'ête^-VOUS     pas   runc  ergo  ei  : 

dunomèredefes  DifcipUs  ?  H  le  nia  î^^ 

de  nouveau  ,  &  p joutant  le  ferment  pulisejuses? 

r  -\r  j  •        i        •         >         B.  A    il  le  i cc- 

au  menfonge,  Aon  ,   dit-il  ,  je  n  en  rum  n^gavic 

fuis  j^oint  j  &  je  n  -  cannois  nullement  a.  cum  jura- 

cet  homme.  Il    fe  paffa    depuis  cela  Sdlxir'Ndb 

environ  une  heure.,  comme  pour  lui  f"T-".A.  Non 

di      t     -.-       i  i  a       novi     homi- 

onner  ie  loilu  ce  rentrer  en  lUi-me-  mm  .  r.  f.0fl. 

me ,  &  de  refléchir  fur  ce  qu  il  venoit  F,,,':!,,in  .  f • 

j       ,•  ,  \       r  j  inr    '•  illo  fa- 

de dite  ;  mais  dans   la  frayeur   dont  a0  qtuiï  ho- 

il  étoit  troublé  ,  il  n'en  étoit  plus  «»»*«», 

capable. 

T  roi  fie  me  renoncement.  *:  7Vm* 

negatio. 

III.  Un  autre  du  nombre  des  fer-  alius  quidam 


in  Analyse 

cl  Îi.'d.  \t.  viteurs  du  Grand-Prètre  entra  dans 
d.  ex  fervis  la  falle  y  c'étoit  le  coulm  de  celui  à 
Pontificis  co-  qUi  Pierre  avoit  coupé  l'oreille  ,  qui 

gnatus  cjus  ,     f.  ,  .        r  a  rr      ' 

cujusabfcidit  dit  tout  haut  en  le  voyant  :  A\jure- 
Petrus    aun-  mcnt  cet  homme-là   étoït  avec   lui  , 

culam  C.af-  .       a  ,  , 

firmabat ,  di-  car  il  ejt  de  Gaulée,  Pierre  le  ma  : 
cens:  veièôc  Mon  ami  ,  lui  dit-il  »  je   ne  fcais  de 

hic  cura  îllo  .  JJ.  Ai  r 

«rat,namôc  quoi  vous  me  parle^.  Mais  il  ne  le 
Gahiaeus  eft.  rjnt  pas  bien  réfuté  par  cette  défaite: 

Iterum    ergo  K   f  ,..  C,         .  ' 

negavic ,  c.  il  lui  louant  qu  il  1  avoit  vu    avec 

&  au  Pecrus:  J^  ^ans  Je  Jar(|in  .  &  }eS  autres 
Homo,  nef-  .  i>-  n- 

cio  quid  di-  quittant  leurs  places  1  invertirent  : 
cis.  Dieu  ei  :  Certainement  ,    dirent- ils ,  vous  êtes 

Nonne  ego  ce  J  t    ' 

vidi  in  horco  de  ces  gens-là  j  car  déjà  vous  êtes 
Rurfus  A.?ac-  ^e  Galilée  _,  &  votre  langage  vous  tra- 
ceulrunc  oui  hit  malgré  vous.  Alors  il  commença 
dfxenîiu  Pe-  *  ^tUre  d'horribles  imprécations  con- 
tro  :  Vlm-c  &  rre  lui-même  ,  &  à  jurer  qu'il  ne 
nam  êî  GaH-  connoilloit  point  celui  dont  on  lui 
laeus  es,  A.parioit    }    de    pendant   qu'il   parloit 

loquela     cua  i  i  i      r  j 

manifeftum    encore  le  coq  chanta  pour  la  ieconde 

refacic.Tunc  fois. 

cœpir    der^'f-         \      r  '  r  i 

tari ,  b.  ana-  ^e  leigneur  le  retournant  regarda 
themati'are,  Pierre  d'un  œil  de  miféricorde  (  car 

A.  &c  jurare ,  -i  •      i  *  i 

quia  non  no  "  ne  pouvoir  le  voir  des  yeux  du 
vijTec  homi-  corps  ;  )  &  aufli  tor  Pierre  fe  fouvint 

nem ,  B.quia    i     S  I  r  i    • 

nefeio  homi- de  la  parole  que  Jésus  lui  avoit 
nem     iAum  dite  ,  qu'avant  que  le  coq  eût  chanté 

quem  dicicis      ,  r    •        *i  i  •  •     r   ■ 

ii  ttatim  c.  deux  rois ,  il  le  renonceroit  trois  rois. 
adhuciiiolo-  il  fortjt  <je  ia  faue  &    je  ]a  majfon 

quentcB  gai-      .  ,  o       1       i 

Ju«     iccuiHi  pleurant  amèrement  >    &  il    repara 


de  i/Evang.  Ch.  CXXXIX.  113 
par  tes  larmes   le  tort   qu'il    avoir  cantavît.  c. 

•T.  .  r  l        x       ,,.        Et  convenus 

tait    par  les    renoncemens   a    1  in-  Dominusref- 
nocence  de  Jésus  ,  dans    l'efprit  de  Pexk    D  p5; 

.     ,  CM  >']    /  trum  >  B'    ^ 

ceux  qui  eroienr  perluadesqu  netoit  recordatus 
fon  Difciple.  e\ .  Petru* 

â  n       ■  i  r  1  •  n  •  verbi      quod 

Au  refte  il  raut  diftinguer  ces  re-  dixerat  ei  je- 
noncemens  par  les  divers  tems  où  fus  :  J™?;* 
Pierre  fur  attaque  ,  &  non  par  le  cantct  bis, 
nombre  des  paroles  qu'il  prononça,  {,"/*£,  £et8£ 
Or  les  fervantes  ou  les  valets  revin-  grefTus  foras 
rent  trois  fois  à  la  charge  contre  lui,  PI!™|  flevlt 

C?  .  alllaXCi 

&  on  ne  peut  douter  qu'a  chaque 
fois,  il  n'y  ait  eu  plufieurs  réponfes 
de  part  &  d'autre. 


CHAPITRE     CXL.  cai.  cxl; 

A.  17.  B.  if. 

Jésus  livre  à  Pilate.  Mort  de  c-  m-'d.  i». 

T'irise  Jefus  Pila- 

Juua5,  ro      traduits. 

Mors  Juda. 

1.  /e/I'j  transféré  devant  Pilate.  1.  Chrifim 

ad     Pilatum 

A  Près  que  le  confeil  des  Juifs  eut  ^"J* 
aflouvifa  vengeance  fur  Jésus, 
ils  confulterent  enfemble,  le  matin,    A.i7-Mane 

, ,  -i     1      r  autem    iatto 

par  quelle  voye  ils  le  reroient  mou-  COnfiiium 
rir.  Il  s'en   préfentoit   deux.    La    1 .  inierum  om- 

'      •     J      1  J  ri  1       r      •    nés  Principes 

etoit  de  le  condamner  ielon  la  Loi  sacerdocum  „ 
à  être  lapidé  comme  blafphcmateur.  B.cumfemo- 
La    2.    etoit     de   le    traduire    au  bis,  &  uni- 


ii4  Analyse 

A.  17-  S-  if.  Tribunal    du    Gouverneur    de      la 

C.  ij.  D.  18.  n  o     j      i       r 

Province,  ôc  de  le  taire  mettre  en 

▼erfo    concî-  • 

lio,A  advcr-  crolx« 

fusjcfum,ut  Ce  qui  favorifoit  ia  première  eft 
traderenc.  4ue  *  exécution  le  remit  d  autant  plus 
furement  ,  fi  elle  dépendoit  d'eux, 
que  le  Gouverneur  n'en  connoîtroit 
point.  Au  lieu  que  s'il  en  prenoit 
connoilTance,  comme  il  devoir, félon 
les  nouveaux  Reglemens  des  Ro- 
mains, les  informations  traîneroient 
en  longueur  ,  ôc  cependant  les  amis 
de  Jésus  remueroient  ciel  Ôc  terre 
pour  le  fauver. 

Mais  plufieurs  autres  confédéra- 
tions l'emportèrent  fur  celle-là.  i .  Le 
droit  de  vie  ôc  de  mort  leur  avoir 
cre  ravi  par  les  Romains.  Ils  pou- 
vaient condamner  à  40.  coups  de 
fouet,  &  à  quelques  peines  de  moin- 
dre conféquence.  Mais  lorfqu'il  s'a- 
gilloit  d'un  crime  digne  de  mort , 
s'il  étoit  contre  les  Loix  générales, 
le  jugement  ôc  l'exécution  en  étoient 
réfervés  aux  Romains  :  s'il  étoit 
feulement  contre  la  Loi  de  Moïfe, 
les  Juifs  en  pouvoient  juger  ,  mais 
ils  ne  pouvoient  exécuter  leur  juge- 
ment fans  le  confentement  du  Gou- 
verneur de  ia  Province.  Ils  ne  pou- 
voient donc  fe  difpenfer  de   cette 


de  l'Evang.  Ch.  CXL.  11  j 
règle  ,  en  faifanc  mourir  Jésus- 
Christ  de  leur  propre  autorité  , 
fans  s'expofer  à  erre  châtiés  févére- 
menr  par  Pilace ,  ou  à  être  cités  par 
lui  devant  l'Empereur  ,  comme  s'é- 
tant  rendus  les  Juges  de  celui  dont  ils 
étoient  les  ennemis  déclarés. 

2.  D'ailleurs  ,  comment  pouvoir 
exécuter  en  public  un  homme  re- 
connu ,  au  moins  pal  tout  le  peuplej 
pour  un  grand  Prophète  ,  eux  qui  de 
peur  d'ctre  lapidés  ,  n'avoient  ofé 
l'arrêter,  lorlqu'il  prêchoit  d.ins  le 
Temple?  La  voie  de  Pilate  n  étoit 
point  fujette  à  cet  inconvénient.  Le 
peuple  ptompt  à  s'émouvoir  feroit 
retenu  dans  la  foumifl;on  par  l'au- 
torité du  Gouverneur  &.  par  la  gar- 
nifon  Romaine. 

3.  C'écoit  même  un  moyen  fur  de 
purget  leur  pourfuite  de  tout  foup- 
çon  de  haine  &  d'envie  ;  puifqu'un 
Juge  étranger,  à  qui  les  deux  partis 
étoient  indirlérens  ,  autoit  jugé  de 
Jésus  comme  eux  ,  &  l'aurou  fait 
exécuter  publiquement.  Après  tout 
il  l'exécution  faite  venoit  à  être 
condamnée  de  tout  le  rrc;nde  ,  il  leur 
feroit  aifé  de  fe  difculper  devant  le 
peuple  ,  en  remettant  toute  la  raute 
lur  Pilate,  fur  l'autorité  duquel  fe- 


n6  Analyse 

c  x7'd  T  ro^ent  f°ndés  le  jugement  de  mort  3c 
"  rexécution. 

4.  Quelle  infamie  ne  feroit-ce  pas 
pour  eux  ,  fi  un  jour  on  leur  pou- 
voit  reprocher  qu'ils  auroient  fait 
mourir  eux-mêmes  leur  Roi  ,  leur 
grand  Prophète  ,  leur  Meflie  ,  celui 
qui  leur  étoit  promis,  &  qu'ils  atten- 
doient  depuis  tant  de  fiécles  ?  Au 
lieu  que  du  côté  de  Pilate  ,  c'étoit 
feulement  le  fupplice  d'un  homme 
qui  affectoit  l'Empire,  &  fequalifioit 
le  Roi,  des  Juifs.  Cette  caufe  de  fa 
mort ,  le  Tribunal  d'où  fon  arrêt 
feroit  émané  ,  le  genre  de  fon  fup- 
plice qui  étoit  la  croix  ,  dévoient  le 
faire  paiTer  pour  un  fameux  criminel, 
obfcurcir  toure  la  gloire  qu'il  s'étoit 
acquife  jufqu'alors  ,  condamner  fon 
nom  &  fa  mémoire  dans  tous  les  fié- 
cles à  venir  ;  ce  qui  étoit  quelque 
chofe  de  plus  doux  à  leur  haine,  que 
fa  mort  même. 

5.  Enfin  ne  devoit-on  pas  compter 
pour  quelque  chofe ,  que  s'il  y  avoit 
quelque  péché  dans  cette  pourfuite, 
comme  cela  étoit  fort  poffible ,  Pilate 
lesendéchargeroit  heureufement de- 
vant Dieu,  pendant  qu'ils  jouiroient 
à  leur  aife  du  fruit  de  fon  injuftice  ; 
étant  défaits  d'un  homme  ,  dont  la 


be  l'Evang.  Ch.  CXL.  117 
cenfure  leur  étoit  formidable.  Il  eft 
aifé  de  voir  par  la  manière  dont  ils 
reçurent  la  facisfaction  de  Judas ,  que 
c'étoit  là  leur  fentiment  à  l'égard  de 
Pilate. 

Tant  de  confîdérations  l'empor- 
tèrent. Il  ne  reftoit  plus  qu'à  remé- 
dier aux  deux  grands  inconvéniens 
de  la  longueur  du  procès  ,  &  de  la 
brigue  des  amis  ,  que  Jésus  avoic 
même  parmi  eux ,  de  jufques  dans  le 
Confeil.  Pour  y  remédier ,  il  fut  ar- 
rêté ,  ie.  Que  tout  le  Confeil  fans 
exception  8c  fans  délai  iroit  le  con- 
duire chez  le  Gouverneur ,  &  deman- 
deroit  fa  mort.  2 °.  Qu'on  ne  fe  don- 
neroit  aucun  relâche  qu'on  ne  l'eût 
obtenue  ,  ce  qui  difficilement  pou- 
voit  être  refufé  à  leur  grand  nombre 
ôc  à  leur  autorité. 

Après  cela  tout  le  Confeil  fe  leva  ,     c-  *!•  E* 

o„  1  •  '    T  >l  furgens   om- 

et ayant  lie  Jésus   ,    qu  ils    avoient  niS  muhiui- 

laifré  fans  liens  pendant  fon  examen.  do  eorum,B. 

i     •    ,  .  il-      vincientes  Je- 

comme  pour  lui  donner  plus  de  h-  fumA.addu- 
berté  de  fe  défendre  ,  ils  le  menèrent  xcruvnt  eum 
de  chez  Caïphe  dans  le  Prétoire  ,  ou  m  prxcori- 
dans  le  palais  du  Gouverneur  >  de  ils  um].\  Al  &c 

I  .      >■  .  •in  tradiderunt 

le  muent  entre  les   mains  de  Ponce  roncioPUaro 
Pilate.   C'étoit  le  matin  du  Vendre-  lrxCldi'    D- 
01  auquel  ils  avoient  transfère  la  veil-  manè. 
le  de  Pâques  tu  des  Azymes.    Ec 


1 1 S  Analyse 

A.V17 .  b.  iç.  comme  le  foir  du  même  jour  ils  de- 

C.  13.  D.  18.         .  -,  .  ri   r  l    1      -i 

voient  manger  1  Agneau  Paichal ,  ils 

Et  ipfi  non  _»  °     •         1  i      r»    '       •         i 

introierunc    n  entrèrent  point  dans  le  Prétoire, de 
in      pr^to-  peur  de  fe  fouiller  ,  &  de  fe  mettre 

xium ,  utnon  1  j>  '  i         m /i  t      r»* 

concamina-    nors  d  etac  de  célébrer  la  Paque  ;  ce 
rentur     fed  qui  n'étoit  néanmoins  qu'une  tradi- 

ut  manduca-  r>i         r    •  x  r    ■  i 

rem  Pafcha.  tlon  Pnarifaïque.  Mais  en  demeurant 
dehors  ils  firent  conduire  Jésus  par 
quelqu'un  de  leurs  gens  dans  la  falle 
du  Prétoire. 

1 .  Mors  7«-  2  •  Mort  de  Judas. 

.    _  Cependant  le  malheureux  Judas 

A.    Tune         .    ,  »    .  .  , 

vidensjudas,  qui  etoit  toujours  aux  écoutes   j  ap- 

cui  eum  cra-  prjr  que  celui  qu'il  avoit  trahi  étoit 

fhdit,  quod  r        n  ^ 

damnatusef-  enrin    condamne.    Il  avoit  toujours 

fet#  efpéré  t   qu'ainfi  qu'il  avoit  fait  plu- 

sieurs fois  j  il  fe  iauveroit  par  mira- 
cle. Mais  fruftré  de  cette  efpérance , 
que  Jésus  lui  avoit  déjà  ôtée  dès  le 
foir  précèdent  par  ces  paroles  :  Le 
fils  de  V homme  fuit  le  cours  de  ce  qui 
a  été  ordonné  touchant  lui  •  il  fut 
accablé  de  cette  nouvelle  ,  comme 
d'une  montagne  qui  fut  tombée  fur 
lui,  &  elle  le  porta  tout  d'un  coup 
au  défefpoir. 

11  répara  fon  crime  autant  qu'il 
put  par  les  trois  parties  d'une  péni- 
tence fort  infruàueufe.    1?.   11    en 


de   l'Evang.  Ch.  CXL.      I  I  9 
«oncur  une  hoiteur    épouvantable  ,  PoenîtentU» 
qui  lui  décrurent   li  comcience  p.,r 
mille  remords.   2°.  Il  rit  fatisricrion  retulir     rrï- 
en  relhtuant  aux  Princes  des  Piètres  £^»rSfST 
&  aux  Sénateurs    les  trente    pièces  bus  sacerio- 
d 'argent  ,    qui  étoient   le  prix  de  fa  tum  ' 
trahifon.  Il  eft  apparent  qu'il  le  leur  ôcienioribus, 
rapporta  chez  Caiphe  où  ils  étoient 
encore  alfemblés  :  &  que  fur  le  refus 
qu'ils   rirent  de  les  recevoir  ,  il    les 
alla  jetter  dans  le  Temple,  où  elles     VHt  infrâ 
devenoient  un  argent  facré  ,    auquel  f*3t9' 
nul  autre  que  les  Prêtres  ou  les  Lé- 
vites n'eut  ofé  toucher   fans    facri- 
lége. 

3°.  Il  confelfa  publiquement  qu'il  diccns  :  Pec- 

/    i    ,  i  \      r  •  cavi    traden* 

avoit  pèche  ,  en  livrant  le  lang  inno-  fanguincm 
cent;  de  par  cette  confeiîionil  ren-  juftum. 
dit  à  Jefus  l'honneur  qu'il  lui  avoir 
ravi  en  le  trahifTant  j  il  répara  le  tore 
qu'il  avoir  fait  a  ion  innocence,  en 
donnant  lieu  aux  Juifs  de;  croire  qu'un 
de  fes  Difciples ,  qui  le  devoir  bien 
connoitre  ,  s'étoir  cru  obligé  de  le 
mettre  entre  les  mains  de  la  Juttice. 
Mais  Judas  aceufa  de  tout  cela  fou 
avarice  devant  les  Princes  des  Prê- 
tres &  les  Sénateurs  j  il  ie  donna 
tout  le  tort  du  contrat  infâme  qu'il 
avoit  fait  avec  eux  ,  &  par  le  même 
aveu  il  les  condamna  à  relâcher  leur 


ni  Analyse 

A.  i7.  b.  if.  priformier.  Car  s'il  lui  étoit  défendu 

C.  13.D.1S.  s    «  ,         .,        ,  / 

de  le  vendre  ,  il  ne  leur  etoit  par  per- 
mis de  Tacheter.  Ils  furent  néanmoins 
alTez  aveugles  pour  n'en  voir  rien  ,  Se 
pour  lui  répondre  :  Que  nous  im- 
At  'Si  -'j  porte  que  vous  ayez  fait  ce  crime  : 

xeruntîQuidÇ,,  ^  / 

ad  nos  ?  ^tu  C  ejt-la  votre  affaire.  (^  elt  comme 
videos.  s*ils  difoient  :  Que  nous  importe 
que  vous  ayez  commis  une  perfidie 
que  nous  avons  follicitée  ,  payée  , 
approuvée ,  &  dontnous  pourfuivons 
les  fuites  jufqu'à  la  mort.  Elle  ne 
nous  engage  nullement  devant  Dieuj 
c'eft-là  votre  affaire  ,  &  non  pas  la 
nôtre. 

Mais  a  toutes  ces  actions  de  péni- 
tence ,  il  manqua  tout  ce  qdietoit 
nécelïaire  pour  les  rendre  utiles  & 
falutaires.  La  foi  en  Jésus  comme  au 
Sauveur ,  l'efpérance  en  fa  miféri- 
corde  ,  l'amour  de  Dieu  &  de 
JesusChrist  qu'il  avoit  ofFenfé  : 
fon  innocence  au  contraire ,  la  mort 
cruelle  qu'il  alloit  fourïrir  ,  la  dou- 
ceur qu'il  lui  avoit  témoignée  ,  .& 
la  noire  trahifon  dont  lui  Judas  l'a- 
voit  reconnue;  tout  cela  fit  une  il 
furieufe  imprelîion  dans  fon  aine  , 
it  pro-  qu'au  lieu  de  la  douleur  d'un  péni- 
jeûis  argen-  tent     \\   conçut   le  défefpoir    d'un 

teis   in  cem-     ,  /  ■*         1»      1  / 1  •  C   ' 

pio  ,  recef-  damne  ,  ôc  pour  le  délivrer  une  rois 

des 


de   l'Evang.  Ch.  CXL.      121 
des  remords  de  faconfcience,il  s'alla  {"*>  &  *}%** 

.  laqueo  le  fuf- 

penare.  pendit. 

Après  la  mort  de  Jésus  ,  les  Prin-        Principes 
ces  des  Prêtres  mirent  en  délibéra-  Jj™*™  Sacet" 

....     aocum  accep- 
tion   quel  uiage  ou  quel  emploi  us  ris argenecis , 

dévoient  faire  de  l'argent  qu'il  ayoit  No"îkeVços 
reftitué.  Comme  il  avoit  été  tiré  du  miccere      in 
tréfor  du  Temple  pour  prendre  celui  "**££'„ 
qu'ils  contidéroient  comme  l'ennemi  fangainis  dt, 
du  Temple  ck  de  la  Loi  ,  il  fut  con- 
clu d'abord  qu'il  ne  devoit  pas  être 
remis  dans  le  tréfor  j  parce    que    le 
fang    dont  il   étoit  le  prix  ,    l'avoit 
fouillé.  Ils  agirent  ainfi  pour  fe  con- 
former peut-être  à  la  Loi  ,  qui  dé- 
fend de  recevoir  en  offrande  le  prix 
de  la  fornication,  Deut.  23.  iS.  ou 
plutôt  à  la  défenfe  que   Dieu  fit  à 
David  de  lui  bâtir  un  Temple  ,  par- 
ce qu'il  avoit  répandu  le  fang    hu- 
main. Mais  par  cette  même    raifon 
ils  fe  condamnoient  à  n'offrir   plus 
jamais  de  facrihee  ,  eux  qui  avoient 
les  mains  encore  teintes  d'un  fang 
innocent. 

Ayant  donc  confulté  enfemble ,  ils    cônfilïoan- 
acheterent  de  cet   argent  un   champ  *"£*££ 
hors  de  la  ville,  (itué  au  midi  ,  der-  lis  agtumfi- 
riere  le  mont  de  Sion  ,  célèbre  par  le  ^* 
nom   du  champ  du  potier   ,    parce 
qn'on  en  tiroic  de  l'argile  propre  à 

Tom.  IF.  ï 


ni  Analyse 

c'i7' d'Ïs '  ^aue   ^es  vaitfeaux   de  terre.   Ils  le 

in    fêpuku-  deitinerent  à  la  fepulture  des  étran- 

ram  pcrcgri-  gers ,  Cv  furtout  des  foldats  Romains, 

norum.  qUj    jusqu'alors  n'a  voient   point  eu 

d'autre  fepulture  que  le  commun  des 

Juifs  j  ce  qui  paroiiîoic  à  ceux-ci  une 

"Propter  hoc  grande  abomination.     Ainfi  le  prix 

getili^Ha"  3^  £*ng  de  Je  sus-Christ   fut 

ceidama,hoc  employé  au  profit  des  Gentils,  Se  le 

eft,  ager  fan-     i  J  il' 

guims,  ufque  champ  ayant  depuis  cet  achat  change 
in     hodier-  de  nom  ,  fut  appelle  le    champ    du 
iang. 

Alors  fut  accompli    ce    qu'avoic 
Tune  im-  prédit  le  Prophète  Zacharie  ,  au  lieu 

$3«to  duq«el  le  no!"  de  Jéremie  s'eft  glilfê 
etï  per  Jere-  dans  le  texte  de  laint  Matthieu.  Les 
phcumfdu  Grinces  des  Prêtres  ont  reçu  de  Judas 
centem  :  Ec  Us  trente  pièces  d* argent ^  qui  éioient 

acceperunt        ,  j  /    •    j     . ^   »      .a.  •      *> 

trigiata     ar-  *-c  fnX  ^e    ce<-UL   dont  la  tctC  dVOU  etQ 

genuos  pre-  taxée  à  cette  Comme ,  &  dont  les  Prè- 

cii'm    appre-  /  *     j  o, 

tiati ,  quem  tres  soient  convenus  avec  Judas;  es: 
appretiave-     Hs  /es  0nt  employées  dans  l'achat  du 

runt    à    filiis      ,  ,  r  t  i>      j 

ifrael:  ôc  de-  champ  du  potier  _,  jelon  l  ordre  que 
derunt  eos  n{en  a  donné  le  Seigneur.  C'eft  le  fens 
guli  ,  ficut  de  cette  Prophétie  que  1  fcvangile  a 
conftituiemi-  abre°ée. 

hi  Dorainus.  & 


•«& 


^ 


de  l'Evang.  Ch.  CXLI.    115 


CHAPITRE     CXLI.        cap.cxli. 

A.  17.  B.  ij. 

Jésus  accufé  devant  Pilate. 


C.13.D.  18. 


Jefus  apud 

1.  Jefus  accufé.  %£  - 

Pllare  eut  la  complaifance  de  s'ac-  accufatus. 
commoder  au  vain  fcrupule  du     d.  18.  Exi- 
Confeil  des  Juifs  ,  &  étant  lorri  fur  vit  «p>KJ*- 

,  r  1        1        r  tus  ac*eos  rô- 

le perron  en  rorme  de  plateforme  ou  ras  &  dûit  ? 

de  pont,  fur  lequel étoit  fon  tribunal,  i?'jam  acc"" 

r  3  1  *  lationem  ar- 

11  leur  demanda  quelles    charges   ils  fertis  adver- 

apportoient contre  cet  homme  qu'ils  ,us  hommcm 
1  '  r  /  1  -1  nunc  * 

lui  avoient  amené  ,  &  de  quels  cri- 
mes ils  l'accufoient. 

Ce  fut  à  eux  à  établir  leur  qualité 
dans  ce  procès  ;  &;  d'abord  ils  jugè- 
rent à  propos  de  prendre  celle  de  Ju- 
ges fouverains ,  pour  ne  pas  expofer 
l'exécution  de  leur  jugement  à  l'in- 
certitude des  informations  de  Pilate. 
lis  lui  répondirent  en  général  _,  que  ru*cfp£nd£ 
fi  ce  n'étoit  pas   un   méchant  ils  ne  xerunc  ei  :  si 
Teuifent  pas  mis  entre  fes  mains ,  &  m°a"ef^corhlc 
qu'il  les  offenfoit  de  révoquer   en  non  rit»  cra- 
doute  les  crimes  d'un  homme,  à  qui  ulml  cmU5C"< 
des  gens  fages  &  religieux  comme 
eux  avoient  fait  le   procès. 

Pilace  vit  bien  qu'ils  le  prenoient 


ii4  Analyse 

a.  17.  b.  iç.  non  p0Ur  le  Juge  de  la  caufe ,  mais 

C.  13. D.  18.  rt,       »  j     1  r  o 

pour  1  exécuteur  de  leur  ientencejoC 

il  fe  piqua  de  ce  qu'ils  ne  daignoient 

pas  lui  expliquer  les  raifons  fur  quoi 

ils  l'avoient  condamné.    11  ne  voulut 

pas  en  uler  de  même  ,    fans  avoir 

pris  connoiflfance  du  fait,  i°.  A  caufe 

delà  haute  réputation  de  Jésus,  donc 

on  lui   avoit  conté  les  actions  mer- 

veilleufes.  20.  A  caufe  de  l'envie  tk 

de  la  haine  implacable   qu'il    favoit 

que    les    Prêtres    &    les    Docteurs 

avoient  conçue   contre  lui.  Comme 

néanmoins  ils  pouvoient   prétexter 

que  c'etoit  des  crimes   contre  leur 

Dîxît  erg©  Loi  qu'il  n'entendoit  pas ,   il  leur 

Accipic^eum  permit  de  lui  faire  fon  procès  félon 

▼os,ôcfccun-  leur  Loi  ,   à   la   charge   de   rendre 

dùm      leeem  j      1  ' j       ^       o,  j> 

vcftramjuJi-  compte  de  leur  procédure,  ex:  d  en 
cate  eum.      répondre  en  leurs  propres  noms.   Ils 

Dixerimt     %  r  i  ' 

ergo  ei  ju-  s  excuierent  de  cette  exécution, parce 
daù  :  Nobis  que  les  Romains  leur  avoient  ôté  le 

non  licet  in-    \      .      ,  _      ,  ri 

terficere  droit  de  vie  oc  de  mort  iur  les  cou- 
quemquam  :  pables  :  cv'  par  cette  réponfe  ils  mi- 
fu  impkre-  rent  les  choies  en  état  d  accomplir  la 
tut  ,   quem  prophétie  de  Jésus  ,  touchant  legen- 

dixit,    figni-  J    f  ,..J.  r       -o. 

ficans  qui  re  de  lupplice  qu  il  devoit  lourrrir  ; 
morte    eiïèc  ^j-  jes  Julfs  ne  l'eulïent  pu  condam- 

ner  lelon  la  Loi  qu  a  la  lapidation  , 
ni  Pilate  qu'à  la  croix. 

Lors  donc  qu'ils  virent  le  Gou- 


de  l'Evang.  Ch.  CXLI.      125 

verneur  fermé  a  leur  prétention  ,  ils 
quittèrent  la  qualité  de  Juges  ,&  pri-  perCunJ^em 
rent  celle  de  dénonciateurs.   Et  dans  iiiumaccufa- 
trois  charges  différentes  ,  dont    les  re  ' 
unes  venoient  comme  au  fecours  des 
autres  ,  ils  l'accuferent  de  plufieurs 
chefs  ,  qui  n'étoient  que  des  men- 
fonges  impudens ,  ou  des  vérités  en-  djcentes  : 

R       ,       l  Hune  inveni* 

venimees.  mus  fubver- 

La  I.    étOlt  la    féducUon    du  peu-    tenrem    gen- 
!  ,  ,         .  r  temnoftram, 

pie  par  des  nouveautés    dangereu- 
£es. 

La  2.  étoit  l'oppofition  au  tribut 
que  l'Empereur  levoit  fur  les  Juifs  : 
deux  menfonges  très  -  impudens  , 
puifqu'il  étoit  de  notoriété  publique 
qu'il  n'avoit  prêché  que  la  pénitence  &  prehiben- 

&ir  J      r\*  o  >-i  •      tem     tribut* 

la  Loi  de  Dieu    ,     &    qu  il    avoit   dareCaïfari, 

décidé  qu'on  devoit  rendre  à  Céfar 
ce  qui  étoit  à  Céfar. 

La  3.  efl:   qu'il  s'étoit  attribué  la  &  ai< 


icentera 


qualité  de  Chrift  :  &  pour  expliquer  fe   chrirtuna 

1      r>  1'-  1  regem  clic. 

au  Gouverneur  1  importance  de  cet 
attentat ,  ils  y  ajoutèrent  le  nom  de 
Roi ,  pour  faire  voir  qu'il  sJagi(ïoit 
de  l'affectation  de. ia  royauté,  crime 
capital  chez  les  Romains ,  lorfqu'on 
fe  l'attribuoit  fans  le  consentement 
de  l'Empereur. 


Fiij 


n6  Anaiysë 

A.  17   B.  it. 

C.z3.D.  iS.  T  ,  -., 

i.    Interroge  par  Pila  te. 

to  tnterroga- 

«*•  Pilare  connut  d'abord  que  toutes 

ces  charges  n'étoient  que  des  calom- 
nies ,  &  il  fe  mit  tout  de  bon  dans 
l'efprit  de  le  délivrer.  Il  y  employa 
trois  moyens  bien  differens.  Le  I. 
raisonnable  &  innocent.  Le  II.  infi- 
niment honteux.  Le  111.  cruel  jus- 
qu'à la  barbarie. 

Le  1.  fut  l'information  juridique 
des  crimes  prétendus  de  Jésus  ,  qu'il 
fit  d'abord  par  lui-même  ,  &  qu'il 
fit  faire  enîuite  par  Hcrode.  Des 
trois  premiers  chefs  d'accufation  ,  il 
ne  fit  pas  grand  fond  fur  la  fédu- 
éhon  ,  qu'il  ne  crut  pas  de  fa  com- 
pétance  ,  ni  fur  l'oppofition  aux  tri- 
buts ,  dont  il  n'avoit  jamais  entendu 
parler ,  ni  reçu  de  plaintes  de  la 
part  des  Publicains  ;  mais  il  s'ar- 
rêta à  la  qualité  de  Roi  ,  fur  la- 
quelle il  n'y  avoir  rien  à  négli- 
ger. 
d.  introi-       H  rentra,  dans  le  Prétoire,  &  fit 

vit  icerum  i.i  •       T  j  i  t  i 

pra-torium     venir  Jésus   devant   lui.    Jésus  les 
Piiatus,&vo-  mains  liées  de  cordes  parut  en  poftu- 

cavit  Jefum.  i  •       •        i     i  t      #~i 

a.  i7.  je-  rede  criminel  devant  le  Gouverneur 
fus autem fie-  qmluidit  :    Vous  êtes  donc  le  Roi 

tic  arueurarii-     *         -    .  r  ^     «  , 

dem:  &.  i*-  des  Juijsi  Jésus  n avoir  pu  enten- 


de  l'Evang.  Ch.CXLT.       127 
dre  du  Prétoire  ,  où  il  croit ,  ce  que  terrogavic  e- 

,•  ,     ■    x    k       umprafcsdi- 

les  Juils  avoient  dit  contre  lui  a  lJi-  Cens  :  Tu  es 
late.  il  iui  demanda  donc  ,  comme  Rex  J"d*°- 

.       .      ru  in  : 

s'il  ne  le  favoïc  pas  ,   s'il  lui  faifoic 

cette    queftion    de   lui-même    pour     D.Refpon- 

l'examiner  ,  ou  fi  c'étoit  une  accufa-  du  Jefu.s:  A 

tio.i  de  les  adverlaires,  a  quoi  il  eut  hocdids.an 

à  répondre  :  infinuai»  par  là  que  dans  j£j  *^at 

la  première  fuppofîtion  ,    il  n'était 

pas  pour  Satisfaire  la  curiohré  ,  (ur 

tous  les  points  dont  il  ne  s'agifïbit 

pas. 

Cette  réponfe  déplut  a  Pilate,  &      Refpondit 
il  lui   demanda  brutquemenr  s'il  le  ^Tllarus  : , 

.     .  ,l         .     .  ,,      r  Nuraquid    e- 

prenoit  pour  un  Jair,  qui  dut  lavoir  go     judsus 
que   les  Juifs  artendoient   un    Roi  fum  ?a  Gen3 

>  1  •  -r  v    tua ,    5c  pon- 

qu  ils   nommoient  le  Mellie  ,  &  a  tifices  tradi- 

qui  ils  attribuaient  les  caractères  de  Jerunt  te  mi- 

la  royauté.   Il  lui  ht  donc   entendre 

que  cette  queftion  ne  venoit  pas  de 

lui  :  mais  que  les  grands  Prêtres  à  la 

tête  de  toute  fa  nation  l'avoient  mis 

entre  fes   mains  ,    comme   u  fur  pan  t 

cette  qualité  ,  &  qu'en  général  il  lui  1uid  fecifli? 

demandoit  ce  qu'il  avoit  fait,pour  en 

juger. 

Jésus  ,  pour  ôter  d'abord  tout  lieu      Refpondit 
à  la  jaloufiede  l'Empereur  ,  &  à  l'in-  Jefu$; 
quiétude  de  Pilate  ,  lui  expliqua  ,  1 . 
La  nature  de  (on  Royaume.    2.   La 
nature  de  fa  Royauté. 

F  iv 


n8  A  N  A  L  Y   SE 

a.  17  b.  m.       j  .  u  l'affura  que  (on  Royaume  n'c- 

C.  13.  D.  18.       .  ^  j         »  n.    v    j- 

toit  point  de  ce  monde ,  c  elt-a-dire, 
um^noîTeft^dê  Semblable  aux  autres  qui  partagent  la 
hoc  mundo  :  terre  ,  terreftres  ,  vifibles ,  &  qui  fe 

foutiennenr  par  les  armes.  De  toutes 

r  .      les  preuves  qu'il  pouvoir  lui  en  don- 

u    ex    hoc       r  *j       r  1111 

mundo  efTet  ner  ,  il  choilit  la  plus  capable  de  le 

uTT  ÎT  rirer  de  Peine  &  de  Soupçon.    C'eft 

um  >  miniftn  r  .  ■     1     s    * 

mei    utique  qu  il  auroit  (ur  pied  des  troupes  & 

ucnoîftrad^  °*es  Officiers,  qui  combattroient  pour 

r.cr  judffis:    lui ,  &  qui  ne  le  laifferoient  pas  à  la 

merci  des  Juifs.  Comme  donc  il  ne 

paroifïoit  rien  de  tout  cela  ,   c'étoit 

une  marque  que  ion  Royaume  n'é- 

toit  pas  d'ici  ;  mais  que  c'étoit  un  Ro- 

iiunc  autem  yaume  tout  fpirituel ,  &  dont  lésâmes 

iegnum  me-  étoient  les  fujers  volontaires. 

um    non   eit  .  '.  v      A  iy 

hinc.  2.  Pilate  lui  répliqua  aulii-tot  qu  a 

Dixititaque  ce  compte  il  étoit  donc  Roi  ,   puif- 

ÎLn™^,1»"  Qu'il  avoit  un  Rovaume.  Jésus  ré- 

goKexes  eu»  1  J 

pondit  a  cette  înltance  par  1  explica- 
tion de  fa  royauté  ,  afin  de  prévenir 
tous  les  ombrages  dans  une  matière 
fi  délicate.  11  lui  avoiia   qu'il    étoit 

Refpondit  r>     •  '"1    '  J  1  J 

jefus  :  Tudi-  Roi ,  qu  il  etoit  venu  dans  le  monde, 
cis ,  quia  rex  &  qu'il  étoit  né  expreflfément  pour 
ijThoc°natus  en  ^he  ^es  fonctions ,  inf  muant  qu'il 
fum  ,  Se  ad  l'étoit  avant  que  de  prendre  une  naif- 

hoc   veni    in  r  n  4  x    '  \     C 

mundum,  lance  temporelle.  Mais  que  la  ron- 
chon de  cette  royauté  ne  devoit  point 
faire  de   jaloufîe  à  Céfar  j    parce 


de  l'Evang.  Ch.  CXLI.       129 
«u'elle  confiftoit  à  rendre  témoigna-  ottefHmcmfc 

*i    1        /   •    /    i      r>i-  *    1  um   Peihlbc* 

ge  a  la  vente  de  Dieu  ,  en  prêchant  am  Yeriuù  ; 
ion  vrai  culte  aux  hommes  ,  &  la 
vraie  Religion  qui  conduit  à  lui.  Ce 
témoignage  fe  fait  au  dehors  par  la 
prédication  ,  &  au  dedans  par  les 
infpirations  fecrettes.  Qu'ainfi  tout  omn,'s  quj  e^ 
homme  qui  fe  trouvoit  dans  le  parti  ex  veruace , 

dt        ,    ■    /    ,  r  •  r         audic   vocem 

e  la  vente  ecoutoit  la  voix ,  nonleu-  meam. 

lement  celle  qui  frappoit  les  oreilles, 

mais    celle  qui  touchoit  les  cœurs. 

Qu'ainfï  les  fujets  de  cette  royauté 

étoient  les  cœurs  &  les  volontés  ;  les 

ordres  abfolus  ,  c'étoient  les  attraits 

efficaces  de  la  grâce;  &  l'obéilTance, 

c'étoit  la  perfuafion  8c  le  confente- 

ment. 

Pilate  ,   pour   pouffer   à  bout   la     DiciteiPi- 

difficulté  ,  lui  demanda  ce  que  c'é-  latus  ;  Quid 

/    •    /  •  eft     veriras  ? 

toit  que  cette  vente  :   mais  comme  lz  cùm  hoc 
il  ne  voyoït  là  rien  a  craindre  il  ne  dixiflêt ,  ite- 

r       \  1     1     -r       J>  J        rum  exivitad 

le  donna  pas  le  loihr  d  en  entendre  juda-osc. ad 
la  réponfe  ,  &  il  fortit  de  nouveau  Principes  sa- 

r  ..  t      r  >-i  •     cerdoi.um,& 

pour  dire  aux  Jmrs  qu  il  ne  trouvoit  turbas  -y   D. 
aucun  crime  dans  cet  homme.   On  Jf^fJM'V 
voyoït  en  lui  un  Juge  qui  plaidoit  la  Vemo  caufa; 
caufe  de  fon  jufticiable  devant  fes  ac  in  hoc  borai* 

r  a    r  ne« 

cuiateurs  j  &  ,  ce  qui  eit  lurprenant, 
unpayen  qui  faifoit  l'office  d'Avocat 
pour  le  Roi  des  Juifs ,  devant  fes  pro- 
pres fujets. 

F  v 


i$o  Analyse 

c'-d  II'      l*'  ^lors  ^es  P«°ces  des  Prêtres 
a  x/^a«h  &  les  Docteurs  delà  Loi  propoferent 

A    hr  eu  m   .  _  r      T 

aceufareturà  leurs  fécondes  charges,  tk  ils  l'acca- 
s^oJum,  lièrent  de  nouveaux  chefs  d*accufa- 
&  feaioribus  non  ,  dont  faim  Luc  rapportera  plus 

A.  "nihU  ref-  ^aS  une  parfie  >  ta  refte  ayant  étéfup- 
yondic.  primé  par   les    autres    Evangéhftes. 

B. Pilacusau-  Pdate  fit  venir  Jésus  fur  le  perron 
Incérroeatic  P^Lir  les  lui  raire  entendre  ,  &  1  ex- 
eum» dicens:  horta    à   y  répondre  :    N'entende?- 

A.Nonaudis  1     ■     j         i  /  j 

quanra  ad-  vous  pas  j  lui  dit- il  j  combien  de 
verfum  te  di-  chofes    ils    dépofent     contre     vous  ? 

cunr  tellimo-     %r  ,  t  l  /     ^ 

nia  ?  P.  Non  ^v*  répondez-vous  rien  a  tout  cela  : 
rcfpondcs       Confiderer    en  combien    de  chefs   ils 

quidquam  ?  "J  *-,  x-     .     T  c  J    , 

Tide  in  quan-  vous  accujent.  Mais  Jésus  terme  dans 
tis  te  accu-  |e  (}|ence  ne  répondit  à  rien  de  tout 

autemampU-  ce  qui  lui  fut  objecté  par  les  Juifs. 
fr  :inni  ref-  p  J  ,te  en  étoit   dans  1  étonnement  • 

j)on  lit  A   et     .  .  -  ,,  * 

ad  uiiumvet-  de  voir  un  homme  lage  cV  éloquent, 
bum  ;  ira  ut  artaqué  par  de  puifiTans  ennemis,  fa- 

toifaretttt  >' ->  J     r         T  J 

pr*t-s  vehe-  vorile  même  de  Ion  Juge  ,    prendre 
néanmoins  fi  peu  de  foin  de  fa  vie, 
u'il  aimoit  mieux   fe   livrer   à  leur 
ureur  en  Te  taifant,  que  déparier 
pour  fe  défendre. 

On  doit  regarder  ce  lilence  de 
Jésus  comme  une  preuve  de  la  vo- 
lonté toute  libre  avec  laquelle  il 
s'offroir  à  la  morr  ,  &  cette  faveur 
de  P  'are  comme  une  preuve  illuftre 
&  fou  innocence.  Mais  ce  lilence  ne 


i 


de  l'Evakg.  Ch.  CXLT.  i  x  i 
doit  furprendreperfonnejEsu  Savoie 
fair  ce  parcage  dans  les  queltions 
qu'on  lui  feroit  j  que  C\  c'étoit  des 
vérités  odieufes  &  fufpecles,  il  les 
avoueroit ,  parce  qu'elles  pouvoienc 
avancer  fa  condamnation  ,  en  les 
purgeant  néanmoins  de  tout  le  venin 
dont  les  Juifs  les  empoiionnoienc. 
Que  fi  c'étoient  des  calomnies  ,  il 
n'y  répondroit  point  du  tout  ,  mais 
qu'il  laitferoir  ce  difeetnemenr  àfaire 
à  fon  Juge  ,  qui  avoit  plus  d'intérêt 
à  ne  pas  condamner  un  innocent , 
qu'un  innocent  à  défendre  fa  vie. 
Qu'enfin  fi  c'étoient  des  chofes  qui 
ne  regardoienr  point  le  fond  de  ia 
caufe  ,  il  leur  garderoit  le  même 
filence. 

x .  Renvoyé  devant  Hé; ode.  f «  Ai  He- 

y  rodem  m.jhs* 

Saint  Luc  feul  nous  a  appris  quel-     c.  At  illi 
les  furent  ces  nouvelles  inftances.  Les  ET!?* SSL. 
Prêtres  &  les  Docteurs  redoublèrent  tes:  Commo- 
leurs  efforts  contre   Je, us  ;    &   iU3£K£* 
l'accu'erent  qu'il  foulevoit  le  peuple  niverfamJa- 

1   r  o.  J  ~  1     dsam  «   inci— 

par  les  diicoors ,  &  que  depuis  la  iens  \  Gali- 
Ga'ilée  où  il  avoit  commencé  à  pa-  «a  uf^ue 
roitre  ,  julques  dans  toute  la  Judée,  il 

avoit  prêché  la  fédnion  &  la  révolte 
contre  lespuhTauces. 

F  vj 


132.  Analyse 

C.ij.  D.  i 


Pilare ,  qui  n'avoit  jamais  entend» 


parler  de  cerre  fédition   prétendue 

ne  fit  pas  plus  d'état  de  cette  accufa- 

Pilatusau-  tion  que  des  autres.  Mais  apprenant 

Galilaam,     que  Jésus  eton  Gahleen  ,  il  jugea 

incerrogavit    lacement  que  le  crime  de  rébellion 

il    homo  Ga-        "  i     ■         i        i»r- 

lii*us  effet.  ne  regardent  plus  1  fcmpereur  ,  mais 
Ecutcogno-  Hérode  Tétrarque  de  Galilée   dont 

vit  quod   de    T  ,  r    •        o  r   •>»'•' ï 

Herodis  po  Jésus  etoit  iiijer,cV  qu  ainii  c  etoita 
tertate  e(u-t ,  jm  \  en  fajre  l'information.  Ravi  de 

remifit    eum    f      ,  ,  c  .         t>         .  r        .. 

adHerodem,  le  deraire  a  un  jugement  h  odieux  , 
qm&  ipfcje-  ji  ie  renvoya  avec  toutes  les  informa- 

rofolymis   c-     .  .       J  ,  , 

rat  mis  die-  tions  de  ion  procès  pardevant  rie- 
bus*  rode  ,  qui  étoit  alors  à  Jérufalem  pour 

y  célébrer  la  Fête  de  Pâque. 
r^r°Jrl  tp"       Hérode  témoigna  beaucoup  de  joie 

tem   vifo  Je-  .  •  i  i      r      i      •  1  • 

fu,  gavifus  de  voir  Jésus  , il  le  louhaitoit depuis 
mc  Venimcu-  long-tems ,  à  caufe  des  chofes  mer- 
piensexmui-  veilieufes  qu'il  en  avoit  oui  dire,& 
vîdere^um*  ^  efpéroit  de  lui  voir  faire  quelque 
eo  quod  au-  miracle.    11  le  queftionna  donc  fur 

dierat  multa      \     r  L     r  1  '"t 

de  eo,  &fFe  planeurs  choies ,  par  exemple  ,  s  il 
rabat  fignum  éroit  Jean  remuante  ,   ou  quelqu'un 

aliquod  vide-  j  n         L  'I 

reabeo  fieri.  ces  anciens  Prophètes ,  comment  il 

avoit  reçu  une  puifTance  fi  merveii- 

interroga   feufe  ;  s'il  ne  feroit   pas  bien  à  fa 

bat  auti-m  e-  r  j  '        •  i  i        •        i       r    ^ 

um  multis  conlideration  tel  ou  tel  miracle,  ht  a 
ferinonibus.   toutes  ces  demandes  inutiles   Jésus 

At  ipfe  ni-  ,  v  r       \     r 

bil  iiii  ref-  ne  répondit  que  par  un  prorond  11- 
pondcbat       lence  Cependant  les  Princes  Se  les 

Srabant     au-   r>>     n  •  n  r  •    •  j  i 

tcm  pnnci-  Docteurs  qui  1  avoient  iuivi  devant  le 


î>e  l'Evàng.  Cri.  CXLI.       i  *  5 

Tribunal  de  ce  Prince  ,    craignant  Pes  Sacerdo-i 
qu  îlne  lui  rut  favorable,  l  accuioient  b*  conftan- 
toujours  avec  une  véhémence  infati-  ter  accu(an-. 
gable  ,  tantôt  de  blalpheme  ,  tantôt 
de  difcours  féditieux  ,  &  fur-tout  de 
la  qualité  de  Meflie. 

Hérode  indigné  d'un  (îlence  qu'il     Sprevïtau- 

ij  /  i      tem        illum 

prenoit  pour  le  dernier  mépris  ,    le  Herodes  cura 
traita  de  fou  &  d'infenfé  avec  toute  exercitu  fuoj 

fg-^  •  r  i        r    &c  illufic  in- 

a  Cour  ,  qui  pour  le  jouer   de   la  ducum  vefte 

royauté   lui  fit  toutes  fortes  d'outra-  alba>  &  ^c- 

•k  r    -  i     raine  ad  Piia- 

ges.  Mais  pour  marquer   mieux    le  cum. 
jugement    qu'il  en  portoit  ,   il  le  ht 
couvrir  félon  l'Original  d'un  vieux 
manteau   de  couleur   éclatante,  qui 
témoignait  que  fa  royauté  étoit  plus 
digne  de  rifée  que  de  crainte  ,    &c 
dans  cet   équipage  il   le  renvoya  à 
Pilate.  Cette  retenue  du  Gouverneur  amLf^Hcro^ 
pour  ne  pas  entreprendre  fur  la  Ju-  des&Piiatus 
rifdiction  d'Hérode  ,  les    réconcilia  !nnarrJp  aanjeâ 
l'un  avec  l'autre  ;    car    ils     étoient  inimiejeran* 

b-ii  /  r       li        s  r  *         ad  inyiccm. 

rouilles  en(emble,a  caule  peut-ctre 

de  l'attentat  que  Pilate  avoit  commis 
fur  l'autorité  de  ce  Prince  ,  en  maifa- 
crant  de  pauvres  Galiléens  {es  fujets 
au  milieu  de  leurs  facrifices  j  &  il 
voulut  par  le  renvoi  de  Je;us  pu-de- 
vant Hérode  lui  en  faire  une  efpece 
de  réparation. 

Pilate,   au  retour  de  Jésus,   tira    pii«U5«u: 


ï  5  4  Analyse 

£  lr"5'  ll'  en  fa  faveur  le  fruit  qu'il  devoit  de 

C.  13.  D.  18.  j  •     f  T  r  . 

ces  deux  informations  ;  &  ayant  bit 

temco'ivoca-  ï 1       r>  j       r»  *  c 

tis  Principe  approcher  les  Princes  des  Pierres  &C 
bus  sacerlo-  les  Magiftrats  du  peuple  ,  il  leur  die 

tu  m  ,  ôc  ma-         »  •  ï    ï     •  /  r         >  i 

gidratibus  ,  clu  "s  iul  avoient  preleiite  cet  homme 
&  plèbe ,  dl-  comme  un  féditieux  ,qui  détournoit 

xic    ad  illos  :    •  1       J      1  >    1    '    /T  »*I   J 

obcuuaismi-  IS  peuple  de  l  obeitiance  qu  il  dévoie 
b\  huic  ho-  aux  PuiGTances.  Que  cependant  ,  i°, 
averrentem  *ra^  I  information  qu  il  en  avoit  raite 
populum ,  ôc  devant  eux,  il  ne  favoit  trouvé  at- 

ecc~  ego    oo-  .,  j  L    f 

ra.n  vohisinv  teint  ou  convaincu  d  aucun  des  chers 
terrogans,     dont  l\s  \e  chargement,  i.  Qu'Héro- 

nu  um    eau-    .  t     -ï    i  r 

fam  invenio  de  auquel  ll  les  avoient  renvoyés 
in  homme  if-  après  l'examen  qu'il  en  avoit  fait  . 

to  ex  his  ,   m      r  *'    ,        i  '  i     •  ï 

quibus  eum  en  avoit  juge  comme  lui  ,  &  que  la 
accu  -ans.  Sed  mamere  dont  îl  !''.vo  r  traité  ne  mar- 

neque   Hero-  ■  ,       A 

des  :  nam  re-  quoitpas  qu  ll  méritât  la  mort.  Lom- 

mifivosadil-  me  né  inmoins  il   les   avoit  orfenfés 

lum  ,  &  •  cce 


uni!  lignum  par  fes  prédications  trop  libres  ,   ii 

"ft"e  Emen"   ''en  &«>"  châtier    Vàt    Tes    lldeUfS   , 


nil 
m< 
éit  ci    j-iin.il-  - 

darum   ergo  pour  leur  e ii  faire  fatisfaChon  ,  afin 
2r  d'mit"  clu'ils  n'eulTent  pas  le  chagrin  de  l'a- 
voir acculé  inutilement. 


0)Vg£* 


^ 


DE  i/EvANG.  Ch.  CXLII.       13  J 


CHAPITRE  CXLII.  cap.  cxliî, 


A.  17.  B.  ij. 
C.  ij.  D.  18. 
&  I*. 


Barrabas-    Flagellation. 
Condamnation. 

harrabas» 
.      T>  L  >r      ,   k     7    r  Flagtliatio. 

1. 15 an ab as  prejere  a  Jejus.  Condemna- 


tio. 


E  fur  ce  qu'il  eut  d'abord  en  vue-       1.  Barra- 
Mais  comme  il  lui  parue  inhu    bas ,   LhnJl9 

prajertur* 


C 

main  de  puni:*  un  homme  innocent, 
pour  avoir  eu  le  malheur  de  dcpl  .ire 
à  des  gens  'uperbes,il  changea  bien- 
tôt de  defTein  ,  loriqu'il    fe   îouvinc 
qu'il  étoit  obligé  par  une  vieille  cou- 
tume autorifée  des  Empereurs, de  leur     c  Neccf^e 
délivrer  un  pnfonmer  avec  Cjsdeuxauum  habe* 
circcnOanceSj   i°.  Qu'ils  pouvoient  bar  ^^5"!! 
demander    celui    qui    leur    plairoit.  fcitum  ,    u- 
2°.  Qu'il  devoit  être  élargi  ce  ,out-!à  ™  Aquv£ 
tri''me  fans  délai,  en  mémoire  de  la  voluiflent. 
délivrant   d'Ifracl  ,    du    glaive  de 
l'Ange  exterminateur,  6V  de  la  fer- 
vrude  de  l  Lgvpte.  Ce  qui   prouve 
en  p  liant  que  ce  jour  là  ctoit  pour 
les  Juifs  la  veille  de  Pâques  ,    puif- 
qi  e  ce  fut  la  veille  de  cette  fête  que 
le    peuple    Hébreu    fur    délivré   du 
g'a.vede  l'Ange  &  de  la  pour  fuite  de 
tharaon. 


i$£  Anaiyjï 

/V.17-B.  if.       Pilate  periuadé  que  les   Princes 
C.  ij.  d.  18.    ,      n  A      r    ,  *     .    i 

des  rretres  n  avoient  mis  Jésus  entre 

fes  mains  que  par  une  baife  &  hon- 
teufe  jaloufie,  feréfolutde  ménager 
l'occafion  que  cette  coutume  lui  pré- 
fentoit  pout  délivrer  Jtsus.  Pour 
cela  il  referra  la  liberté  qu'avoit  le 
peuple  de  choifir  indifféremment  fur 
toute  la  troupe  des  pnfonniers ,  &  il 
ne  leur  donna  le  choix  que  de  deux, 
dont  Jésus  feroit  l'un  ,  afin  de  gar- 
der au  moins  dans  ce  petit  nombre 
la  forme  de  leur  privilège  ,  &  qu'on 
pût  dire  qu'ils  avoient  ihoifi.  Mais 
afin  défaire  tomber  le  fort  fur  Jésus, 
il  alla  prendre  dans  fes  prifons  le 
plus  fcélerat  de  tous  ceux  qui  y 
étoient  pour  le  lui  oppofer,dansl'ef- 
pérance  que  fi  les  Juifs  confervoient 
encore  quelque  refte  d'équité  &  de 
reconnoiffance  ,  pour  les  bienfaits 
dont  Jésus  les  avoit  comblés ,  ils  fe 
determineroient  pour  lui.  Ce  fut  le 
II.  moyen  qu'il  prit  pour  lui  fauver 
la  vie. 
Habebatau-  Il  y  avoit  alors  dans  fes  prifons 
tem  tune  vin-  Un  iniigne  voleur  nommé  Barabbas  , 
nem,  quidi-  qui  y  etoit  arrête  avec  d  autres  mu- 
cebatur  Bar-  tms    pour  avoir  fajt  un  meurtre  dans 

l'a  DU  *>  *^ 

D//8.Erat  une  fédition.  Pilate  trouva  cet  hom- 
b«eniiaBcrrra  me  ^'autant  plus  propre  à  fon  delTein, 


de  l'Evang.  Ch.  CXLII.     137 

qu'il  étoitl'horreur  du  public:  au lteu  Jv<luî. cuià 

*       -  .  -  .      l  j  feditiouserat 

que  le  prilonnier  ,  dont  on  deman-  Vin&us,  qui 
doit  la  grâce ,  devoit  être  diftingué  [n    fedjw°n.e 

©  o        feceracfcomi- 

des  autres  par  quelque   circonltance  cidium. 
favorable  ,  qui  le  rendît  digne    de 
compaffion. 

Le  peuple  fit  les  acclamations  or-     Etcùm  af- 

dinaires  pour  demander  au  Gouver-  fend,{ïe.ttur- 

1  j>  t       •  »i  ba  cœPlc,ro- 

neur  la  grâce  d  un  prilonnier  ,    qu  il  gare  ,    ficuc 

avoit  accoutumé  de    leur    accorder  [e,Tp- î  f- f  acT 

oat   llilS.     A. 

toutes  les  années.   Pilate   les  ayant  congregatis 
atfemblés  devant  lui ,   leur  dit  qu'il  JJ5dl^£ 
ne  trouvoit  rien  en  Jésus  qui  méri-  dixit  a.  PUa- 
tât  le  dernier  fupplice,  &  qu'il  pou-  ^m  iave°- 
voit  le  relâcher  de  plein  droit.  Qu'il  nio    in   c» 

'  '  1  •  •  r  1  caufarn. 

etoit  néanmoins  bien  aile  qui    leur 

fût  redevable  de  la  vie  :  Et  comme      *ft  au.tem 

..  .  •    i>    1  1  •     confuetudo 

ils  avoient  une  coutume  qui  lobh-  vobis  ut  u- 
eeoit  à  leur  donner  la  vie  d'un  cri-  nuin  ^DÏ}" 
minel  dans  la  rete  de  Paque  ,  il  leur  Pafcha  :  vul- 
donnoit  le  choix  de  Jésus  ou  de  Ba-  tl-ctcam  vobis 
rabbas  :  Lequel  des  deux  _,  difoit-il,  RegemJuda;- 
voule^-vous  que  je  vous  délivre  j  de  oruA1.îQUem 
Barabbas ,  cet  homme  féditieux  &  vuhis  dimic- 
homicide  ,  ou  de  Jefusque  la  voix  du  *%£%£ 
public  appelle  le  Chrifl  ?  fum ,  qui  di- 

r\~         :  T  *  ~  J     citur     Chrif- 

yJti  voit  combien    ce  moyen  de  tus?B.sciebat 
fauver  Jésus  lui  étoit  honteux;  puif- eniir»    quocl 

»  1       1    rr rr  '         *i    r        ■  j  Per  invidiam 

que  s  il  reuiiiiloit  ,  il  leroit  redeva-  tradidi(Tent 
ble  de  la  vie  aux  crimes  de  Barabbas;  eum  /ummi 

&>•!/•  i_    •      i  Sacerdoces, 

que  s  îliuccomboit  dans  cette  cou- 


138  Analyse 

a.  17. B.  if.  cucrence  ,  il  auroir  paru  moins  die- 
ne  d?  vivre  que  le  plus  grand  de  tous 
les  fcélerats. 

Dans  ce  moment- là  ,  Dieu  donna 
encore  une  nouvelle  preuve  de  l'in- 

'em^iîio  nocence  ^e  ^on  Fils*  Pilate  étant  aflis 
procribunaii,  fur  fon  Tribunal  ,  fa  femme  lui   fit 

mihc  ad  cura  Jjre  par  un  Je    fes  gens       citl'il    ne   fe 

dicens.-Nihii  meiat  point  dans  la  caule  de  Jésus  , 

imV&iuil0  Pat  deux  raifons  :  L'une  »  de  Rell~ 

gion  ,  parce  que  c'étoit  un   homme 
multa    cnim  jufte  .  L'autre  de   crainte   ,     parce 

pafia  lum  ho-  '      ,    , .  •     1    1     rr  11 

•Uepcrvifum  qu  elleavoitete  errroyablement  tour- 

propter  eum.  mentée  à  caufe  de  lui,  dans  un  fon- 

ge  plein  de  terreurs,  où  on  lui  mon- 

troit  les  malheurs  dont  Pilate  étoit 

menacé  s'il  l'abandonnoit  à  la  fureur 

des  Juifs.  11  e(t  fans   doute  que   ce 

fonge  venoit  de  la  part  de  Dieu ,  non 

pour  délivrer  Jésus  ,  mais  pour  faire 

éclater  fon  innocence   par  une  per- 

fonne  ,  qui  n'avoir  aucun    intérêt  à 

autem^ace"  parler  pour  lui.  Au  moins  il  confirma 

dotum,  &fc-  le   Gouverneur  dans  la  volonté   de 

nioresB.con-   r  r 

citavcruat      lauver  Jésus. 

turbam,  Pendant  que  cet  Envoyé  s'acquit- 

A.   ut     pete-  j      r  -  rr  1         n 

rcnc  Bana-  roit  de  la  com million  ,  les  Princes 
bjm ,  Jefmn  des  Prêtres  &  les  Sénateurs  corrom- 

\"jvo     perde-  1  ,  a  0jr 

rent  Refpon-  pirenc  le  peuple  par  eux  -mêmes  oc 
dens  amena  par  leurs  émiifaires  ,  &  lui  petfua- 
lis  :    Qucm  dereiu  de  demander  la  grâce  de  m- 


DE  i/EvANG.Ch.  CXLII.        I  j  9 

rabbas  ,  ôc  la  more  de  Jésus.  Etlorf-  vukU  votlt 
que  Pilate  leur  propoia  lequel  donc  dimhti  ?  c. 
des  deux  ils  vouloient  qu'il  leur  ac-  ExdaMyk 

A         ..  ,,      .  ^  auceiii    limul 

cordât  ,  ils  s  écrièrent  tous  :  toint  mrirerfa  tur- 
de  cet  homme  .  maïs  donnez-nous  Ba-  5.a,j.  d,,ce:is  : 

J  *•  Toile   hune  , 

rabbas»  &      dimitte 

nobis   Barra- 
r  bam. 

i.  Clameurs  des  Juifs  contre  2.cUmo- 

JeSUS.  ks  J" l*orum 

adverfus    /c* 
fum. 

Le   Gouverneur    toujours  ferme      _   _M 

J  i       i    (<"  •       i      r  t  s\  B-    P»Iatus 

dsns  ledeîleinde  iauver  Jésus  :  Que  autemkerùm 
voulez-vous  donc  t  leut  dit- il  .,  que  K-[?4^femc9 
je  fajjè  de  celui  que  vous  ave%  appelle  roless  dimfo 
vous  même  le  Roi  de  Juifs  ?  (  il  "rcr  Je/um: 
parloïc  ians  doute  de  la  cérémonie  de  vultis  raciam 
fou  entrée,  )     &  qui    ordinairement  Re&1  Jïaïo: 

'  *■  rum  ,  A.  qui 

ejl  nommé  le  Chrijl.  Il  vouloir  les  dicicur  ciui- 
touchei  par  ces  noms  de  Chrift  &c  de  ^s  ?  .^^ 

Roi    «jes    Juifs    ,   qui    leur    dévoient    clamaverunr, 

être  fi  précieux.  Mais  il  n'y  trouva  £uctfgCemcseI 
aucun  fenriment  de  tendre(Tej6<:  ils   um.  nie  au- 

>  /  j  *■»        «       tem       tertio 

s  écrièrent  tous  de  nouveau  :  Cruu-  diAkadiiios: 
J.  er-te  _,    crue  /fier  -le.   Pilate  tenant  Q"»d     enim 

i  a*    •  /7  i  mali  fecit  if- 

tou;ours  bon  :  Mais  enfin  ,  leur  tc  .  Nuuam 
dit-il  pour  la  rroifieme  fois,   quel  caufammor- 

/  «f  r  •    i   *t  •  tisinvenioin 

mcla-t-ll faitt  A0«  ,    y*    /Z<?    rrcav*    eo:corripiam 

r  c/2  é/i  /■?  c^a/^  £\v/  <f£//i  à  /#  raorr ,  /£  ^ê0 iHum,CC 

,     /        .  r  n  r  i  \      oimittam. 

le  jerai  fuftiger _,  ks>  je  lerenverai  après  a  ac  illi 
le  châtiment.  Ces  dernières   paroles  î"asis  dania- 

/         j,  c  o         r  \       banc  c-  VOC1' 

prononcees  d  un  ton  rame  oc  reiolu  bus  nwgnis, 


140  Analyse 

a.  17.  b.  iç.  excitèrent  de  tous  côtés  de  redou- 
"  blemens  de  cris  &  de  voix  confufes, 

postulantes  •    i  j  t  iTA 

ut  crucifiée-  °lul  demandoient  que  Jésus  rue  cru- 
mur  ,  &  in-  citîé  ,  Se  qui  en  cas  de  refus    fem- 
voecs  corum.  Ploient  erre  les  preiages  d  une  icdi- 
tion  prochaine. 

latio  FCoro-       $  *  Flagellation,  Couronnement. 
natio.  niufio.  Outrages* 

Alors  Pilate  fe  relâchant  de  la  fer- 
meté qu'il  avoit  fait  paroître  juf- 
qu'ici  ,  reprit  le  III.  moyen  qu'il 
avoit  rejette  j  Se  jugea  qu'il  falloit 
compofer  avec  ce  peuple  inflexible 
&  rebelle.  Il  demandoit  la  mort  de 
Jésus  \  il  lui  en  accorda  une  partie  , 
en  ne  lui  laiflant  qu'autant  de  vie  , 
qui  lui  en  pourroit  refier  après  une 
cruelle  Se  fanglante  flagellation.  Pour 
le  fauver  de  la  mort ,  il  le  condam- 
na à  une  peine ,  qui  fans  lui  ôter  la 
vie  appaifât  la  fureur  des  Juifs.  En- 
tre les  deux  extrémités  de  le  faire 
mourir  comme  ils  le  fouhaitoienc  , 
Se  de  le  renvoyer  abfous  à  pur  Se  à 
plein  _,  comme  il  le  vouloit,  il  fut 
contraint  de  prendre  ce  cruel  tem- 
pérament ,  dont  il  efpéroit  que  les 
Juifs  fecontenteroient.  Horrible  in- 
juftice  ,  cruelle  miféricorde  ,  de  ren- 


be  l'Evang.  Ch.  CXLII.  141 
dre  un  innocent  miférable ,  pour 
farisfaire  la  fureur  d'un  peuple  in- 
fenfé. 

11ht  prendre  Jésus  par  fes  Li-  D.  i9#Tunc 
(Sieurs ,  qui  l'ayant  dépouillé  &  lié  à  erg°  appre- 
une  colomne  de  la  falle  du  Prétoire,  tus^efuin,  se 
lefoiietterent.On  peut  juçer  combien  flagciiavir.B. 

„, „  n         11  c  \\  o  Militcsaurem 

cette  nagellation  tut  cruelle,  r.  par  A.  pnriïdis , 
la  qualité  des  exécuteurs,  qui  étant  fufciPiemes 

1     •  l  r  Jefum          in 

payens  ne  gardoient  aucune  meiure  prjetooum  , 
dans  ce  châtiment  ,   mais  qui  l'exer-  B-  «luxerai* 
^oient  adilcretion.  2   .  Parlann  que  umprsioiii , 
le  Gouverneur  s'y  étoit  propofée ,  qui 
étoit  d'amollir  les  cœurs  barbares  des 
Juifs  pour  Jésus  ,  à  quoi   n'eût  pas 
fuffi   une  flagellation   ordinaire.    11 
fallut  donc  le  mettre  dans  un  état  ca- 
pable d'infpirer  quelque  compailion, 
&  d'arracher  quelques  larmes  à   ces 
cœurs  de  pierre. 

Les  foldats  ne  fe  contentèrent  pas 
de  cette  inhumanité.    Mais  foit  de 
leur  propre  mouvement  ,    foit  par  a.  &  congre- 
les  ordres  fecrets  du  Gouverneur  ,  &  gavêmnc  ad 

di  1      1     •       1    •  1        rr  eufn    univer- 

ans  la  vue  de  lui  plaire,   ils  aliem-  çzm    C0hOr- 

blerent  autour  de  Jésus  toute  la  Co-  tem  :  &  exu- 

h,>.  0  ■•         j     r       entes     eum, 

orte  Prétorienne  j  ex  au  heu  de  les  chiamidem 

habits  ,  dont  il  étoit  dépouillé,  ils  le  coccincam 

,,  l  .,/      circumdede- 

couvnrent  d  un  vieux  manteau  d  e-  runc  ei  :  &c 
carlare ,  peut-être  le  même  qu'il  avoit  pie&entesco- 

F  1        1  il'        1  o  lonamdefpi- 

rapporte  de  chez  nerode  ;  oc  ayant  ais ,  pofu«; 


142.  Analyse 

A.  17-  b.  15.  fait  une  couronne  d'épines  entré- 
es 13.  D.i?.i    rpi  -111  r       1        * 

laliee  ,  ils  la  lui  mirent  lur  la  rete , 
«nr^in?crc&  &  une  canne  à  la  main  en  guife  de 

put  ejus  ,    oc  o 

arundinemin  fceprre.  Alors,  pour  jouer  fa  royauté, 

dexcera  ejus.   «j  \   1  1  \    r 

D.  Et  vente-  ^s  venoient  a  lui  chacun  a  Ion  tour, 
bancadcum:  Se  mettant  un  genou  en  terre  devant 

A.  ôcecnufle-  1  1  j         1 

xoaiueeum/ul  >  comme  pour  lui  rendre  leurs 
illudebancei.  hommages ,  ou  faire  entre  fes  mains 
rûnc  falacarc  ^e  ferment  de  fidélité  ,  ils  lui  di- 
cum,  A.di-foient  :   Salue  au  Roi  des  Juifs  ;  ÔC 

cemes  :   Ave  1     •  il  t  1     • 

Rex  judaro-  pour  lui  payer  le  tribut ,  les  uns  lm 
rum.  d.  Et  doniioient  des  fourriers  de  toute  leur 

dabanteiala    r  1  1     •    1  j     1 

pas  ;  b.  &  rorce  ,  les  autres  lui  donnoient  de  la 
percutiebant  canne  par  la  tète  pour  enfoncer  fa 

capuc  ejus  a-  l  o      1  r        1     • 

îundine  ;  &  couronne  ,  ce  les  autres  enhn  lui 
confpuebanc  ayant  défiguré  le  vifage  de  leurs  cra- 
nente's  genua  chats ,  faifoient  femblant  de  l'adorer 

adorabant  e-  £  aenoux. 
um.  ° 


mo. 


4.Ecceho-  4.  Voilà  V  homme. 


d.  Exiv'it      Avant  que  d'expofer  aux  yeux  des 
ergo   iceiùm  Juifs  ce  fpeftacle  pitoyable  ,    Pilate 

Pilatustoras,  r  r        J  J 

&  dicic  eis:les  prévint  pour  les.  y  préparer.  Il 
Ecce  adduco  jeur  £lt       >^  venoit  encore  le  leur 

vobiseumto-  .    .         *  ■. 

ras ,  ut  cog-  produire  ,  pour  leur  protelrer  qu  il 
nofcans,quia  ne  crouvoir  en  lui  aucun  crime  diçne 

nullam  inve-  ^  £> 

nioineocau-  de  mort.  Jésus  fortiten  meme  tems 
er«>*  Ejèfùs t0Ut  déchiré  de  coups  ,  portant  la 
portanscoro-  couronne  d'épines  fur  fa  tête  ,  &  cet 
vn  fpwcam  habillement  de  pourpre  fur  fes  épai* 


DE  l/EvANG.  Ch.  CXÎ  II.        I45 

les.  Ce  fpectacle  étoit  un  aveu  que  &p«rpu«uni 

Pi  r  •  r   •      a     r  -a.  h  •     veftimcncura 

îlate  raiioit  de  ion  injultice,  en  rai- 

fant  crairer  h  cruellement  un  homme 
qui  n'avoir  point  d'autre  crime  que 
d'avoir  déplu  aux  Grands- Prêtres  ; 
d'où  il  leur  laifloit  à  conclure  ,  que 
s'il  y  avoit  trouvé  quelque  crime  ef- 
fectif, il  ne  Tauroit  pas  épargné.  Pour 
les  toucher  de  compalîion  il  leur  dit,    T    ,.  .    . 

.  .    f .  •  r-       '     Etdiciteis; 

en  le  montrant  de   la  main  :   Voila 

,3  r  1  1     >  il  •     r-     Ecce  horao. 

/  nomme  dont  il  s  agit  j  il  leur  înli- 
nuoit  qu'il  étoit  dans  un  état  plus 
digne  de  leur  pitié,  que  de  leur  hai- 
nCj  &:  que  s'il  leur  reitoit  encore  quel- 
que Gentiment  d'humanité  _,  ils  dé- 
voient lui  laifler  ce  peu  qui  lui  refloic 
de  vie. 

Mais  ce  lâche  Juge  ne  tira  point 
de  ce  moyen  barbare  le  fruit  qu'il 
en  avoit  elperé.  Comme  il  avoir  lâ- 
ché le  pied  jufqu'à  leur  accorder  une 
partie  de  ce  qu'ils  lui  demandoienr, 
il  s'étoit  arToibli  pour  leur  refufer 
le  refte.  Le  Prince  des  Prêtres  ,  ÔC 
leurs  gens  reçurent  cette  condefcen- 

dance  de  Pilare,  comme  un  engage- 
ai    r   ■        rwî      1  »*i       •  Cùm  ereo 
ment  a  la  luite.  Des  iorsqu  ils  virent  vidiflenceum 

paroitre  Jésus  fur  le  perron  ,    crai-  Pomifices  ac 

1  >  1    •        1      miniitri ,  cla- 

gnant  que  cette  vue  11  attendrit  le  mabant ,  di- 
peuple  pour  lui  ,  ils  commencèrent  ce™cs:  Cru* 
les  premiers,  pour  en  donner  l'exem-  c\&p  cum. 


144  Analyse 

c'  *7'd*  Y'  P^e  *  *  cr*er  ;  Crucifîel-k  j  crucifie^- 
'  le.    En  vain  Pilate  en  colère  contre 
latS •  Accipi-  une  fl  grande   brutalité  ,  leur  du  : 
te  eum  vos ,  Prenez-le  vous-même  _,    &  fi    vous 
egoenimnon  l  °M  -»  crucifieriez  pour  moi  je  ne 
invenioineo  trouve  en  lui  aucun  crime.  Cette  op- 
pofition  ne  fervit    qu'à    leur   flaire 
avancer    leur     III.     charge     qu'ils 
avoient  fupprimée  jufqu'ici ,  dans  la 
crainte  qu'elle  n'eût  un  effet  tout  con- 
traire. 

Pour  éluder  la  raifon  du  Gouver- 
neur ,  que  félon  les  Loix  Romaines , 
dont  il  devoit  fans  doute  être  inftruit, 
Jésus  n'avoit  rien  commis  qui  mé- 
ritât le  dernier  fupplice  ,  ils  le  remi- 

Nos  kgem  favoit  pas  ,  &:  ils  lui  alléguèrent  que 
ficundùm  £  félon  une  de  leurs  Loix  il  devoit 
gem     debec  mourir  ,  parce  qu'il  s'etoit  fait  palier 

mori  ,    quia  i      r -i      j      fv-  >  i  / 

fîiium  Del  fe  pour  le  rils  de  Dieu  :  ce  qu  ils  pre- 
fecit.  tendoient  être  un  blafphême  qui  in- 

troduifoit  deux  Dieux  dans  le  mon- 
de j  puifque  le  Fils  de  Dieu  devoit 
être  Dieu  comme  fon  Père  ,  &  un 
Dieu  tout  différent  de  lui. 
cùm  ergo  A  cette  parole  Pilate ,  quines'in- 
audiffet  pila-  commodoit  gueresde  la  pluralité  des 

tus  hune  fer-  ç  ,  r 

monern ,  ma-  Dieux  ,  rut  trappe  d  une  horreur  le- 
gisumuic.     cretre>  qu'il  n'eût  traité  le  Fils  de 

quelque  Dieu  d'une  manière  fi  bar- 
bare» 


de  l'Evang.  Ch.  CXLIÏ.  14$ 
bare.  Il  joignit  cette  accufation  à  tous 
les  miracles  qu'il  avoit  faits  j  à  cette 
indifférence  pour  la  vie  ,  à  cette  pa- 
tience dans  les  tourmens ,  qui  ne  s  é- 
toit  pas  laifTé  échaper  une  feule  pa- 
role de  plainte  j  à  ce  lilence  furnaturel 
dans  les  queftions  les  plus  favorables  : 
toutes  chofes  impodibles  au  commun 
des  hommes;  il  foupçonna  dans  Jésus 
quelque  chofe  de  divin,  8c  au-deflus 
de  l'homme  ,  dont  on  lui  faifoit  un 
crime. 

f.  Secunîa. 

5 .  o  econde  interrogation  de  Ptf*ti  muno. 

Pilate.  ëano' 

Pour  s'en  éclaircir ,  il  rentra  prom-    Er  îr.greiïus 
ptement  dans  le  Prétoire ,  &  s'étant  îr%*co.riT 

m  1 L  C  1  U I  II      j        Oc 

fait  fuivre  par  Jésus  ,  il  lui  demanda  àixïi  ad  je- 

doùilétoit;c'e(tâ-dire  d'où   Ùti-*™;  Ullde 

roit   fon  origine ,  de  quels  parens  , 

de  quelle  famille,  qui  étoit  fon  père 

&  fa  mère  :  car  il  iavoit  qu'il  étoit 

de  Galilée,   8c  il  ne  lui  demandoit 

pas  ce  qu'il  favoit.   Jésus  ne  fit   à    T  r 

r  1  Jefussorem 

cela  aucune  reponle  ,  1  .  Parce  que  refpomum 
cette  queftion  étoit  inutile  à  la  déci-  nou  dedu  Cl' 
fion  du  fend  de  la  caufe.  1.  Il  y  avoit 
déjà  furHtamment  répondu  ,  en  lui 
difant,que  fon  Royaume n'étoit  pas 
de  ce  monde  ,  &  qu'il  y  étoit  venu 
Tom,  IF.  G 


146  Analyse 

A.  17.B.  ij.  parla  nailfance.  Pilaten'étoit pas  ca- 
pable d'une  plus  ample  inftruction  j 
elle  ne  pouvoit  fervir  qu'a  fa  déchar- 
ge ,    &  il  ne  vouloit  rien  faire  pour 
conferver  fa  vie. 
Dicit  ergo      Pilate  s'offença  encore  de  ce  filen- 
mihi  non  io-  ce.  Vous  ne  me  parle^  point ,  lui  dit- 
l^oilt,^"  ^en  colère  ,  à  moi  ?   Ne  faver-vous 
ftatcmhabco  pas  que  je  puis  vous  faire  attacher  à 

te    &  pocei-  une  croi:c  j  °^  vous  renvoyer  abjous  f 
tacem  habeo  Cette  vanité  de  Pilate  obligea  Jésus 

dimitteie  te  î     1      1     •      /  j  >•!       > 

RcfponditJc-  «e  lui  repondre  ,    qu  il  n  auroit  pas 
fus?  Non  ha-  Heu  d'exercer  ion  pouvoir  fur  lui,  fi 

berespotefta-        •  >    a        /    /  /  l        '      j       1 

tcm    adver-  cela  n  euc  ete  rnenage    de  loin  par 
fum  me  ui-  une  difpofitioii  fecrette  de  la  provi- 

lam  ,   niu*  ti-    ,  f-    .  •,/•/••       1 

bi  datum  cf-  dence  divine  ,  qui  s  etoit  lervie  des 

fcc  defuper.    pallions  de  des  vices   d^s   hommes 

pour  le  faire  tomber  entre  fes  mains, 

6v  pour  le  mettre  lui  Pilate  dans    la 

Proptcrea  néceflité  de  le  l'user.  Qu'aufii  ,  pour 

qui  me  cradi-    ..  .  1      r      v     r      J'    1 

dictibi,  ma-  dire  quelque  choie  a   la  décharge  , 
jus  peccatum  c'eft  ce  qUl  aggravoit   le   péché   de 

habec  71  ,      ,  &P  .  . .   r  ,      , 

ceux  qui  le  lui  avoient  livre  ,  beau- 
coup plus  que  le  fien.  Car  ceux  là 
avoienr  mérité  ,  L-s  uns  par  leur  ava- 
rice ,  les  autres  par  leur  envie  j  les 
autres  par  leur  orgueil  infolenc  ,  que 
Dieu  le  fervît  d'eux  pour  le  faire 
fouffrir  ,  lorfque  contre  leur  con- 
feience  ,  ils  Tavoient  dé^cié  comme 
un  fcélerac  à  fon  Tribunal  7  au  lien 


,  Ch/CXLH  :  i" 
que  Pilace  n'ci  il  foc  loi  b  Ju- 
nfdiâion  ,  que  par  l'obligation  que 

lui  cri  impoloit    la  charge  de 

:    Je   la  Province  ,  qui  dev 
la    j n il  1  ut  le    momie.     (Quelle 

admira. 

d'une 

manière  li  injure  cv    II  bai.    n  .    de 

[Oeiaoe   iorte    ion    apolo- 

Dèslorsl  <<  paroirr:  aux  Juirs      Et  c 

qu'il  c- 

la:u\    di 

oie  abfous    il  -»^ra 

naimoit    point    Cclar  ;   car  ce  n  eit  :  si 

pas  aimer  C  ctar  que  de  pardonn. 

I  .  »  «  .    non   c» 

1  »n  ennemi.   Or  quiconque  le   tait  c*f« 

Roi  comme  Jesui  ,  le  déclare  1 

nemi  il;  l        .     Le  malheui   ir*  Ju 
cotnba  fou 

.appe  d'un  coup 
de  foudre.   1  \j%  t 

l'amour  pour  la  ju  le    foin    : 

D  boni  Ion  aurai  te 

ItC  en  un  momen 
yeux.  Il  i  plus  qu'i    I  ibère 

M  plu  i  lia  les  ii  ,  , 

&  a  la  mal u 

q  ne  pas  de  nt  ce 

Pi  d'avoir  fauve  la  vie  au  Roi 

G  il 


14S  An  A  LYSE 

A.  17.  B.  iç. 
C.  13.  D.  19. 

6.  Jésus  livré  à  la  Croix. 

6.  Chriftus 
îrj.d.tur  cruci- 

jisendus.  H    fe  donna    néanmoins  le  loifïr 

dans  un  fi  grand    trouble  ,    de    faire 

un  dernier  efiort  pour  fauver  Jésus 

par  ce  IV.   moyen  aulîi   inurileque 

Pilatusau-  les  autres.  Il  le  fit  forcir  dehors,  &:  il 

tem  cùm  au-  s'atfît  dans  fon  Tribunal  ,  élevé  fur 

diflet        hos  ,    ,  , ,      .     . 

fermonesid-  un  perron  pave  de  pierre.  C  etoïc  le 
duxit  foras  jOLir  c[e  ja  parafée ve  ;  c'eft-à-dire  , 
dicproaibu-  de  la  préparation  a  la  raque  ,  qui 
caii,  inioco  fe  fajt  }a  veille  ,  &  il  éroic  environ 

qui      dicitur   ,       r  ,  ,  ,    a 

Lkhoftroros ,  la  lixieme  heure  du  jour,  c  eit-a- 
Hcbraïcè  au-  ^ire      entre  onze  heures    &   midi. 

tem     Gabba-  *       .      ,  A     , 

tha.  Eracau-  IL  les  prit  de  tous  cotes  pour  les  cou- 

tem  parafée-  cher 

ve    Pafch*,  A    ,  , 

horâ  quafi  i.  Du  cote  de  1  amour  qu  ils 
fexta  i  avoiênt  pour  leur  Meffie,  8c  de  i'hu- 

manité  pour  les  miférables ,  en  joi- 
gnant l'un  &   l'autre  dans  la    per- 
se dkit  Ju-  fonne  de  Jésus  ,  Voilà  _,  leur  dit-il  j 

Rcxvcfter!"  en  ^e  ^eLir  montrant  >  vo/Ai  votre  Roi 

dans   cet  homme  le  plus  miférable 

de  tous  les   hommes.  Où  elt   votre 

amour  pour  votre  Roi  ?■  où  eft  votre 

compaiîion  pour   la   mifere  de    vos 

illi  autem  femblables  f  Mais  il  ne  reçut  point 

ToUe^oiie    d'aucre  réponfe   que  ces  cris  cumul- 

ciuciiïgc    c-  tuetix  :  Otc^-lc  j  ôte^-lc  }  crucifie^ 


dï  l'Evang.  Ch.  CXLÎI.     149 

2Q.  11  les  centa  du  côté  de  la  con-    .,  Dîcît  cîs 

r  •  ni  •  1  -il  >\   Pilatus   :   Re- 

icience  ,    ce  du  crime  horrible  qu  il  gem  veitmm 
y  auroic   dans   cette   exécurion.    ^  «uafigam  ï 
Dieu  ne  plaife  _,   dit- il ,  que  je  com- 
mette un  aujjl  grand  parricide  que  de 
crucifier  votre  Roi  !  Mais  les  Grands-      Refponde- 
Prêtres  qui  crurent   que  ce  cas  de  ruru  Ponufi' 
confeience  les    regardoit  ,     &   que 
c'étoit  à  eux  à  y  répondre  ,    prirent 
la  parole  au  nom  de  tous  ,  la  défa- 
vouerent  hautement  pour  leur  Roi  ; 
&  procédant  qu'ils  n'avaient  point  Noa    babe- 
d'autre  Roi  queCéfar  ,  ils  renonce-  m[l*   *egcm 
rent  aux   promettes  que  JJieu  leur 
avoit  faites  de  leur  envoyer  le  Mef- 
fie. 

3°.  Rejette  de  ces  deux  épreuves,     a.  videns 

o.  1    • 11  1  aurem  Pilatus 

ot  voyant  que  loin  d  avancer  ,  le  tu-  quja     nihii 
multe  croilfoit  de  plus   en  plus ,   il  proficeret , 

1  r       j       j  h     1  T\      1  •  fed  magis  tu- 

les   ionda  du  cote  de  la  crainte  ,  en  muhusfieier, 
leur  repréfenrant  le  fupplice  épou- 
vantable qui  étoit  attaché  à    cet  at- 
tentat :  pour  les  en  toucher  plus  vive- 
ment ,  il  y  employa  la   cérémonie  ; 
il  fe  fit  verfer  de  l'eau  fur  les  mains,  accepta  aquâ 
&  en  fe  levant  il  protefta  devant  tout  J^™™ 
le  peuple  ,  qu'il  avoit  les  mains  pures  lo  ,   dicem  : 
du  fang  de  ce  Jufte  ,  &    qu'il   étoit  [™S- 
innocent  de  fa  mort  ;  qu'ils  y  prilTent  ne  Jufti  hu- 

_,      j_  »/       •      \  \  /  jus   :    vos  vi- 

garde,  que  c  etoit  a  eux  a  en  repon-  'demis. 
dre.  Tout  le  peuple  moins    fetupu-  Etrefpondenj 

G  iij 


1 5  «  Analyse 

a.  17.  F.  iS.  leux  que  Pilare  ,  confentit  qu'à  Pé- 

C.  15.  D.  1^.  1  j     1  \      r 

gara  de  la  vengeance  ,  tout  le  lang 

univerfuspo-  j_  t. 1*  ri  r 

puiusdixk:  de  Jésus  ne rombac pas  ieulement  Iur 
leurs  mains  pour  les  teindre  ,    mais 

Sanguis   ejus  r       .  A    r  11       j      1 

fupemos,  &  tur  leurs  têtes,  &  iur  celles  de  leurs 

nXos  fiIlOS  enfaDS- 

Voilà  dans  ces  trois  actes  le  fonde- 
ment de  la  réprobation  des  Juifs  juf- 
qu'à  la  fin  dus  lîécles  ,  i°.  Ils  ont 
procuré  la  mort  du  Meflie  que  Dieu 
leur  a  envoyé.  2°.  Ils  l'ont  renoncé 
pour  jamais  ,  en  ne  reconnoiifant 
point  d'autre  Roi  que  Céfar.  30.  Ils 
ont  engagé  leurs  âmes  6c  celles  de 
toute  leur  poftérité  à  la  vengeance 
éternelle  de  Dieu. 
b.  Pilatus       Enfin  Pilate  pouffé  à  bout  de  tous 

ZStoûZ côcés donna au PeuPle toute  la fatis- 

facere,c.  ad- faction  qu'il  demandoit.  11  leur  ac- 
î?P«h£JeM  cocha  ce  Barabbas  qui  étoit  arrêté 
eorum.Dimi-  pour  les  crimes  de  meurtre  ôc  defé- 

Cn  autemillis    i  •    •  o     "1    1'  T  A^-^ 

cum,quiPio-dition;  &  il  livra  Jésus  pour  être 
pter  homici-  crucifié ,  ainfi  qu'ils  le  vouloient,fans 

dium  &  fedi-  n  /  •         \        a         il 

tionem  mif-  renouveller  néanmoins  la  nagella- 
fus  fueracin  cion  qUi  précédoit  toujours  le  der- 

circerem  ,  -ri-  >1  i»         *     J '• 

«juem  pete-  nier  iupphce  ,  parce  qu  il  l  avoir  déjà 
bant  :  a.  je-  foufFerte.   Voilà  où  fe   terminèrent 

fjm      autcm  <  ,rrt  i       rvi  ! 

flagciiatum  toutes  les  reliitances  de  rilate,  qui 
G.     tradidit  au  jjeu  Je  fe  fouvenir  qu'il  avoir  en- 

'olumati  eo-  ,  .  »*   i       \,r 

,  a.  ut  tre  les  mains  le  pouvoir  de  1  tmpe- 


vo 

rum 


crucih-ete-    reur  pour  foutenir  la  juftice  &  Tin- 


DEl/EvAtfG.Ch.CXLllI.        151 

nocence,  immola  lâchement  à  fa  for- 
tune l'une  Se  l'autre  dans  la  person- 
ne de  Jésus  ,  pour  n'avoir  ofé  le  fau- 
verque  duconfentement  defes  mor- 
tels ennemis.  11  devoir  s'expofer  à 
tous  les  hazards  de  l'indignation  de 
Tibère  ,  &  des  Juifs  ,  en  laiffant  au 
Giel  le  foin  de  l'en  délivrer  ,  parce 
qu'il  n'elt  pas  petmis  de  faire  un  mai 
pour  en  empêcher  plufieurs  autres. 
Ses  infrances  néanmoins  pour  déli- 
vret Jésus  n'ont  pas  été  inutiles  ;  Ci 
elles  n'ont  rien  fait  pour  le  difculper 
devant  Dieu ,  elles  ont  mis  l'inno- 
cence de  Jésus  dans  un  jour ,  que  fa 
condamnation  ne  fait  que  relever  da- 
vantage. 11  n'y  eut  jamais  d'aceufé 
plus  innocent  ,  que  celui  qui  eft  ab- 
fous  par  le  Juge  meme  qui  le  con- 
damne. 


CHAPITRE    CXL1ÏI.        cap.cxlm. 
Crucifiement  &  Mort.        *•£»;*>- 

Crucifixio 

1.  Portement  de  la  croix,  &Mors' 

1 .    Cruel i 

LE  refte  des  fouffrances  de  Jésus  bajuiado. 
fe  réduit  ;    1.  A  la  douleur.   II. 
A  la  honte.  La  douleur  fe  fit  fentir 

G  iv 


i  $1  Analyse 

A.  17.B.1J.  fans  le  portement  de  la  croix  ,  & 
dans  le  crucifiement  :  de  la  honte  rut 
caufée  par  la  nudité  j  &c  par  les  infui- 
tes que  lui  firent  toutes  fortes  de  per- 
sonnes ,  Juifs ,  Gentils ,  Grands- Pre- 
D-;^s^-  très,  larrons  &  foldats. 

ceperunt  au-  '  # 

cem  Jcfuni  j  Les  foldats  fe  faifirent  de  Jésus,  Se 
Jiîiufîrî:  l'ayant  dépouillé  de  ce  vil  habille- 
mntei,  exue- ment  d'écarlate  dont  ils  l'avoient 
purpura*,  &  couvert  ,  ils  le  revêtirent  de  fes  pro- 
e-  près  habits ,  foit  pour  ne  pas  perdre 
"■sl  :a"  le  droit  qu'ils  y  avoient ,  ou  pour 
&  educune  ie  rendre  plus  reconnoilïable.  Ils  le 
Wwn,utcru-  firent  fortir  du  Prétoire  pour  le  me- 

cineerent    e-  .  r  _  a 

um  D.Erba-  ner  cruciher.  ht  comme  ceux  qui 
juians  fibi  étoient  condamnés  à  ce  fupplice  , 
vit  in  eum,  etoient  obliges  a  porter  eux-mêmes 
S"|    dîcitut  la  croix  a  laq-uelle   ils  dévoient  être 

Calvaria:    lo-  .    ,  1  1        1        r  -i 

cinn,HxLra- attaches;  pour  garder  la  rorme  ,  ils 
ïcè  aurem  chargerentjEsusdelafienne.il  mar- 
cha  fous  ce  poids  jufques  hors  de  la 
ville  ,  vers  le  lieu  nommé  en  Latin 
le  Calvaire  ,  à  caufe  desoflTemens  de 
ceux  qu'on  y  faifoit  mourir  }  &c  en 
Hébreu  Golgotha  ,  qui  a  le  même 
fens.  Mais  comme  ils  vouloient  lui 
épargner  le  tourment  de  porter  fa 
croix  jufques  fur  la  montagne  ,  Se 
n'ofant  de  peur  de  caufer  du  tumulte, 
contraindre  aucun  de  tout  a  peuple 
qui  fuivoit ,  à  un  minif.ere  ^ue;  >~us 


DE    l'EvANG.  Ch.  CXLIII.     15.3* 

eftimoient    abominable  ;  heureufe-    tC.  15.  it 

.      '     .        ...  cumducerenc 

ment  ils  rencontrèrent  hors  la  ville  un  eum,  a.  in- 
païfan  étranger,  qui  venoit  delacam-  veneru°t   B» 

r  &      »   1  .  practcreua- 

pagne  _,  nomme  Simon  ,  de  la  ville  tem  quem- 
deCvreneen  Lybie,  le  père  d'Ale-  ?iam  Ar'h°- 

1  1     r»     r  1  ^i      »   •  minera  Cyre- 

xandre&deRurus,  deux  Chrétiens  naeum,nomi. 
illuftres  ,    en  faveur  defquels  faint  îcJivao"™ 

t    %  r        r  -il      B.venicntcm 

Marc  a  marque  dans  Ion  hvangile  la  de  villa,  pa- 
part  que  leur  père  avoit  eue  dans  le  ^s^ufT* 
portementde  la  croix.  Les  exécuteurs 

r     a  rr  _  A.     Hune 

arrererent  ce  patient ,  ce  avec  une  in-  angariave- 
folence  foldatefq  ne  le  forcèrent  à  por-  ru"c'  ut  B' 

•    r  r      i1  r>   i       ■        i  ■      i      tolleret    cru- 

ter  julques  lur  le  Calvaire  lacroixde  cem  ejus^c, 
Jésus  qui  marchoit  devant  lui.    On  &   impofuc- 

^  runt  il  1 1  cru- 

ne  peur  guère  attribuer  cette   huma    cem  pcmare 
nue  des  ibldats  envers  Jésus  , qu'aux  folt  Jcfum» 
ordres  que  Pilate  leur  avoir  donnés 
de  traiter  favorablement  un  homme , 
qu'il  n'avoit  condamné  que  par  force. 

2.  Larmes  &  regrets  des  femmes.        ?■• MuluTet 

D  J  plangentcs. 

Il  étoir  fuivi  des  Prêtres  Se  des 
Docteurs  ,  qui  pour  ô:er  tout  lieu  au 
Gouverneur  de  leur  donner  le  chan- 
ge ,  8c  de  fubftituer  quelqu'aurre  en 
la  place  ,  s'étoient  fait  une  affaire  de 
politique  de  ne  le  point  quitter,qu'ils 
ne  l'eulfeiuvii  expirer  fur  ta  croix. 
Avec   eux  venoit   une  grande   foule     sequebami 

j  \        a     r  P  r  •   aurcm   illum 

de  peuple,  &  iur-rout  deremmesqui  muica  mrfc 

G  v 


154  Analyse 

c*  i7.'d  [l]  ^e  P^euro^enr  avec  de  grandes   mar- 
'  ques  de  deuil  &  de  déïblation  :  (  car 

populi  ,     5c    i    „  î  >  r>    \  i 

niiîlierum,     ies  nommes  n  auroientote  devant  les 
qux  pUngc-  Grands-Prêtres  donner  aucune  mar- 
mencabtuur  que^de  criftefli.  } 
€um.  Cette  compaflion ,  quoique  pure- 

Converfus  1  »    ■       ii-t 

ain- m  ad  il- ment  namaîne  obligea  Jésus    ,    qut 
lasjcfus,  di-  éroir déchargé  de  fa  croix,  à  Te  tour- 

xic  :  Fi  lis  Je- 

rufaifm,no-  ner  vers  elles ,  &  à  les  prier  de  mé- 
lice  flcre  fu-  nager-mieux   les  larmes  qu'elles  ré- 

par  me  5   fed        c  ,  .  r      i     •    it  i 

îup.rvosip-  pandoient  inutilement  lnr  lui.  11  leur 

fasflere,  «c  repréfenra  que  dans    la  prévoyance 

veilros.         des  malheurs  qui  dévoient  venger  la 

mort  ,  elles  dévoient   les  employer 

pour  elle  -  mêmes  &  pour  leurs  enfans. 

Il   leur  jultifia    ce    confeil     par  la 

ruine  future  de  la    ville   de  Jéru- 

falem. 

Quoniam       i  °.   Dans  la  part  que  celles  de  ces 

ccce  vemcnt  fernmes  qUi  feront  encore  vivantes 

dks,  in  qui-  1 

bus   dicent  :  dévoient  prendre  comme  routes   les 
Bearac    ften-  autres  dans  les  maux  &  dans  la  more 

les,  &c  ven-  .  ■ 

très  qui  non  de  leurs  enrans  ,   qui  leur  lont  d  or- 

ruUberr?qua?  dirtaire  plus  fenfibles  que  leurs  pto- 

non  îaciave-  près  maux ,  &  qui  leur  feront  eftimer 

heur-enfes  les  femmes  (renies, qui  au 

moins  ne  feront  miférables  que  dans 

leurs  perfonnes ,  &   de  leur  propre 

mifere. 

Tune  incî-       2°.  Par  le  poids  infuppombledes 

*icnt     dicerc  n  •     r       i  r  i 

Koacibus  ;    malheurs  qui  fondront  iur  tous  les 


de  i/Evàng.  Ch.  CXLIII.     1 5  5 
Juifs,  &  qui  leur  feront  fouhaiter  que  Caditf  faf*e 
les  montagnes  les  ecralent  par  leur  bus  :  opemc 
chute  dans  les  cavernes  où  ils  fe  ré-  nos* 
fugieront,  &  que  les  colines    s'abî- 
ment fous  leurs  poids,  &c  les  englou- 
tiflent  tous  vivans. 

3°.  Par  la  comparaifon  de  ce  qu'il     Quia  /î  in. 
fourîre  avec  ce  qu'ils  foufFriront.Car  ^dunT 
fi  on  traite  ainn*  le  bois    verd  ,     que  la  aridoquid 
fera-ce  du  bois  (ne  ?    Il  fe  compare 
au  bois  verd  ,    les  Juifs  au  bois  fec  , 
&  le  fupplice  au  feu.  On  nedeftine 
pas  au  feu  le  bois  verd ,  à  caufe  de  fa 
fécondité  &  de  fon  humidité  j  le  bois 
vif  n'eft  pas  bon  à    brûler  ,    parce 
que  d'un  côté  il  eft  encore  en  état  de 
porter  du  fruit ,  &  ce  feroit  une  per- 
te ;  &  que  de  l'autre  il  eft  humide  , 
&  il  y  auroit  de  la  peine  à  lui   faire 
prendre  feu.  Au  lieu  que  le  bois  fec 
eft   de  ces  deux  cotés  une  matière 
fort  combuftible.  Si  donc  tel  eft   Té- 
tât déplorable  où  les  Juifs  ont  réduit 
l'innocence  &  la  fource  féconde  de 
toute  fainteté  ,  pour  laquelle  les  pei- 
nes de  la  juftice  n'ont  point  été  éta- 
blies j  a  quel  excès  de  mifere  en  cette 
vie,  &  de    malheur  éternel  dans  le 
fiécle  à  venir,   la   juftice  de  Dieu 
réduira- t-elle  des  parricides  comme 
eux  ? 

G  vj 


156  Analyse 

A    17.  B.  iy. 

.     ^or/     $.  Premier  breuvage.  Crucifiement. 
prima.  Crità-  Pardon  demandé. 

Pater 

dimltte. 

_     ,  On  menoit  auffi  deux  criminels  * 

Duccbanrur     1  r      r  i  11  » 

âurem     alii  charges  ians  douce  de  leurs  croix  _, 
duo  nc-4Mam  !elon  |a  coutume ,  pour  les  faire  mou* 

cum    .0  ,    uc  1  1        ,        >  r  ' 

interficcren-   rir  avec    lui.    Lonqu  on   rut    arrive 
tur  B.Ecper-  <uv\t  Calvaire  ,  on  lui  donna  à  boire 

durant  -Hum  £  M,     ,, 

iu  Golgocha  c  un  vin  rumeux,  mêle  d  une  myrre 
locum,  quod  çoï\  air.ere.   On  en  uioitainfi  envers 

cjtinterprcca-  .  ,  \  r 

cum    ca:va   ceux  qu  on  execiuoit ,  pour  leurror- 
n«  locus.      riher  le  cœur  contre   les  douleurs  de 

A.  Et  dede  -, 

runc    ei  vi    leur  lupphee  ,  &  pour  en  amortir  le 
mimbib.reB.  fentirr<enc  par  les  vapeurs  decebreu- 

myrrarum    ,  r  J 

A.  cum  l'a. e  vage.   Jésus  en  goûta  pour  obéir  a 
niiftum  :   &  jaCoutume;  mais  comme  il  vouloir 

oc    cum   gui-  ri  rr  1 

taflet,  noluit  ïourrrir  fans  adoucmçment  la  mort 
bibere.  ^e  ja   croix  ?  armée  de  toutes    (es 

douleurs ,  il  n'en  voulue  point  boi- 
re. 
B.iratau-  Ils  le  crucifièrent  lorfqu'il  étoit 
S"  ^?r»!î"  la  fixieme  heure  du  jour  ou  midi , 
fixerunteum,  &  avec  lui  ces  deux  criminels ,  1  un 
Siot  luo"  c°  à  droite  ,  l'autre  à  gauche  ,  &  Jésus 
larron: s  ;  u   au  milieu.    Le  texte  de    faint  Marc 

Su*,  &  ahe-  Porre   que  ce^a  *~e  ^C  a   la  troifieme 
ron  A  unir,  heure  :  fur  quoi  voyez  la  Dijjertation 

tris  ,  D   me-    -..  y  y  prr 

Jefttm.  Et  alors  fut  accomplie  la  prophé- 

B.    Et  im-  ,,ir  ..  •  •  ->  1  '   A 

picca        cit  tie  d  Haie  ,  qui  portoit  q»  il  a    ete 


de  l'Evang.  Ch.  CXLIII.     157 

mis  au  ranidés  fcélerats.  Cependant  Scr«ptur*  » 

J.    v     r  111  quaedicic  :  Ec 

es  us  pnoir  Ion  père  de  leur  pardon-  Cum   iniquif 

ner:  Ôc  pour  les  excufer  en  quelque  «pucatuseft. 

manière ,  11  allcguoit  leur  ignorance,  tem  dicebac  : 

ôc  qu'ils  ne  favoient  ce  qu'ils  fai-  Pa«>> dimic- 

-   .  ^  T.  te  îllis  i  non 

lOienC.  enim    fciunc 

quid  faciunc. 

4.  Tare  de  la  croix,  4-  Titulus 


cructs. 


Pilate ,  pour  faire  dépit  aux  Grands-  d.  scrSpfît 
Prêtres  ôc  aux  Dodeurs  ,  fit  dretfer  ^  *£ 
un  écriteau  pour  le  mettre  fur  la  tus;  &  pofuic 
croix  de  Jésus  au-de(ïus  de  fa  tête.  ÇcZ\r,CAt 
11  contenoit  fon  nom  ,  fa  patrie,  Se  tem  b.  mu- 
la  caule  de  fon  fupplice  en  ces  ter-  -.™  "^*  & 
mes   :    Jefus  de    Nazareth    Roi   des  impofucrunc 

/•  r      t        r^   1  »i  '  i  »  fuper     caput 

uifs.   Le  Calvaire    n  étant    éloigne  ejL,s   caufcnl 

de  la  ville  qu'environ  de  deux  ftades  ,  »Pfîus  fcriP- 

ai  l  tam  :  nie  elt. 

e  deux  cens  cinquante  pas,  plu-  d.  Jefus  Na- 

fieurs  Juifs  de  tous  les  pais  du  monde  "rf™s  Rex 

ia  ,  ii-  Judarorum. 

lurent  avec  beaucoup  de  chagrin   ce  Hune  «go  cl- 
titre  écrit  pour  cela  en  Hébreu  ,    en  tu!,um  mulci 

r^  o  1        •  •     1  '  1     •     Judsorum 

Grec  &  en  Latin  ,  qui   les   renuoir  îegerunc  : 
la   fable  de  tous   les  peuples ,  l'op    *ui.a    ProPe 

.  .  .  1  ,         r      civi:acem    e- 

probre  de  toute  la  terre  ,  Ôc  !  1  honte  rat  Locus,abi 
de  l'univers,  en  les  aceufanr  d'avoir  5rï    iU3  eft 

v  »  Jefus.  Eccrac 

attache  a  une  croix  leur  propre  K01 ,  fcripeura Hè- 
le Medie  que  L):eu  leur  avoit   pro-  b^£^è> 
mis  ,    de   qu'ils   attendoient  depuis 
tant  de  fiécles.  Les   Grands-  Prêtres 
qui  croient  fur  le  Calvaire  ,    outrés 


î5$  Analyse 

à.  17.  b.  m.  de  cet  écriteau  ,  envoyèrent  prier  Pi-* 
late  de  changer  ce  Roi  des  Juijs^ovit 

g?ICebpil7co  ces  mots  foi  difant  le  Roi  des  Juifs. 
Ponrificesju-  Mais  Pilate  demeura  ferme  dans  fa 
li  (ccibcre ,  première  penlce  ;  ce  qui  ejt  écrit  ejt 
Rex  fumju-  écrit  ,  leur  dit  il  fièrement  \  &  il  eut 

décorum.  Rc-     1  •  r  J       1  ~ 

fendit  Pila-  "eax  railons  de  le  concevoir  en  ces 

tus  1  QuoH  termes. 

^crip  i,  icnp-  ^  1.  e(r ,  que  n'ayant  plus  rien  à 
craindre  du  côté  de  Tibère  ^  il  fut 
bien  aifederendreà  Jésus  l'honneur 
qu'il  lui  avoit  ravi  par  fon  arrêt  ,  en 
lui  ailurant  la  qualité  que  fes  fe6ta- 
teurs  lui  avoient  donnée. 

La  2.  eft  ,  que  pour  fe  venger  de 
la  violence  que  les  Juifs  lui  avoient 
faite,  il  fe  fit  un  plaifir  de  couvrir  toute 
la  Nation  de  honte  Se  d'infamie  pour 
tous  les  fiécles  à  venir  ,  par  un  mo- 
nument éternel  qui  portoit  qu'ils 
avoient  fait  mourir  leur  propre  Roi. 
Une  j.  au-delïus  de  la  portée  de 
Pilate  ,  eftque  ,  félon  les  prophéties, 
le  Roi  des  Juifs  devoit  foufTnr  la 
mort  de  la  croix  ,,  &  qu'ainfi  la  vraie 
caufe  du  coté  de  Dieu  pourquoi 
Jésus  étoit  attaché  à  la  croix  ,  eft 
qu'il  étoit  réellement  le  Roi  des  Juifs. 
Aulîi  Dieu  qui  lui  avoit  infpiré  ce 
titre  ,  ne  permit  pas  qu'il  le  chan- 
geât. 


DE  L'EvAtfG.  Ch.  CXLI11.       I59 

f/y  /•  /.  Sors  fu* 

5 .  Vttemens  au  Jort.  per  veJles%  J 

Après  que  les  quatre  foldats  l'eu-     Milites  er- 

1  ri  1  1  eocùmcruci- 

rent  crucih-e  ,  chacun  attachant   en  fixuTenccum 
même   tems   avec  un  cloud  le  pied 
ou  la  main  qui  lui  étoit  échue  ,    ils 
prirent  Tes  vêtemens,  qui  confiftoienr  "^mcnSc- 
en  une  robe  &  en  une  tunique  ;   car  jus, 
il  paroît  affez  que  le  manteau  étoit 
demeuré  chez  Caïphe.  Ils  couperenr  ^^^pa"! 
la  robe    par  les  coutures  en  quatre  tes ,  unicui- 

>  1      '       •  i>        /      que       militi 

parties ,  autant  qu  ils  croient  a  exe    parteni  &  tu. 
cureurs  :  &  comme  ces  quartiers  neni"m, 
pouvoient  pas  erre  égaux  ,  pour  évi   b.  mitrentej 
ter  querelle  ils  les  jetterent  au  fort ,  r?rrem  ,UPC' 

1  1  .  .'  eis,  quisq^uid 

pour  déterminer  la  part  qui  devoit  toiicret. 
échoir  à  chacun.  Mais  pour  la  tuni-     d.  Eratau- 
que,  qui  étoit  fins  couture,  &  d'un  tem    /un,ic* 

?     1      \t    J  IL  •     C      »       L         inconfutilis 

ieul  tniu depuis  le  haut  jutqu  au  bas.,  defuper  con- 
ils  jugèrent  bien  qu'étant  coupée,  texca  Per  lo~ 
elle  fe  défiieroit  peu  à  peu  ,  &  ne  Dîxerunt 
feroit  d  aucun  u^^e  :  fans  donc    la  erS°  ad  invI* 

.  D  r  v  ce  m     :      non 

couper  _,  ils  jetterent  au  lort  a  qui  /dndamus  e- 
des  quatre  elle  appartiendrait.     Ce  am'  Çe(!  r?,r" 

C        1»  \   rr  11  1    '      namurrteilla 

rut  1  accomplilîement  de  la  prophe-  cujus  fit. 
tie  de  David  ,  qui  fan  dire  à  Jésus  „■££££ 
d.  ns  le  Pfeaume  11.  Ils  ont  partage  dkem  :  Par- 

_    .  j  -1  c.      ■  1  ,.  titi  funi  vef- 

tntreux  mes  vetemens  >  &  //j  o/?r  tjim.ma  mea 
jette  ma  ro.  e  au  fort.  Voilà  ce  que  fibiiôc  tnve- 
firent  les  foldars.  Et  enfuite  s'étanc  ftcm    mcartt 


i£o  Analyse 

c.  i 7  d  If"  a^s  *  terre  '  ^s  ^e  gardoienr  >  f°ît  â*e 
peur  que  Tes  Difciples  ne  vinrent  le 

miferunt  for-  j  /        l         1     t  •  i  a    a 

tem.  Ec  min.  détacher  de  la  croix  j  ou  pmtot  ce  qui 
tes  ^quidem  eft  plus  apparent,  pour  empêcher 
a.  eÏ  feden-  °iue  ^es  Juifs  n'arrachalfent  le  titre  du 
tes  fervabanc  haut  de  la  croix  ,  tk  n'aioutaifent  par 
cura.  •     j    r  •     J  v 

voie  de  hut  de  nouveaux  outrages  a 

(es  douleurs. 
#.  BUf-  ç%   Blafphêmes  &  inCultes. 

pnemiœ  ç?  ir-  J£  J 

rifiones. 

Cette  crainte  étoit  d'autant  mieux 
fondée  ,  que  les  Juifs  voyant  l'objet 
de  leur  haine  dans  l'état  où  ils  le 
fouhaitoient ,  eurent  encore  l'inhu- 
manité de  lui  infulter   en  plulieurs 
Pnrtereun-  manières,    i.  Quelques-uns  parlant 
biafpkem""1  devant  ^a  croix  ^  le  maudilïoient  en 
banreummo-  branlant  la  tête  ,  &   vomilfoient  des 
fuaC&  dlcc"  inJuies    contre   lui.  Ils  i'appelloienc 
tes  :  vah  qui  un  destructeur  du  Temple  de  Dieu  , 

détruis  cem-  ■  /  j  i  > 

pium  Dci,&  °iul  pretendoit  le  réparer  en  trois 
in  triiuo  il-  jours.  Aveuglement  prodigieux  de 
cas;  lui   reprocher  le  crime  même  qu  ils 

commettoient  actuellement  contre  fa 
falva  trjmet-  perfonne  !  Ils  ajouroient  qu'au  iieu 

ipfum  :  :ï  Fi-     ,  /      ,  ...r       '  I       t-  i       i   r 

Uni  Dci  es,  de  ce  retablitlement  du    1  emple  il  le 

defee  ule   de  faavâr  lui-même  ,  &  qu'il  defeendît 

de  la  croix  ^  s'il  étoit  le  Fils  de  Dieu, 

c.  Er  ftabat  comme  il  s'en  étoit  vanté,   i.    Tout 

Eu,  &£*-  ^e  peuple  prenoit  un  plaifir   fingu- 


DE  i/EvANG.  Ch.  CXLI1I.       itfl 

lier  à  repaître  Tes  yeux  d'un  fpe&acle  debant  eum; 
qui  faifoit  toute  fa  joie  ,   il   fe  mo- 
quoit  de  fa   nudité  &   de  fes  dou- 
leurs. 

Les  Princes  des  Prêtres  >  les  Do-    a.  similiter 
deurs  de  la  Loi  &  les  Sénateurs  fe  *  pyn«P" 
divertilïoient  audi  enfemble  ,  en  lui  Mudentes 
reprochant  la  faulTeté   de  fes  mira-  ttoX'û* 
cles ,  &  fon  impuilTance  à  f e  déli-  dicebamiA- 
vrer.  Ils  prenoienc  cette  impuiifance  cit^fdpfam 
prétendue  pour  une  conviction   de  non     poteft 
FaulTeté  de  toutes  les  guérifons  &  de  £}"■  iiCC' 
toutes  les  réfurre&ions  qu'il   avoic 
faites.  Qui  le  croiroit  ?  Ils  lui    en 
firent  même  un  défi  folemnel  ,   Ôc 
ils   lé   piquèrent  d'honneur,  i.  Par  fl^xr irrffel 
Ja  qualité  de  Koi  d  liraci  qu  il  s  etoit  de  cruce ,  ôc 
(aillée  donner,    i.  Par   le  nom   de  credimus  ci  : 
Chnft  choifi  de  Dieu  ,  qu'il  s'étoit  fJl^lZ 
attribué.  3.  Par  le  titre  de  Fils   de  cft   chriftui 
Dieu  qu  il  avoit  pris  oc  avoue  dans  B#  defcendac 
leur   Confeil.    4.  Par   la  confiance  nunc  de  cru- 

»i  •  r\-  r      tri       ce ,  &  creda- 

qu  il  a  voit  en  Dieu  >  comme  ion  rils ,  mus . 
qu'il  ledélivreroit.  Ils  le  défierentpar  a.  confiait  in 
tous  ces  motifs  de  fe  délivrer  foi-mê-  Deoi  jibe;cc 

r  .     .  .  .  nunc,  fi  vulc, 

me  ,  de  delcendre  de  la  croix  en  leur  eum}  dixkc- 
préfence  ,  &  d'une  manière  il  vilîbîe  S?  :    Q.u'* 
qu  ils  n  en  puilent  douter ,  oc  ils  s  or-  fum. 
frirent  de  croire  en  lui  a  cette  con- 
dition. 

Les  foldats   toujours  infolens  lui  c.illudebant 


\6i  Analyse 

A.iy.B.ij.  firent  infulte  à  leur  tour,  lorfqu'enlni 

offrant  du  vinaigre  ,  ils  lui  difoient  : 
Sus  accf-  Sit*  es  U  Roi  des  Juifs ,,  fauve  -  toi 
dentes.&ace-  toi-même.  Mais  le  détail  enferarap- 

tum   ofFeren-  'IL 

tesei;diccn-   pOUe  plus  bas. 

tes  :  fi    tu  es 

Rex    Juda:o-  t/   . 

rum    falvum  7-    VoltUTS. 

re  fac. 

7.  latrones.      Les  voleurs  mêmes    qui  étoîent 
A.idipfum  crucifiés  à  fes  cotés ,  lui  faifoient  les 

autem  ce  la-        h  i  i>  • 

noncs  qui  mêmes  reproches  &  1  outrageoicnc 
IZ'rfuL  *T  auiîï  de  paroles  :  Si  fa  <u  /*  Chrift  , 
impropera-  lui  difoit  un  des  deux  en  le  blaiphê- 
bamei.  rnnnt  >fauve-toi  de  la  mort  ^  &  nous 
c.  unusau-  avec  t0l%  Le  blafphème  confiftoit.  en 

tem  de   his,  r  r  >»    '  1    #^L     n. 

qui    pende-  ce  que  iuppolant  qu  il  eroit  le  Chrift 

busrbUf°hc*  &IeFiIs  de  Dieu  Tout-puitfant  , 
mabat  eum  il  l'accufoit  de  folie  ou  de  foiblefTe 
dicens:  suu  d'efprit ,  ou  de  perte  de  fens  &  de 

es      Chriftus         ,  t      -»  r^ 

faivum    fac  mémoire  ,  de  s  être  lame    attacher 

no$.pfuni>  *  la  croix  »  &  dV  ètre  demeuré  juf- 
qu'alors.  Comme  fi  Jésus  avoit  ea 
befoin  que  ce  confeil  le  fit  fouvenir 
qu'il  avoit  entre  fes  mains  le  pouvoir 
de  fe  délivrer  ,  ou  qu'il  lui  reprochâe 
comme  une  folie  ,  de  ne  s'en  être  pas 
fervi. 
Refpondcns  Mais  enfin  fon  compagnon  éclairé 
pour  ainli  dire  par  les  ténèbres  qui 
commencèrent  peu  après  le  crucifie- 
ment, &  touché  des  autres  prodiges, 


DE  L'EvAKG.Ch.  CXLIII.       163 

rentra  dans  fon  devoir.    11  s'oppofa 

fermement  au  blafphèmateur  ^  &  de 

la  même   fuppofuion  que  celui  -  ci 

avoir  faite  que  Jefus  étoit  le  Chrift  , 

il  en    infera  rout  d'un  coup  que  fa 

Paflion  ôc  fa  Mort  n'étoient  ni  une 

fuite  de  fon  imprudence  ou   de    fa 

foibleffe  ,  ni  un  effet  de  la  haine  des 

Juifs  ;   mais  un  arrêt  du  Confeil  de 

Dieu   &    de    l'amour    de    Je  su  s.  increpabat  e- 

Quoi  donc,   lui  dit-il  en  le  repre-  um,dicen$: 

«,  ,  ■£»  •        Ncque  tu  tl- 

nant  :    1  u  ne  crains  non  plus   Dieu  mts  Dcum , 
que  les  autres  j  en  blafphêmant  com- 
me eux  celui  qu'ils  blafphèment  ,  toi  <iU0(1  în  e*- 

.  j  *   ,   ,  r  A  dem   damna- 

qui  étant  engage  dans  la   même  co/z- tione  es  î 

damnation  que  lui >  devrois  au  moins 

être  plus  ftnflble  à  fes  maux  par  le 

fentiment  des  tiens?  11  eft  vrai  que 

dans  cette  égalité  de   fupplice  il  y  a 

une  différence  infinie  dans  la  caufe  ;     ,  „„,„„• 

'      Ec  nos  qui- 

car  nous  ne  recevons  ici  que  la  jufte  dem  juftè  j 
punition  due  à  nos  crimes  j  au  lieu  £aa6mis  re^p* 
qu'il  n'a  fait  aucun  mal.  Puis  s'a-  mus  :  hic  ve- 
dreiTantà  Jésus  ,  comme  pour  répa-  ge^Jhl1  mat 
rer  les  blafphêmes  de  l'autre   :    Set-  m   ,.  , 

..'....         r  Ecdicebatad 

gneur  y  lui  dit-il  j  Jouvene^-vous  de  jefum  :  Do- 
7770/  ,    votre  compagnon  de  croix  &  minc  »    m.c" 

,       r •         i.  A-     B  .     mento    mei  , 

de  lupplice,  lorjque  vous  aure\  pris  cùm  veneris 
pojfejjion  de  votre  règne.  Paroles  qui  "ùurarcfinum 
contiennent,    i°.  Une  charité  &  un 
zèle  intrépide  ,   qui  prenoit  la  dé- 


i  ^4  Analyse 

A.  17.  b.  ij.  fen[e  de  JESUs  dans  un  rems  où  fes 

c.  13. D.  i<>.  ,  1  /    l         ' 

ennemis    etoient    déchaînes  contre 

lui  ,  &  où  il  étoit  abandonné  de  fes 
amis. 

i°.  Une  liberté  généreufe  envers 
l'autre  voleur ,  qu'il  reprenoit  de  fes 
hlafphemes.  30.  Une  humble  ck  fin- 
cere  confeiîion  de  (es  crimes  à  la  vue 
de  tout  le  monde.  40.  Une  accepta- 
tion volontaire  de  Ton  fupplice  en 
eiprit  de  pénitence  ,  qui  changeoit 
la  punition  de  fes  excès  en  un  Sacri- 
fice d'expiation  50.  La  ferme  efpé- 
rance  du  pardon  qu'il  avoiioit  ne  mé- 
riter pas.  6°,  La  foi  de  l'innocence 
&  de  la  divinité  de  Jésus  ,  lorfque 
tout  le  monde  letraitoit  comme  un 
fcélerat.  70.  LJattente  du  règne  fu- 
tur de  Jésus,  dans  un  tems  où  il  étoit 
foulé  aux  pieds  comme  un  ver  de 
terre. 

Jf.sus  récompenfa  la  foi  &  la  con- 
felfion  du  larron  au-delà  de  fon 
tStâfâS*  efpérance.  11  lui  promit ,  pour  le 
djcoribi:  ho- fouvenir  qu'il  lui  demandoit ,  que 
erh  iapaïï  ce  jour-la  même  il  feroit  avec  lui 
cUfos  dans  le  Paradis,  c'eft-à  dire  ,  qu'il 

jouiroit  avec  lui  de  la  gloire  &  de 
la  félicité  éternelle.  Ainfi  du  haut 
de  fa  croix  ,  comme  de  fon  Tribu- 
nal ,  il  fit  l'office  de  Juge  entre  ces 


de  l'Evang.  Ch.CXLIII.     i6"5 

deux  voleurs.  11  délivra  le  larron  fi- 
dèle &  pénitent,  ôc  condamna  le  blaf- 
phêmaceur. 

8.  Parole  de  Jésus  à  fa  Mère.  s.  Je  fus  ad 

Jlfatrcm. 

Cependant  on  vovoit  auprès  de  la    De  Srabanc 

l.      T  x  /r      ■      r  •    a-'tem    juxta 

croix  de  Jésus  Marie  la  mère  ,  qui  crucem  Jefu 
en  le  fuivanc  depuis  Jéruialem  avoic  œater  eJus  > 
fait  paroirre  dans  une  douleur  infi- 
nie l'ardeur  d'une  foi  Toujours  vive 
ôc  ardenre  ,  &   une    fermeté   d'ame 
inébranlable.  Avec  elle  éroienc  Ma-  &  foror  ma- 
rie de  Cléophas  fa  Coufine,  &  Marie  trisre.Jus^a- 

r  >  naCleoph*, 

A^adCiailie.  &MariaMa- 

Jesus  ayant  apperçu  auprès  de  fa  jjjjg;  erg™ 
Mère  ce  Difciple  qu'il  aimoit  il  le  Jeiusmarrem 
donna  à  fa  Mère  pour  lui  tenir  lieu  ^£**m 
de  fils  en  fa  place  ;  &  il  donna  fa  quem  diiige- 
Mere  à  ce  Difciple  pour  lui  fervir  maaccr-  {^] 
de   mère  ,  en   les  déii^nantl'un   àM"lier»ecce 

i>  j  r  j         k     *        rN\      filius       cuus. 

1  autre  par  deux  lignes  de  tête.    Des  Demie  dicic 
lors  Jean  qui  étoit  ce  Difciple  bien-  difcipulo:ec 

/  •  i  r    •     x*      •       xi  ce  mater  tua. 

aime,  retira  chez   loi    Marie  Mère  Ecexiiiaho- 
de  Jésus  ,  &  pour  exécuter  ce  tefta-  ra  «cepkc- 

.,,.',.  ,  ,  .        amdifcipulus 

ment  ,  il  lui  rendit  tous  les  devoirs  in  fua. 
&c  tous  les  foins  qu'un  nls  doit  à  fa 
mère.  Cet  échange  d'un  coté  infini- 
ment inégal ,  &  de  l'autre  extrême- 
ment honorable  à  Jean ,  fut  la  jufte 
cécompenie  de  fon  courage  &  de  fa 


166  Analyse 

A.  17.  b.  iç.  iidélité.  Car  lorfque  tous  (es  con- 
' l?'  frères  fuyoient ,  ou  fe  cachoient  de 
honte  &  de  crainte  ,  lui  feul  eut  la 
hardielfe  de  paroitre  auprès  de  fa 
croix  avec  fa  Mère .,  de  de  ne  l'a- 
bandonner  point  jufqu'au  dernier 
foupir. 

<».  Tenebr*.  9.   Ténèbres.  Eli.  Eli. 

£U.  Eli. 

c.  Eratau-       Jésus  fut  crucifié  un  peu  avant  mi- 

eemferehora    ,.  «  ,    »  ,  , 

&x«.  di  5  oc  depuis  cette  heure    la    plus 

claire  du  jour  ,  dans  un  jour  du 
mois  où  l'éclipfe  du  foleil  eit  impof- 
fible ,  puifque  c'étoit  le  15.  de  la 
lune  ,  lorfque  les  deux  aftres  font  en 
Ettenebra:  oppofition  :  le  foleil  néanmoins  fut 

faaacfuntin  obfcurci ,   comme  s'il  eût  refufé  fa 

univerfam        ,  '    i    •  i        i        L 

tsrram  ufque  lumière  pour    éclairer  le  plus  norri- 
in  horamno-  D|e  fe  tous  les  parricides ,  &  les  té- 

aam  :  &obf-         ,  r  l    ,  ■  • 

curatus     eft  neores  le   répandirent  par   toute  la 
fo1,  terre  jufqu'à  la   9.  heure  du    jour  , 

c'eft-à-dire  jufqu'à  3.  heures  après 
midi.  Ce  fut  alors  que  Jésus  s'écria  : 
hotam  nS  ^on  Dieu  j  mon  Dieu  y  pourquoi 
nam  clama-  rnave^vous  abandonné  !  C'elt  le 
JJJ™  ,Tai!  commencement  du  Pfeaume  2 1 .  qu'il 
cens:  eh,e-  prononça  de  vive  voix  ,  pour  faire 
fabaahamin-  voir  que  c'efl:  lui  oui  y  parle  dans 
•hoc  eft  ,  De-  tout  le  refl;e  jufqu'à  la  fin  ,  non  dans 
us  "meus,-  ut  un  langage  de  parole,  mais  de  chq- 


»e  l'Evano.  Ch.  CXLI1I.    167 
fes  &  d'actions ,  qui  eft  le  langage  de  <lu!c}.  dereIÎ- 

.         ,    .    ,  •  °   °  quiih  me  ? 

la  vente. 

Jésus  prononça  ces  mots  en  Syria- 
oue  :  EU  ,  £7/  lamma  fdbaclhani  •  &    Quidam  au- 

I1      t    •  C     i  y  J     "  ^        tem  il!ic  ftan- 

es  Juirs  étrangers  qui  n  entendoient  tes  ^    &  au- 

pas  cette  langue  ,    crurent  qu'il   ap-  dientes  dicc- 

pelloit  Elie  à  fonfecours  .,  6c  le  di-  V0Cat iik. 
rencaffez  haut  pour  être  entendus  des 
foldats. 

10.   Vinaigre,  Mort.  t».  Ace~ 

tum.  Mors. 

Dans  le  même-tems  ,    Jésus   fa-      d.  roftca 
chant  que  prefque  tout  étoit  accom-  fcicns  J-fus  > 

,.  i        l  x      • .  quia     omnia 

pli ,  pour  accomplir  encore    un   en-  confummaia 
droit  du  même  Pfeaume  21. dit  qu'il  ^unt»"tcon. 

r   .  r  ..  r  *     .      fummarecur 

avoit  loir,  comme  il  ne  le  pouvoit  saipcura^i- 

autrement  dans  l'épuifement  de  fon  *1C    :   sicio> 

r  q     j         11  j      c     *  as  er2° crac 

iang  ,    ce  dans  la    violence    de   les  aceco      pie- 

douleurs.    Auilî-tôc  un   des   foldats  nu?'E 

pour  donner  au  Prophète    Elie    le  daaàcurrem 

loifir  de  venir  ,  voulut  retarder  de  unus  ex  eis  * 

quelques  momens  la  mort  de  Jésus 

qui  s'abailfoit  viiiblement ,  &  ayant  accepram 

rempli  de  vinaigre  une  éponge  qu'il  ipongiamim- 

•    l        1  i,°  L        °     1,  plevit  aceto , 

mit  au  bout  d  une  canne  ou    d  une  &    impofuiç 
tige  d'hylfope  j  il  courut  la  lui  ap-  arundini , 
pliquer  à  la  bouche  ,  au  nez,  Se  aux 
temples  ,  pour  empêcher  fa  défail- 
lance ,  ou  pour  l'en    faire    revenir. 
Les  autres  foldats.  qui  ne   favoient  Tcr6  '   die" 


1 68  Analyse 

c.xJ.'d.  Il]  Pas  **on  defTein  5  craignirent  que  le 
Prophète  ne  vint  pas  ,  tandis  que 
ce  foldat  feroit  auprès  de  la  croix  , 
ou  du  moins  que  Jésus  ne  mourût 
avant  qu'il  fut  arrivé.  Ils  crièrent 
donc  au  foldat  qu'il  fe  retirât  de  là: 

ytàLmusn\nLaiIfe-;i0US  vè*r*   difoient-  ils  ,  fi 
veniac   Elias  Elie  viendra  le  délivrer.  Mais  lui  qui 

liberanseum.  •  i  1  t 

A.  Ecdabac  avolt  en  vue  de   prolonger  les  mo- 
eibibere,  b.  mens  de  Jésus  :  Lai (fer-moi  faire  , 

dicens  :  Sini-  i  /  j-      -i  n 

te, vidcamus leur  repondir-il  ,   nous   allons   voir 
fiyeniatElias fi  £['u  viendra  à  fon  fecaurs»     C'eft 

ad  deponen-      .     r  3  .     .    J         J  , 

«iumeum.  ainh  qu  on  doit  arranger  les  cir- 
conftances  de  cette  action  ,  qui  ont 
été  féparées  par  les  Evangéliftes  ,  & 
dont  chacun  a  rapporté  quelqu'une 
pour  marquer  i'accomphflement 
de  l'Ecriture  touchant  la  foif  de 
Jésus. 

TD.  Cùm  er-         t        n      »*i  1  *i 

go  accepifTec      Lorfqu  il  eut  pris  le  vinaigre, il 
Jefusacecum,  s'écria   que  tout   étoit   confommé, 

dixic  :    Con-     ,    n     v     j  •  1        n  L  ' 

fummatum    c  elt-a-dire  ,   que  toutes  les  Prophe- 
t&%  ties  qui    regardoient    fa   vie    ik    fa 

mort  _,  6c  tout  ce  que  fon  Père   lui 
avoit  commandé  de  faire  &  de  fouf- 
frir  étoit  accompli  :  Et  aufli  tôt  fur 
le  point  de  mourir  ,  pour   faire  voir 
qu'il  mouroit  par  amour  &  avec  li- 
it  A.  ite-  berté  ,  &c  non  comme  les  autres ,  de 
rùm  ciamar.j  défaillance  ;   i°.    Il  jetta  un    grand 
m"  c.  naif  :  cri ,  en  difant  :  Mon  Père  j  je  re- 
mets 


de  i'Evang.  Ch.  CXLÎI1.      1 6$ 

mets  mon  efprit  entre  vos  mains.  2°.  Pater * in  ma*~ 

ii  l  -te       \  i      *  •  nus        tuas 

Il  bailla  volontairement  la  tête,  qui  commendo 

dans  les  autres  mourans  tombe  de  fPiritumrac- 

.  .     ,,     -    uni. 

ion  propre  poids.  30.  H  rendit  1  ei-     Eih*cdi- 
prit  _,  ou  plutôt  il  le  remit  entre  les  censD.  inciî- 
mains  de  Ton  Père,  au  lieu  que  dans  ^ad^"^!! 
les  autres  hommes  ,   la   mort  chatte  tuum. 
avec  violence  l'âme  de  fon  corps. 

La  mort  de  Jefus  ayant  été  ainii 
av2ncée  de  quelques  momens  ,  il 
fallut  réparer  cet  endroit  par  où  les 
Juifs  l'auroient  pu  calomnier  de 
fuppofition. 

11.  Prodiges.   Centenier.  Femme.      .'*:Pro*r 

o  gia.  Lentuno. 

Mu  liens. 

La  1.  réparation  fe  fit  par  les  pro- 
diges. Car  1.  Pour  montrer  que  Ton 
humanité  ,  qui  _,  comme  un  voile 
couvroir  fa  divinité  ,  avoit  été  divi- 
fée  en  deux  parties  ,  &  que  le  che- 
min du  ciel  ,  véritable  fanctuaire  , 
qui  depuis  le  premier  péché  avoit 
été  fermé  aux  hommes  ,  leur  étoic  A  r.. 
déformais  ouvert  ;  le  voile  qui  le-  vélum  rempli 
paroit  les  deux  fanduaires  du  Tem-   [ïf"™^.? 

1  1  u  a  s  j-  a  r  1  c  s  ^ 

pie  rut  déi  luré  depuis    le    haut  juf-  à  fummo  uf- 
qu  nu  bas  ,   ahn  qu  on  ne   pur  attri-    çum. 
buercet  efret  i  aucune  vertu  humaine. 

2.    L<i  terre  trembla  ,   comme  té     &  rerramo- 
moignant  qu'elle  ne  pouvoit  fuppor-  taeft; 

Tom.  IV.  H  * 


170  Analyse 

a.  î7.  b.  rj.  rer  je  poids  de  fOI1  Seieneur  ,  mort 

C  15.  D.  19.   r  l  .  O  » 

lui  une  croix. 
&       petr«      3.  Les  rochers  Te  fendirent  com- 

iciilaj    lunt  ;  J      j        1  r         1  / 

me  de  douleur  ,   pour    fuppleer    au 
défaut  de  celle  des  Juifs,   dont   les 
cœurs  écoient  plus  durs  &   plus   in- 
icnhbles  que  les  rochers. 
&monumen-       .     Les  tombeaux  s'ouvrirent  pour 

ta         aperça  r  ■  ■  ,  ,        ,         r 

fuutj  raire  voir  que  la   mort  des  hommes 

éroïc  détruite  par  la  mott  de  Je  fus  , 
&:  que  cette  mort  étoit  le  principe 
de  leur  vie.  Ils   ne   s'ouvrirent    pas 

&  mulracor- en  vain  :  car  après   fa  réfurrection 

pora  fantto-      1     ,-  r    •         L   t  1  1 

rum  ,     qui  piulieurs  saints  dont  les  corps  dor- 
dormieratu  ,  moient  encore  dans  la  poufliere,  fe 

furrexerunt.         1  t  r         V»  •  1 

le    exeuntes  relevèrent  par  une  reiurrechon  gio- 
dc      mono-  neufe  Se   femblable  à   celle  de  Je- 

mcutis     poil  r  r  .        . 

refurreftio-    tos  \    u   en  iortant  de    leurs   tom- 
nem     ejus ,  beaux  ils  entrèrent  dans  la  ville  fain- 


fanétamcivi- te  (   c  elt   ainii  que  iaint  Matthieu 
taccm,&ap-  nomme  Jérufalem  après  fa  Paillon  ) 

parucpjnt  ir    1     r 

roulds.  8c  apparurent  a  piuueurs. 

La  II.  réparation  de  l'avance  de  la 

mort  ,  le  fit  par  un  commencement 

de  pénitence  ,  que  les  prodiges  catir 

ferent  dans  plusieurs  perlonnes.    1. 

Dans  le  Centemer.  1.  Dans  les  foi- 

dats.  -$.    Dans  les  Juifs. 

B.  Vi4cnsau-       1.  Le  Centemer  confidérant  tout 
Cenco-  ce  qU[  çe  pa{f0ir    &  ful-cout  ce  grand 

no,<pii  ex  .11-       .  1       3      r  > 

vcifo  itabac ,  cri  qu  il.  avoir  jette   en  mourants 


©i  l'Evang.  CK.  CXLÎÎÎ.  171 
contre  l'ordinaire  de  tous  les   cruci-  £*r ,  c.  qaod 

r  ,  11  j       1  r  factura     fue- 

fies,  auxquels  la  perte   de  leur  iang  rat t  b.  quia 
ote  peu  à  peu  la   voix  de  la  force  ,  flc  .  c,a.m*ns 
juiqu  a  ce  qu  ils    rendent  1  ame  de  gîorificavic 
pure  défaillance:  cet  ofïïce  ,  dis-ie  ,  Deum  *  <U- 

*       j.        ,     •  r<  ..        '  ,       cens    :     Vcrc 

rendit  gloire  a  Uieu  ,  en  avouant  de-  hk  homo  ju- 
vant  tour  le  monde  que  cet  homme  SuV2,rI  B- 
ctoit  vraiment  jutte  ,  qu  il  etoitven-  moFiiiusDei 
rablement  le  Fils  de  Dieu.  €rar' 

2.  Les  cent  foldats  qui  fervoient  a.  Et  qur 
fous  lui   pour   prêter   main  forte  à  c''^j:e™nt; 

.1  L  cuitoaieiues 

l'exécution  ,  Ôc  pour  garder  Jésus  ,  Jefum  ,  vifo 
voyant  le  tremblement  de  terre  Se  &hfsq™rfic: 
le  refte  des  prodiges ,  furent  frappés  kanc,  rimue- 
une  horrible  crainte  ,  &  avoue-  aicenres:  Ve- 
rent  qu'il  étoit  vraiment  le  Fils  de  re  f«Hus  d« 
Dieu.  ""i,ie- 

3.  Toute  cette  foule  de  Juifs  (  on  c  Etom- 
ne  parle  pas  des  Grands-Prêtres  )  n,ï  curba  5S" 
qui  alnftcient  a  ce  trille  Spectacle,  mui  aderant 
que  la  haine  ,  ou  lacuriofité  ,  oulafd  CpaaÀica,' 

*,  •  1      r  •    /       Jummud,& 

réputation  de  Jésus  y  avoient  attires,  videbanequ* 
de  persécuteurs  devinrent  pénitens  ;  emi^ntes Pcc- 
car  effrayes  par  tant  dJévenemenspro- tora  fua  re- 
ligieux ,  ils  s'en  retournoient  en  fe  sraban^au- 
frappant  la  poitrine  de  douleur  &  de  rem  omnes 
regret  noti  cjus   à 

icgieu.  ^  longe,  &mu- 

Ceuxquiétoient  de  la  connoifian-  lieres  qui  fe- 

^   J      1  o      !        r  •   p       curae   cum  e- 

ce  de  Jésus  ,  oc  les  femmes  qui  1  a-  raru  à  Gaji>p 
voient  fuivi  depuis  la  Galilée ,  étoient  Jf a  »  hic  v»- 

Li     •  il-  dentés  :  B.  in- 

i  qui  regardoienc  de  loin  tout  ceterqU 

Hij 


ias  eiar 


i7i  Analyse 

a.  ij.ft.  iç.  nUi  fe  patToit.   (  Nous  avons  vu  que 
c.  15.  d.  19.    1  ;.     X/f       v  ,     .  j    j      1 

w   .    w      Marie  la  Mère  etoit  au  pied  de  la 

Maria    Mag-  ,.    Jt  .. 

daiene  ,    &  croix.  )    Entre  elles   etoient  Marie 
Maria  Jacobi  Maçdelaine ,  Marie  Mère  de  Jacques 

Unions  ,    &  ^ .  o     c    l  î  J        J 

jofcph    ma-  le  Mineur ,  &  Salome  mère  des  deux 
■cr,& saiome  £j  j   Zebedée.lefquelles le fuivoienc 

A-  mater    fi-  >         t 

liorumZ:be-  dans  les  millions  ,  loriqu  il  ecoit  en 
*?**■  Galilée  ,   &   contribuoient  de  leur 

b.  Et  cùm  bien  à  Ion  entretien.  Il  y  en  avoir 
dGTet  inGaii-  encore  plufieurs  autres  qui  étoienc 
jur  cum,  ôc  venues  avec  lui  a  Jeruialem  ,  oc  donc 
jpiiùihabant  \es  noms  ne  fout  pas  venus  jufqu'à 

ci    :    &:  aliaî  *  .,   •* 

mulra  ,  quaî  IIOUS, 

iîmul  cum  eo 

afeenderant     ^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^ 

j'erofoly-  ■"—■—•  .  . 

ma  m. 

cap.cxliv.  CHAPITRE    CXL1V. 

A.  17.  B.  if.  1 

c.  13.  b.  xp.      Côté  perce.   Sépulture. 

Latus.  Se- 
r .   Juâ*i 


1.  Requête  des  Juifs. 


"dT"  T  a  1VL  réParâtion  fe  fir  Par  !'in- 
dxi'  Ip  ergô  Lj  formation  du  Juge.  Ce  jour- M 
(quoniampa-  ^toit  |a   veille  &   la  préparation  du 

raiceveerat  )  ,    c   .  ,  V  I     i>>.     •  J       r»* 

ut  non  rema-  grand  Sabbat  ,  oa  la  tête  de  Paque 
nerentincru- avojt    fe£  transférée  ;  deux    circon- 

fabbato(erac  ftances  qui  le  rendoient  le  plus  cèle- 

*Ét--î$?b  kre  &  *e  P*as  ^aint  ^e  toute  l'année. 
bat».  J  Elles  obligèrent   les  Grands-Prêtres 

^  ne  fourTrir  pas  que  les  corps  foit 

juorcs  o\x  vivans  derneuraiTenc  à  1$ 


de  i/Evàng.  Ch.  CXLIV.     173 
croix  jufqu'au  jour  du  Sabbat  donc  la 
fête  commençoic  après  le  coucher  du 
foleii. 

1.  De  peur  que  la  fainteté  du 
jour  ne  fût  fouillée  par  le  funefte 
fpectacle  de  trois  corps  pendus.  2. De 
peur  que  le  jour  du  Sabbat  ne  hic 
violé  par  le  travail  de  ceux  qui  les 
dttacheroient  de  la  croix  ,  6c  leur 
tendroient  tous  les  devoirs  de  la  fé- 
puirure.  5.  Pour  obéir  au  précepte 
du  Deucéronome,c.  11.  22.  qui  por- 
te que  les  corps  des  criminels  ne  de- 
meureront point  la  nuit  à  la  croix  : 
mais  qu'ils  feront  enfevelis  le  jour 
même  avant  que  le  foleii  fe  cou- 
che. 

Ils  vinrent  donc  prier  Pilate  de  per-  rogaVertta* 
mettre  qu'on  leur  rompit  les  jambes  Sî^itiî 
pour  avancer    leur  mort  ,  &  qu'on  eorumcmra, 
les  otat  de  la  ,  ce  qu  il  leur  accorda.  :ur# 
Il  étoit  déjà  environ  la  dixième  heu- 
re du  jour  ,   qui  répond  à  nos  quatre 
heures  du  foir. 

1.  Jofeph  (TArimathie.  3.  Jofeph  al 

Arïmathéta. 

Peu  après  qu'ils  furent  fortis  d'à-  Pofthxcau- 
vec  lui ,  il  vint  un  noble  Sénateur  &  cum  }2Lm 
nommé  Jofeph  .  homme  jufte  de  de  fcrôcflicfac 

dt  •    /       1      1  •  1  »         1  >  *  tum    ,     quia 

e  probité,  de  la  ville  d  Arima-  Crat  paraW 

H  iij 


174  Analyse 

'   i7-  b.  if.  thiedans  la  Tribu  de  Juda  ,  qni  n'a- 
X3     j  a  v°ic  point  confenti  à  leur  confpira- 

yc  ,  quodefl  r.  K 

ante  fabba-  tion  ni  a  leur  entreprile  contre  J  es  us, 
tumA.  venir  mals  c,uj  attendoit  comme  beaucoup 

quidam    ho-  i      r»  i     r^-  i 

Eiodives,  c.  d  autres  le  Royaume  de  Dieu.  Il  en- 
fe^B.  nol  tra  aiment  chez  Pilate  ,  de  il  lui 
biiisdecurio,  demanda  le  corps  de  J  e  s  u  s  ,  dont 

fc  k!ftu?hic  ^  ^ro*r  Difciple  j  quoique  la  crainte 
non  confen-  des  Juifs  l'eût  empêché  jufqu'alors 
hoT  &°aa|:  d'f n  feire  profeffion  ouverte.  Pilace 
bus  eorum  -,  s'étonna  qu'il  fût  déjà  mort  ,  parce 
th*a  ^ïvka-  °lue  *e  ûipplice  lent  de  la  croix  laif- 
te  juda: ,  qui  foit  quelquefois  vivre  deux  jours  ceux 

expeftabat  &c  >      •  1_  '       r*  > 

ipfe  regnam  C1UI  7  etoienr  attaches.  Pour  s  en  în- 
*>«-  former  il  rit  venir  le  Centenier  de  la 

Hic  acceflit»   r  iT     A  •  ;/      •  i 

B.&audaûer  rortereiie  Antonia  3  qui  etoit  proche. 
innoivit  ad  Afin  de  ne  rien  accorder  qui  fûteon- 
co  qùia  efïci  ae  Â  exécution  de  1  Arrêt ,  il  lui  de- 
difcipulusjc-  manda  ii  Jésus  étoit  déjà  mort  ;  &c 
àuuin  prop-  i  ayant  îu  ,  il  donna  ion  corps  a  Jo- 

ter      mecum   fçph, 

JudcEorumB.        * 

petiit  corpus 

Jefu.    Pilacus  aucem  mirabatur  Ci  jam  obiifTet  :  &  acoerfito  cen- 

turione  y  interrogavit  eum  fi  jam  mortuus  elfet.  Ec  cura  coguo- 

jriflcc  à  cencuriojiL-,  donavic  corpus  Jofeph. 

iral:laurh  3  •  Ouverture  du  coté. 

La  IV.  réparation  fe  fit  par  le  coup 

de  lance  qu'un  foldat  donna  à  Jésus 

Vencrunt  après  la  mort.  Les  foldats  exécuteurs 

r;:!rai!iq":  revinrent  fur  le   Calvaire  fuivis  des 


'de  l'Evang.  Ch.  CXLIV.    175 

Juifs  ;  8c  ayant  couché  par  terre  les  <*cm  £r'Z{' 
croix  des  deux  larrons,  us  rompirent  akerius  qui 
d'abord  les  jambes  au  premier  ,  qui  crodfiaw.eft 

,       .  '  1     •    1     1     j  cumeo; 

etoit  apparemment  celui  de  ladroite, 
8c  enfuite  à  l'autre  crucifié-  8c  ils  jet- 
terent  8c  les  corps  8c  les  croix  dans  la 
vallée  des  corps  morts. 

Quand  ils  vinrent  à  Jésus, comme  aci  jefumau. 
ils  le  trouvèrent  déjà  mort  ,    ils   ne  «m  cùm  re- 

*    •  •  1  niflent  ,    ne 

lui  rompirent  point  les  jambes  ,  ce  Viderunteuni 
qui  eut  été    une  exécution    inutile.  ^B»mortuum 

>  x    •        i  1  •  »*f       »         *      non       frege- 

Mais  dans  la  crainte  qu  11  n  y  eut  ri,ntejUSCru- 
encore  quelque  refte  de  vie  caché, un  ra  :  fed  u,nus 

/»   t  1         \  >r  \     •      i  j      militam  lan- 

loldat  dchanc  lui  donna  un  coup  de  Ceà  latuseju» 
lance  dans  le  coeur,  8c  par  confé-  ap««"j 
quent  dans  le  côté  gauche  ,  ahn  de 
mettre  fa  mort  hors  de  doute.  Mais 
ils  n'eurent  point  le  loifir  de  jetter 
{qi\  facté  corps  dans  la  vallée  ,  parce 
qu'avant  qu'ils  euifent  achevé  leur 
office  fur  les  deux  voleurs  ,  Jofeph 
d'-Arimathie  arriva  fur  îe  lieu  avec  les 
ordres  du  Gouverneur. 

Audi-tôt  que  le  coté  de  Jefus  fut  &  continua 
ouvert  ,  il  en   fortit  deux  ruiffeaux  «»vicfangm$ 
trcs-diltincls ,  Pun  de  fang,  8c  l'autre 
d'eau. 

11  y  eut  «en  cela  ,   1.  Un  miracle 
inoiii  ,   puifque  le   fang  fe  gelé  d'a- 
bord dans  les  corps  morts  ,   8c    que 
e  humeur ,  qui  ejl  renfermée  dans- 

H  iv 


Ij6  A   N    A    L    Y     SE 

e!  Il,  Dkîli  ^  Pericarde  s  n'a  rien  ni  dans  la  cott- 
"  leur  ni  dans  te  goût  >  qui  reflTembiei 
de  l'eau  naturelle. 

i.  Il  y  eut  un  myftere  de  reli- 
gion. L'eau  marquent  le  Baptême  qui 
nous  régénère  pour  la  vie  de  la  gra- 
ce^  le  fang  repréfentoit  l'Euchariltie, 
qui  nourrit  la  vie  nouvelle  que  nous 
avons  reçue  dans  le  Baptême  :  &c 
c'eft  en  ce  fens  que  comme  Eve  eft 
fortie  du  côté  d'Adam  3  TEglife  a  été 
tirée  du  côté  percé  de  Jésus-Christ^, 
parce  que  la  matière  des  deux  plus 
grands  Sacremens ,  dont  l'un  la  for- 
me ,  &  l'autre  la  nourrit ,  en  eft  for- 
tie par  un  coup  de  lance.  Audi  pour 
confirmer  le  myftere  ,  faint  Jean 
s'attache  à  prouver  le  fait  du  mira- 
cle. 

Il  l'appuie  ,   i.  Sur  Ton  témoigna- 
it qui  vîdit  oe,  H  vit  donner  le  coup  de  lance  y 
perhibuit  :  se  il  en  vit  couler  le  lang  oc  1  eau  ,    6c 
▼crumcfttef- jj  déclare  qu'il  ne  témoigne  que  ce 
j.as.  qu  il  a  vu  }  &    qu  ainfi   Ion  témoi- 

gnage eft  véritable.    Mais    comme 
on  lui  pouvoit  objecter  qu'il  avoic 
cru  voir  ce  qu'il  ne  voyoit  point ,  il 
répond   qu'il   fait  que  fon    témoi- 
itiilcfcit  gnage  eft  vrai ,  &  digne  d'une  en- 
^uia  vera  di-  tiere  créance  ,  fondée  fur  ce  qu'étant 
«cdatis.       près  de  la  croix  ,  il  etoit  a  portée  de 


■ 


t)E  L'EvANG.Ch.  CXLlV.       I77 

voir  tout  ce  qui  fe  paiToit  dans  la  per- 
sonne de  Jésus. 

2.  Il  l'appuie  fur  l'Ecriture.  Il  re-     Fa£la  ruHt 
marque  que  ces  deux  circonftances  ,  rt»imh«c,û| 
je  dis  de  n  avoir  point  eu  les  jambes  pier£tur  !  0s 
rompues,  &  d'avoir  eu  le  coté  ou-  tfon  comhtf- 
vert  d'un  coup  de  lance,    arrivèrent  nuetls  ex  eo' 
au   corps   de  Jésus   pour  accomplir 
deux  oracles  de  l'Ecriture  5   l'un  de 
l'Exode,  c.  11.46.  qui  porte, qu'on 
ne  brifera  point  les  os  de  l'Agneau 
Pafchal,    pour  figurer  que  les  os  der 
Jésus  vrai  Agneau  de  Dieu  ,  ne  fes- 
toient point  rompus  à  la  croix.  L'au- 
tre du  Prophète  Zacharie,  c.  12.  10.    ,Et  irerùm' 

/  i-    '  1        1    -r  ri'  alia  Scriptura 

qui  prédit  que  les  Juirsconlidereront  dieu  :  vide- 
attentivement  celui  qu'ils  auront  per-  buntinquem' 

,  ,.,      ,  1  f  l  transhxe- 

ce  ,  pour  voir  s  il  n  y  paroitra  aucun  rUm.' 
figne  de  vie.- 

4.  Nicomede.  Sépulture.  4.  tiïcodcï 

mus.     Sepul* 

Le  V,  moyen  de  reflource  fut  la 
fépulture.  Lorfque  les  loldats  eurent  D  Venitr 
£aic  leur  devoir  ,  Jofeph  qui  avoit  ergo(jofeph) 
acheté  un  linceul  blanc  de  fin  lin  ,  J^SSE^* 
vint  le  premier  ,  8c  en  détacha  de  la  venitautem' 
croix  le  corps  de  J  e  s  u  s.  Nicodeme  &    Nkodc-- 

r   •  %:t-        1  •    '  mus,  quive-- 

vintenluite  :  ce  JNicodeme  qui  etoit  nCrat  ac{  Je-- 
venu  autrefois vifiter  J  e  su  s  pendant  fum      rioJ*®' 

k,       r  T  l  r        primiim  ,  fe-^ 

•mue ,  lorique  Jésus  commença  Ion  reas  mixtu-- 

liv 


17S  Analyse 

C.  i3.  D.  i?. 


B-  *»■  miniftere;&  il  apporta  environcent 


livres  de  myrrhe  ôc  d'aloës  mêlés  en- 
ram  mkikx  fembie  pour  l'embaumer.  Tous  deux 

ôc  aloes.cuia-  i  ■         T 

n  în.ias  ccn-  ayant  pris  le  corps  de  Jésus  , 
tum ,  13  j0-  l'enveloppèrent  dans  des  linceuls  , 
Wïcatas  fin-  couvrirent  ion  vilage  d  un  linge  ,  8c 
doncm  ;  éc  après  qu'ils  l'eurent  lié  par  tout  avec 
un»,  invol-  dès  bandelettes,  ils  le  plongèrent 
yu    îiudonc  dans  des  liqueurs  aromatiques,  en  la 

A,    munda  ,  .  i        t    •  r  l       *  / 

eh  acccpe-  manière  que  les  Juifs  ont  accoutume 
runc     er^o  d'enfevelir  les  morts. 

corpus  Jefu  v         ,      ..  £ 

&  lipvetunr  Vtt%  du  lieu  ou  Jésus  rut  crucifie , 
iJiud  linteis  J0feph  avoit  un  jardin  où  il   avoic 

cum.  aroma-   r  •     r    ,,        i  ,     ;  r,       , 

tibus  v  fient  fait  tailler  dans  le  roc  un  lepulcre  en 
moseft  judœ-  forme  Je  gratte  voûtée  :  on  y  en- 
erataucemia  troit  par  une  autre   première  grotte 

cTfixuf1  cT;  <$*'  llîi  fervoitde  veftibule.  Comme 
horcus  se  in  c'étoit  alors  le  foir  du  jour  avant  le 

ÏSZFZ.  Sabbat  >   I11'  aHoit  commencer    au 

Tum  in  quo  coucher  du  foleil ,  Jofeph  &  Nico- 

£££££ deme  &  hâterent  de  mettte  J Es  u  s 

erar,  dans  ce  monument ,   qui  fe   trouva 

ptberCpa°af«-  heureufementtout  proche ,  &  où  au- 
▼.en.  Judaro-  cun  n'avoir  encore  été  mis.   Ils  en 

mm    ,    quia    c  i>  '  i 

>uxtai  erax  armèrent  1  entrée  par  une  grande 
monumen-     pierre  qu'ils  y  roulèrent ,  &  ils  fe  re- 

tum,    A.  Jo-   f-    rt        "?  J 

fepffpoÇaitiU  tirèrent;. 

iud  in  monii-      Cependant  les  femmes  qui  étoienc 

mento.     fuo-  j     /~>    ri  '  t 

bovo  ,  qu©d  venues  de  Galilée  avec  Jésus  ,  entre 
«xciderac  in  lefquelles  étoit Marie  Magdelaine,&: 

l^tra.  Et  ad-   x  K    J  Ju   T    t     J  '      • 

«•lmûùia  Marie  mere.de  Joleph ,  etoient  au.:- 


de  l'Evang.  Ch.  CXLVî.     179 
près  du  fépuicre  ;   &  lorfque  Jofeph  ™5™m  ** 

e    xt-        1  r  r       •  11       oftiummoniN- 

ce  JNicodeme  en  furent  iortis  ,  elles  menti,  &a- 
y  entrèrent  pourconfidérer  en  quelle  bm;. e,Et  e: 

Jr  ..    r  .  j     rat  aies  paraf- 

lituarion  ils  avoient  mis  le  corps  de  eeves,  &fab- 
jEsus^aflnque  revenant  de  grand  ^«.sibl 
matin  l'embaumer  de  nouveau, elles  fecut* autem 
pufTent  fe  reconnoître  dans  les  téne-  SÏÏS^ 
bres  5  &  s'acquitter  de  ce  pieux  offi-  rant  de  Gali- 
ce fans  erreur  &  fans  embarras.  Elles  Genres fôiur*. 
s'en  retournèrent  préparer  de  bonne  fepuichrum  r 
heure  les  aromates  &  les  parfums  ubi^ponere- 
dont  elles  avoient  befoin  j  &  elles  *«« ,    c.  se 

r  lit  •    "         •     /  quemadmo- 

ne  hrent  rien  le  lendemain  qui  etoit  jumpofitum- 
le  Sabbat ,    félon  que  la  loi  î'ordon-  eratcorpuseT 

01  •!  jus.  Er  rêver» 

n  voit  dans  tout  cet  appareil  [entes   para- 

tant  de  convictions  de  la  vérité  de  la  verunt   aro- 

1      »  1        t    t  mata  Se  un- 

mort  de  Jésus,  que  les  Juifs  ,  tout  gUenra  :  ôc 
incrédules  qu'ils  étoient,  n'ont  jamais  Jabbato  qui- 

1  l  ,  '  demuluerunt: 

pu  la  mettre  en  doute.  fecundùm 

Ici  commencent  les  preuves  de  la  niandatum? 
Réfurrection  de  Jésus  :  Et  avant  que 
de  quitter  fa  fépulture  ,  nous  comp- 
ter- ns  pour  lai.  fa  ferme  &c  !a  ftru- 
cture  de  (on  tombeau.  Dieu  voulut 
1.  qu'il  fut  taillé  d:ns  le  roc,  afin 
qu'on  ne  pût  foupçonner  que  pour 
enlever  Con  corps  ,  on  avoir  fappé 
les  fondemens  ,  ou  percé  les  mu- 
railles .  ju  découvert  fe  toit,  routes 
chofes  humainement  in  pefTIbles,  2, 
Qu'il  n'eût  encore  point  feevi ,  ÔC 

a  vj. 


1 8  o  Analyse 

a.  17.  b.  iy;.  que  le  corpS  de  JESus  y  fdc  mis  le 
premier.  Car  enhn  ,  diroient  les 
Juifs,  qui  nous  affinera  que  c'efl 
Jtsusqui  eft:  refTufcité  ,  &  non  pas 
quelqu'un  de  ceux  qui  étoient  enfe- 
velis  avant  lui  ?  La  foi  de  fa  réfur- 
rection  fe  perd  ,  (i  on  la  peur  con- 
fondre avec  celle  de  quelqu'autre. 
Mais  11  Jésus  eft  le  premier  de  le 
feul  qu'on  y  ait  mis  ,  il  n'y  a  que 
lui  qui  en  foit  forri  par  la  réfur> 
re&ion,. 

La  II.  Preuve  fe  tire  des  précau> 
rions  extraordinaires  que  prirent  les 
Grands-Prêtres  &  les  Pharifiens- 
pour  garder  fon  corps.  Jésus  avoit 
prédit  tant  de  fois  fa  réfurrection  & 
{es  Difciples  ,  &  en  avoit  parlé  eit 
rant  d'autres  rencontres,  quelebruk 
en  fu  t  porte  je  ne  fçai  comment  juf- 
ques  a  leurs  oreilles.  Et  par  un  mér 
nagement  fecret  de  la  Providence  , 
ils  s'en  fouvinrent,  lorfque  les  Dif- 
ciples l'àvoient  oublié.  Ils  jugèrent, 
en  fages  politiques  que  cer  avis  n'é- 
a.  Altéra. to^  point  à  négliger.  Le  lendemain* 
autem  die ,  qUi  étoit  le  jour  du  Sabbat ,  ils  fu— 
llufcyln  ,JÇtl>  cJiez.  Pilate  5.  &  lui  repréfenie*- 


de  l'Evàng.  Ch.  CXLIV.     1*1 
rent  qu'ils  s'étoient  fou   .?nus  que  ce  coaTcnerunc 

r,  i     À  ,  n      '     Principes  Sa-- 

ieducteur  étant  encore  vivant,  s  etoit  cerdomm  se 

vanté  qu'il  reiïufciteroit  trois  jours  £!""**■  î* 
y     /.  ^   *i     1         •   «        Piiatum ,  di- 

aprés la  mort,      v^u  ils  le  pnoient  cences  :  Do> 

donc  de  faire  garder  Ion  fépulcre  9â°e  » recor~ 
•T'Nirj  -r  •  >  dan   fumus  * 

juiqu  a  lahn  du  troiiieme  jour  ,   ou  quiafedudor 

s'étendoit  fa  promette,  &  au-  delà  lhUe  &**  *& 
duquel  fa  réfurreétion  tardive  nefe-  pofttres-die» 
roit  plus  recevable  ;  parce  qu'alors  refurgam; ju- 
la  raullete  du  terme  leroit  un  pre-  diri  iepui- 
jugé  de  la  fauflété  de    la    réfurre-  f^SmS- 

Ction.  ùuol: 

En  cela  ils  avoient  en  vue,  i.Une 
raifon  fort  folide.  2.  Un  prétexte  ridi- 
cule ,  quoique  d'une  apparence  allez 
fpécieufe. 

1 .  La  raifon  étoit  qu'ils  craignoient 
extrêmement  l'accompliiTement  de 
cette  prédiction.  Les  prodiges  qui 
avoient  paru  à  fa  mort ,  &  fur-touc 
Fouverture  des  rombeaux  étoientdes 
préludes  de  la  réfurrection  de  Jésus. 
Il  eft  vrai  qu'ils  ne  fe  repréfentoienc 
qu'une  réfurrection  mortelle  ,  com- 
me étoit  celle  de  Lazare  ,  dont  ils 
avoient  été  témoins.  Mais  ce  fut 
aufli  pour  l'empêcher  ,  ou  du  moins 
pour  en  étouffer  les  fuites  ,  qu'ils 
demandèrent  des  gardes  à  Pilate  ^  &r 
qu'ils  les  chargèrent  de  tuer  Jésus  , 
$c  de  le  repouller  dans  fon  caveai* 


1S1  Analyse 

a.  27  d,  ïf.  en  cas  qu'il  en  voulût  forcir.  S'ils  ont 
rorme  ce  deiiein  fur  Lazare  reliulcite,, 
j^arce  qu'il  croit  une  occafion  à  plu- 
iïeurs  de  croire  en  Jésus  ;  comment 
ne  l'auroient-ils  pas  fait  fur  Jésus 
même, avec  lequel  toute  fa  Religion 
demeureroit  éteinte. 
ffe  forte  ye-       2.  Le  prétexte  de  cette  garde  croie 

iiianc     diici-  r      r<,<  r  *    \  1       •  1 

puiicjus,  &  queieslJiicipiesviendroieiitpena«.nc 

furemur    e-  ja  nujc  dérober   fon    corps ,   &  nu- 
um',  &    di-  ,,.        .  .  .  f     :  r 

cane    piebi  :  bueroient  au  peuble qu  il  etoit  reii ut— 
surrexk      à  clZfL  .  £rreur  pîus  daneeteufe  que  la 

eric  noviflî-  première.    Mais    rien   n  ctoit    plus 

muserrorpe-  £rivo{e    que  ce    prétexte-    Ç>U?l  lllté- 

ret  auroient  pris  les  Disciples  dans 
la  gloire  &  l'immortalité  de  ion  nom, 
eux  qui  auroient  été  trompés  com- 
me les  autres  par  la  faillie  prophétie 
de  fa  réfurrection  ?  Quel  plaifir  au- 
roient  pris  des  gens  comme  eux  , 
fans  lettres  ,  fans  autorité ,  fans  puif- 
fance  _,  à  tromper  leur  nation  par  un 
menfonge  en  faveur  d'un  homme 
mort ,  dont  ils  n'auroient  eu  plus 
rien  à  efpérer  ;  puifque  la  promeffe 
de  la  réfurrection  fe  trouvant  fauife  , 
Toutes  les  autres  tomboient  néceflfai- 
rement  par  terre. 

Cependant  Pilatequi  nepenétroit 
pas  dans  toutes  leurs  vues  ,  leur  ac- 
corda tout  ce  qu'ils  demandoient  ? 


de  l'Evàng.  CL  CXLIV.     i  S  5 
en  leur  faifatit  fentir  qu'il  ne  fe  mê- 
loit  pas  volontiers  de  leurs  affaires  : 
Vous  ave%  ,   leur  dit-il  ,  des  foldats     AirilîisPi- 
pour  le  garder  ,  les  mêmes  qui  vous  Iarus  :  HaijT 
ont  fervi  à  le  crucifier  \  Alle-^  ,  gar-  diao  , 
derfon  fépulcre  comme  vous  Venten-  itc,cuftodite 

j  il  ficut  feins. 

de%.    Ils  ammenerent   avec  eux   ces 
témoins  futurs    de  fa  réfurrection  ,     nu 


aurem 


qui  ne  dévoient  pas  leur  erre  lufpects.  a^eunres  mu- 

3  ..  .         f.  r  meruat      fe- 

11  y  a  heu  de  croire  qu  ils  viuterent  Fukhtum  , 
le  fépulcre  ,  &"  reconnurent  l'état  où 
étoit  le  corps  de  Jésus.  Enfuire  ayant 
appliqué  de  nouveau  la  pierre  à.  l'en- 
trée ,  ils  y  oppoferentlefceauinvio-  fignanre$  la. 
lable  de  l'Empire  ,  &  ils  y  lailTerent  pkfcm    cu* 
les   foldats  qui  firent  un    corps  de  cuko     us* 
garde  du  veftibtiîe.  Ils  ne  pouvoient 
prendre   des  mefures  plus  juftes  ôc 
plus   fures  pour  metrre  la  réfurre- 
£Hon  de  Jésus  ho--sde  tout  foupçon 
de  fautfeté,  pour  s'orer  à  eux-mêmes 
!k  aux  autres  tout  prétexte  de  la  ca- 
lomnier ,  &  pour  pi  égarer  tous   les 
efprits  raifonnables  à  la  croire.  Cette 
II.    raifon   s'achèvera  au   Chapitre, 
fuivant. 


<$> 


184  Analyse 


cap.  gklv.  CHAPITRE    CXLV. 

A.  18  B.  16. 

c  _■+  d.  lo.      Résurrection. 

Refurrcttïo. 

1.  Voyage  des  femmes  au  fépulcre.- 


L 


A  III.  preuve  de  la  Réfurrec- 

rion  de  Jésus  fe  tire  de  la  vifite 

que  des  femmes  pieufes  firent  de  fou 

A.i8.vef-  fépulcre.   Après  que  toute  cette  fe- 

yere    autem  maine  fut  paflTée   (    c'eft:  le  fens   de- 

fabbati,qu2B  r  c    1  1       •  \      1       /*  I 

^ucefcit     in  vejpere  autem  ùabbati  )    lorlque   le 
prima  fabba-  premier  jour  de  la  femaine  fuivante 

ri,  B.  Maria    r     .      /       '    •    v  r^.  » 

Magdaiene  ,  qui  répond  a  notre  Dimanche,  com- 
ôc  Maria  &c  mençoit  à  luire  ,  Marie  Maçdelainev 

Jacobi         &  .■*  *-? 

Saiome  cme-  Marie  mère  de  Jacques  le  mineur ,  &T 
runc  aroma-  Salomc  mère  des  deux  fils  de  Zebe- 

ra  ,    ur    ve-    ,  ,  ,  ,  1      r 

niences  iinge-  dee  partirent  de  grand  matin  ,  lorl- 
renr   jcfum.  qU»jj  fa i fo î t  encore  obfcur  ,pour  aller 

Et  valde  ma-     A  1      t 

ne una fabba-  embaumer  le  corps  de  Jésus  ,  avec 
^fUm  a'*lhuc  ^es  p21^1115  qu'elles avoient  préparés 
reucbrs  ef-  dès-le  iok  du  Vendredi  ,  cV  elles  ar- 
fent ,  b.  ve-  rjv€reQC  au  fépulcre  lorfque  le  foieil 

niunc  ailmo-    ,...,,        f  r  ■  rr 

numencum     croit  déjà  levé.  Voye-^la  DiJJertation 

ercojamfole,    Y  Y  Y  l/'T  T 

C.    portantes  A  AA  *121'  ,        .  .      ,  , 

qu«  parave-  Plufietus  grands  obitacles  s  oppo- 
rant  atoma-  f0ienc  a  [eur  pieufe  entreprife.  Le  i. 

étoit  la  pierre  qaL  fermoit  l'entrée 
du  fépulcre ,  Ôc  que  des  femme^n^ 


de  l'Evang.  Ch.  CXLV.  i  $$ 
pouvoient  pas  remuer  de  fa  place  > 
beaucoup  moinsla  détacher  du  roc  , 
où  elle  tenoit  par  des  crampons  de 
fer.  Elles  s'en  ïbuvinrent  en  chemin,  B.  Ec  dic<r- 
&  fedemandoienc  les  unes  aux  au-  fcancadinvi- 

•   .  a  i  •  ji      cem   :     Quis 

très  qui  leur  oteroit  la  pierre  de  la  reVoivec  no- 
porte  du  fépulcre.  Lé  2.  étoitle  feau  bis  Jappent 

*i     1>T-         •    r  ,  •  /-/     T'     ab  oiho  nrcy 

de  1  Empire  qu  on  y  avoit  appoie.  ht  numeau* 
le  3.  le  corps-de-garde  qu'on  avoit 
poftédans  le  veftibule  :  obftaclesplus 
invincibles  encore  que  la  péfanteur 
de  la  pierre.  Elles  n'avoient  rien  fçu 
de  tous  ces  changemens  ,  qui  leur 
eufiTenc  6té  la  penfée  d'aller  feule- 
ment vifiter  le  fépulcre  /  Dieu  le 
voulut  ainli  ,  pour  leur  faire  porter 
les  premières  nouvelles  de  la  Réfur- 
redHondefon  Fils. 

Il  leur  envoya  du  ciel  un  Ange  , 
qui  leur  applanit  toutes  ces  difficul- 
tés. Il  annonça    fa    venue    par    un     a.  Ececce 
grand  tremblement  de  terre  ,  qui  re-  ""*  motus 

*>    ...  ,  ,  •   t  •  radius eft  ma- 

veilla  ceux  des  gardes  quidormoient;  ^nus.  Ange- 
étant  entré  dans  le  veftibule  fans  au-  jusr  D,omT 

r     A  1      r  J       Pc         dclccndic  de 

cun  reipect  pour  le  iceau  de  1  Em-  cœio-,  &  ac- 
pire  ,  il  arracha  la  pierre  &  les  cr*m-  cede,ns  u v°l" 

r         »        .  r  vie  UriJem, 

pons  qui  1  attachoient  au  roc  _,  &  les  ^.fedebacfa- 
jetta  hors  du  veftibule  avec  un  fra-  ptl  *um' 
cas  effroyable.   Son    vifage   brillanc     Erataovm 
comme  un  éclair  qui  remplit  celieu  a.rPcd^s.  e'u* 
oblcur  d  une  lumière  lurprenante  ,  &  veftimea- 


i86  Analyse 

A.  18.  B.  16.  fon  habillement  blanc  comme  la  nei- 

C.  14.  D.  zo.  ,  ,  r 

ge  _,  &  toute  la  repreientation  terri- 

tumeiusficuc  11      j^   r  C  C  \ 

nix  :  prs  d-  ^Q  de  ia  perioiine  ,  rrappa  les   gar- 
more  autem  des  d'une  iî  grande  épouvante  qu'ils 

ejus  exterrici  r  '  \      r  1 

func    eufto-  en  penierent  mourir  j  larra)eur  les 
des ,  ôc  faai  chaffa  loin  de  ce  pofte  ,  pour  en  laif- 

lunt       velue    ri>  'IL  r  '  C 

œortui.  1er  1  entrée  libre  aux  iaintes  temmes. 
Mais  l'Ange  épargna  leur  vie,  i.  Afin 
qu'ils  puflTent  témoigner  ce  qu'ils 
avoient  vu.  2.  Parce  que  leur  more 
eût  donné  lieu  aux  Juifs  de  dire  que 
lesDifciples  de  Jésus  avoient  furpris 
les  gardes  endormis  ,  &  qu'après  les 
avoir  tués  ils  avoient  enlevé  fon 
corps  fans  trouver  aucune  réfiftance. 
Pour  leur  donner  néanmoins  le  loifir 
de  reconnoître  l'Auteur  de  leur  dé- 
route ,  ôc  d'en  décharger  les  Difci- 
ples  innocens  ;  il  s'aflit  fur  la  pierre  , 
&  s'expofa  fièrement  à  leurs  regards 
avec  cet  air  terrible  qui  les  avoit 
effrayés. 
b.  itrefpi-      Cependant lesfemmesqui  s'appro- 

cientes  (mu-  choient  toujours  virent  de  loin  que  la 

hères  )  vide-       .  •  '  ,    /  a     /       ,      r       ,  i  r 

mut  c.  lapi-  pierre  avoit  ete  ot.ee  de  la  place  ,  ians 

4em    révolu-   appercevoir  aucun  qU|  fût  aiîlS  defïllS. 
tum  à  monu-      ^f  .1  i-rri 

mento  :  b.  e-  C  eft  que  les  Elprits  bien  differens 

magnu?UvPaPl-   ^eS  corPs  ne   &  *om  W0K    9U*^    CetlX 

de:  qu'ils  veulent.  Au(îî  cette  vifion  les 

&introeuntes  eût  effrayées  jufqu'à  leur  faire  quit- 

mmonumen-  .  J  -r        ni 

tum,  c.  non  ter  leur  entreprile.  Lues    entrèrent 


de  l'Evang.  Ch.  CXLV.     187 

jufques  dans  la  grotte  du  fépulcre , 
&  regardant  de  toutes  parts  j  elles 
n'y  trouvèrent  point  le  corps  du  Sei- 
gneur Jésus. 

Aufli-tôt  Marie  Magdelaine,  ayant 
averti  (es  compagnes  de  (on  derfein  , 
courut  porter  cette  nouvelle  à  Simon 
Pierre  &  à  cet  autre  Difciple  que 
Jésus  aimoit  ,  ôc  qui  en  a  écrit  lJhi- 
floire.  Elle  leur  dit  qu'on  avoit  em- 
porté le  Seigneur  hors  du  fépulcre  , 
&  qu'elles  ne  favoient  où  l'on  l'a- 
voit  mis. 


invenerunr 
corpus  Doirw- 
ni  Jefu.  D. 
Cucurrirerg© 
Maria  Mag- 
dalenet&c  ve- 
nir, ad  Simo- 
nemPetrum, 
&  ad  alium 
difcipulum  , 
quemamabac 
Jefus  -,  &  di- 
cit  illis  :  Tu- 
Ierunr  Domi- 
num  de  mo- 
numcnto  ,  5c 
nefcimus  ubi 
pofuerunt  c- 
um. 


2.    Courfe  de  Pierre  &  de  Jean. 

Pierre  partit  avec  cet  autre  Difci- 
ple pour  voir  de  leurs  yeux  ce  qui 
ctoit  arrivé  ,  &  tous  deux  allèrent 
au  fépulcre  ,  en  courant  enfemble  \ 
Jean  néanmoins  ^romme  le  plus  jeu- 
ne courut  plus  vite  que  Pierre,  & 
arriva  le  premier.  L'entrée  étant  fort 
baffe,  il  fe  bai  (Ta  &  vit  les  linceuls 
par  terre  ',  mais  la  crainte  l'empecha 
d'entrer ,  &c  il  fait  cet  aveu  fans  doute 
pour  s'humilier  ,  Se  pour  donner  à 
Pierre  tout  l'honneur  de  cette  action 
généreufe. 

Car  Simon  Pierre  qui  le  fuivoit 
étant  arrivé  ,    entra  hardiment  dans 


2  .  Curfus 
Pétri  &  Joan- 
nis. 

Exiit  ergo 
Petrus  ,  &  il- 
lealiusDifci- 
pulus ,  &  vc- 
nerunt  ad 
monumen- 
tum.  Curre- 
bant  au  rem 
duo  fîmul,  ôc 
ille  alius  dif- 
cipului  pr«e- 
cucurrir  ci- 
tiùs  Petro,  6c 
venir  primus 
adrnonumen- 
runi.  Er  cura 
fe  inclin?  (Ter, 
vidic  polira 
linceamina  , 
non  tamen 
inrroivir.  Ve- 
nir ergo  Si- 
mon    Pcuui 


1 88  Analyse 

a.  i8.  b.  16.  Ja  taverne  j   il  vit    comme  lui   les 
'  linceuls  par  terre ,  &  enfuite  le  fuaire 

inmonumen-  qui  n'étoit  pas  avec  les  linceuls,  mais 

tum,  &  vidic      i*  /  t  /  j 

linteamina  P*ie  ou  roule  proprement  dans  un 
pofita,&fu-  lieu  à  part.  Alors  Jean  devenu  plus 
fuerac  fuper  nardi  par  1  exemple  de  Pierre,  entra 
capuc   ejus ,  aufli  dans  la  caverne  du  fépulcEe  ;    il 

noncum  lin-  \-     r  c  *i 

tcaminibus  V1C  toutes  ces  choies  :  ce  comme  ils 
poficum,fed  ne  favoient    pas  encore   que    félon 

feparatim  in-  i>E.  i  j  •         rr   r  •  j> 

Yolutum  in  1  Ecriture  il  devoitretiuiciter  d  encre 
unumiocum.  les  morts ,  il  crut  auïîi-bien  que  Ton 

Tuncergoin-  ^,    n  r  ,         ,  »     J,        , 

troivic  &  iiic  Collègue ,  lelon  le  rapport  de  Magde* 
difdpulus   ,  laine      qu'il  avoit  été  dérobé  ,  quoi- 

qui    venera:  .        1  ,  a    i     ,-p 

primus  ad  que  les  apparences  leur  prechallcnc 
monumen-     ie  contraire  ;  n'y  ayant  aucune  appa- 

tum;&  vidit,  ,  J.    J    .  ,.  ,,r  r 

&  credidit.  rence  que  des  voleurs  j  au  heu  d  em- 
Nondum    e-  porter  le  corps  comme  ils  Tauroienc 

mm  fciebant  r  /       r     r   rr  rt       i 

scripturam  ,  trouve  ,  le  ruiient  aminés  dans  un 
qma  oportc-  {[  çrand  péril  à  le  développer  de  {es 

bat     eum    a   ,    &    ,    ,    r         n     ,     r     ,  •      rr. 

monuis   re-  bandelettes  &  de  les  linceuls  j  de  les 
furgere.        féparer  du  fuaire,  &  de  plier  le  fuai- 
re à  part ,    tout  cela  fans  craindre 
Abierunr  d'être  pris  fur  le  fait.   Ces  deux  Dif- 

ergo  iterum  ciples  s'en  retournèrent  chez  eux,  Se 

«difcipuli    ad      r  . 

femctipfos  :  Pierre  toujours  perluade  du  larcin  , 

PerrS  fe^um  ne  Pouv°ic  a^ez  s'étonner  comment 
mirans  quod  on  avoit  pu  exécuter  une  entreprife 

fr*.    lue-  fi  ^^ 


DE  l  "Ev  ANC  Ch.  CXLV.      I  8  9 

3 .  Première  apparition  de  Je/us  à     ^ànuTa^i 
Masdelaine,  ft  MagdaU- 

Marie  ne  les  fuivit  pas  ,  non  plus  autfm  *£br£ 
que  les  autres  femmes  qui  y  croient  ad      monu« 
demeurées  j  mais  elles  forrirent  avec  S^Jïïl   ^ 
eux  de  la  caverne  ,  Ôc  Marie  fondoic 
en  larmes  fans  favoir  quelle  réfolu- 
tion  prendre.   Plus    impatiente   que 
les  autres,    elle  rentra  dans  le  velli- 
bule,   <x   en  pleurant  toujours  ame-  fleret,  incii- 
rement  ,   elle  fe  pencha  pour  voir  navic  fc  >  Sc 
de  nouveau  ce  qu  elle  avon  déjà  lum- fnonumen_  . 
famment  vu  _,  il  quelque  choie  pou-  tum  : 
voit  fuffire  à  une  amante ,  pour  voir,  &  viHit  duos 
dis-je  ,  fi  elle   n'appercevroir  point  ffi&lffi 
ce  qu'elle  cherchoit.    Alors    elle   vit  unûm  ad  ca- 
deux  Anges  vêtus  de  blanc,  aflis  l'un  ff^H 
a  la  tête  j  &c   l'autre  aux  pieds  ,   fur  pofîrum  Vue- 
i'eftrade  de  pierre   creufée   en   forr^/ScuntS 
me  de  cercueil  où  le  corps  de  Jésus  »'1i  ■  Muher, 

/    /  ni         J  J  quid  ploras  * 

avoir  ete  mis.    Ils   lui  demandèrent  J>jCit       eiS, 
pourquoi  elle  pleuroit  :   parce  que,  QU1»     tu!e* 

/  i-        m  i        /  r    •      funr     Domi- 

repondit-elle  ,  on  a  enlevé  mon  bei-  num  meum 
gheur  ,  Se  que  je  ne  feai  où   on  l'a  &  nefeioubi 

p         ,     n  *,        '  J  ,  i       ,  rofuerunc  c- 

porre.  Sans  leur  tenir  plus  de  Hn-  Um.  HcTccùm 

cage,  elle  les  lai  (Ta  là  ,  toute  polTé-  toifTet  .cou. 

J'     JJ  1»  l-  »  n       i        l    •  o    vcrfa  eft  tc*. 

dee  de  l  objer  qu  elle  cherchent  ,    ce  ttorium. 

fortit  du  veftibule  pour  aller    dans 

tout  le  Jardin  y  porter  fa  recherche  , 


i<.)0  Analyse 

a.  18.  b.  16.  pendant  que  les  autres  femmes  ren- 
c.  14.  d.  10.  r  1 

r  c„r„  *.  trerent  dans  le  iepulcre. 

b.  Surgens  r 

aucun  j«/îii      Lors  donc  qu'elle  le  retourna  elle 

5£d?a£  vit  Jesus  devanc  elIe'  Mlls  comme 
païuit  primo  elle  cherchoit  un  corps  mort  ,   elle 

dlîene  Madê  ri'avoit  garde  de  le  reconnoître  dans 
<jua  cjcccrac  un  homme  vivant  qui  lui  parloit ,  8c 
moniT  d.  &  fur  qui  elle  n'arrêta  pas  les  yeux.  Il 
vidit  jefum  lui  demanda  de  nouveau  quel  étoît 
£onCfdcbaf,  le  fojet  de  fes  larmes  ,  &  ce  qu'elle 
«juiajefuscft.  cherchoit.  Elle  qui  le  b'rërioit  pour 

jDicitei Jefus;  i      x  >r   a          j      t       J"         v    '  f      /*'        I 

Muiicr,quid  le  Maure  du  Jardin  ou etoit  le  lepiil- 
piorasîquem  cre  y  c'eft-à-dire  ,  pour  Jofephd'Ari- 

ousricisî  Illa  i  •          1     •    j  •  r  1 

exiftimans  ,  mathie ,  lui  dit  ,  comme  11  tout  le 
^uiaboitula-  monde  ne  devoit  fonder  qu'à  ce  qui 

ivusefkc.di-  ,,  .  r  wi  /     a      p- 

citd:Domi- 1  occupoit ,  que  il  ce  dépôt  l  mcom- 
nc    fi  tu  fu-  modoit ,  elle  le  prioit  de   lui  mar- 

ftulifti  cura  ...  \    m    i  j  /  r 

aidto  mihi,  quer  le  lieu  ou  il  1  avoit  rait  cranl- 
ubi    pofuifti  porter  ,    afin  qu'elle  le  fit  enlever. 

cura  :  6c   ego  «^  i  ■••■'% 

cumtoliam.   Comme  il  ne  repondoit  point  a  cette 

prière  ,  elle  lui  tourna  le  dos  comme 

aux  Anges. 

î™?vïzlîi       ^ESUS  la  rappellant  lui  dit  de  ce 

convctfa  iiia  £Gn  de  voix  qui  lui  étoîr    connu  : 

dicitei  :  Rab-     **       •      t?\\      r  a  

boni  ,  quod  Marie,  hue  le  tourna  en  mcme-tems, 
riicitur  Ma-  &  fe  jecta  à  fes  pieds  toute  ravie 
^  de  joie  ,  elle  lui  dit  :  Ah  mon  Maî- 

tre !  Comme  elle  tenoit  toujours  (es 
pieds  embraiîés  ,     &  qu'elle  ne  les 
DiciteiJe-  qUitr0it  point  ,  Jésus  pour  modérer 

fus:Nolimc     *  .  .  ».     .     ,.  ,    n 

unge^aon-  cette  première  ardeur, Un  dit  qu  elle 


de  l'Evang.  Ch.  CXLV.     191 
ne  dévoie  pas  ainfi   fe  coler    à    fes  d«»enimaf- 

.  r  r     ..  j         •        1        cendi  ad  Pa- 

pieds  ,  comme  h  elle  ne  devoit  plus  u:m  meum: 
le  revoir  j  qu'il   n'étoit  pas   encore 
remonté  vers  fon  Père ,  &  qu'il  a  voit  vatlc    auceai 

,     r  •  \       1  ac*        rratres 

encore  plulieurs  jours    a   demeurer  meos,  &  die 
fur  la  terre.   Voyc\  la  DiJJertation  c,s  : 
XXXVIII,  Mais  qu'elle  s'en  retour- 
nât incelfamment  vers  (es  frères,  ter- 
me d'honneur  &  d'amour,  qu'il  em- 
ployoit  pour  consoler  fes  Difciples  j 
ôc  qu'elle  leur  dit  de  fa  pat t  _,  qu'il 
n'étoic  pas  feulement  reifufcité,  mais 
en  état  de  monter  dans  peu  de  tems  Afcendo    ad 
vers  fon  Père  Se  leur  Père  ,  vers  fon  Patrc™   ™e- 
Dieu  Se  leur  Dieu   :    Expreflion  qui  nemvcftrum: 
marque  nettement  fa  Divinité  &  fon  ^Tun^vTf- 
humanité.  tnim. 

Marie  Magdelaine  alla  porter  cette     venit  Ma- 
heureufe  nouvelle  aux  Difciples  du  ria  Masdalf- 

e    .  ,  i        .  ne    annunti- 

àeigneur,   qui  etoient  encore  dans  ans  difeipu- 

les  larmes  ôc  dans  le  deuil    de    fa  lis  ■  B-  j*** 

un     1         rr  »  11    1»  cum  co  fue" 

mort,   iille  les  aliura  qu  elle  1  avoit  mne,  îugen- 

vu  ;  Se  pour  leur  témoigner  que  ce  [|bus&    S" 

n'étoit  pas  une  imagination    ,    elle  QuiavidiDo- 

leur  rapporta  les  chofes  qu'il  lui  avoit  T^T  .*  *? 

,.  i[,    .  .       ,  .7         a !     •    j.       h*cduic  nu- 

dités.    Mais   quoiqu  elle   put     dire  ni.  b.  Et  Ul| 

pour  leur  perfuader  qu'il  vivoit,  ôc  ^fâ'viverer, 
qu'elle  l'avoit  vu  ,  ils  ne  crurent  ni  &  vifus  eflet 
l'un  ni  l'autre   ,    Se  ils   Paccuferent  fj^™* 
tacitement  d'avoir  pris  pour  une  réa- 
lité qui  lui  avoh  frappé  les  yeux ,  le 


î  92.  Analyse 

a.  rt.  b.  16.  phantome  donc  Ton  imagination  étoit 
pleine. 


C.  A4.D.  20. 


4.  Refune-  4.  Femmes  ïnjlrultes  de  la  Réfurreclion 

bus  indicata.  ae  JeJuS' 

«  c.  Er  fac-  Cependant  les  autres  femmes  qui 
mente  conf-  etoient  rentrées  dans  le  veltibule  , 
ternats    ef-  toutes  affligées  de  cette  féconde  per- 

ie:u  mulieres  1       1  a  /T    A  •  A 

dcifto,ccce  te  de  leur  Maître,  virent  paroitre 
duo  vin  fte-  auprès  d'elles  des  hommes  vêtus  de 

tsrunt    fecus   ,  •  f  •    /  i 

jiias  invcfte  blanc,  qui  etoient  apparemment  les 
fuigemi.cùm  mêmes  qui  avoient  apparu  à  Marie. 

timcrent   au-   ru  lc  r  T        j  c 

tcm,  &  .de-  -biles  en  turent  laides  de  crainte  j  &: 
clinarent       comme  la  pudeur  leur  faifoit  baifler 

vnlcum       in  -  1         A  1  J: 

terrant  dixe-  la  vue  en  terre  ,  les  Anges  leur  di- 
mnt ««g*/* ad  rent  qu'elles  n'avoient  aucun  fujet 

illas:A.No-     ,  K      .  „     ,.,  .  If 

lire  «mère  de  craindre.  V,)u  ils  voyoïent  bien 
tos-,  b.  noii-  qU'e{les  cherchoient  Jésus  de  Naza- 

tc  expavefce-     1    .  .  ,    ,  .  r  , 

rc  :  jefum  retn  qui  avoir  ère  crucihe  ;  mais 
«^uauitis  Na-  pourquoi  chercher  parmi  les  morrs 
rifixdm.  c.  celui  qui  etoit  plein  de  vie  ?  yu  il 
Q«id  qusri-  n!^roitplus  là  '  mais  qu'il  étoit  refluf- 

tis  vivenu'tvi      •,■1         F 
cummoiruis?   Cite. 

A.  Non   eji       lis  leur  en  alléguèrent  deux   preu- 

hic-:  furrexit  .  o  r 

s  inconreltabies.  La  i.eit  la  predi- 


enim 


ficuc  ves  inconreltabies.  La  i.eit  la  pi 


dixir.  c.  Re    c^lon  gU  ^  Jeiir  enavoit  faite:    fur 

corilamiui  •   •?    1  •  1       r      r  • 

^uaiirer    îo-  quoi  ils  les  prièrent  de  le  louvenir 
cutuseft  vo-  J  »-j  |       avoir-dit  étant  encore 

bis  ,  cumad-  1    ; 

tue  in  Gah-  en  Gainée  ,   que  le  dis  de  1  nomme 
i*acrtet,di-  jevou  ^;e  1^^  entre  les  mains  des 

mec  dans , 


de  l'Evang.  Ch.  CXLV.     195 

médians  ,    attaché  à  la  croix   ,    &  ?P°"«    Fî- 

rr    r  ■  1  -r  •  Iiumhominis 

reflufciterle  troiiieme  jour.  tradi  in  nu_ 

La  1.  eftque  pour  voir  la  confor   nushommum 

•/11        l   t  jvû«  v    i>    rr  11        peccatorum  , 

mite  de  la  prédiction  a  l  errer  ,  elles  &  cmdfigi , 
n'avoiem  qu'à  s'en  rapporter  à  leurs  &/ilc  tem* 

1  11  re  iuriTere. 

propres  yeux  ,  qu'elles  rentraient  A.Venîre, 
dans  la  grotte  du  iépulcre,  &  qu'elles  &  v,cletc  *?: 
vinllentreconnoitre  le  heu  ou  le  àei  pofitus  crac 
gneur  avoit  été  mis.  Dommus' 

Après  avoir  réveillé  leur  foi ,  ils 
exercèrent  leur  obéitfance.   Ils  leur    Etckoeim- 
com mandèrent  d'aller   avertir   tous  c"  B-,tiicitc 

r         rx-r  •    1  o  1  difcipuhs    e- 

ies  Dilciples  .,  &  principalement  jUS  &  Petro, 
Pierre  doublement  affligé  de  la  mort  A-  .iUI0a  fur" 

1      r        m  «  *  o      1     r  1   a  rcxit  -,  Oc  cccc 

de  ton  Maître  &  de  la  propre  chute  ,  précédée  vos 
que  Jésus  étoit  relTufcité  ,  &:  qu'il  'nGa.l,la:ani: 

A     .      .  ,  r   ,,,  2  B.     îbi    cum 

iroit  les  attendre  en  Galilée  ,  que  videbiûs,  û- 
c'étoit-là  où  il  devoit  fe  faire  voir  à  £utdixitv<*- 
eux  félon  fa  promeife.  Cet  ordre  re- 
gardoit  tous  fes  Difcipies ,  qui  étant 
alors  plus  de  cinq  censn'auroientpu 
dans  un  fi  grand  nombre  s'alTembler 
dans  la  Judée  prefque  fous  les  yeux 
des  Grands-Prêtres  ,  qu'ils  n'en  euf- 
fent  donné  de  l'ombrage  à  Pilare 
comme  d'une  confpiration  formée. 
Pour  la  fureté  de  les  Difcipies  8c 
pour  l'honneur  de  fon  Eglife ,  Jésus 
eut  la  bonté  de  leur  alîigner  un  ren- 
dez-vous en  Galilée. 

A  la  fin  les  Anges  dirent  aux  fem-   a.  cuzvx*. 
Tome  IF.  I 


194         Analyse 
A-  18.B.  i*.  mes  qu'ils    s'acquittoient  de  lacom* 

C.  14-  D.  10.        .  r  i      ,  1  , 

million  dont  îlsetoient  charges  ,  de 

dixi  vobis  Ci  1  ° 

Ec  recordat*  Aes  avertir  par  avance  de  toutes  ces 
fiuu  veibo-  chofes.  Elles  fe  fouvinrent  en  erret 
Ex™  eikrunr  des  paroles  de  Jésus;  & fortaut auffi* 
citodemonu-  tôt  du  fépulcre  ,  faifies  de  crainte  & 

mento     cura  r         lf        1      •     •  11 

timoré  &  traniportees  de  joie  ,  elles  coururent 
çaudio  mag-  faire  leur  rapport  aux  Apôtres  ;  la 

no,currentes    r  ,  L  ,  1*1  o 

nunriare  dif-  frayeur  leur  donna  des  ailes  ,  &  ne 
eipulis  ejus.  Jeur  permit  pas  même  d'en  parier  à 

B.    Invaferat  l  ,        «      l  .  ,r  r      >    11 

enim  eas  tre-  ceux  de  leur  connoiliance  qu  elles 
moï&pavor:  rencontrèrent  en  leur  chemin. 

6c  ncmini 
quidquamdi- 
xerunc  :  ti- 
jnebancenim. 


5 .  Seconde  apparition  de   Je/us 


s.  Secundo,  aux  femmes. 

gipparitio 

chrifiimuhe-       Leur  foi  fut  récompenfée  de  la  vue 
de  Jésus  :  elles  le  trouvèrent  qui  ve- 

A.  Et  ecce  v  ,  11    1  j 

jefus  occur-  noit  a  leur  rencontre.  11  leur  donna 
rit  iiiis ,  du  fa  paix  s    &    elles   embraflerent   (es 

cens:Avete:       •    j         o,  i»    j  r       J 

iii«  autem  pieds ,  oc  1  adorèrent  par  un  prorond 
acccffcrunt  ,  profternement  :  Ne  craigne?  point  , 

&  tenuerunt   [  p     -i  ■  n         j-  \ 

pedcsejus,&  leur  dit-il  9  mais  alle\  dire  a  mes 
adoraverunc  freres  qu'Us  aillent  en  Galilée  :  ce(l- 

eum.      Tune-7,,        ,.7.  '       J 

aie  illis  Jcfus:  là  qu  ils  me  verront. 

Noiite  cim«-      Revenues  du  fépulcre  ,  elles  con- 

re,ite,nun-  r    A 

date  fratd-  terent  aux  onze  Apôtres  ,  oc  aux 
bus  meis  ut  autres    Difciples  qui  fe   trouvèrent 

cane  in  Gali-  .  x  r      .     i  ,  ,     , 

izam:ibime  la,  tout  ce  qui  leur  etoit  arrive, 
ridebunt^c.  L'apparition  des  Anges ,  rafTurance 
mQnumcnto,  touchant  la  réfurre&ioii  4e  Jésus  ,  fa 

fciuu  rayer  mi; 


©e  l'Evang.  Ch.  CXLV.     195 

rencontre  ,  fa  vue  ,    Se  fes  paroles  h*c    °,mHÎi 

*  r         .     «  ,    n  .  l  îllis  undecim 

rneme,  les  pieds qu  elles  avoienttou-  &      cxteùs 
chés  ,  &  enfin  ce  qu'elles  n'avoient  omnibus- 
pas  deviné  ,  l'ordre  qu'il  leur  avoic 
cionné  pour  tous  les  Difciples  d'aller 
en  Galilée.   Celles  qui    leur  rappor-     Eratamem 
toient   toutes   ces  chofes  ,    écoient  J^ria  Ma|" 
Marie  Magdelaine ,  Jeanne  _,  Marie  joanna'    & 
mère  de  Jacques  ,    &  plufieurs   au-  ^iaria-Tacobi» 

,     7  n  y-.  **        esters 

très  qui  etoient  avec  elles.  Cepen-  qua:  cum  eis 
dant  tout  cela  leur  parut  une    pure   jranu'    0j}i3\ 

r  r  diccbanr    ad 

rêverie  ,  6c  ils  n  en  crurent  rien.         Apoftoios 

Quoique  le  témoignage  des  fem-  %££?£ 
mes  pût  être  infirmé  par  les  Juifs,  los  ficut  de- 
1.  du  côté  de  leur  fexe  ,  qui  e(l  cré-  ^^  j 
dule  &  imbécile  ,    2.    du    côté    de  &  non  credi- 
l'affection  qu'elles  avoient  pour  Je-   deruntiihs- 
sus  ,  il  devoit  néanmoins  avoir  rou- 
te fon  autorité  fur  Tefprit  des  Apô- 
tres. Car  le  premier  défaut  étoit  ré- 
paré ,  iQ.  Par  leur  nombre  ,   étant 
impoffible  qu'elles  eu(Tent  toutes  été 
trompées  ,  &:  que  les  unes  n'eurent 
pas  corrigé  l'erreur  &  Tillufion  dis 
autres.  i°.   Par  le   même  détail  de 
toutes  les  circonftances  en  quoi  elles 
convenoient',  ce  qui  eût  été  impof- 
fible fi  elles  eufiTent  été  faulfes.  30. 
Par  leur    fagelTe  &  par    leur   vertu 
bien  au-deffus  du  commun  des  fem- 
mes, &:   qui  les  rendoit  incapables 


196  Analyse 

a.  18.  b.  16.  Je  feindre  une  fable  fi  bien  circon'* 

C.  2.4.  I).  10.  n  •  / 

itanciee. 

Pour  l'affection  envers  Jésus  „  ce 
n'étoit  pas  un  défaut  à  l'égard  des 
Apôtres  ,  qui  étoient  fujets  au  mê- 
me préjugé.  Mais  la  vérité  ne  per- 
dit rien  dans  cette  dureté  des  Apô- 
tres }  autant  qu'Us  refuferent  de 
créance  &  d'autorité  au  rapport  des 
femmes,  autant  en  ajouterent-ils  \ 
leur  propre  rapport  ,  lorfqu'enfin 
perfuadés  de  la  réfurrection  de 
Jésus  ,  ils  la  prêchèrent  aux  Juifs,  de 
à  toutes  les  nations  de  la  terre. 

t.Confdium    £#  Confcil  des  Juifs  pour  étouffer 
J0cdcuhandârl  le  bru'lt  &  la  Réfurrection, 

furreftione. 

Il  eft  tems  de  pourfuivre  la  II. 
preuve  de  la  Réfurrection  que  nous 
avons  commencée  au  Chapitre  pré- 
cédent. Les  Gardes  furent  témoins 
de  toutes  ces  démarches  des  deux 
Apôtres  &  des  femmes  ,  fans  qu'ils 
leur  vilfent  rien  emporter  hors  du 
A.Quaecùm  fépulcre.  Après  qu'elles  fe  furent  ré- 

abiifTent ,  ce-         /  1 1  A  j> 

ce  quidam  de  tirées ,    quelques  -  uns  d  entre    eux 
euftodibus     vinrent  dans  la   ville  rapporter  aux 

▼cnerunt     in  ^   •  j        r»   *  »  ' 

civicatem,  &  Princes  des  Prêtres  tout  ce  qui  s  e- 
nuntiaverunt  toit  pafïe.  Témoins  irréprochables  % 

te&dQim  &  qui  par  leunmçrec  commua  cou- 


t>e  l'Evang.  Ch.  CXLV.     197 
tre  Jésus  ,  ne  leur  dévoient  pas  être  ?™nî!    4UiE 

r   r      rs         a  ■    r     1  •         s   *a&a  fuciant. 

iu'pecis.  Aind  11  ne  manque  rien  a 
la  folidité  de  la  II.  preuve  de  la  Ré- 
furrection  de  Jésus  dans  l'efprit  des 
Grands-Prêtres  j  ils  en  furent  per- 
suadés malgré  eux  ,  mais  ils  ne  fe 
manquèrent  pas  au  befoin. 

Ils  s'alTemblerent  avec  les    Séna-     Eccongre- 

o  J  ml  '  '     '    J  >*1      pati  eu  m  fe- 

teurs  _,  ce  ayant  délibère  de  ce  qu  ils  nioribus,cou- 
avoient  à  faire  ,    ils  donnèrent    une  lîlio  afeepto, 

ar  i>  r   \  \  pecuaiam  co- 

e  lomme  d  argent  aux  loldats  ,  piofamdedc- 

pour  publier  par  tout ,  que  la  nuit  ,  ,tunt,  milici- 

1  1  '  ,-.1    /  ,  -|         bus,dicentes: 

pendant  qu  ils  etoient  endormis ,  les  dicke     quia 
Difciples  de  Jésus  croient  venus  dé-  difeipuii  ejus 

,       l  r  \  g    •  r  nocce    venc- 

rober  Ion  corps.  Mais  ce  menionge  runt,  &fu- 
qui  fauvoit  l'honneur  des    Grands-  ratirmueiim 

n   a  1  1         r  ,  1  v      nobis       doc- 

rretres  ,  perdoit  les  loldats  auprès  miencibus. 
du  Gouverneur  ,  à  qui  ils  dévoient 
rendre  compte  de  leur  expédition; 
parce  qu'il  y  va  de  la  vie  i  un  fol- 
dat  en  faction  de  fe  lai  (Ter  aller  au 
fommeil.  Le  confeil  Judaïque  ratïu- 
ra  donc  les  foldats  contre  cette  ter- 
reur j  &  ils  leur  promirent  que  6  aJhu^ftS 
leur  prévarication    prétendue  venoit  ritâpr«fide, 

~    _  'il       J     r*  1        C      nos  fuadebi- 

aux  oreilles  du  Gouverneur ,    ils    re-  musei,  &re- 
roient  leur  paix.  .  euros  vos  far 

Mais  cette  terreur  que  les  foldats 
ne  manquèrent  pas  de  fah*e  bien  va- 
loir aux  Juifs ,  pour  grollîr  le  paye- 
ment de  leur  menfonge  ,  ne  les  tour- 

lnj 


ciemus. 


i()$  Analyse 

/.  i*.  b.  16.  mentoir  guère  dans  le  fond.    II  eft 
lans  doute  qu  ils  contèrent  a  Filate 
tout  le  détail  de  i'hiftoire  félon  la 
vérité,  avec  le  traité  que  les  Juifs 
avoient  fait  avec  eux  pour  les  obli- 
ger à  mentir.  Cependant  il  diilimula 
tout ,   auiïi  intérelTé  que  les  Juifs  à 
étouffer  le  bruit  de  la  Réfurrection 
de  celui  qu'il  avoit  fait  mourir  con- 
tre fa  confidence ,  &  contre  toutes 
les  règles  de  juftice. 
*.t  ïîlî  ac-       Les  foldats  ayant  touché  l'argent 
F^KSÏÏÎ  des  Juifs  ,  parlèrent  comme  ils  leur 
t  an-  edoââ.  avoient  fait  la  bouche  j  &  ce    faux 
^7/^'.  enlèvement  du  corps   de  Jésus  par 
fauna  îftud  a-  [qs  Difciples  ,  s'eft  répandu  depuis 
%^Z  parmi  eux,  &  dure  encore  jufqu'à 
iii/  :;um.       nos   jours  ,  quoiqu'il  n'y  ait  rien  de 
plus  mal  concerté  &  de  plus  extra- 
vagant que  ce  menfonge. 

Car  ,  i.  files  Gardes  dormoient, 
qu'ont-ils  pu  voir  ;  &  s'ils  n'ont- 
rien  vu  3  que  peuvent-ils  témoi- 
gner ? 

i.  Par  où  les  Difciples  ont- ils 
enlevé  ce  faint  corps  ?  Par  la  porte 
fans  doute  gardée  par  les  foldats  s 
puifque  par-tout  ailleurs  ils  n'euf- 
fent  trouvé  qu'un  rocher  impéné- 
trable. Mais  comment  ne  s'éveillè- 
rent-ils  pas  au  bruit  de  tant  de  gens 


de  l'Evàng.  Ch.  CXLV.  199 
qui  entroient  dans  le  fépulcre  ,  &C 
qui  en  fortoient  f 

3.  Comment  les  Difciples  ont-ils 
pu  arracher  la  pierre  avec  les  cram- 
pons fans  faire  un  giand  bruit .?  com- 
ment les  foldats  ne  fe  font- ils  pas 
éveillés  aux  coups  de  marteau  &C 
au  fracas  que  la  pierre  a  du  faire  en 
tombant  ?  il  falloir  que  leur  fommeil 
fut   enchanté. 

4.  Enfin  quelle  apparence  que  les 
Difciples  de  Jésus,  qui  Tavoient  lâ- 
chement abandonné  ou  renoncé  pen- 
dant fa  vie  ,  fufifent  devenus  plus 
généreux  après  fa  mort,  &:  qu'ils  fe 
flirtent  jettes  pour  lui  dans  un  péril  5 
où  dans  le  plus  heureux  fuccès  il 
n'y  avoit  rien  à  gagner  pour  eux  , 
&  où  ils  dévoient  attendre  une  more 
certaine  ,  fi  leur  entreprife  ne  réuf- 
firtoit  pas  î 


<%> 


Iir 


200  ANALYSE 

CAf  cxivr.  CHAPITRE  CLX VI. 

B.  16.  C.  14. 

Ténia  &      Troifieme   &  quatrième 

quarto,  appa-  A  .    • 

ruio.  Apparition. 

I.  Quarta 

éipparitio    m         1.   Quatrième   Apparition   à 

Jûmmaus»  .  £ £ 

hmmaùs. 

b.  16.  Poft  T  A  IV.  preuve  de  la  réfurrect!  on 
duobusw^is  -*-J  de  Jisus  fe  rire  de  fon  appari- 
ambuianti-     rion  à  deux  de  fes  difciples,  qui  ce 

bus    C.    ipfa    pv-  I       iv        a  11  1  1 

die  in  caftel-  J-'irnancne-la  même  allèrent  dans  le 
Jum  ,   quod  bourg  d'Emmaiisà  60.  ftades  de  Jé- 

«rac  in  fpario         r  \  \  ,,, 

iladiorum  fe-  rulalem  ,  qui  valent  7500.  pas  d  lta- 
acagimaabje-  lie  ,&  deux  lieues  &  demie  deFran- 

rufalem    no-  n  ,  «  r  -i\    rr 

mine  Emma-  ce*  "  ménagea  leur  roiblelle   avec 
***>  un  tempérament  merveilleux  ,  &  il 

les   prépara  de  loin  &   comme  par- 
degrés    pour  les  faire  pafTer   de  la 
prévention  de  fa  mort  où  ils  étoient, 
jufqu'à  pouvoir  foufriir  fa  vue. 
#.     ©ftenfus       1.  H  prit   l'apparence  d'un  voya- 

cft  inaliae-fti-  r  rr.  rr  -        r  1 

pe. c.Etipfi  gear  inconnu  qui  palloit    Ion  che- 
loqucbantuc    mjn  3  &:  qui  marchant  après  eux  ,  & 

ad      invicem    i  1  r      •     •       •       \ 

de  his  omni-  les  ayant  atteints  ,  le  joignit  a  eux 
busquaacci-  pour  avoir  l'avantage  d'être  de  leur 

derant.  Et  ta-   l  .  ° 

ûumeftdum  compagnie. 

fabuiarentur,       ]jp  jjs  s'entretenoient  de  tout   ce 

quacrctcnt  :    qui  etoit  arrive  ,  ce  même  lans  te 


be  l'Evàng.  Ch.  CXLVI.     201 

contraindre  pour  lui  ,    depuis  qu'il  &  «pfe  Jcfa* 

.  .    i  »t  i    •  «    appropin- 

les  eue  joints ,  ils  continuèrent  a  qUans  ibac 
s'informer  l'un  de  l'autre  des  circon-  cu™illis-  o* 
itances  qu  ils  lçavoient,  ce  a  raiion-  iiiorumtene- 
ner  là-de(ïus.   Ainfî  il  put  entendre  ïaiu"' f"e 

t    #  eu  m  agnolce- 

une  partie  de  leur  entretien  ,  &  cela  rent.  Et  aie 
lui  fit  prendre  la  liberté  de  leur  en  fi^S 
demander  le  fujet  ,   &  quelle  étoit  mones,quos 
la  caufedeleur  triftetfe.  Cependant  %££*£ 
ils  ne  le  reconnurent  point  5  foit  que  buiames    ôc 
le  défaut  fut  dans  les  y  eux ,  ou ,  corn-  *ftis  Kiftw 1 
me  il  eft  plus  probable  ,  que  quel- 
qu'endroit  du  vifage  de  Jésus  leur 
parut  autrement  qu'il    n'étoit  ,    ce 
qui  fufht  pour  changer  tout  l'air  du 
vifage. 

III.  L'un  d'eux  nommé  Cléophas,     Et  refpoa- 
le  père  ou  le  mari  d'une  des  Maries ,  dc?s    unus  * 

■    S    ,  j.  ,/  ,.,   rA  '   cui      nomeix 

lui  répondit  en  s  étonnant  qu  il  rut  ckophas,  di- 
te feul  étranger  à  Jérufalem  qui  n'eût  fltei:  Tuf°- 
rien  lçu  des  choies  lugubres  qui  s  y  nus  es  m  je- 
étoient  paffées  dans  ces  jours-là.  11  non^coeno^ 
diflimula  de  le  favoir,  pour  leur  vifti  quxfac- 
donner  moyen  de  lui  découvrir  leur  £  hi°diêbus> 
plaie  ,  &  pour  avoir  lieu  d'y  appli-  Quibw  iiie 
quer  le  remède.  Cléophas  lui  ayant 
dit  que  le  liijet  de  toute  cette  trage-  xeruHt  :  <fc 
die  ctoit  Jésus  de  Nazareth.  Jefu  Nazare- 

r.  11  lui  marqua  les   difpofitions       '  f  .     . 
prelentes  ou  ils  etoient  encore  a  ion  propheta,po- 
c^ard ,  d'eftime  Ôc  de  créance  ,  corn-  ^\^^ 

1  v 


2oi  Analyse 

».  j6.  c.z4.  me  d'un  Prophète  envoyé  de  Dietr^ 

coram    Dco  puiflant    en  (qs  œuvres    faintes    &c 

?iiomm  P°"  roiraculeufesj  puiflant en  fes  paroles 

par  la  pureté  de  fa  doctrine  ,  &  par 

l'autorité  avec  laquelle  il  enfeignoit; 

puifTant  en  Tune  &  l'autre-  manière 

devant  Dieu  ,    qui  l'avoit  autorifé 

par  mille  merveilles  ,  &  devant  le 

-    Uomo-  PeilP^e  °iui  l'avoit  toujours  admiré. 

do  cum  tra-       2.  Il  marque  la  manière  indigne* 

iiL{cnmlror   dont  les  Grands- Prêtres  6c  les  pre- 

lumm»  Sacer-         ;  .  »    /* 

dotes  &  Prin-  miers  du  peuple  1  avoient  traite  ,  en 
S^ât£iin  Ie  condamnant  à  la  mort  ,  &  en  le. 
nem  mords ,  faifant  attacher  à  une  croix  par  la 
Dunteom..^  fentence  du  Gcuverneur. 

Nos  autem       3-  U  repréfenre  leur   difpofiçiots 
fperahamui.,  paflee  ,  qui  étoit  i'efpérance    qu'ils 

quiaipfecllet   l         .  A  ..  >-i        i/i*  •     i 

xeàcmpturus,  ^voient  conçue  qu  u  aelivrerpit  le? 
ifraci  :  peuple  dlfraël  du  joug  des  Gentils; 

ou  d^s  Romains  ,  Ôc  qu'il  le  rétabii- 
roit  au   même  état  qu'il  étoit  fous. 
David.  Car  ils  ne  pénétroient  pas 
plus  loin  ^   &  ils  ne  fongeoienc  pas- 
encore  à  la  délivrance  de  la  ferviu    o 
du  démon  ,  du  péché  ,  &  de  la  Loi- 
Mais  helas  !  ajouta- t-il,  cette  efpé- 
rance  étoit  bien  abbatuë. 
*jnuncfuper       Car,   i .  C'étoit  alors  le  troifieme- 
tertia  aies  eft  jour  depuis  que  tout  cela  etoit  arrivea> 
kodie ,  quod  &  cependant  il  n'y  avoit  point  de* 

ha?c        fa&a     i  l  j  w,  j      l   i      r 

xuat..  changement  dans  1  état  des-  choies» 


t>E  l'Evang.  Ch.  CXLVI.     20$ 

&  tout  demeuroit  dans  la  même  dé- 
flation j  d'où  il  lailïbit  à  juger  qu'il 
en  feroit  toujours  de  même  ,  8c 
qu'il  n'y  avoit  plus  rien  à  efpérer  pour 
l'avenir. 

2.  Il  s'oppofe  une  petite  lueur  de  Sed&cmu- 
reflource.  il  eft  vrai  que  quelques  ^ a*%£. 
femmes  de  leur  parti  les  avoient  un  tris  terrue- 
peu  étonnes  :  Qu  étant  allées  avant  ante  lu*eiu 
le  jour  voir  fon  fépulcre  (  cet  avant  fuerunt  ad 
le  jour  eft  myiténeux  dans  le  dif-  ™°mUi&  non- 
cours  de   Cléophas  )   elles  avoient  invento  cor- 

y    i       »         o  '11  t  ..  porecius,  ve- 

declare  ,  1  .  qu  elles  n  avoient  point  flerun'c     ai- 
trouvé  fon  corps:  20.  qu'elles  avoient  ccntcs  fe  eri- 

r         j' a  •         ri'       am  vifionenv 

eu  une  viiion  d  Anges  ,    qui    ailu-  aoçeiorum 
roient  que  Jésus  étoit  plein  de  vie.  vWiflc  ,  qui- 

M.-p  1      '     c  *L1    i   dicunc     eura 

aïs  que  cette  reilource  etoit  roible!  Viverc.  ic  a- 

Quelques-uns  de  leurs  amis  étoient  bierimt  qui- 

7,  /      1     r,       1  3.     r  dam    ex  nof- 

ailes  au  îepulcre  pour  s  informer  par  tris  ad  Kiorm- 
eux-mêmes  de  la  vérité  de  ce  double  mtntura  :  fc 

,  r    -i      n  •  1  ':a      invenc- 

temoignage.  ht  il  elt  vrai  que  de  ces  runt      ficut 

deux  parties  de  leur  rapport  ils  ont  mulieres  «U* 

j lutine  la   première  ,  qui  elt  qu  ils 

n'ont  point  trouvé  fon    corps  dans 

fon  fépulcre.  Mais  que  pour  l'autre 

qui  regardoit  fa  réfurrecbion  ,  ils  l'a— 

voient  trouvée  faulfe  ,  puifqu'ils  ne  ,Pfum.    rer^ 

.,         .  .  »    •       *k         *  non    inve»*-- 

1  avoient  point  vu  lui-même  ,  &  que  runt. 
s'il  eût  été  vivant ,  il  n'eût  pas  man- 
qué de  fe  faire  voir  à  fes  plus  chers 
.Difeiples  c|ai-  le  cherchaient   avec^ 


204  Analyse 

t.  a.  €.  i4.  emprefTement.  De-là  il  laifloit  à  con- 
clure a  l'étranger  ,  que  ces  bonnes 
femmes  ayant  été  au  fépulcre  avant 
le  jour  s'étoient  éblouies,  que  dans 
l'obfcurité  elles  avoient  pris  pour 
lui  quelque  phantôme  qui  leur  avoir 
frappé  la  vue  ,  &  que  ces  Anges,  qui 
leur  avoient  conté  fa  réfurrection  , 
étoient  une  pure  vifion  de  femmes  y 
qui  s'imaginent  voir  &  entendre  tout 
ce  qu'elles  ont  dans  la  penfée. 

IV.  Après  avoir  entendu  leurs  rai- 

fons,  Jésus  les  réfuta  avec  la  liberté 

que  donne    la    compagnie  dans   le 

s  ïc  îpte  di-  voyage.  Il  les  traita  de  gens  fans  ef- 

c^ftuiji'^pnt  &   fans   docilité  pour   tout   ce 

tardi    corde  que  les  Prophètes  avoient  écrit  tou- 

dum  ii^om-  chant  le  MeMie.  Il  paiTà  fans  réponfe 

nihus     qua?  tous  les  faits  allégués  parCléophas  ». 

locuti      funt   0      1  1  •  rr  >  ' 

ïiophera:  !  &  dont  la  connoiiiance  11  etoit  pas 
d'un  étranger  donr  il  portoit  le  cara- 
ctère. 

Mais ,  1.  Il  s'attacha  a  la  mort  di£ 
MeÛle  ,  le  fujet  de  leur  fcandale. 

2.  A  fa  réfurrection  ,  qui  étoit  le 
fujet  de  leur  défefpoir. 
'onuTt^ad      l'  Il  leur  prouva;  i°.  Que  felorc 
ci.riftum, &  l'Ecriture  le   Mefîîe  dévoie  fouffrir 

ita  incrare  in  tour    Q  que  JESUS   Je  Nazareth  avoic 
glonain.    lu-  ^         ^_        f    ., 

mi:  fouftert.  2.  Qu  il  devoit  entrer,   par 

cette  voie  dans,  1»  gloire  T  6c  paf 


de  l'Evang.  Ch.  CXLVI.     205 
conféquent  qu'il   étoit  reifufcité.  11    Et  încîpien 

,  n  j  •      •  1  -  à  Moïfe  ,    & 

leur  prouva  ,  dis-je  ,  ces  deux  points  omnibus  pro- 
par  coure  l'Ecricure,  en  commençant  Phctis  »  in" 

a.     x  m       r     ■     r      ■>  1  •         *  1        tcrprerabatur 

epuisMoile  juiqu  aux  derniers  des  Mu  in  omai- 

Prophetes.  Il  leur  expliqua  rous  les  busfcripcuris 
lieux  qui  le  regardaient ,  ce  qu  il  rai-  eranr. 
foit  avec  d'autant  plus   de  Lienféance 
Ôc  de  grâce  ,  qu'étant  inconnu  il  iem- 
bloit  plutôt  plaider  la  c^.ufe  d'un  au- 
tre que  la    henné.     11   les  convain- 
quit de  la  né  :  de  Ta  mort  &  du 
droit  de   fa  echon    ,    en  leur 
lailfant   démêler,  comme  ils    pour- 
roient  ,  les  faits  allégués  par  Cleo- 
phas.  Il  ne  reftoit  plus  à  leur  prouver 
que  le  fait  de   fa  réfurrection    :  Ec 
voici  comme  il  s'y  prit. 

C-i     *      •    â  *  i>  Ec    appro» 

omme  ils  etoient  prcts  d  enrrer  phiquave- 

dans  le  bourg  où  ils  alloient  y  il  fou-  rui!c  c*ftefï*ii 
tint  juiqu  au  bout  Ion  caractère  d  e-  &  iPfe  fefin- 
rranger  ,  &c  il  prit  congé  d'eux  com-  xic    loûS"* 
me  s'il  eut  dû  aller  plus  loin.  Ainfi 
il  n'y  a  pas  plus  de  menfonge  dans 
cette  action  ,   que  dans  l'apparence 
d'étranger  qu'il  avoit  prife  ,  parce 
que  les  actions  ne  font    des  ngnes 
naturels  que  de  la  volonté  qui  les 
commande ,  ôc  non  de  la  foi  à  quoi 
elie  les  rapporte.  Jésus  fit  l'action, 
d'un  homme  qui  vouloit  pafler  ou- 
tre, Ôc  continuer  fon  voyage  ;    ôc  il 


xo6  Analyse 

I,  16.  c.  14.  l'eût  en  effet  continue ,  s'ils  ne  Peut 

fent  pas  arrêté  comme  ils  firent, 
tunr  iiiuin ,  Charmés  de  Ton  entretien  ,  ils  le 
dicente$:Ma-  contraignirent  de  demeurer  avec  eux 

lie  nobifcum,  °.  ,..    ,  ,,,  . 

qûonUm  ad-  cette  huit,  parce  qu  il  etoitdeja  tard, 
vcfperafck  ,  Se  que  le  jour  s'abbaiiïoit  ;  &  il  en- 
eftjam  aies,  tra  avec  eux  dans  lamailon,  comme 
Ir     v,nra,'ic  pour  y  patfer  la  nuit.   Etant  à  table 

eu  n  dits.    Er   !.        .   ]    *       .       ,  N     . 

factum  où.  il  prit  du  pain  des  >e  commencement 
du  m  recum-  dùfoupèr,  il  le  chaàô'éà  en  fon  corps 
accepit  pa  par  la  bénédiction ,  &  I.  ayant  rompu,, 
nem ,  &  be-  A[  [e  ;eiu.  ,réfenca  fans  faire  la  même'. 

nedixie  ,    ac     .      r     .      i    .. 

fregic  ,    ôc  choie  du  calice,  ce  qui  prouve  mani- 
porngebat il-  fetlement  la  communion  fous  une 
feule  efpece. 
Et  apperti       Dans  le  tems  que  ces  deux  Difci- 

funtoculieo-      1  l  ,-,    . 

ram,&cog-  p*es  rian^o;';:r  ce  qu  il  leur  avoit 
noveruac  e-  donné  ,  leurs  yeux  furent  tellement; 
ouvert;  qu'ils  le  reconnurent  distin- 
ctement par  une  vertu  attachée  au 
myftere  de  PEucliâriftie.  Alors  ils 
furent  pôr  Luadés  du  fait  de  fa  réfur- 
redtion  ,  i.  Par  leurs  propres  yeux. 
se  ipfe  eva-  2.  Par  les  ;  I  oiritueiles  de  fon 

eorum.  corps  réiiulcite..  Car  il  dilparut  au 

Ecdixciunt  même  moment  ,  Se  il  fe  rendit  invi- 

«d  invicem  i    /m  1      x   1  n    .    I»    J 

Nonne  cor  "ble  a  leurs  yeux.  3.  Par  1  erret  que 
no/irum   ar-  fes parole-)  p  5ô<fuîigre*ht  d  i lis4  leur  ef- 

dens   erac  in        •  '  1        1  •         ,  ■>  / 

nobis ,  dum  prit  penaa'nï  le  chemin,  lis  s  avoue- 
îoquerecur  in  renc  pim  £  l'autre   que    leur  cceur 

Via  .   &  ape-    /  a  /      i>  o      1 

4ret-    nobis-  etoif  tout  ennamme  a  amour  oc  d&" 


de  l'Evang.  Ch.  CXLVI.     207 
foie  ,    lorfqu'il    leur  expliquoic  les  ScrîPtur"  ? 
Ecritures. 

2.  Troijieme  Apparition  à  Pierre.         2.  Tenim 

apparïtïo  P&~ 

Ils  comprirent  que  Ton  detTein  en 
difparoilTant  tout  d'un  coup  ,    étoit 
qu'ils  allafïent  ince  Tarn  ment  porter 
cette  heureufe  nouvelle  aux  Diici- 
ples  encore  dételés,    lis  le  levèrent  ,  ^J^t*' 
de  table  a  la  mernè  heure,    lans  le  râ      tegreflî 
donner  le  loifir  de  manger  ,   &  ils  £ai«nT&iî£ 
retournèrent  fur  leurs  pas  à  Jcrufa-  venerunteoni 
lem,  où  ils  trouvèrent  les  onzeaGTem-  |reec^° 
blés  ,  (  quoique  Thomas  hitabfent, 
c'eft  ainli  néanmoins  que  depuis  la 
mort  de  Judas  on  nommoit  le  collège 
Apoilolique.  )  Ils  trouvèrent    avec  &  eo* .  lui 

1  ,l  '  r-x    r  ■    \  •   cum    illis    c- 

eux  quelques  autres  Lhiciples  ,  qui  rantj  dicen- 
leur  rapportoient  ce  que  Pierre  qui  tes  :.Q"0(i 

il  ai        furrexit    l)o™ 

étoit  préfent  leur  avoit  confié ,  &  ce  minus  verèP 
que  fa  modeftie  &:  la  crainte  d'exci-  &  aPParuic- 
ter  leur  jaloulie  l  empechoit  de  leur 
dire,  comme  une  marque  honorable 
de  diftinction  ,  qui  eft  que  le  Sei- 
gneur étoit  vraiment  relTufcité  ,  & 
qu'il  étoit  apparu  à  Simon. 

Ces  deux  voyageurs  fe  joignant  à  ,EtiPfi  narr*- 

1  J    °  /  «    °     /  bant  quae  ge- 

eux  leur  racontèrent  ce  qui  leur  ctoit  iu  eranc  in 
arrivé  dans  leur  voyage  ,  &  de  quelle  Tia }  &  <ino- 

11,         .    '     o     '  j.  modocogno- 

mauière  ils  1  avoienc  reconnu  dans  la  v«w«.  <:*«*• 


2o8         Analyse 
In   fraaïone  fraclion  du  pain.   Mais   toute  cette 
paB.Skec  aii  foule  de  témoins  ne  firent  encore  au- 
wediderunt.  Cllne  impreflion  fur  leur  efprit ,  ôc 
ils  demeurèrent  fermes  dans  leur  in- 
crédulité. 


cxlv  iTi.       CHAPITRE     CXL  VIL 


Cinquième   &  fixieme 
Quhu*&  Apparition. 


B.  16.  C.  14. 

D.  20. 


ftxta  Apparï 

1.  Cinquième    Apparition  aux  once; 

1.  Quinta 

JSSU  aF'J  A  V.  preuve  de  la  Réfurre- 
8  j  ctioft  fe  tire  de  l'apparition  de 
Jésus  aux  Apôtres  ;  &  cette  preuve 
a  toutes  les  conditions  nécefïaires 
pour  être  décifive.  1.  Du  côté  des 
Apôtres  défians&  incrédules  jufqu'a 
l'opiniâtreté.  II.  Du  côté  de  l'appa- 
rition même  qui  fut  de  la  dernière 
évidence.  III.  Du  côté  de  leur  per- 
fuafion  &  de  leur  foi, qu'ils  allèrent 
prêcher  par  toute  la  terre  ,  qu'ils 
iîgnerent  de  leur  fang  &  fcellerent  de 
leur  mort. 

I.  Si  on  reçoit  le  témoignage  des 
ennemis ,  on  doit  compter  pour  quel- 
que chofe  la  perfuafion  des  gens  in- 
crédules ,  qui  étoiem  comme  armé* 


DE  l'ËvàNG.  Cil.  CXLV11.       20ç 

de  toutes  pièces  concre  les  argumens 
de  la  réfurrection.  Dans  cette  indif- 
pofition  Jésus  les  attaqua  de  loin  , 
pour  les  réduire  peu  à  peu  à  la  véri- 
té.  11  leur  en  fit  porter  la  première 
nouvelle  par  des  femmes  :   mais  ce 
meflage   ne  fit  aucune  imprelîion  fur 
leur  efprit.  Ils  auront  donc  peut-être 
plus  de  créance  en  des  hommes.    11 
leur  envoya  ces  deux  voyageurs  d'Em- 
maiis  ,   mais  ils   ne  furent  pas  plus 
heureux  que  les  femmes.  Ils  avouent, 
difoient-iis ,  qu'ils  fe  font  trompçs 
pendant  le  chemin  ,     en  le  prenant 
pour  un  autre  ;  n'ont-ils    pas  pu    fe 
tromper  une  féconde  fois  dans  la  fra- 
ction du  pain,  en  prenant  quelqu'au- 
tre  pour  lui  ?  Non  fans  doute  ;  car 
ces  deux  erreurs  font  incompatibles, 
&:  s'excluent  l'une  l'autre  :  s'ils  fe 
font  trompés  la  première  fois ,  il  eft 
impoiîible  qu'ils  fe  foient  trompés 
la  féconde.  Mais  ils  n'y  regardoient 
pas  de  fi  près.  D'ailleurs  cette  éclip- 
fe  de  Jésus  ,  au  même  inftant  qu'ils 
le  reconnoilfoient  ,    leur  parut   de 
mauvaife  augure.   Voilà  une  dureté 
prefque  furnaturelle. 

II.  Ils  la  portèrent  encore  plus 
loin  dans  cette  apparition  où  Jésus 
remédia  à  toutes  leurs  défiances ,  i. 


no         Analyse 

B,  !<?.  c.  14.  par  l'apparition    même.    2.  Par  Pc-* 
D.  zo.  rr,     .  ,      ,,  , 

preuve  de  la  vue  &  de  1  attouche- 
ment. 3.  Par  le  manger. 
c.  H.Dum       1.  Ils   n'en  crurent  point  les  ex* 

loquuntur.  Pues  4U  *1  *eur  avolt  envoyés  j  il  leur 
b.  16.  No-  porta  donc  lui-même  en  perfonne 
cumbenrib'in  *es  nouvelles  de  fa  réfurreclion.  Ce 
illis  uiuiecim  Dimanche-là  même  au  fo ir  ,  les  por- 
^Lx^cùm  tes  du  lieu  où  croient  les  Difciples 
crgofcroeiret  étant   fermées  de  peur  des   infulteS 

die  illo  ,  una    i        r    T       1      r      >i      '      •  \       i  i 

fabbatorum,  des  Juits  ,  loriqu  us  ctoient  a  table  , 
«cforesefTent  &  que  les  voyageurs  d'Emmaiis  con- 

claufae  ,    ubi        .  J  '  ,  °  T 

«rantdjfcspu- toient  encore  leur  avanture  ,  Jésus 
li  congregati  vmt  &  fe  trouVa  au  milieu  d'eux  * 

propter    me-  .  ..  f  {      r- 

tum  judso-  en  leur  duant  :  La  paix  Joit  avec 
*um  »  QveÀlk  vous.    Cette     vue   produisît    l'efTet 

Jefus,  8c  fie-         ,    n         .  «      n 

tic  c.  in  me-  qu  elle  dévoie  naturellement  avoir 
dio  corum,6c  dans  leur  prévention.  Ils  fe  trou- 
vons ,  ego  blerent ,  ils  s'effrayèrent  dans  la 
fum,  nohec  créance  qu'ils  voyoient   un  efprit , 

timere.  Con-  ,  1  /  /   r,        ' 

turban  vero,  roqdes  lans  doute  lur  cette  penetra- 
&  conternti,  tjon  £un  ^eil  fermé  de  toutes  parts  , 

exilhmabanc  .  .     ,    ,    .  x  r  ' 

fe  fpiritum  qui  auroit  ete  împofiible  a  un  corps. 
TJr l?\    .         i.  Il   leur   demanda  de  quoi  ils 

Ir  dmt  eis  :  .  .1 

Quid  turbati  s  allarmoient ,  &  d  ou  venoient  tant 
gftatior^sCa0f"^e  phantômes  qu'ils  fe  formoienc 
cendunt  in  eux-mêmes.  Voyant  donc  que  la  firrï- 
*°  aîple  apparition  ne  les  convainquoie 

pas  ,  il  leur  prouva,  i.  Que  c'étoit 
lui-même  par  un  argument  fort  pro- 
portionné à  leur  groiîiéreté  ,  je  dis 


de  l'Evakg.  Ch.  CXLVII.    1 1  î 
par  les  paies  qu'il   avoir  reçues  à  la 
croix.  11  leur   montra  les  mains  ex  nus  meas   & 
fes  pieds   encore   percés  des    doux  pedes ,  quia 

î    /  o     r  *      egoipfefum; 

qui  les  avoient  attaches  ,  oc  Ion  co-   °    r 
té  ouvert  d'un  coup  de  lance.   2.  Il 
leur    prouva  qu'il  n'étoit  point    un 
efprit  par  la  confiitance  de  fon  corps 
compofé  de  chair  &  d'os  ,   chofes 
qui  ne  conviennent  point  à   un   ef- 
prit j  &  il  les  invita  à  le  toucher  :  ce  paipate ,   & 
que  rirent    peut-être    quelques-uns  7'J^|  |jjï 
d'entreux  ,   puifque  faint  Jean  aile-  nrà  &  oiu 
gue  cet  attouchement ,  î.  Joan.  c.  14.  ^ucnïvul- 
comme  un  motifde  crédibilité.  Alors  tishabere.  Et 
ils  fe  relâchèrent  un  peu  de  leur  du-  SStTollei* 
reté  ,  &  ils  en  crurent  a(Tez  pour  fe  die  eis   ma- 

'•  j      î  j     c    •  J      nus, 6c  pede$„ 

réjouir  de  la  vue  du  beigneur  ,  ou  du  D>  &  iatus* 
moins  de  quelque  objet  qui  lui  étoit  Gavifl    fanç, 

r       il    il  ergodifcipulf 

iemblable.  vifoDomia^ 

3.  Mais  enfin  comme  un. efprit 
pouvoit  contrefaire  tout  ce  qu'ils 
voyoient  ,  ils  ne  furent  pas  tout-à- 
fait  convaincus  :  mais  ils  conçurent     „    .  ,, 

r     .  \    r        •  r  c-    Adhuc 

je   ne  lçai  quel  lentiment  courus  ,  autem    iiiu 

mêlé  de  défiance ,  d'admiration  ,  &  n?n  crfden; 

,  T  1   •     p  nbus  » &rai- 

de  joie.    La  joie  regardoit  1  appa-  ramibus  pr« 

rence  ,   qui    leur    étoit    infiniment  S4^10- 

agréable  j  l'admiration  étoit  pour  la 

manière  furprenante  ,  qu'ils  ne  pou- 

voient  pas  comprendre.  La  défiance 

&  la  crainte  s'atcachoient  au  fond  j 


iii  Analyse 

*• *'•  c#  H-  ils  appréhendoienr  que  rour  ce  qu'ils 

voyoient  ne  fûc  une  îllufion. 
dixic  :  Habe-       Pour  les  défabufer  il  leur  deman- 

tishîcaliquid    j  *i       r  •  i  i  i 

quodmanau-  da  >  cornrne  ^s   iortoient  de   table, 
cavur?  At  iin  s'ils  n'avoient  pas  là  quelque  chofe  à 

*>btulerunt  ei  •   f  *  n  /    i      i  /•  / 

panempifcis  ranger,  qui  rut  reite  de  leur  loupe: 
affi,&favura  ils  lui  préfentereiit  un   morceau  de 

mellis.ïtcum         •  rr  *    •        o  i  •    i 

manducafTec  poilion  rôti  ,  oc  un  rayon   de   miel, 
coram    eis ,  \\  Qn  mangea  une  partie  .  &  prenant 

lumens   reli-  .  n      -i    i      i  i-  r    r 

quias    dedic ie  reIre  "  *e  leur  rendit  ,  ahn  que  ce 
e,s#  qui  refroit  fût  comme  un  monument 

-  de  ce  qu'ii  avoit  mangé, 

ptobravit  in-       HI.  Lorfqu'il  les  vit  affermis  dans 
credulitatem  la  foi  delà  Réfurreclion   ,    il    leur 

eorum    ,     &  i       i      j  /     j       i 

duritiamcor-  reprocha  la  dureté  de   leur  cœur  m- 
dis,  quiaiis,  crédule ,   avec  laquelle    ils    avoient 

qui   viderant        .         i  \         §  l  i  •  i> 

eum  refurre-  rejette  le  témoignage  de  ceux  qui  1  a- 
Îj.;    non  voient  vu    refïuicité  s     parce   qu'ils 

frediderunc.     .         .  .         ,  ,c,       »N  ,r       ,       1  . 

dévoient  plus  dererer  a  la  depolition 

des   fages  qu'à   leurs    impoflibilités 

prétendues. 

©.  Dîxîtcrgo      La   paix  qu'il  leur  avoit   donnée 

Paxvob'is^i-  d'abord  ,  ayant  été  rejettée,  il  la  leur 

eut  miiît  me  donna  une  féconde  fois.  Et  i .  comme 

mitto    'vos°.  f°n    ^ere  'a*    avoit  donné   million 
Haec  cumdi- dans  la  Judée  ,  il   la  leur  donna  par 

xiflet  ,  infuf-  i  11  a    ! 

iîavic  i  &:  di-  toute  la  terre,  pour  y  aller  prêcher 
*iceis:Acci- l'Evangile.  2.  Mais  comme   ils    ne 

pire  Spiricum  i>  r  ,  •rp 

fanûumquo-  pouvoient  1  exercer  ians  la  puiliance 
rumremifcti-  ^Q  remettre  les  péchés ,  il  foufrla  fur 
eux ,  en  leur    difanc  :    Recevez  le 


tis    peccata  , 
xemiccumur 


de  l'Evang.  Ch.  CXLVIT.  215 
Saint- kfpr'u  ;    les  péchés  feront  re-  cis  :  &  W** 

\  [     \  1  rum  retinuc- 

mis  a  ceux  a  qui  vous  les  remettre^  ,  rjtiS)  rerenca 
&  lis  feront  retenus  à  ceux  à  qui  vous  runt- 

,  7  Q%     14..     Et' 

/dj  retiendrez  Ii  ht  voir  pat  ce  fouf  dixitadeosi 
fie  qui  croit  la  figure  du  Saint- Efprit.  Hxcfuatver- 

.—  ^  Dâ  Q   icE  10CU  — 

qui  le  produiioit  avec  le  Père  pai  tus  fum  ad 
voie  de  ipiration.  jos.cùm  ad- 

_,      .     *  .    ,      .  .     hue  elkmvo- 

11  ajouta  que  tout  ce  qui  etoit  am- j>ifcum;quo- 
vé  ,  étoit  précifement  ce  qu'il  leur  n'am  .ne"flç 

»  ^       r   •  1       -      >  1  cft      implen 

avoit  prédit  tant  de  rois  ,  loriqu  il  opinia ,  quac 
étoit  encore  avec  eux  ;    parce  qu'il  fct ,iptaw ..? 

,  >     r  1  mlcgeMoifi, 

ralloit  neceliairement  que  tout  ce  qui  &prophecis, 
étoit  écrit  de  lui  dans  la  Loi  de  Moi-  **!££  ^c 

Tune  a- 

le,  dans  les  Ecrits  des  Prophètes  ,  &c  peruit  Mis 
dans  les  Pfeaumes  fut  accompli  à  la  [n"ef^renutc 
lettre.  Scripturas     : 

Alors  il  leur  ouvrir  ïefprit  pour  &£*•£ 

entendre  les  tentures ,  de  il  leur  dit  feripeumeft, 
qu'il  eft  marqué  en  rel  &  tel  Heu  fccSK 
que  le  Chrift  devoir  foutîrir  la  mort  ;  pat»  &  refur- 

1  "  r  •  '  1    J  tT  r  £ere   à  inor- 

que le  troilieme  jour  il  devoit  reiiui  tuis     tcrtia 

citer  d'entre  les  morts,   que  la  péni-  <jiei&.  Ptae* 

oi         /       'rr  J  'f'J         dicari  in  no- 

rence  <x  la  remiiiion  des  pèches  de-  mineejuspoe- 
voir  être  prêchée  en  fon  nom  à  tou-  nkenriam  & 

1  l  ■  11  remiifionem 

tes  les  nations  de  la  terre ,  en   corn-  peccatorum 
rnencant  par  Jérufaiem.  Cette  char- in       omne« 

*  .  •,  j       j»  genres  ,  înci- 

ge  ,  ajouta-t-il  vous  regarde  dau-  pientibus  ab 
tant  plus  particulièrement  que  vous  Jerofolyma. 

*  F  i'i  Vos      aurer» 

êtes  les  témoins  oculaires  de  tout  ce  teftes  cft* 
qui  s'eft  paffé.  bûIlw- 


ii4  Analyse 

B.  16.  C.  14, 

1.  oixieme  Apparition  aux  mêmes 
i'ifdem     cum  Apôtres  avec  1  homas. 

Thoma. 

La  VI.  preuve  fe  tire  de  l'appa- 
rition à  faint  Thomas  ,  dans  lequel 
on  doit  admirer  deux  grandes  extré- 
mités }  I.  Un  excès  d'incrédulité  ôc 
de  défiance.  IL  Une  foi  parfaite  &c 
dont  il  n'y  avoit  point  encore  eu 
d'exemple. 

I.  Y  a-t-il  encore  quelque  chofe 

à  dire  ,  que  la  foi  de  la  Réfurrection 

ne  foit  parfaitement  établie  dans  l'ef- 

Thomas  prit  des  Apôtres  ?  Oui ,  8c  il   s'en 

autem    unus  V-  *       l  i  n  n 

cxduodecim,  raut  mune  beaucoup,  rar  malheur 
qui  dicitur  Thomas  étoit  abfent,  lorfque  Jésus 
îwneraccum  le  ht  voir  aux  autres.  Ils  lui  dirent 
cis    quand©  qLl'ils  avoient  vu  le  Seigneur.  11  leur 

venit     Jefus.   J  ,        ,.,     ,,  .         °,  .  ,    ,- 

Dixerunt  ei-  demanda  s  ils  l  avoient  bien  touche, 


gocialudif-  pour  reconnoitre  (1  ce  n  etoit   point 

cipuh:  Vidi-   l  .  A  -,.         ,  ,.  >-i 

mu     Domi-  un  phantome.  Ils  repondirent    qu  11 

IÊnm'  setoit   expofé  à  l'épreuve  de    leurs 

mains  ;  mais  que  la  chofe  leur  avoit 

paru  il  certaine  Se  Ci  évidente  qu'ils 

n'avoient  pas  pris  la  peine  d'en  ufer. 

ïlle  autem  11  les  aiTura  que  leurs  yeux  avoient 

«lixitcis:  Ni-  donc  ^>te>  trompés  par  la  faillie  appa- 

H    videro  in  r        r  i     •       i 

œanibusejus  rence  d  un  corps  ;  que  pour  lui  plus 

£xuram  cla-  circ0nfpe6t    que  les  autres  ,   il  ne  le 

croiroit  point  reuulcite  que  ious  çç$ 


BEl/EvANG.Ch.CXLVII.        II J 

trois  conditions,  i.  Qu'il  verroic 
de  fes  propres  yeux  dans  fes  mains 
la  place  des  clous  qui  les  avoienc 
percées,  i.   Comme  la  vue  fe  peut  &     mîttam 

/ii-  >-i  r  i    •        diçitum  me- 

eblouir  ,   qu  il  mettroit    ion    coigt  u.-n  iniocum 

dans  les  trous  ,  pour  en  mefurer  la  cUvorum, 

largeur  avec  la  çroffeiir  des  clous  à 

peu  près  pareille  à  celle  de  fon  doigr. 

5.  Enfin  comme  l'ouverture  du  côté 

par  une  Lance  de  oit  être  plus  large 

que  les  plaies  des  mains  ,  qu'il    ne  &     mîttam 

,_«.•«.  >'i        y        *  r         '    manum   me- 

croiroit  point ,  qu  il  n  y  eut  enfonce  am  in  latug 
fa  main  toute  entière  ,  large  à  peu  ejus,noncie«- 
près  comme  le  fer  d'une  lance. 

Ces  conditions,  &  fur-tout  la  der- 
nière ,  étoient  fort  étranges  ,  de  ne 
vouloir  point  croiie  qu'un  homme 
vive  ,  à  moins  qu'on  ne  le  voie  blef- 
fé  d'un  coup  de  lance  qui  lui  perce 
le  cœur.  Dieu  rendit  par  Thomas 
aux  Apôtres  le  même  traitement 
qu'ils  avoient  fait  aux  autres  ména- 
gers de  la  Réfurrection.  Ils  avoient 
rejette  les  femmes  &  les  voyageurs 
d'Emmaiis ,  ils  furent  rejettes  eux- 
mêmes.  Cependant  il  falloit  fatis- 
faire  cet  homme  difficile  j  &  c'efl: 
une  des  raifons  qui  obligea  le  Sei- 
gneur à  conferver  fes  plaies.  Et  pou 

II.  Huit  jours  après  la   première  dies(    °a° , 

'   .       r^.vr  .    .         ,  r    .  r    iteruni         e- 

apDaruion  ?  les  Dilciples  etoient  ai-  fàai  cUftipuij 


i\G  Analysé 

b.  16.  c.  14.  femblés  dans  le  moine  lieu  ,  &Tho- 

D.  io.  ,      .  T 

mas  etoit  avec  eux.  Jésus  y  entra 
Thomas  cura  Ies  Porres  fermées ,  &  le  trouva  au 
cis.  Vcnicjc-  milieu  d'eux  ,    fins  qu'on  fçiit   par 

fus        januis       v     1  rri     \\\        r  \  ,, 

clau/îs  ,    &  ou  ll  zvoit  paiie.  li  les  ialua ,  bc  leur 
/lerk  in  me- donna  fa  paix.   En  fui  te  s'adrelFanc  à 

dio   &  dixit:    »  1  \>       '      '  1  »■  l 

Pax     vobis.  ■*■ llomas  j&  répétant  ces  paroles  qu  il 
Deinde  dicic  n'a  voit  pas  entendues  ;  Enfonce  ici 

Thomas  :  In-  j    .  1     •    i-      -i  1     • 

fer   digitum  ton  «-oigt ,  lui  dit-il  en  lui  montrant 
tuuiu hue, &  fes  mains  :  avance  ta   main   de  mê- 

vide     manus  c     w         t  1 

meas,&affer  me  j    &  la  plonge  toute  entière  dans 
qurrnmtua.ro  mon  côté  y  &  ne  fois  plus  incrédule  , 

oemitte  inla-  .       ~  ,  ,.        -r-,     J        £        r  r 

tusmcum}&  mais  Jiaele.    1  homas   ennn   perlua- 
îioli  efc  in-  dé ,  lui  dit  :  Vous  êtes  mon  Seigneur, 

credulus,fed  _  .  ° 

fidelis.    Ref-  &  mon  Dieu. 

pondit  Tho-    Confeflîon  complette  de  l'humanité 

*nas,&:  dixit  _     ,     .      ..    .    .    ,    \       _ 

ci  :  Dominus  <x  de  la  divinité  de  Jésus,  qui  en- 
meus,&Deus  chérit  au  moins  dans  les  termes  fur 
celle  de  faint  Pierre  ,  puifque  la  filia- 
tion divine  que  celui-ci  avoit  recon- 
nue &  confeiïce  ,  peut  s'attribuer  à 
d'autres  qui  n'ont  pas  la  Nature   di- 

Dixit  ei  T  i     *      '  \  ■  »•  1  i» 

7e fus  :  Quia  Vlne-  Jésus  lui  répondit  qu  il  1  avoir 
vidifti    me ,  cru  relîiifcité  ,    parce  qu'il  l'avoir  vu 

didlSVbeati  ^e  *~es  Yeux  :  ma's  clue  ceux   clu^  ^'a- 

qui  non  vide-  voient  cru  fans  le  voir  ,  étoient  plus 

runt ,  ôc  cre-  t  i  I 

dUderuuc.  heureux  que  lui  j  parce  que  la  nature 
ôc  le  mente  de  la  foi  ,  confilte  à  croi- 
re ce  qu'on  ne  voit  pas.  Il  ne  parloir 
pas  des  Apôtres  ,  qui  étoient  à  cet 
égard  dans  la  même  caufe  que  Tho- 
mas y 


de  l'Evamg.  Ch.  CXLVII.     îry 

rnas  ,  mais  de  ceux  qui  perfuadés  par 
leur  prédication  dévoient  croire  fans 
voir  par  toute  la  terre  tk  dans  la 
fuite  des  (iécles. 

On  voit  tout  d'un  coup  à  quoi 
tend  Pufage  que  Dieu  a  fait  de  l'in- 
crédulité éc  de  la  défiance  des  Apô- 
tres. C'a  été  pour  ménager  des  preu- 
ves à  la  Rcfurre&ion  de  Jésus  ,  Se 
pour  en  établir  la  créance  dans  tous 
les  efprits.  Car  on  ne  peut  former 
-aucun  doute  contre  ce  fait  ,  qu'ils 
n'ayent  formé}  ni  faire  aucune  obje- 
ction ,  qu'ils  n'ayent  faite.  Ils  enc 
éprouvé  pour  nous  toutes  les  peines 
que  nous  pourrions  fentir.  Il  eft  donc  Mal  m  qaî- 
julte  que  nous  nous  rendions  comme  £?,  ?.aJ,a 

<         .  l  ligna  fecu  Je- 

ils  le   font  rendus  ,   ôc    que     nous  Cusûïcoofpe- 
xrroyons  par  leur  autorité  „  ce  qu'ils  ^J^f^ 


n  ont  cru  qu  après  tant  d  épreuves,  qus  non  (unt 

Saint  Jean  nous  avertit  que  Jésus  bropu  7jl~ 

a  fait  devant   fes  Difciples  plufieurs  H*c    aurem 

autres  miracles  qu  il  n  a  pas  juge  ne  ut  crdaris 

ceîTaire  d'écrire  :  maisqueceux  qu'il  ^ûjefusoft 

'      r    illi"  C       J         Criftus  Filius 

a  marques  lutnlent   pour  periuader  Dei  :  & 
les  fidèles  à   qui  il  les  adrelFe  ,  que  «ed««««*i- 
jEsused  le  Chrift  &c  le  Fils  de  Dieu,  -m  nomincï 
afin  que  la  foi  qu'ils  auront  en   fon  fus* 
nom  leur  procure  la  vie  éternelle. 

Tom.  IK  K 


ii$  Analyse 


cxlviÎi.      CHAPITRE     CXLVIII. 

D' tu        Septième  Apparition  fur  le 
pVruh*  apai  bord  de  la  mer. 

mare. 

x. Secundo.       \*   Seconde  pèche  miraculcufe. 

pifcatio  mira- 

cuiofa.  T   A  VIII.   preuve   fe    prend    de 

d.  11.  Po-   1   i  l'apparition  de  Jésus  à  fept  Dif- 

ftea  mamtef-  c\p\es  fur  ie  t)0rd  de  la  mer  de  Ga- 

vùmjefusdi-  lilee.  hn  voici  le  détail.  Un  jour  m- 

fn^reTibcrfa4  mon  Pierre  > Thomas  Didyme  ,  Na- 
dis.  Manifef-  thanaël  qui  étoit  deCanaen  Galilée, 
«vit    autcm  les  d        fils  fe  zebedée  Jacques  & 

MC.   fcrant  u-  r^v-r  •    i  r 

mul  Simon  Jean  ,  &  deux  autres  Dilciples  le 
5™?,;  „?S  trouvant  enfemble  à  Bethfaïde  ou  à 

1  nomas    qui 

dicitur  Dicfy-  Capharnaum  j  Pierre  leur  dit  qu  il 
Xna=f  Nqf,i  alloit  pêcher,  pour  chercher  fans 
erac  à  ca-  doute  de  quoi  vivre,  &  ils  s'offrirent 
&  Gfimlaze-  tous  pour  l'y  accompagner.  On  voit 
bcdaii  ,  6c  dans  cette  hiftoire  quatre  circonftan- 
puîis^   ejus  ces  dont    chacune    peut    faire  une 

duo.  Dicit  e-  preuve  à  part.  I.  Une  pèche  mira- 
is Simon  Pe-        i       r      i¥    tt  '          ' 

uus  :  vado  culeufe.  II.  Un  repas  prépare  en  un 
pifcari.  Di-  inftant.  III.  La  réparation  des  renon- 
nimus  &  nos  cemens  de  Pierre.  IV.  La  prédiction 
tccum.  Je  fon  martyre. 

Ecexierunt,      I.  Ces   Difciples  étant  fortis  fur 
*n*ç£nil'.  le  foir,  qui  eft  k  meilleur  tems  pour 


de  l'Evang.  Ch.  CXLVIII.   119 

la  pèche  ,   montèrent  dans  une  bar-  vîn>:  &  îf1* 

1  7  •      1  \    -i  •  notte      nihil 

que  ,  ôc  cette  nuit-la  ils  ne  prirent  prendide- 
rien.  Le  lendemain  matin  Jésus  fe  runt-    ^1* 

r      .        .  r  ,.,  r    aurera    fado 

trouva  iur  le  rivage  ,  lans  qu  ils  pui-  ftttit  Jeûilin 
fent  connoître  de  fi  loin  que  c  etoit  Jlttorrtc  :  "on 

1  tamencogno- 

lui.  En] ans  j  leur  cria- 1- il  ,  <zve£-  verunt  difci- 
V0&J  quelque  chofe  à  manger  ?  avez-  \ f J^gJJJ 
vous  pris  du  poiiïbn  ?  Ils  le  prirent  ergoeisjcfuii 
pour  un  marchand  qui  alloit  de  grand  ^JpuW 
matin  acheter  des  pêcheurs  ce  qu'il  tariumhabe- 
devoir  revendre  en  détail  au  marché.  ns  ? 
Ils  lui  répondirent  qu'ils  n'avoient  Refponde- 
nen.  Jette\  _,  leur  dit-il,  le  jilet  a  la  Dicic  cis  .- 
droite  de  la   barque    ,     cv    vo^j     e/z  finies      in 

_  1      •         /*  1  dexceram  na- 

trouvère^.  Cette  droite  le  prend  par  vigiirece,  ce 
rapport  à  la  fituation  de  ceux  qui  font  ^Tf0^5'  i 

rr     /  ,  ..11         •  L  Mifcrunt  cr- 

toumes  vers  la  proue.  Ils  y  jetterent  go  :  &  jara 

le  filet ,   ôc  ils  ne  pouvoient  plus  le  n,? n/aIebanc 

•  1        r     j    1  1  •     j    j      lllud  trdhcre 

retirer,  a caule  delà  multitude  des  praimuintu- 

poilïbns  qui  s'y  étoient  pris.  pifaum. 

Le  Difcipleque  Jésus  aimoiteon-  Dixir  ergo 
(îdéra  d'un  coté  cet  avis  qui  paroif-  difdpulus  il- 
loit  rort  inutile  ,  puilqu  on  av#it  jet-  ligebac  Jefus, 
télé  filet  en  tous  les  fens;  ôc  de  l'au-  Pctro  '-D°- 

t      f        v  ...  \  . .  .      rr.jnus  eft.  Si- 

trele  lucces  prodigieux  dont  il  avoir  mon  Pecrus 
été  fuivi  ;  il  en  conclud  que  c'étoit  cùm^udifTer, 
le  seigneur  ,  ôc  il  le  dit  a  Pierre,  nuscfi,  tuni- 
Comme  celui-ci  étoit  nud de  la  moi-   5a  ruccinxic 

•  /    1  1  >    1  »  1  •  Ie>  erat  cnim 

rie  du  corps  >  des  lors  qu  il  apprit  que  nudus  ,  u 
c'étoit  le  Seigneur  il  prit  fa  tunique  ^  fe  u 
o.u  fon  habillement  de  detfbus  pour 

Kij 


220  Analyse 

D*  **•     paroître  devant  lui  avec  bienféance, 

ôc  ne  pouvant  fouftnr  la  lenteur  de 

la  barque  ,  il  fe  jetta  dans  la  mer  à  la 

Aîii  autem  nage ,  pour  fe  tendre   plutôt  auprès 

difcipuli  na-  je  [ul   j_es  aLltres  Difciples  qui  n'é- 

*igio     venc-  ,  r  1 

runt ,  non  c-  toient  éloignes  du  rivage  que  d  en- 
Bim  longe  e-  vjron  deux  cens  coudées  ou  *oo  pas. 

Tant  a  te  ira  ,  .     >  r    n  7 

fed  quafi  eu-  vinrent  dans  la  barque,  traînant  après 

m££  e?x le  filet  Plein  de .  p°iir°»  •  <iui 

actepifeium.  n'auroit  pu  y  entrer  ni  y  tenir. 
utergoHc-      H.  Lorfqu'ils  furent  defeendus  à 

tcendeiuntin  -j  j  i       i 

terramiVicie. terre,  ils  y  trouvèrent  des  charbons 
ïunt  prunas  allumés  ,  un  poilïon  qui  rôtilïoic 
îccm^Vupcr- deHus,  &  du  pain  :  foit  qu'ils  enflent 
çofitum ,  ôc  été  apportés  là  par  les  Anges ,  ou  , 
^aiicm.         ^^  ^^  e^_  ^|^s  vrai-femblable  ,  au 

moins  du  feu  &  du  pain  ,  foit  que 
Jésus  les  eût  formés  par  le  change- 
ment des  pierres  du  rivage  j  car  pour 
le  poiflon  il  venoit  fans  doute  de  la 
mer  même  de  Galilée.  On  peut  dou- 
ter avec  raifon  quelle  néceflité  il  y 
avoit  de  tenir  fur  le  rivage  un  déjeû- 
ner tout  prêt  pour  des  gens  qui 
avoient  abondamment  de  quoi  man- 
ger dans  la  pêche  qu'ils  avoient 
faite  ;  puifque  la  Providence  ne  fup- 
plée  dans  nos  befoins  qu'au  défaut 
de  toutes  les  reflources  humaines. 
On  ne  peut  répondre  autre  chofe  , 
J#ion  que  comme  ils  écoient  exue- 


DEL'EvANG.Ch.CXLVIII.  211 
mement  fatigués  de  la  veille  ,  du 
travail  de  toute  la  nuit  ,  &  d'un  tra- 
vail inutile  ,  le  Seigneur  plein  de 
bonté  ne  voulut  pas  différer  leur  re- 
pas jufqu'après  qu'ils  auroient  ap- 
prêté une  partie  de  leur  pêche;  mais 
il  leur  tint  une  partie  de  leur  déjeu- 
ner toute  prête  au  fortir  de  la  barque, 
pendant  que  d'autres  poilions  cui- 
roient  fur  la  braife.  C'eft  ce  qu'il 
leur  dit  par  ces  paroles  ;    Apporte^  .     -, 

quelques-uns  de  ces  poijjbns  que   vous  jefus  :  Affer- 
vener  de  prendre  ,    ôc   les  joignez  à  [e   de  Plfci" 
celui-ci  qui  ne  iuiTiroit  pas  pour  iept  prendidiius 
perfonnes.  nunc* 

Pierre,  pour  lui  obéir  ,  fit  quel-       Afcendît 

i  l        ,  «       •        \  Simon       Pe- 

ques  pas  dans  la  mer  ,  oc  tira  a  terre  truSj&  traxit 
le  filet  qui  fe  trouva  plein  de  iu.rete   in  ter* 
gros   poilions.  Mais  par  une  mer-  maSnis  pifei- 
veille  encore  plus  grande  ,  comme  fi  bus    cen^um 
ces  poilions  le  ruiient  prelics  pour  le  tribus.      Et 
faire  prendre  ,  ils  gardèrent   fi  bien  c/,m  tanri  e^" 
la  paix  entr  eux  ,   qu  il  n  y     eut   pas  fdflumrctc 
une  maille  du  filet  qui  en  fut  rom- 
pue :  Vene?  ,  dit  Jésus   aux  Difci- T  rDix\c, CIS 
pies  ,  dine%  comme  des  gens  qui  ont  tc,prandete. 
travaillé   de  grande  force   pendant 
toute  la  nuit. 

Ils  s'adirent  fur  l'herbe  pour  man-  audcbac  dif- 
cer  :  &   tous  étoient  fi  nerfuadés    ôc  cumbentiu* 

V  ■  i         r     •  i       r       mtercogatc«t 

fa  convaincus   par  les  traits  de  Ion  Um  ; 

K  iij 


ni  Analyse 

v.  h.        vifage ,  &  par  le  ton  de  fa  voîx  ,  que 
Tu  quis  es  ?  c'étoit  le  Seigneur  ,    qu'aucun  d'eux 

lcientes  quia  -   >  •     °       .     , •      *  /-/        i       i     - 

Dominus  cft.  n  eur  pas  la  moindre  penlee  de  lui 
demander  qui  il  étoit. 

Lorfqu'ils  fe  furent  aflîs,  Jésus  fe 
mit  avec   eux  pour    les   fervir.     H 

fus7&niaccei-  ?/n  le  Pain  &  le  poiflbn  ,  &  leur  en 
pit    panem ,  fit  la  diftribution.    Ce  fut  la  troifie- 

&  pifcenTiï-  me  £0*s  q11^  apparut  a  {qs  Difciples 
jminer.  Hoc  affemblés  ,  en  comptant  pour  la  pre- 
manifefilcus°  rniere  celle  du  Dimanche  de  laréfur- 
eft  jefus  dir-  re&ion  au  foir  ;  &  pour  la  féconde 

cjpulis   fuis  ,11  •   r     r     r  .  \        r^ 

cùrn  refurre-  ceUe  qui  le  ht  huit  jours  après.  Car 
jiflet  àmor-  l'Evangile  n'a  pas  égard   à   plusieurs 

autres  apparitions  qui  fe  firent  à  des 

particuliers. 

x.Commen-    lt  Jefus  confie  Ces  brebis  à  Pierre. 

datio     ovium  J  *i       <t 

Petto. 

cùm  ergo  ÏH-  APr"  qu'ils  eurent  mangé  , 
fraadi/Tenc ,  Jésus  voulant  confirmer  à  Pierre  la 
charge  de  fouverain  Pafteur  de  fes 
brebis  qu'il  lui  avoir  donnée.  Car 
encore  que  la  première  donation  fon- 
dée fur  fa  parole  &:  fur  fon  ferment 
demeurât  toujours  ferme  &  inébran- 
lable, fans  avoir  reçu  aucune  attein- 
te par  fa  chute ,  il  voulut  néanmoins 
empêcher  que  les  hérétiques  n'en 
pulîent  tirer  de  fâcheufes  conféquen- 
ces  contre  fon  autorité.   11  lui  cou- 


DE  L'EvANG.Ch.CXLVIlI.     12) 

firma  cette  charge  en  préfence  de 
trois  Apôtres  &  de  trois  Difciples  , 
comme  repréfentant  le  auttes.  Pour 
cela  le  Seigneur  plein  de  miféricorde, 
bien  loin  de  lui  reprocher  fa  faute  , 
qu'il  lui  avoit  déjà  pardonnée  ,  fe 
contenta  d'exiger  de  lui  autant  d'actes 
d'amour  ,  qu'il  en  avoit  fait  de  re- 
noncement :  Se  pour  marquer  plus 
diftinttement  fa  perfonne  ,  il  le  dé- 
signa par  fon  premier  nom  ,  &  par 
celui  de  fon  Père. 

i.  Simon  fis  de  Jean  >  lui  dit- il  j  dicit  sîmonl 
rri aimer-vous  plus  que  ceux-ci  f  corn-  Petro  Jefus  « 

1  a  i  t     Simon  Joan- 

me  vous  vous  en  vantâtes  dans  le  njS  t  diiigw 
dernier  fouper ,  en  m'aflurant  que  mePlu$hisî 
quand  tous  [çs  autres  m'abandonne- 
roient  ,  vous  ne  m'abandonneriez 
jamais.  Pour  répondre  jufte  à  cette 
demande  _,  il  eût  fallu  pénétrer  dans 
le  cœur  des  autres  ,  &  mefurer  fon 
amour  avec  le  leur  ,  pour  s'en  donner 
la  préférence.  Il  n'eut  garde  de  le 
faire  :  mais  devenu  plus  humble  & 
plus  prudent  par  fa  chute,  il  fe  con- 
tenta d 'exprimer  ce  qui  fe  pafTbit  dans 
fon  cœur ,  en  laiffant  à  Jésus  le  juge- 
ment qu'il  en  devoit  faire  par  rapport    tzhmt  Do- 

r    .  i       i     •      i-      -I        niine   ,       tu 

aux  autres.  Seigneur  ',  lui  dit-il  ,  fcis  qluaanio 
vous  feaver  que  je  vous  aime.  Paiflez  rc-  Dicit  ei  : 
mes  agneaux  ,  lui  répondit  Jésus.      mzQi,    * 

Kiv 


214  A  N  A  L  Y  s  r 

».  if.  2.  Peu  après  il  lui  répéta  la  mê- 

picit  ei  ite-  me  demande  abfolument  5    &    fans 

rum  :   Simon   r  .  •  r         i      /• 

Joannis,  di-  raire  comparaiion  de  Ion  amour  avec 
hgis  me  ?  Ait  ce|Lli  des  autres  :  Simon  fils  de  Jean  . 

îili  :    etiam  .     .  i     s\>-    t     ■  1     • 

Domine ,  tu  rn  aimc^-vous  t    Oui  Seigneur  j     lui 
fcis  quiaamo  dit-il  ,   vous  faver  que  je  vous  aime, 

te.  Dieu   ei  :  '  J  <-  7  i     •        '  j- 

Pafce    agnos  Paijfe^  mes  agneaux  .,    lui  répondit 
meos'  JESUS. 

Diciteirer-       ,    Enfin   il  l'interrogea    pour   k 

tio   ,    Simon  ^  r   •  r .  ri       j       t 

Joannis,   a-  troilieme   rois  :   oimon  jils  de  Jean 
mas  me?       m> '  aimey-vous.  Cette  troisième  que- 
stion  donnoit   naturellement    cette 
idée  5  que  Jésus  fe  dériant  delà  fin- 
cénté  des  deux   premières  protefta- 
fions  ,  en  exigeoit  une  troisième  ,  ôc 
obligeoit  Pierre  avant  que  de  la  faire, 
à  fonder  férieufement  ia  fîtuation  de 
fon   cœur   à  (on  égard.     D'ailleurs 
comme  il  fe  fouvenoit  que  Jésus  lui 
avoit  découvert  la  vanité  de  fa   pro- 
mette ,  il  craignit  qu'il  n'en  fût   de 
fon  amour  comme  de  fon  courage  \ 
Contrifta-  &  il  fut  fenfiblement  affligé  de  cette 
tnseftpetrus,  troi^erne  -demande.    11    en   appella 

quia  dixit  ci       ,  .  ,    .  .  r  j  r 

tertio,  amas  néanmoins  a  la  connoiitance  de  Je- 
wki Je  cu.it  sus    Seigneur  j  lui  dit- il  ,  vous  faver 

ci  :  Domine  ,  O        .    ?  ri 

tuomnia  no-  toutes  chojes  j  vous  Jave%  que  je  vous 
m.5  n  Uis  aime. 

quia  amo  ce,  '  r  .  ,  ,  n       . 

On  peut  faire  quelques  renexions 
fur  cette  triple  confeilion. 

i.  Elle  eft  vifiblement  une  retra- 


de  l'Evang.  Ch.CXLVIII.  11$ 
dation  des  trois  renoncemens  qu'il 
avoit  faits  chez  Caïphe.  Il  conçue 
depuis  que  Jésus  ne  lui  avoit  par  fait 
tant  d'intetrogations  par  défiance  , 
mais  par  forme  de  juitice  3  puifque 
l'amour  devoit  au  moins  tirer  de  fa 
bouche  auront  de  confeilions  ,  que  la 
ctainte  de  renoncemens. 

i.  Jésus  le  rend  ,  ou  plutôt  il  le  Paf£îxît0Cve< 
confirme  fouverain  Pafteur  de  (es  meas. 
agneaux  &  de  fes  brebis,  en  compre- 
nant fous  les  agneaux  tous  les  peu- 
ples ,  &c  fous  les  brebis  les  Pafteurs 
fubalternes  qui  engendrent  les 
agneaux.  Ainfi  il  n'excepte  rien  de 
fa  Jurifdiction ,  &  tout  ce  qui  porte 
le  nom  de  brebis  de  Jesus-Chiust  eu; 
fournis  à  fa int  Pierre. 

3.  11  ne  fait  pas  en  fecret  cette  dé- 
flation réitérée  ,  mais  en  préfence  de 
plufieurs  témoins  j  &c  même  des 
principaux  Apôtres  ,  afin  qu'aucun 
nen  prétendit  caufe  d'ignorance  ,  ôc 
que  tous  ceux  qui  avoient  été  feanda- 
lifés  de  fa  chute  ,  fufient  édifiés  par 
fa  confefiion  ,  8c  informés  de  ion 
affermilTement  dans  la  primauté  de 
l'Eglife. 


Kr 


il6  Analyse 

D.  il 

5.  Pr*du:    3.  Prédiction  du  martyre  de  Pierre! 

tio     mtrtyru  ^ 

Pétri. 

Amen,  amen  JY;  Jésus  le  cohfola  de  la  peine 
dico  cibi  ;  qu  il  lui  avoit  faite  ,  en  lui  promet- 
tant à  lui-même  avec  ferment  qu'un 
jour  il  ne  manqneroit  pas,  comme  il 
cûmeffes  ju-  avoit  fait  à  Toccafion  du  martyre  , 
bl°r \c\niu  &  qu'il répareroit  ce  qu'il  avoit  per- 
ambuiabasu-  du.  Qu'au  lieu  que  dans  fajeuneffè 
cimV°aubtem  ilfe  ceignoit  pour  le  voyage,  &  alloic 
fenueris,cx-  où  il  vouloit  ,  lorfqu'il  fera  vieux  , 

tendesmanus  »\     /^     \        r  ■  o.         »  -, 

tuas,ôcaiius  "  étendra  les  mains,  &  qu  un  autre 
te  cinget ,  &  après  l'avoir  ceint  le  mènera  où  il  ne 

ducet  quo  tu  •  1  ti  r  rr  ' 

non  vis.  Hoc  voudroit  pas  aller,  lixpreilion  enig- 
autem  dixit  matique  du  fupplice  de  la  croix  que 
qua  morte  *  lerre  devoit  fourrrir  ,  &  qu  il  avoir 
ciarificaturus  déjà  fouftert  pour  la  gloire  de  Dieu, 

cflet  Deura.     *    ',  r  •       j  /•       •/*       t? 

lorique  iaint  Jean  ecrivoitlon  fcvan- 
gile.  Pour  l'obfcurcirun  peu  ,  Jésus 
changea  l'ordre  des  parties  de  ce  fup- 
plice ,  qui  font  i.  D'être  lié  de  cor- 
des. 2.  D'être  mené  à  la  croix,  j. 
D'étendre  (es  mains  fur  le  travers. 
4.  Et  d'y  être  attaché  avec  des  clous  ; 
au  lieu  que  J  e  s  u  s  a  mis  l'extention 
des  mains  devant  les  autres  parties. 
Après  cette  prédiction  Jésus    fe 

«lîxlffe^didt   ^eVa  ^U  ^eU  0U  ^  ^Zon  an^S  )   &  POUr 

ei  :  sequere  l'exhorter   à    ce  grand   effet  de  fou 
amour,  il  ajouta  :  Suive\-moi\Q&- 


Bie. 


de  i/Evang.  Ch.CXLVIII.  117 
a-dire  ,  imitez  l'exemple  que  je  vous 

ai  1  r  Conrerfat 

orme, comme  prelentementvous  Petrus    vidic 

allez  marcher  fur  mes  pas.  Pierre  fe  »Hum   difci- 

t  \     pulum  quem 

rerournanr  vit  Jean  qui  venoit  après  diiigcbat  je- 
lui ,  &  qui  fe  défigne  par  fa  marque  fus  fequen- 
ordinaire  du  Difcipie  que  Jésus  ai-  recubiuc"  in 
moit  ,  à  laquelle  il  en  ajouta  deux  cœna  fuPcc 
es,  d  avoir  repole  la  tête  iur  ^XiC:  D0mi- 
fa  poitrine  ,  &  de  lui  avoir  demandé  ne  »  9"is  cft 

h  ,       ,  .  i  •         r»-  •  qui  tradec  te? 

qui  le  devoir  trahir.    Pierre  curieux     Hunc  ergo 
de  fa  voir  le  fort  de  fou  ami  ,     &  cum  vidiïkt 

,  ,    r    .  ,     Petrus  ,  dixit 

croyant  que  Jean  qui  n  oioit  pas  le  jefu  :  Domi- 
demander    feroit  bien  aife  de  l'ap-  ne,hicaurern 

.  ..      v    T  .  r      quid  !    Dicic 

prendre  _,  dit  a  Jésus  en  le  montrant:  ei  jefus  :  sic 
Et  celui-ci  .  Seigneur  _,  que  deviendra-  eum      ,vol° 

,      /  o  \'       1  maneredonec 

t-il  r  01  je  veux  ,  répondit  Jésus  ^  veniam, quid 
qu'il  demeure  en  vie  jufquà  ce  que  je  ^  te  :  tume 
vienne  _,  que  vous  importe  ?  Pour  vous 
fuive^-moi. 

Cette  réponfe  donna  lieu  au  bruit      Exîîtergo 

1  •  r  fermo  ifte  in- 

qui  courut   entre   les   rreres  que  ce  ler    fratres, 
Difcipie  ne  mourroit  point  :   quoi-  <îuia  «Jjfcipir- 

T£  ,    a  j-  >  1  lus    ilk  non 

que  Jésus  n  eutpasditqu  îlnemour-  m0ritur.    Et 
roit  point, mais  que  Pierre  ne devoit  non  dixir  ei 

.    r  r  i  r    f  ,       Jefus  ,     non 

point  le  mettre  en  peine  li  Jean  de   morkur ,  fed 
meureroit  en  vie  iufqu'à  fon  retour.  CïC  eum  V<?1° 

^        .  .   r  '      .  *  manere     do- 

Paroles  oblcures  qui  ne  peuvent  re    nec  veniam, 
cevoir  ni  le   fens  d'immortaliré  que  qu-^adic? 
plufieurs  leur  donnent ,  &  qu'en  effet 
elles  ne  portent  point  ;  ni  le  fens  d'u- 
ne mort  paifible  de  non  fanglame  , 

K  vj 


nS  Analyse 

D-  "•  puifque  toute  forte  de  mort,  foitna* 
tutelle  ou  violente  ,  eft  pour  chacun 
le  tems  de  l'avènement  de  Jesus- 
Christ,&  que  ce  fens  convient aufïi 
à  la  mort  de  Pierre  ,  qui  eft  fans 
doute  demeuré  fur  la  terre  jufqu'à  ce 
que  Jesus-Christ  foit  venu  pour  l'en 
retirer.  Enfin  cet  avènement  de  Je- 
sus-Christ reçoit  encore  moins  le 
fens  du  liège  de  Jérufalem  ,  dont  il 
ne  s'agit  point  ici.  A  quel  propos 
borner  la  vie  de  faim  Jean  à  la  ruine 
de  Jérufalem ,  qu'il  a  furvccu  de  plus 
de  25.  ans  ?  Voye\  la.  DiJJertation 
XXXIX. 

Il  fernble  que  les  fidèles.  d'Éphefe 
ont  inféré  la  claufefuivante;  i.Pouf 
cip^ïus"  mîf;  apprendre  a  toute  i'Eglife^quel'Au- 
qui  te/timo-  teur  qui  a  écrit  cette  hiftoire  Evan- 
ttà%  g^ique  ,  Si  qui  en  a  rendu  témoi- 
&c  fcriphc  gnage  ,  eft  ce  Difciple  même  donc 
mTs^quVa  J^sus  parloit.  2.  Pour  foufcrire  à  font 
verumeft  re-  cémoignage  de  en  reconnoîcre  la  vé- 

flimonium  e-         /  \  r 

jus.  rue  par  leur  lignature. 


de  L'EvAtfG.  Ch.CXLIX.    229 

CHAPITRE    CXLIX.  cap.cxli* 

Huitième,  neuvième  &   di-  §;**'  j.1?; 
xieme  Apparition.  F* I,if* 

OUava  , 

1.  Huitième  Apparition  en  cima.  apparï- 

Galilée.  tio- 

1.  Oftava 

LA  VIII.  preuve  fe  prend  de  ZîuZ  "* 
cette  fameufe  apparition  ,  que 
les  Anges  &  Jésus  lui-même  avoienc 
fait  annoncer  par  les  femmes  à  tous 
les  Difciples.  Il  l'alîigna  en  Galilée  , 
êc  comme  on  le  croit  probablement 
fur  le  mont  Thabor  ,  ou  dans  quel- 
qu'autre  montagne  écartée. 

i.Afin  de  ne  paroître  plus  vifible- 
ment  aux  yeux  dts  hommes  ,  avec 
lefquels  il  ne  devoit  plus  avoir  de 
commerce  après  fa  résurrection  que 
par  la  foi. 

1.  Pour  ôter  lieu  aux  ombrages 
que  Pilate  auroit  pris  d'une  ii  grande 
afTemblée  ,  fi  elle  fe  fut  tenue  dan* 
la  Judée,  3c  auprès  de  Jérufaiem. 

3.  Pour  oter  moyen  aux  Juifs  Ces 
ennemis  de  la  calomnier  comme  une 
révolte  ou  une  confpiration  contre 
l'E 


m  pire. 


'P 


i$°  Analyse 

A.  tî.%.  is.  Les  onze  Apôtres,  &  tous  lesaa- 
&£îTf;  "'  très  Difciples ,  fou  de  Judée  ou  de 
a.  x8.  un-  Galice,  fe  rendirent  au  jour  nomme 
éedm  autem  fur  cette  montagne  que  Jésus  leur 
bierunr  in  avolc  marquée  ,  &  il  apparut  la  en 
taiiiaram,iu  même  tems ,  félon  faint  Paul  à  plus 

«nontem    ubi   J^^  c       '         \     rr      *  *»i     1         • 

confiituerat  de  500*  rr^res.  Auih-tot  qu  ils  le  VI- 
îiiis  jefus.  f.  rent ,  ils  l'adorèrent  tous ,    &  ceux 

ly.    Et  vifus        a  i         i  i  ' 

eft  piufquàm  meme  qui  avoient  le  plus  doute  au- 
juingencis     paravant.  Tous  les  foupçons  furent 

fratribus    fi-  lt-/r     /  ■       ■         >     i    V  'r 

«ml.  a.  Et  diiiipes  par  la  clarté  de  la  preience, 
Tidentes  eum  &  ds  s'en  retournèrent  affermis  pour 
quidam  au-  jamais  dans  la  foi  de  la  Réfurre#tion 
tem  dubita-  qu'ils  dévoient  prêcher  par  toute  la 

Verunt.  1  *  * 

terre. 
i.NonaJa-    2.   La  neuvième  à  Jacques.  La   di- 

cobo.  Décima  ,  .         ...       /      r/      ri 

in  JerufaUm.       xieme  dans  la  ville  de  Jerujalem. 

F.  Deinde      La  IX.  preuve  eft  l'apparition  qui 

cobordeindc  fe  fit  à  Jacques  le  mineur  ;  on  n'en 
Apoitoiisom-  fait  ni  ]e  tems  ni  Je  lieu# 

accedéns  je-  La  X-  efi:  celle  qui  fe  fit  a  tous  les 
fus    locutus  Apôtres  apparemment    le    jour  de 

eft  eis  ,    di-  .  ,l  r        r     rr  a       ^  ■      j  '    1       l     1 

ten$  :  1  Atceniion.  Apres  avoir  déclare    la 

uidance  univerfelle  que  fon  Père 
.ui  avoir  donnée   au   ciel  &    fur   la 
nmnis  p™ef-  terre  ,  fur  les  Anges  de  fur  les  hom- 

tas  incœlo  ,  meS. 

&  in  terra.  T    ti  1  r /       1  1» 

I.  Il  leurconrera  le  pouvoir  d  exer- 
cer  par  tout  le  monde  &  fur  toutes 


r, 


t>ï  l'Evang.  Ch.  CXLIX.  i  $  i 
les  âmes  les  fondions  de  l'Apoftoîat 
par  cette  autorité  dont  ils  étoient 
déjà  revêtus.  IL  II  promit  à  ceux 
qui  croiroient ,  une  double  récom- 
penfe  pour  la  vie  préfente  ,  &  pour 
la  vie  à  venir.  III.  11  les  munit  de 
tous  les  dons  &  de  tous  les  talens 
perfonnels  ,  dont  ils  avoient  befoiil 
pour  s'acquitter  d'un  fi  grand  mini- 
Itère. 

i.  Il  réduit  à  trois  les  fonctions  de 
leur  Apoftolat. 

La  i.  eft  la  prédication;  il  les  en-    Juntes  erg* 
voie  par  toute  la  terre  prêcher  l'E-  b.   in  mun- 

• i      \  i  /  •  r  dum  univer- 

vangile  a  toutes  les  créatures  railon-  fum  .  p^i. 
nables  ,  comme  étant  toutes  dans  la  «te  Evange- 

d/-    /    i     i  Ait  i  lium      omni 

îverhte  de  leurs  pays  &  de  leurs  lan-  creatura  •  a. 

gages  ,  les  ouvrages  du  même  Dieu  ,  doceceomnes 
formées  par  la  même  nn   de  1  éter- 
nelle félicité ,  &  rachetées  par  le  mê- 
me prix  de  fon  fang. 

La  2.  eft  l'adminiftration  du  Bap   baptîzantes 

*  .  i        t.       i  i*      eosinnominc 

terne  qui  comprend  celle  de  tous  les  pams  ,     &. 
autres  Sacremens ,  &  il  leur  ordon-  Filii'ôc^fïri" 
ne  de  les  baptifer  au  nom  du  Père, 
&  du  fils  ,  &  du  Saint-  Efprit. 

La  3.  eft  l'inftruction  des  fidèles  <locentes  eo» 

hl  /    1  11  •      fervate     on>- 

ant    le  règlement  de   leur  vie  nia  qu«curo- 

&  de  leurs  mœurs    Ils  doivent  leur  que  man<U?i 
apprendre  de  vive  voix  &c  par  leurs 
exemples  à  garder  tous  les  préceptes 


2$i  Analyse 

a.  18.  b.  16.  qu'il  leur  adonnés  ,  &  à  faire  tout 

C.  z4.   E.    1.     A  a       ,        r  .      '  , 

F.  1.  xj.  ce  qui  elt  neceilaire  pour  les  mener 
par  l'Evangile  a  la  vie  bien-heu- 
reufe.  Ce  qui  comprend  le  pouvoir 
de  faire  des  Loix  Eccléfialtiques ,  ôC 
de  les  foutenir  par  des  Cenfures. 

IL   II  marque  deux  fortes  de   ré- 
compenfes   réfervées  à  ceux  qui  au- 
ront cru  ,  &  qui  auront  reçu  le  Bap- 
tême; reflTentieile  &  l'acceiToire. 
B.Qui  crc-       La  1.  eft  le  falut  éternel ,  dont  les 

dideric   ,     &    •  '  1    1  r  11  1 

baptizatus  incrédules  leront  tellement  exclus  , 
fueiic,falvus  qu.'ils  encourront  la  damnation  éter- 
rononcrcdi-  nelle.  Il  n  étend  pas  cette  peine  a 
dedc     con-  tous  ceux  qui  ne  feront  pas  baptifés  , 

ûeranabitur.  1      1  T  1      r>        a 

parce  que  le  deratir  de  Baptême  peut 
être  fupplée  dans  les  adultes  par  la 
pénitence  ,  &"  qu'il  dépend  d'un  mi- 
nière qui  peut  manquer. 
Signa  au-      ^a  x  récompenfe  ce  font  diverfes 

tem  eos ,  qui  r 

crcdiderint  ,  grâces  gratuites  ,  qui  avoient  lieu 
h«  fcquen-  aans  Ie  commencement  de  l'Eglife 

pour  y  attirer  les  infidèles  ,    &   qui 
dans  la  fuite  des  fiécles  n'ont  été  ac- 
cordées qu'à   des    particuliers    donc 
Dieu  vouloit   honorer    la    fainteté. 
»ito  d^mo!  C'eft  1.  la  puiflance  de    chafler   les 
nia  ejidcnt:  démons  du  corps  des  poGfedés.  2.  De 
çuJntur  no-  parler  des  langues  nouvelles  ou  etran- 
*is  :  gères.    3.  De  chaffer  les  ferpens  des 

Uin™         lieux  qu'ils  infecteront  .,  &  de  les 


»e  l'Evàng*  Ch.  CXLIX.     i;t 

tuer  par  leurs  prières.  4.  De  ne  re-  fc-ffmortïfo 

r  r      1      ■  r  »  1     rum  quid  bi- 

cevoir  aucun  mal  du  poiion   qu  ils  bcrinc,  no» 
auront  pris ,  foit  par  contrainte  ,  foit  eis  nocebit  : 
par  mégarde.  5.  De  guérir  les  mala-  fuper   a*gros 

*j  i>-  r   '  11  manus  impo- 

des  par  1  împontion  de  leurs  mains.  nenc  t  &£e- 
A  tout  cela  il  ajoute  la  promefle  au-  ne  habebunt. 
tentique  qu'il  fait  à  fon  Eglife  dans  go  vobifcum 
la  perfonne  des  Apôtres  de   demeu-  fum  omnibui 

1       •/-,  ,  l  !!•/*>>   diebus  ufque 

rer  viliblement  avec  elle  juiquaaa  co-ifum- 
la  fin  des  fiécles  ,  par  une  préfence  «adonem  G* 
de  protection  &  de  venu  efficace,  par 
la  préfence  de  (on  efprit  dans  fa  con- 
duite ,  Se  par  celle  de  (on  corps  dans 
fon  facrifice  }  promeîTe,  qui  emporte 
nécessairement  la  perpétuité  &  la  vi- 
abilité de  l'Eglife  jufqu'à  la  Rn  des 
fîécles. 

3.  Promeffe  du  S aint-E fprit.  *«  tromlfi 

7  M  Jt  fio      SpiritâÊ 

fanftï. 

III.  llles  enrichit  des  dons  nécef- 
faires  pour  s'acquitter  de  leur  char- 
ge. Et  pour  cela  les  ayant  affemblés        E.  I>It 
pour  la  dernière  fois  ,  il  leur  ordon-  convefeens 

1  >»i  1      T'       r       pnecepic  c'a  M 

na  de  ne  point  s  cloigner  de  Jcrula-  jerofoiymis 
lem  j  mais  d'y  attendre  l'effet  de  la  ne    difeede- 
promelie  du  Père  qu  ils  avoient  ap-  p;aarentpro- 
prife  de  fa  bouche  ,  qui  eft  qu'au  lieu  miffionemP*. 

1  T  -    t  t»  1>  1  tris  ,     quam 

que  Jeanavoitbaptile  avec  1  eau,dans  audiftis ,  in- 
peu  de  jours  ils  feroient  baptifés  dans  <iuit  *  Per  ?$ 

1      c    •         rr     •         *  Tii  •     meum  :  quia 

le  baim-Elprit  même.  Il  leur  promit  jcannci  qu*. 


134         Analyse 
A.  is.  B.  \6.  pofitivement qu'il  leur  enverroitl'Ef- 
F.  i^zy.  "      prit-Saint  que  le  Père  leur  avoir  pro- 
dem  baptiia-  mis  ,  &  qu'ils  n'avoient  qu'à  demeu- 
yhaqua.voi  rer  dans  la  ville,    jufqu'à  ce   qu'ils 

autem  bapu-  r   /T-  A  i>         i     *       t» 

zabimini  spi-  rulieiir  revêtus  d  en-haut  d  une  vertu 
ritu     fanao  &  j'une  folxe  noUvelle. 

nonpoltmul- 

tos  hos  dies.  C.  Et  ego  micto  promifTum  Patris  mei  in  vos  :  toi 

autem  fedete  in  civitate  quoad  ufque  induamini  virtute  ex  alto* 

t.  îgitur      Ceux  qui  fe  trouvèrent  à  cette  der- 

4m  cwivene-  rr       t_l  '  •  ' 

tant  interro-  niere  allemblee  ,  toujours   préoccu- 
pant eum  ,  p^s  ju  royaume  temporel  d'lfraê'1  , 

dicenres:Do-  ,r  .     ,  J  «  r  r        -  r 

mine  ,  fi  in  lui  demandèrent  li  ce   ieroit   ennn 

tempore  hoc  £   m  CQ  tems  qu^  \Q  rétabliroit. 

reftuues  reg-  m   ;  t 

aura  ifraci  ?  Il  ne  leur  répondit  rien  touchant 
la  nature  de  ce  royaume  qu'il  étoit 
venu  fonder  dans  le  monde.  Ulailla 
au  Saint-  Efprit  à  leur  faire  cette  in- 
ftruction  dont  ils  n'étoient  point  en- 
Dixit  autem  core  capables.   Mais  pour  le    tems 

eh  :  Non  eft  de  ce  rétabli(Tement  vifible  ,  il   leur 

veltrumnolie      ,  ,.  ,/      •  \ 

tempora  vel  répondit  que  ce  n  etoit  point  a   eux 
momenta,     ^e   favojr  |es  tems  &  les   momens 

quae Pater po-    ,  .     0  , ,  ,r        /  i     j-r 

fuitinfuapo-  dont  le  Père  s  etoit  relerve  la  dilpo- 
teftate  ,  fed  Çn\on,  Qu'ils  dévoient  feulement  fe 

accipietisvir-        ,  ^v  .     .  .     c 

tutem  fuper-  préparer  a  recevoir  la  vertu  oc  la  tor- 
▼enientis  spi-  ce  ju  Saint-Efprit ,  qui  defeendroit 

mm  fandti  jn  >  z1    i  •  r 

vos,  en  eux  ,    &  qu  armes  de  cette  puil- 

&  eritis  mihi  fance  ,  ils  lui  ferviroient  de  témoins 
telles  in  Je-  pour  prêcher   fa  Divinité  ,  fon   In- 

rufalem  .    &  r  r.  «      r     r»  T  n.'  J 

i»  omui  ju-  carnation ,  &  la  KeiurreCtion  dans 


mum  ictix. 


de  i/Evang.  Ch.  CL.         1 3  5 
Jérufalem  ,  dans  toute  la  Judée,  dans  dafa.»  *  s*: 

i      r»  •  J     c  o    •     C      »  maria,  &  uf- 

la  Province  de  Samarie^juiquaux  que  ad  uki- 
cxtrémités  de  la  terre. 

Il  ne  nomme  point  la  Galilée ,  foit 
que  la  patrie  des  Apôtres  leur  fût 
afTez  recommandée  par  elle-même  , 
ou  qu'il  n'eût  voulu  leur  marquer  que 
des  terres  ennemies ,  ou  hérétiques , 
ou  infidelles ,  dont  ils  auroieut  eu 
peut-être  de  Péloignementjfeit  qu'el- 
le fût  comprife  fous  le  nom  de  toute 
la  Judée. 


CHAPITRE    CL. 

Ascension. 

ENfin  l'hiftoire  Evangélique  fi- 
nit ,  I.  Par  l'élévation  de  Jésus 
au  Ciel.  II.  Par  la  prome(Te  de  fon 
retour.  III.  Par  la  préparation  des 
Difciples  à  la  miflion  univerfelle. 
IV.  Parla  proteftation  de  l'Evaneé- 
lifte.  ë 

1.  11  les  mena  hors  la  ville  jufqu'à 
Bethanie  }  &  après  qu'il  leur  eut 
donné  fes  dernières  inftructions  ,  il 
éleva  fes  mains ,  &  il  leur  donna  fa 
bénédiction.  Dans  le  tems  qu'il  les 
bénitfbit ,    il  les  quitta ,  &  s'éleva 


C  A  F.    CL. 

B.  16.  C.  14* 
D.  xi.  E.  i. 

Afcctnfia* 


C.  14.Edu- 
sic  autem  eos 
foras  in  Be- 
thaniam.  B. 
16.  Et  Domi- 
nus  quidcm 
Je  fus  poft- 
quàm  locu- 
tus  cft  cis  * 
I.  vtdcnùbui 


i$6  Analyse 

h.  i*.  c.  14.  vers  le  Ciel  à  leur  vue  ,   jufqu'à   et 

D.    11.   E.  1.  ,  ,      1,  IL* 

.„.     .  qu  une  nuée  1  ayant  reçu  le  cacha  a 

iHn  clevatus  ,*  \     ,    r   '  x   ,       ,  , 

eft  b  in  cœ-  leurs  yeux ,  6c  il  s  aine  a  la  droue  de 

lum  :  C.    Ec   [)ieu< 

elevatis   ma- 

iiibiis  fuis ,  benedixit  cis  :  Et  faftum  eft  ,  dum  benediceret  illis  , 

rccciHcab  cis  ;  2c  ferebaciu  in  cœlum  :  E.  Et  nubes  fufeepit  eui» 

ab  oculis  eorum.  B.  Et  fedet  à  dexcris  Dei. 

E.cumque       Les  Djfciples  après  l'avoir  perdu 

lntuer**ncur       .  l  .  l  .       r 

in  cœlum  c-  de  vue  ,  tenoient  encore  les  yeux 
ûntemillum,  attaches  au  Ciel  où  ilmontoit,  lorf- 

cccc  duo  viri 

afti-crunt  que  deux  hommes  vêtus  de  blanc  fe 
juxta  iiios  in  préfenterent  à  eux  avec  ces  paroles  : 

vclhbus      al-  r  ^  .  r 

bis ,  qui  &  hommes  de  Galilée  leur  dirent- ils  , 

ri  GaTihei1*  Pourau01  vous  arrêtez-vous  ici  à  re- 
quid  iiatis  af-  garder  au  Ciel,  Ce  Jefus  qui  en  vous 
lalum"  hic  quittant  efi  monté  dans  le  Ciel  „  en 
3c fus  qui  af-  reviendra  de  la  même  forte  que  vous 
vXrc'ψ'/>  ^fT  vu  monter.  Us  difparurent 
lam ,  fievs-  en  même-tems.  Aind  Jésus  dansle 
admodumw- tems  même  de  Ton  Afcenlïon  a  fait 
diftis     cum  po;:er  a  Ton  EgUfe  Paiîurance  de  fou 

«untem       in  r  î         » 

cœlum.         iecond  avènement. 

c.  Et  ipfî      111-  Les  Difciples  ayant  adoré  Je- 
adorantes  re-  susdans  le  même  Heuoù  l'on  dit  que 

grem  funt  in  ,  n  .  -.      *  •     i      r  i  / 

jerufaiem  les  velnges  de  les  pieds  lont  demeu- 
cùm   gaudio  rés  imprimés  fur  le  rocher  ,  remplis 

magno  ,  E.  a    .,  r  %    .         j  r 

monte  qui  d  une  exceliive  joie,  s  en  retournèrent 
vocatur  oii .-\  Jénifalem  du  mont  qu'on  appelle 

veti  ,   qui  cft    ,        rv..     .  ,.  ,    j1,         -11       J        1 

iuxta  jerufa-  des  Oliviers ,  éloigne  delà  ville  de  la 
lern  ,  fabbati  |oneueur.  du  chemin  qu'on  peut  faire 

habens    ncr.  yTB  1  r 

dans  un  jour  de  oabbat.   Depuis  ce 


de  l'Evang.  Ch.  CL.         237 
jour  ils  écoient  continuellement  dans     c-  Ete"n« 
le  temple  ,  louant  &  bemilant  Dieu,  lcmpio ,  îau- 
Et  après  qu'ils  eurent  reçu  le  Saint-  Nantes, &be- 

rr    K     ..    *  ,      T,    >r,  nedicmies 

Jbiprit  ils  partirent  cie  Jeruialem  pour  Deum,  amen» 
aller  prêcher  l'Evaneile  par  toute  la  B-  J.11' aiuera 
terre  ,  &   le  Seigneur  agilioit  invili-  dicavemuc 
blement  avec  eux  ,  &  confîrmoitleur  ubuiue  «  D°- 

•      1      j        m    p       mmo  coope" 
parole  par  les   miracles  dont  ils  1  ac-  rame,  &  fer- 


raon^m  con- 


compaçnoient.  %  ; 

tr  11  1      r  fumante ,  fe- 

IV.  11  y  a  tant  d'autres  choies  mer-  quemibus  &■ 
veilieufes  que  Jésus  a  faites,  que  (ion  *™'ll  Sunc 
les  écrivoit  en  détail,  je  ne  crois  pas,  aucemScalia 
dit  le  Difciple  bien-aimé  de  Jésus  ,  Eft*iefK 
que  le  monde  tout  entier   pût  corn-  <\ux  fi  feri- 

dl        1  •  »  '  bantur      per 

re  tous  les  livres  qu  on  en  ecri-  fu)gula  t  nec 

roit  :   Ce  qu'on  peut  expliquer  par  îpwm    arbi- 

1  11        j      1  n         '         J    ••     J      trormundum 

hyperbole  de  la  valte    ctenduc    du  C2pere  po{^e 
monde, ou  peut-être  de  l'intelligen-  eos,quifcri- 
ce  des  nommes  du  monde  ,  qui   ne  broJt 
feroient  pas  capables  de  comprendre 
ou  de  croire  tout  ce  qu'on  en  écri- 
roic. 


23* 


DISSERTATION    XXIX. 

Luc.  C.  XXII.  v.  15.  Defiderio 
defideravi  hoc  Pafcha  mandu- 
care  vobifcum  aniequam patiar. 
Concord.  Cap.  CXXVIII. 

ON  fait  deux  queftions  fur  la 
dernière  Pâquede  Jesus-Christ, 
dont  Tune  regarde  le  fait  ,  &  l'au- 
tre le  tems,  toutes  deux  importantes 
&:  néceifaires  pour  une  parfaite  con- 
noilîance  de  î'Hiftoire  Evangélique. 
La  1.  eft  fi  Jesus-Christ  a  fait  la  der- 
nière Pâque  ,  comme  c'eft  le  fentiment 
de  toute  l'Eglife,  &  des  Sociétés  mê- 
mes qui  en  font  féparées  ;  ou  s'il  ne 
Ta  pas  faite  ,  comme  l'ont  cru  quelques 
Auteurs  ,  dont  l'opinion  éteinte  ou  af- 
foupie  jufqu'ici  ,  a  été  réveillée  par 
l'Auteur  de  l'Harmonie  que  j'ai  déjà 
cité  ,  foûtenue  dans  fa  Lettre  au  R.  P.  F. 
ôc  depuis  dans  fon  Traité  Hiftorique 
de  la  Pâque.  La  IL  queftion  efr  quand 
Jesus-Christ  a  fait  la  dernière  Pâque, 
s'il  l'a  célébrée  le  même  jour  que  les 
Juifs ,  ou  s'il  a  anticipé  ce  tems  d'un 


i4o     Dissertation  XXIX. 
jour,  foit  pour  fe  conformer  à  la  Loi 
que  les  Juifs  quittoient  pour  fuivre  leur 
Tradition  ,  foit  dans  la  vue  de  fa   Paf- 
fion  prochaine. 

Je  traiterai  l'un  &  l'autre  dans  deux 
DiOertations  ,  en  commençant  par  celle 
du  fait.  Ce  n'elt  pas  ici  le  lieu  de  trai- 
ter cette  matière  avec  toute  l'étendue 
qu'elle  mériteroit.  Cet  Ouvrage  ne  doit 
traiter  les  difficultés  qu'autant  que  cela 
eft  néceflaire,  pour  ôter  les  obftacles 
qui  arrêtent  ou  qui  embarraflfent  la  le- 
cture. J'efpere  néanmoins  en  dire  affez 
pour  fatisfaire  ceux  qui  de  bonne  foi  &c 
Ùlîis  prévention  cherchent  la  vérité,  en 
péfant  dans  une  balance  droite  les  rai- 
10ns  qu'on  allègue  de  part  &  d'autre. 

§.  i. 

Que  Jefus-Chrift  a  fait  la  dernière  Va- 
que qui  précéda  immédiatement  fa 
mort.  Preuves  par  V Ecriture, 

Toutes  les  expredîons  de  l'Ecriture 
font  manifeftement  pour  cette  propor- 
tion. On  y  voit  que  la  Pâqne  eft  im- 
molée par  les  Juifs  ,  propofée  à  Jesus- 
Chiust  par  fes  Difciples  ,  commandée 
par  Jesus-Christ, apprêtée  par  deuxde 
fes  Difciples ,  enfin  actuellement  man- 
gée. 


Dissertation  XXIX.  241 
gée.  Le  premier  jour  des  Azymes  où  les 
Juifs  immoloient  la  Pâque.  Marc.  14, 
il,  &  où  l'on  étoit  obligé  de  V immoler  ^ 
félon  faine  Luc  ,22,7.  Les  Difciples  lui 
demandèrent  où  il  vouloit  qu'ils  allaf- 
fenc  lui  préparer  toutes  chofes  pour 
manger  la  Pâque.  Cette  queftion  lui 
propofoit  deux  chofes.  La  1.  s'il  agréoit 
qu'ils  allalFent  lui  préparer  la  Pâque. 
La  2.  en  quelle  mailon  il  vouloit  qu'ils 
fiifent  cette  préparation.  Jefus  -  Chrift 
confentit  à  la  première  demande.  Alle%> 
leur  dit-il  ,  apprêtez-nous  ce  qu'il  faut 
pour  manger  la  Pâque.  11  répondit  à  la 
féconde  j  en  leur  marquant  le  lieu.  Il 
adreflTa  Pierre  &  Jean  à  un  certain  Dif- 
ciple  ,  avec  ces  paroles  :  Mon  tems  ejl 
proche  _,  je  dois  faire  che^vous  la  Pâ- 
que avec  mes  Difciples.  Ils  firent  ce  que 
Jefus-Chrift  leur  avoit  ordonné  ,  &  ils 
préparèrent  la  Pâque.  L'heure  étant 
venue,  il  fe  rendit  fur  le  foir  au  lieu 
marqué,  Pc  il  leur  témoigna  qu'il  avoit 
déliré  avec  ardeur  de  manger  cette  Pâ- 
que  avec  eux  avant  que  de  fouffrir. 

On  voit  dans  tout  ce  narré ,  tiré  de 
faint  Matthieu  ,  de  faint  Marc  &  de 
faint  Luc  ,  1.  l'intention  de  manger  la 
Pâque  ,  2.  la  préparation  qu'en  font  deux 
Difciples,  3.U  mancjucaçion  a&uelle. 
Tome  IFt  L 


242.    Dissertation    XXIX. 
Sur  quoi  on  peut  raifonner  en  cette  ma- 
nière. 

Dans  tous  ces  lieux ,  où  le  mot  de 
Pâque  eft  répété  deux  fois,  &  fous- 
entendu  deux  autres  après  le  verbe  9pré+ 
parc^-nous _,  parate  _,  ce  mot  ne  change 
point  de  lignification  :  la  Pâque  s'y 
prend  par-tout  dans  le  même  fens ,  parce 
que  toutes  les  actions. dont  l'objet  eft  la 
Pâque  font' tellement  liées  enfemble , 
qu'elles  ne  fe  peuvent  féparer.  L'immo- 
lation publique  eft  l'occafion  de  la  pro- 
portion. La  proportion  eft  fuivie  du 
commandement  de  la  préparer  j  le  com- 
mandement, de  la  préparation  ;  &  la 
préparation ,  de  la  manducation  ac- 
tuelle. 

Or  dans  l'immolation  j  necejje  erat 
cccldi  Pafcha  :  ce  terme  n'a  point  d'au- 
tre fens  que  celui  de  l'Agneau  Pafchal. 
Car  de  toutes  les  chofes  qui  étoient  né- 
ceflaires  dans  cette  fête  ,  il  n'y  avoit  que 
l'Agneau  qui  pût  être  tué,  &  qui  fût 
çn  effet  immolé  par  les  Juifs.  On  ne 
prétendra  pas  fans  doute  qu'on  tuoit  les 
herbes  ameres ,  <Sc  qu'on  égorgeoit  les 
pains  fans  levain.  La  Pâque  donc  ne 
peut  lignifier  autre  chofe  que  l'Agneau 
dans  tous  les  autres  lieux  où  elle  eft 
exprimée. 


Dissertation-   X  \  !  \" 

t  incontefta- 

blc.  Toute  la  difficulté'  eft  dans  la  pre- 

:  e ,  qui  porte  que  daiu  tous  les  lieux 

où  le  terme  de   Pàque  eic  employé  ,   1! 

ne  change  point  r. 

préiendra  peut  î  tré  cjue  la  I  ini- 

tiant l'Agneau   Palthal  quand  il 
de  l'immoler  ,  e  toute  autre  cl. 

quand  il   s'agit  d  is  qui 

•  fe  periuadec  féneaferriefit 
u  hors  d-apparen        1  'unir, 
tion  n'cùVelle  pas  une  partie  i  ;nc 

la  |  le  de  la  |  m- 

reeni  une  l'  "e  être 

un  Agneau  q  m  l'immole,    . 

en    laimc  ai: 
i  Azyme  quand  elle 
(      induit 
es  allé 

icr  le  |  >ur  des  A 

i   il  parok  par  !      rMai 
dcm.in  '       •  •     ■  \\c\x 

ils  1  u 1 1  lent  la  I 

ilors  le 
>u:umc  de  l'immoler  :  Et  primo  die 

rum   c 

pjrcmus  ribi  nt  mandat 
i  4  ,  i 
«olacion  fci  rtal  aux  IV 


JL44     Dissertation    XXIX. 

pour  demander  à  Jefus  Chrift  en  queK 
lieu  ils  lui  dévoient  apprêter  la  Pâque, 
&  qu'ainfi  la  prépaier  ôc  l'immoler 
étoient  la  même  choie. 

Or  il  ell  certain  par  la  liaifon  de  tous 
ces  palfages  que  Jefus-Chrift  mangea 
de  la  Pâque  que  les  Difciples  lui  avoient 
préparée.  11  mangea  donc  de  la  Pâque 
immolée. 

On  me  niera  peut-être  encore  cette 
féconde  proportion.  Mais  elle  fe  dé- 
montre invinciblement ,  parce  que  la 
rnanducation  eft  exprimée  quatre  fois, 
comme  le  but  &  le  terme  de  toutes  les 
autres  actions  qui  la  précèdent. 

Elle  eft  le  terme  de  la  proposition  des 
Difciples  :  Où  vous  plaît  -  il  que  nous 
allions  vous  apprêter  ce  qu'il  faut ,  afin 
que  vous  MA  NG  I E  Z  la  Pâque  ;  ut 
MANDVCES  Pafcha? 

Elle  eft  le  terme  de  l'intention  de 
Jefus  -  Chrift  ,  &  des  commandemens 
qu'il  fait  à  fes  Difciples  :  Alle%  nous 
préparer  tout  ce  qui  eft  néceffaire ,  afin 
que  nous  MANGIONS  la  Pâque.. 
Euntes  _,  parate  nobis  Pafcha  >  ut 
MANDUCEMUS. 

Elle  eft  le  terme  de  la  demande  que 
Jefus-Chrift  lit  au  Difciple  inconnu > 
de  lui  prêter  une  chambre  :  Ou  eft. 
V appartement  où  je  dois  MANGER  la\ 


Dissertation    XXIX.     245 

Pâque  avec  mes  Difciples  ?  Ubi  ejl  di- 
verforium  ubi  Pafcha  cum  Difcipulis 
meis  MANDUCEM? 

Elle  eft  le  fujec  de  la  préparation 
qu'en  firent  les  Difciples  :  Où  voulez- 
vous  que  nous  allions  vous  préparer  la 
Pâque  à  MANGER  ?  Ubi  vis  pare- 
mus  tibi  comedere  Pafcha}  Us  la  pré- 
parèrent donc,  à  moins  qu'ils  ne  l'ayent 
oublié  en  chemin;  &  que  par  un  rare 
éblouiftement  ils  n'ayent  fait  toute  autre 
chofe  que  ce  qu'ils  écoient  allé  faire. 

Elle  eft  enfin  exprimée  comme  ac- 
tuelle. Jefus-Chrift  étant  à  table  témoi- 
gna à  (es  Difciples  qu'il  avoit  dès  long- 
tems  fouhaité  avec  ardeur  de  manger 
cette  Pâque  avec  eux.  Dejiderio  dejî- 
deravi  hoc  Pafcha  MANDUCARE 
vobifcum.  Ce  pronom  démonftratif  hoc 
ne  s'applique  qu'aux  chofes  préfentes  Se 
qui  frappent  les  fens.  Si  donc  les  Dif- 
ciples apprêtèrent  la  Pâque ,  afin  que 
Jefus-Chrift  en  mangeât ,  il  eft  certain 
que  Jefus-Chrift  mangea  de  la  même 
Pâque  qu'ils  avoient  apprêtée,  &  qui 
lui  fut  fervie.  Car  enfin  qui  l'en  auroic 
empêché  ?  Qui  auroit  pu  fruftrer  ces 
defirs  û  ardens ,  &  rendre  inutile  cette 
préparation.  Et  h  d'ailleurs  la  Pâque  ^ 
que  les  Difciples  préparèrent,  eft  celle 
que  les  Juifs  immoloient,  ôc  qu'on  de-, 

L  iij 


±4^  Dissertation  XXIX. 
voir  immoler  félon  la  Loi,  je  dis  l'A- 
gneau Pafchal  j  pour  être  perfuadé  que 
Jefus-Chrift  mangea  de  l'Agneau  Paf- 
chal à  la  dernière  Cène  ,  il  n'en  faudroit 
pas  davantage  à  tous  les  efprits  de  bon- 
ne foi  que  cet  argument  qui  eft  la  réca- 
pitulation de  tout  ce  que  je  viens  de 
dire. 

Les  Difciples  préparèrent  la  même 
Paque  &:  de  la  même  manière  que  les 
Juits  qui  Timmoloient.  Or  Jefus-Chrift 
mangea  de  la  même  Paque  que  les  Dif- 
ciples avoient  préparée.  11  mangea  donc 
d'une  Paque  immolée.  Cela  eft  d'autant 
plus  vrai  ,  qu'encore  que  le  nom  de 
Paque  pût ,  le  long  de  la  femaine  des 
Azymes ,  s'appliquer  par  analogie  à 
d'autres  victimes  \  il  eft  néanmoins  hors 
de  doute  que  le  premier  jour  il  fignifioit 
] 'Agneau  qui  étoit  la  vraie  Paque,  la 
principale  circonftance  du  feftin  Pafchal, 
qui  communiquoit  ce  nom  à  toutes  les 
autres ,  &  il  n'en  pouvoir  fignifier  au- 
cune à  fon  exclufion. 

§.  h. 

Preuves  par  la  Tradition  Eccléjiajlique. 


J 


'Appelle  Tradition  le  fentimenr  una- 
nime des  Pères ,  touchant  un  point 


Dissertation  XXIX.  247 
dont  ils  ont  écrit,  &  qui  a  été  reçu  par 
l'Eglife  depuis  leur  fiecle  jufqu'en  nos 
jours.  Je  dis  des  Pères  qui  en  ont  écrit  ^ 
car  il  n'ell  pas  néceffaire  que  tous  les 
Pères  ayent  parlé  d'un  article  pour  le 
faire  paflfer  en  Tradition.  Il  fufïit  que 
ceux  d'entr'eux  qui  en  ont  écrit ,  ôc 
dont  les  Ouvrages  font  venus  jufqu'à 
nous,,  en  ayent  eu  le  même  fentiment 
qui  règne  encore  aujourd'hui  dans  l'E- 
glife. 

On  ne  peut  refnfer  cette  notion  de  la 
Tradition  Eccléiiaftique  au  point  que 
nous  agitons  ici.  Ceux  des  Pères  qui 
ont  parlé  de  la  dernière  Pique  où  Jefus- 
Chrift  a  fini  fa  vie,  enfeignent  tous 
qu'il  l'a  faite.  Et  on  n'en  doit  point  ex- 
cepter ceux  qui  moralifent  ou  qui  tour- 
nent en  allégorie  les  paifages  que  nous 
avons  expliqués  ci  -  delfus.  L'allégorie 
ni  la  morale  ne  détruifent  point  le  fens 
littéral. 

Cette  opinion  règne  encore  par  toute 
l'Eglife  Catholique  ;  tous  les  Interprètes 
de  l'Ecriture  l'expliquent  en  ce  fens;  tou- 
tes les  Eglifes  en  retendirent  dans  les 
Sermons  du  Jeudi  Saint  &  du  jour  du 
Saint-Sacrement;  on  l'enfeigne  dans 
toutes  les  Ecoles  de  Théologie  ;  on  l'ap- 
prend même  aux  enfans  dans  les  Caté- 
chifmes  un  peu  étendus  \  on  la  chante 

L  iv 


248  Dissertation  XXIX. 
dans  les  Offices  Eccléfiaftiques  ;  &  il  y 
a  des  Théologiens  qui  en  font  un  dog- 
me de  foi  fui  ce  principe  inconteftable; 
qu'un  point  de  fait  ou  de  doctrine , 
contenu  dans  l'Ecriture ,  expliqué  unani- 
mement en  ce  fens  par  tous  les  Pères  qui 
en  ont  écrit  >  appartient  à  la  foi  de  l'E- 

glife' 

Ce  qui  eft  un  grand  préjugé  de  vérité , 

c'cftque  toutes  les  Sociétés  féparées  de 
Communion  d'avec  l'Eglife  Catholi- 
que, les  Grecs ,  les  Proteftans ,  &  tout 
ce  qui  eM  comptis  fous  ces  deux  noms, 
conviennent  avec  elle  dans  ce  point ,  que 
Jefus  -  Chrilt  a  fait  la  dernière  Pâque  , 
excepté  quelques-uns  dont  le  petit  nom- 
bre ne  mérite  pas  de  faire  exception 
dan»s  la  généralité  des  autres. 

Tout  ce  que  l'Auteur  de  l'Harmonie 
oppofe  à.  leur  autorité  ,  eft  qu'il  repro- 
che   à    Origene  ,    qu'il   ne  paroît  pas 
avoir  étudié  ce  qui  regardoït  la  Pâque  , 
parce  qu'il  compte   le  jour  quon  immo- 
loït  V Agneau  Pafchal  pour  un  des  fept 
jours  pendant  lefquels  la   Loi  comman- 
doit  de  ne  point  manger  de  pain  levé,  p. 
351.  Ce  qui  eft  néanmoins  vrai  en  un 
fens,  &  félon  l'Auteur  même  j  comme 
on  le  verra  dans  fon  lieu*,  Se  qui  d'ail- 
leurs n'eft  qu'une  bagatelle.  11   fait  le 
même  reproche  à  faint  Auguftin,  qu'il 

*  Voyci  ci-dejjbus,  $.  XXXI F,  p.  SP8. 


Dissertation  XXIX  2 49 
ne  paroit  pas  dans  aucun  de  Je  s  Ouvra- 
ges qu'il  ait  étudié  cette  matière ,  & 
qu'on  ne  doit  pas  relever  toutes  les  pa- 
roles qui  lui  font  échappées.  A  faint  Am- 
broife,  qu'il  fuppofe  ce  qu'il  dit,  fans 
en  donner  de  preuves ,  p.  3  5  5 .  A  faine 
Jérôme  ,  que  ce  nejl  point  une  quejlion 
qu'il  agite  ,  cejl  un  petit  mot  dit  en  paf 
fant.  Reproches  vains  ôc  frivoles  qui 
ne  font  fondés  que  fur  ce  que  ces  faines 
Docteurs  ne  fe  font  pas  étendus  fur  cet- 
te matière  }  au  lieu  que  c'eft  une  mar- 
que évidence  ,  d'un  côté  que  l'Ecriture 
eft  fi  claire  fur  la  dernière  Pâque  de 
Jefus-Chrift  ,  qu'ils  n'ont  eu  befoin  que 
d'alïurer  ce  qu'elle  dit,  fans  s'y  arrêter 
davantage  y  ôc  de  l'autre  ,  que  cette 
créance  touchant  la  dernière  Pâque  étoit 
fi  généralement  reçue  de  tout  le  monde, 
que  c'eût  été  perdre  fon  tems  de  faire 
de  longs  difeours  pour  établir  un  point 
qui  n'étoit  contefte  de  perfonne. 

§.  m. 

Que  Jefus-Chrijl  a  obfervé  dans  la  der* 

niere  Pâque  la  circonjlance  du  lieu 

ordonnée  par  la  Loi. 

Après  avoir  établi  le  fait  de  la  der- 
nière Pdque ,  il  eft  aifé  d'en  ailurer  le 

L  T 


250  Dissertation  XXIX. 
droit  à  l'égard  du  tems  &  du  heu.  Ec 
pour  commencer  par  le  lieu ,  Jefus- 
Chrifl:  la  célébra  dans  Jérufalem  chez 
un  particulier  de  fes  Difciples  _,  qui  lui 
prêta  ia  maifon  pour  cette  fainte  céré- 
monie. L'un  &  1  autre  conformément 
à  la  difpofition  de  la  Loi.,  qui  ordon- 
noit, 

i°.  Que  dans  chaque  famille  on  prît 

un  agneau  ou  un  chevreau  d'une  année, 

&  qui  n'eût  aucun,  défaut  :  Tollat  unuf- 

quifque  agnum  pcr  familias    &  domos 

fuas.  Lxod.  en. 

2.  Que  fi  une  famille  n'étoit  pas  afîez 
nombreufe  pour  le  manger  tout  entier, 
elle  emprunteroit  de  la  maifon  la  plus 
proche  autant  de  perfonnes  qu'il  lui  en 
falloir  pour  cela,  n'étant  pas  permis 
d'en  réferver  aucune  partie  pour  le  len- 
demain. 

5.  Que  rout  le  peuple  Timmoleroit, 
non  pas  collectivement,  ce  qui  efl  im- 
poflible ,  mais  chacun  le  fien ,  &  cha- 
cun chez  foi  entre  deux  foirs ,  c'eft-à- 
dire  ,  dans  le  tems  qui  fe  pâlie  entre 
te  foleil  couchant  6c  le  foleil  couché  j 
ce  qu'on  a  eftimé  à  deux  heures  de  tems , 
depuis  les  trois  heures  du  foir  jufqu'â 
cinq,  comme  nous  l'apprenons  de  Jo- 
feph  j  parce  qu'on  fe  réfervoit  une  heu- 
*e  pour  le  faire  cuire  avant  la  grande 


Dissertation  XXÎX.  2 5 1 
fête  des  Azymes,  qui  commençoit  à  6 
heures  dans  l'Equinoxe ,  &  que  cecce 
cuifine  n'eût  pas  été  permife  j  fi  la  fête 
fut  tombée  dans  le  Sabbat,  comme  il 
arrivoit  fouvent.  Un  efpace  de  tems  fî 
court  eft  une  preuve  invincible  que  cha- 
que famille  devoit  immoler  fon  agneau 
à  part,  comme  Moïfe  l'exprime  nette- 
ment :  Ite  tollentes  animal  per  familias 
vejlras  ,  &  immolate  Phafe  ;  parce  qu'il 
falloit  que  l'immolation  fe  fit  par  -  tout 
en  même-tems. 

4.  Que  fous  peine  de  la  vie  on  feroic 
l'afperiion  du  fang  de  l'agneau  fur  le 
haut  de  la  porte.  Autre  marque  certai- 
ne que  rimmolation  s'étoit  faite  dans  la 
maifon  même,  parce  que  dans  l'incer- 
titude de  l'heure  de  du  moment  où  de- 
voit palfer  l'Ange  exterminateur  cette 
nuit  -  li  ,  Tranjîko  noble  illa  ;  aucun 
n'eût  ofé  dans  un  fi  grand  péril  diffé- 
rer tant  foit  peu  après  l'immolation ,  une 
afperhon  fi  nécefiaire. 

5.  Qu'on  mengeroit  la  Pâque  debout, 
le  bâton  à  la  main  &  dans  la  pofture 
de  voyageurs ,  pour  être  toujours  en 
état  de  partir  au  premier  fignal.  Voilà 
les  Replemens  touchant  la  Paqne  que 
Moïfe  fit  en  Egvpte  :  à  quoi  il  en  ajouta 
depuis  un  (■>.  Qu'il  ne  ferait  pas  permis 
de  l'immoler  dans  toute  autre  ville  que 

Lvj 


i$i  Dissertation  XXIX, 
dans  le  Heu  que  le  Seigneur  auroit  choiji 
pour  y  établir  fon  nom.  Deut.  c.  \6  y  5. 
On  ne  peut  douter  que  Jefus-Chrift 
n'ait  accompli  à  la  lettre  tous  ces  Re- 
glemens  ;  de  même  ceux  qui  paroiflent 
n'avoir  été  faits  que  pour  l'Egypte.  Car 
ce  qu'on  fait  la  première  fois  par  né- 
cefîité ,  on  le  fait  dans  la  fuite  par  Re- 
ligion ,  &  par  cérémonie.  Il  a  immolé 
l'Agneau  Pafchal  dans  une  maifon  par- 
ticulière par  les  mains  de  deux  de  ^qs 
Difciples  fes  fubftituts,  ôc  il  l'a  man- 
gée avec  fa  famille  dans  l'enceinte  de  la 
ville  de  Jérufalem ,  qui  eft  le  lieu  que 
Dieu  avoit  choiiï  pour  y  habiter ,  de- 
puis que  David  eut  fait  tranfporter  l'Ar- 
che avec  le  Tabernacle  3  de  Gabaa  où 
elle  étoit  auparavant ,  dans  fa  maifon 
bâtie  fur  la  montagne  de  Sion ,  qu'on 
appelloit  la  Cité  de  David  >  &  que  Sa- 
lomon  l'eut  placée  dans  le  Temple  qu'il 
avoit  fait  bâtir  ,  &  qui  fuccéda  au  Ta- 
bernacle. 

§.  iv. 

Témoignage  de  Jofeph  &  de  Philon 
touchant  le  lieu  de  l'immolation  de  la 
Pâque  :  Ce  dernier  jujlifié  du  fehif- 
me. 

Rien  n'eft  plus  conforme  à  la  difpo- 


Dissertation  XXIX.  25^ 
fition  de  la  Loi  que  toute  cette  conduite 
de  Jefus-Chrift ,  pour  ce  qui  regarde  le 
lieu  où  il  a  célébré  la  Pâque.  11  eft  déjà 
confiant  par  l'Ecriture  &  par  le  témoi- 
gnage de  Jofeph ,  que  dans  l'Egypte  les 
Hébreux  l'immolèrent  chacun  dans  leur 
maifon ,  ou  dans  une  maifon  empruntée. 
Car  il  écrit  que  Moifeles  diftribua  com- 
me par  diverfes  familles  ou  confrairies 
qui  dévoient  manger  la  Pâque  enfem- 
ble,  «T/ctTcfcJctc  «/'*  (ppcfcTp/ctf.  /.  2.  Ant. 
c.  5 ,  qui  eft  le  même  terme  dont  il  fe 
fert  ailleurs  pour  fignifier  la  compagnie 
qui  s'aftembloit  pour  manger  chaque  a- 
gneau  :  G>V«p  cTê  çp&rpt  et  <wh$i  iK&ïtiv 
yiyviTcti  Qvff/ctv.  Moïfe  ayant  partagé 
ainfi  les  Hébreux  les  affembla  de  tout  le 
pay  s  deGeften  dans  un  même  lieu,  qui  pa- 
roît  avoir  été  la  ville  de  Rameffes ,  qu'ils 
avoient  bâtie  :  afin  qu'ils  y  filfent  la  Pâ- 
que enfemble ,  non  fous  des  tentes  qui 
n'ont  point  de  portes ,  fur  le  haut  des- 
quelles ils  ayent  pu  faire  les  afperfions 
du  fang  de  l'agneau;  mais  dans  des  mai- 
fons  qui  leur  appartenoient ,  &  qu'ils 
prêtoient  aux  Hébreux  étrangers. 

Cette  coutume  de  s'alTembier  dans 
une  même  ville  pour  y  faire  la  Pâque, 
eft  demeurée  depuis  en  ufage  parmi  les 
Juifs  ,  comme  aufti  celle  d'immoler  la 
Pâque  dans  les  maifons  particulières. 


*Î4  Dissertation  XXIX. 
On  n'en  peut  douter  après  ce  témoigna- 
ge de  Philon  qui  connoilToit  bien  les 
coutumes  de  fa  Nation  :  Au  tems  de 
Paque _,  dit- il,  1.  3.  de  la  vie  de  Moïfe, 
on  rien  ufe  pas  comme  dans  les  autres 
jours  de  Vannée  ou  les  Laïques  prefentent 
leurs  victimes  à  l'autel  pour  être  immo- 
lées par  les  Prêtres.  Mais  pour  l'or- 
donnance de  la  Loi  tout  le  peuple  facri- 
fie  lui-même  _,  chacun  immolant  à  part  fa. 
victime  de  fes  propres  mains.  Et  dans 
le  Livre  du  Décalogue  :  La  fête  de  Pa- 
que eft  lorfque  fans  attendre  les  Prêtres  ^ 
les  particuliers  du  peuple  font  eux  -  mê- 
mes le  facrijîce  j  &  que  tous  les  ans  pen- 
dant un  jour  dejliné  à  cette  cérémonie  _,  la 
Loi  leur  permet  de  faire  eux-mêmes  l'of- 
fice &  la  fonction  de  Prêtres. 

L'Auteur  répond  à  cela  _,  que  ces 
paroles  de  Philon  font  d'un  fchifmati- 
que  \  parce  que  ,  félon  l'Ecriture  ,  la 
Pâque  fe  devoit  faire  à  Jérufalem  3  Tr. 
H.ft.  p.  1 3  5 ,  &  que  Philon  ne  le  dit  pas. 
Je  ne  fais  n*  fa  perfonne  a  été  fchifma- 
tique,  mai~  je  fuis  aiïuré  que  fes  pa- 
roles ne  le  font  pas  _,  &  que  rien  au 
contraire  n'eft  plus  conforme  à  la  vérité 
figurée  par  le  facnrlce  de  l'Agneau  Paf- 
chdl.l)jeu  voulut  que  chaque  Ifraclite 
en  fut  le  Prêtre,  pour  exprimer  ce  fa- 
ceidoce  intérieur  ôc  fpirnuel  donc  cous 


Dissertation    XXîX.     îjj 

les  Chrétiens  font  revêtus,  félon  le 
Prince  des  Apôtres ,  pour  offrir  à  Dieu 
des  hofties  ipirituelles  d'adoration  8c 
d'action  de  grâces  :  Sacerdotium  fanclum 
offerre  fpirhuaUs  hoftias.  i.  Petr.  c.  2  , 
v.  5.  mais  fur  tout  pour  immoler  la  pre- 
mière fois  Jefus-Chrift  dans  le  Baptême 
par  une  entière  application  de  fa  morr. 
Car  ce  que  dit  faint  Paul ,  qu'il  eft  im- 
poiîible  de  remettre  de  nouveau  Jefus- 
Chrift  en  croix  pour  la  rémilîion  de  Ces 
rechûtes  :  Rurfus  crua 'figent es  fibimet- 
ipfis  filium  Dei ,  fuppoie  qu'on  i'avoit 
déjà  crucifié  &  immolé  une  fois  pour 
fes  premiers  péchés,  &  que  ce  facrifice, 
dont  chaque  tidele  eft  le  Prêtre ,  bien 
loin  d'être  impoflible  ,  eft  aufii  nécef- 
faire  qu'il  eft  méritoire  &  agréable  à 
Dieu.  Or  c'eft  de  quoi  l'Agneau  Paf- 
chal  facrihé  par  les  Hébreux  étoit  une 
excellente  figure  _,  parce  qu'il  exprime 
Jefus-Chrift  attaché  à  la  Croix;  &  le 
facrifice  exécrable  àt%  bourreaux  qui 
crucifièrent  Jefus  -  Chrift  ,  devient  un 
facrifice  légitime  de  la  part  de  ceux  qui 
dans  leur  cœur  ,  comme  dans  un  Te  n- 
ple  ,  immolent  &  mettent  en  croix  Je- 
fus Chrift  ,  en  s'en  appliquant  le  prix 
de  fa  mort  Pourroit-on  mieux  expri- 
mer la  figure  de  cette  vérité  de  Reli- 
gion j  que  par  ces  belles  paroles  de 


'zyG     Dissertation  XXIX. 
Philon  :  Que  dans  la  fête  de  Pâque  cha- 
que maifbn  devient  un  Temple  augujle 
&  vénérable ,  1.  de  Septenario. 

Mais  enfin  voyons  comment  l'Auteur 
de  l'Harmonie  s'y  prendra  pour  le  con- 
vaincre de  fchifme.  //  ejl  confiant ,  dit- 
il  ,  félon  l'Ecriture ,  que  la  Pâque  fe 
dev oit  faire  en  Jérufalem.  Philon  le  dit- 
il  ?  p.  135.  Mais  dit-il  le  contraire  ?  On 
juge  de  la  créance  d^s  gens  par  ce  qu'ils 
enfeignent ,  8c  non  par  ce  qu'ils  n'en- 
feignent  pas,  à  moins  qu'ils  ne  le  duf- 
fent ,  fuivant  le  delfein  qu'ils  s'étoient 
propofé  ;  &  Ci  on  me  foutient  le  con- 
traire, j'aimerois  autant  accufer  de  Lu- 
théranifme  un  Auteur  _,  qui  fans  nier  la 
tranfubftantiation ,  affureroit  fortement 
la  préfence  réelle.  Si  donc  ce  qu'avance 
Philon  eft  très  -  catholique  ,  ce  qu'il 
n'avance  pas,  parce  qu'il  n'eft  pas  de 
fon  fujet ,  ne  le  doit  pas  rendre  fchif- 
matique.  Cette  I.  preuve  négative  de 
fon  fchifme  efi  donc  entièrement  nulle. 

La  1  I.  l'eft  encore  davantage.  Car 
je  foutiens  même  qu'il  le  dit  pour 
tou  •  ceux  qui  favent  un  peu  raifonner, 
&  qui  jugent  des  chofes  fans  préven- 
tion }  8c  ce  qui  eft  rare  j  il  le  dit  par  les 
mêmes  paroles  où  l'on  prétend  le  con- 
vaincre de  fchifme.  Ceux  qui  voyagent , 
dit- il ,  ou  qui  demeurent  dans  les  pays. 


Dissertation  XXIX.    257 

éloignés  ,  ne  méritent  pas  pour  cela  d'ê- 
tre privés  de  l'honneur  de  faire  la  Pâ- 
que  ,  qui  leur  doit  être  commun  avec 
tous  les  autres.  En  voici  la  raifon  :  Cefl 
quune  feule  Région  ne  peut  pas  contenir 
une  Nation  nombreufe  qui  s'efl  répan- 
due par  toute  la  terre ,  1.  de  la  vie  de 
Moïfe ,  1.  33.  D'où  l'Auteur  de  l'Har- 
monie conclut ,  qu'il  n'entend  pas  feu- 
lement qu'ils  puiffent  faire  la  Pâque  à 
leur  retour y  mais  qu'il  infirme  ajfe^_ 
clairement  qu'on  la  peut  faire  en  tout 
lieu.  Trait.  Hift.  p.  135. 

Sur  quoi  fonde-t-il  un  jugement  fi 
défavantageux  ?  Qui  ne  voit  au  con- 
traire que  ce  paffage  fuppofe  que  félon 
la  Loi ,  la  Pâque  fe  devoir  faire  à  Jéru- 
falem  ?  Oeil  une  excufe  qu'il  fournit 
aux  voyageurs  ou  aux  étrangers  comme 
lui ,  qui  font  abfens  pendant  la  Pâque 
du  premier  mois.  Il  la  tire  de  l'embar- 
ras qu'il  y  a  à  la  faire  dans  un  lieu  où 
une  nation  toute  entière  s'aiTembloic 
pour  ce  même  fujetde  toutes  les  parties 
du  monde  }  &c  il  veut  dire  que  quand 
des  étrangers  n'auroient  point  d'autre 
raifon  de  la  différer  au  deuxième  mois 
que  la  fuite  d'une  fi  grande  incommo- 
dité, ils  ne  mériteroient  pas  pour  cela 
d'être  privés  d'un  honneur  commun  à 
tous  les  Juifs.  11  parle  de  la  ville  de 


258       Dl  S  SERT  AT  ION    XXIX. 

Jérufalem  comme  du  rendez-vous  géné- 
ral de  toute  la  Nation  }  il  regarde  com- 
me un  honneur  d'y  célébrer  la  Pâque  j 
il  craint  feulement  la  foule  inévitable 
dans  cette  fête }  il  ufe  de  la  relïource 
c[ue  la  Loi  accorde  aux  abfens.  Où  eft 
le  fchifme  ? 

Mais  parce  que  l'Auteur  fait  con- 
finer fon  fchifme  à  n'avoir  pas  condam- 
né celui  des  alexandrins  fes  compatrio- 
tes j  qui  fe  ferv  oient  du  Temple  quOnias 
avoit  fait  bâtir  dans  V Egypte,  lbid.  p. 
1 3  5  j  on  peut  déjà  répondre  qu'on  n'ap- 
prouve pas  tout  ce  qu'on  ne  condamne 
pas  extérieurement  j  parce  que  la  pru- 
dence demande  fouvent  qu'on  y  obferve 
des  mefures.  De  plus  pour  rejetter  fon 
prétendu  fchifme,  on  n'a  qu'à  lire  dans 
fon  Ambafïade  traduite  par  M.  d'An- 
dilli,  ch.  12,  ce  qu'il  a  écrit  du  Temple 
de  Jérufalem,  &  les  fentimens  qu'il  a 
eus  de  la  profanation  que  Caligula  mé- 
ditoit  d'en  faire  :  La  ruine  de  notre 
Temple  efl  afjurée  ;  (  c'eft  la  nouvelle 
qu'un  Juif  lui  vint  apporter  :  )  car  l'Em- 
pereur a  commandé  de  mettre  fa  jlatue 
dans  le  Sanctuaire ,  &  de  donner  pour 
infcription  à  ce  Coloffe  le  nom  de  Jupi- 
ter. Une  Ji  épouvantable  nouvelle  nous 
rendit  prcfqu  immobiles  :  nous  nous  re- 
tirâmes &  nous  enfermâmes  dans  notre 


Dissertation    XXIX.     259 

logis  pour  y  déplorer  la  ruine  particu- 
lière &  générale  de  notre  Nation.  Et 
quelques  lignes  plus  bas  :  Qui  auroit 
été  ajje%  hardi  pour  lui  repréfenter  qu'il 
ne  devoir  pas  violer  la  fainteté  du  plus 
augufle  de  tous  les  Temples  ?  Et  pour- 
voit- on  fans  perdre  la  vie  s'oppofer  par 
des  remontrances  au  torrent  d'une  fi 
grande  impiété}  En  vérité  ces  paroles 
de  Philon  ne  font  point  d'un  fchifmati- 
que  ,  ou  les  fchifmatiques  d'Alexandrie 
parloienc  fort  catholiquement ,  comme 
il  paroit  encore  par  ce  qu'il  ajoute  : 
Caïus  écrivit  donc  que  l'on  confacrât  , 
&  que  l'on  mît  fa  flatue  dans  notre 
Temple,  ch.   13. 

De  plus ,  Ci  la  multitude  des  Temples 
eft  une  conviction  de  fchifme  ,  jamais 
aucun  Juif  ne  fut  plus  éloigné  de  ce 
crime  que  Philon,  qui  s'eft  fi  hautement 
déclaré  pour  l'unité  du  Temple  de  Dieu 
qui  étoit  à  Jérufalem  ,  qu'il  condamne 
tous  ceux  qu'on  voudroit  bâtir  _,  foie 
ailleurs,  foit  dans  cette  ville  même.  Car 
après  avoir  dit  élégamment  que  l'Uni- 
vers était  le  feul  Temple  véritable  Se 
digne  de  Dieu;  il  ajoute  que  pour  fa- 
vorifer  la  piété  des  hommes  Se  le  culte 
de  Dieu,  il  y  en  devoit  avoir  un  qui 
fut  bâti  par  la  main  des  hommes  j  mais 
que  Dieu  avoit  pourvu  quon  n'en  bâtît 


26b    Dissertation    XXIX. 

pas  en  plujieurs  lieux  ,  ni  plujieurs  en 
un  même  lieu  ,  avec  d'autant  plus  de 
raifon  que  comme  il  n'y  a  quun  feul 
Dieu  j  il  riy  doit  avoir  quun  feul 
Temple.  Liv*  i  de  la  Monarchie.  On 
ne  peut  mieux  établir  l'unité  de  Tem- 
ple que  d'éloigner  tous  les  moyens  de 
la  multiplier  ,  qui  feroient  ou  d'en  bâ- 
tir un  dans  chaque  ville  ;  ou  (  fi  cet 
honneur  étoit  deftiné  pour  une  feule  ) 
d'en  bâtir  plufieurs  dans  la  ville  de 
Jérufalem.  Philon  nous  apprend  que 
Dieu  a  défendu  l'un  &  l'autre  ;  8c  il 
fonde  divinement  cette  unité  du  Tem- 
ple fur  l'unité  même  de  Dieu,  tppovvo'n- 

ffi   <Tê    ai   «     Tê  fEraMet^O/  ,    «V  iV    TcbV- 

?o  43-otôa.ll  ajoute  conféquemmentque 
Dieu  ne  permet  point  aux  hommes  de 
lui  facrifier  chacun  en  fa  maifon.  Que 
leur  éloignement  de  Jérufalem  ne  les  dif- 
penfe  point  de  ce  précepte;  &  quand  il 
faudroit  pour  eux  venir  des  extrémités 
du  monde ,  Dieu  leur  commande  de 
fe  rendre  dans  ce  Temple  s'ils  veulent 
lui  offrir  des  facrifices. 

L'Auteur  de  l'Harmonie  dans  fes 
Réflexions  fur  le  fyftême  du  P.  Har- 
douin  ,  p.  2  ,  témoigne  avoir  lu  tout 
cela;  Ôc  fa  Réflexion  eft  ,  que  ce  qu'il 
dit  touchant  la  défenfe  d'édifier  des 
Temples  en  différais  endroits ,  &  d'en 


Dissertation  XXIX.       2(jI 
bâtir  plufieurs   dans   un  même    lieu  _,  eji 
ce  qui  le  rend  fufpecl ,  &  nefl  point  con- 
traire   au  fchifme  des    Juifs  d'Alexan- 
drie. Il  faut  avouer  que  les  mêmes  cho- 
fes  font  des  impreflions  bien  différentes 
fur    des   efprits    diverfement    tournés. 
J'aurois  cru  (implement  que  cet  endroit 
étoit  formel  pour  difculper  Philon  du 
fchifme.  C'eft  au  contraire ,  félon  l'Au- 
teur ,  ce  qui   l'en  rend  fufpect.   Mais 
j'attends  fa  raifon. C'eft,  ajoute  t-il,  que 
les  Juifs  d'Alexandrie  reconnoiffoient  le 
Temple  de  Jérufalem  pour  la  maijbn  de 
Dieu  :  mais  en  même-tems  ils  vouloient 
quon  eut  pu  bâtir  un  Temple  dans  CE" 
gypte.  Refl.  p.    3.    I.  Comment  cette 
prétention  peut-elle  s'accorder  avec  ce 
qu'il  dit  enfuite ,  que  l'unité  de  Temple 
eft  fondée  fur  l'unité  de  Dieu;  ce  qui 
fuppofe  que  la  multiplication  des  Tem- 
ples   fembie    prêcher   la  pluralité   des 
Dieux.  Or  le  Temple  de  l'Egypte  mul- 
tiplioit  les  Temples  de  Dieu  ;  il  multi- 
plioit  donc  les  Dieux  en  fa  manière. 
Comment,  dis-je,  Philon  fi  zélé  pour 
l'unité  de  Dieu,  vouloit-il  qu'on  eût 
pu  ériger  dans  un  fécond  Temple,  un 
monument  fi  contraire  à  cette  unité  di- 
vine ? 

2.    Cejl  j    ajoute    l'Auteur  ,   ce  qui 
{ait  dire  à  Philon  quil  n  étoit  pas  per~ 


i£i  Dissertation  XXIX. 
mis  d'en  bâtir  en  plujieurs  endroits.  Réf. 
p.  3 ,  comme  fi  ce  privilège  écoicréfervé 
À  la  feule  Egypte.  Mais  il  fait  dire  à 
Philon  une  choie  à  quoi  ce  Philofophe 
n'a  jamais  fongé.  Et  je  ne  fais  en  quelle 
confcience  l'Auteur  peut  falfifïer  la  pro- 
pofition  de  Philon,  en  y  ajoutant  cette 
reftriérion  qui  n'y  eft  point  :  Hormis 
dans  l'Egypte  :  &c  qui  eft  réfutée  par 
tout  fon  raifonnement.  Car  la  défenfe 
de  bâtir  des  Temples  en  plujieurs  en- 
droits ,  «Vê  moKKcL^o^i ,  fe  fait  par  op- 
pofirion  à  la  feule  ville  de  Jérufalem  où 
le  Temple  étoit  bâti  j  ôc  il  a  la  force 
d'alibi,  ailleurs.  Ainfi  ces  divers  lieux , 
ces  plujieurs  endroits  _,  où  s'étendoit  la 
défenfe  j  comprenoient  l'Egypte  ,  aufïî- 
bien  que  les  autres  lieux  du  monde  j  Se 
par  -  là  il  condamne  le  Temple  d'E- 
gypte. 

3.  Enfin  comment  ce  Temple  d'Ale- 
xandrie pouvoit-il  s'accorder  dans  l'ef- 
prit  de  Philon  avec  l'ordre  que  Dieu? 
avoir  donné  aux  Juifs  de  fe  rendre  dans; 
le  Temple  de  Jérufalem  pour  facrifier  , 
quand  il  leur  eût  fallu  venir  du  bout  du 
monde?  Si  l'on  en  croit  l'Auteur,  ce 
lavant  Juif  n'étoit  pas  feulement  fchif- 
matique,  il  avoit  encore  l'efprit  ren- 
verfé.  Mais  c'eft  une  méchante  manière 
de  prouver  le  fchifme  d'un  homme  ^ 


Dissertation    XXIX. 
que  de  luppolcr   qu'il  n'a  pas   le  feQi 
commuai 

(     ifemoni  néanmoins  par  complai- 
fance,  que  Philon    K  (maciqae; 

qu'en  infère  t  on  -  âge. 

cil  do\.  touchant  l'immolation 

laP 

;t  roue  irraire  une  marque  qu'il 

cil  indubr  [   li  Philon  parle 

l.l        P  y       H 

n'auruic  p        .  .         idence  d'avances 
un  rait  publia  h  non  mx  ,  qu'il 

cûr  -  par  r. 

ou  quatre  millions  de  témoin?.  S'il  a 
en  vue  |ue  qui  le  : 

dne  qu'en   cela  :oic 

conforme  a  celle  de    I       .    ;!em.  An 
ment  poucqa    1  .      :res  de  pec 

du  droit 
dont  ceux  :  en  poi- 

m   1  emple  a 
l'immolation  de  i  timej  I 

Jules  '  1!  que   les  Juifs 

d'Alexandrie  eu::  .ore 

:ol- 
s     1 

lx>ir  1    r.ipj  quelU  n  y 

il  de  1  ;      ■  ;_  la 

e  le  plus  .;ra-  *>us 

;  elle  le  t.iit  par  lord 
lUJice  de  la  Lui,  \$  le  du  PJuiuii  j 


1^4     Dissertation    XXIX. 

jubente  lege ,  permijfu  legis  ,  &  fur 
l'exemple  de  la  première  Pâque ,  qui 
s'eft  faite  fous  les  yeux  du  Légiflateur. 
11  feroic  inutile  d'en  dire  ici  davan- 
tage. 

§.  V. 

Que  Jefus  -  Chrijl    a  accompli  la  Loi 

touchant  le   tems  de  l'immolation 

de  la  Pâque. 

■Jk  Preuve  par  deux  ufages  des  Juifs , 

Vun  félon  la  Loi ,  Vautre  félon 

la  Tradition. 

A  l'égard  du  tems  ,  Moïfe  avoit  or- 
Sonné  qu'on  immoleroit  l'agneau  le 
foir  du  1 4  du  premier  mois  qu'on  nom- 
moit  Nifan.  Etfervabitis  eum  (  agnum  ) 
ufque  ad  quartam  decimam  diem  men- 
fis  hujus  ,  &  immolabit  eum  univerfa 
multitudo  ad  vefperam.  Exod.  c.  n.  6, 
Et  c'eft  alors  que  devoit  commencer 
l'ufage  des  pains  fans  levain.  Comme 
donc  le  14  de  la  Lune  fe  doit  compter 
fur  le  premier  où  arrive  la  nouvelle 
Lune ,  on  n'a  qu'à  chercher  dans  les 
Tables  aftronomiques  quel  jour  tomba 
la  nouvelle  Lune  de  cette  année-là ,  qui 
fur  la  33    de  Jefu$-Çhrift  félon  l'Ere 

commune, 


Dissertation  XXIX.  265 
commune,  pour  trouver  infailliblement 
dans  lequel  de  nos  mois  &  dans  quel 
jour  de  la  femaine  arriva  le  14. 

CedevoitêtreauflilaPàque  des  juifs. 
Mais  parce  que  pour  de  certaines  rai- 
fons  ils  transferoient  fouvent  la  fête  de 
Paque  du  jour  où  elle  tomboit  au  jour 
fuivant ,  ils  la  firent  le  lendemain  de 
celle  de  Jefus-Chrift.  C'eft  une  diver- 
sité de  tems  qu'il  eft  aifé  de  concilier, 
fans  qu'on  foit  obligé  d'en  conclure,  ni 
que  Jefus-Chrift  n'a  point  fait  la  Paque, 
parce  qu'il  ne  l'a  point  faite  avec  les 
Juits  ;  ni  que  les  Juifs  l'ont  fake  le 
même  jour  que  Jefus-Chrift,  parce  que 
Jefus-Chrift  l'a  faite  en  fon  tems  :  Deux 
extrémités  vicieufes ,  dont  la  première 
ne  peut  s'accorder  avec  trois  Evangc- 
liftes,  ni  la  féconde  avec  faint  Jean. 

Il  n'y  a  pour  cela  qu'à  fe  fervir  de 
l'hypotèfe  de  Rupert  qui  vivoit  vers 
le  commencement  du  11.  fiecle.  Mais 
pour  la  mettre  en  un  plus  grand  jour, 
il  eft  bon  de  fuppléer  ce  qui  y  manque 
par  Paul  de  S.  Marie ,  Juif  de  naiffance  , 
ôc  depuis  fa  converfion  Evcque  de  Bur- 
gos  dont  il  étoit  originaire ,  ôc  connu 
maintenant  fous  ce  nom  là. 

Il  eft  mort  félon  Calvifius  à  la  fin  du 
14.  fiécle,  &  félon  les  autres  au  com- 
mencement du  15.  Son  fentiment  tou- 
Tome  IF.  M 


166  Dissertation  XXtX. 
chant  le  tems  de  la  Pâque  &  de  la  mort 
de  Jefus-Chrift  ,  eft  d'autant  plus  con- 
fidérable,  qu'ayant  fuppofé  à  de  favans 
Hébreux  la  iupputation  qu'il  en  avoir 
faite ,  elle  en  fut  approuvée. 

Il  y  avoit  parmi  les  Juifs  une  ancienne 
Tradition  établie  depuis  le  retour  de  la 
captivité  &  dès  le  fécond  Temple  > 
qu'on  évitoit  autant  qu'on  le  pouvoit  de 
faire  deux  fêtes  de  fuite,  à  caufe  de  plu- 
fïeurs  incommodités  inféparables  de 
cette  concurrence  ,  &  particulièrement 
de  la  fépulture  qui  étoit  défendue  les 
jours  de  fêtes.  Mais  on  transféroit  la 
première  dans  le  jour  de  la  féconde  à 
la  faveur  de  deux  obfervations  qui  é- 
toient  d'un  grand  ufage  parmi  les  Juifs 
pour  le  jour  de  la  Pâque  qui  regloit  ceux 
des  autres  fêtes. 

La  I.  eft,  que  les  jours  de  chaque 
mois  étant  toujours  folaires,  prenoient 
néanmoins  de  la  Lune  leur  rang  &  leur 
nombre  ordinal  dans  le  mois  ,  &  fe 
comptoient  le  premier  _,  le  fécond ,  le 
troifieme  ,  &  ainfi  des  autres ,  félon  les 
révolutions  de  la  Lune  depuis  fa  con- 
jonction avec  le  Soleil.  C'étoit  donc 
cette  conjonction  qui  rendoit  le  jour  où 
elle  arrivoit  le  premier  jour  du  mois. 
Mais  pour  le  déterminer  on  avoit  égard 
à  l'heure  où  elle  étoit  arrivée ,  lorfqae 


Dissertation   X I 
.  oit  en:.  î 
midi,  ce  jour- là  même  croie  c 
pour  le  premier  jour  du  mois  :n- 

me  la  Ncomenie  attachée 
jour  ûoit  une  fête  parmi  les  }         .   elle 
commençoit  con, 

le   foir    pi  .:.  A  mit  la  N.omenie 

comim  ilors  plufieors  I  .me 

la  conjonction  de   la  Luik  ^rf- 

ion  romboïc  entre  midi 

.unuit ,  e\:  même  au  poin:  -ii, 

ce    :  tOÎl  point  COmpi  11  le 

lu  mois-,  mais  la  nouvelle  Lu- 

ii  transférée  au  lendemain  y  .5c  U 

•  de  la  x       nenic  comm 

le  Soleil  coucl 
La  raifon  naturelle  en   e(i  que  la  rcte 
nie  comment  urs 

au  loir ,  !  ué  au  jou 

rant    d<  :   1 1    noir.  [  me 

qui  ne  tut  arrivée  qu'a- 
vant ,  la  nouvelle  Cône  nci 

dix- huit  heu- 
res avant  la  N 

I   I  IL  -ion  cfl  que  ni  la  N 

menie  de  la  lune  Pafchile  ,  m  par 

\/vmo  ,  qui 
éto\  .  île  C< 

>ienc  jamais  le   - 

ni  I  jour  d 

à  -  dire   le    1    '    ii  ,   le  M. 

M 


'x£t    Dissertation    XXIX. 
Vendredi  j  &c  fi  elles  arrivoienc  un  de 
ces  trois  jours ,  on  la  transferoit  au  jour 
fuivanr. 

Nous  apprenons  cela  d'un  Hifrorien 
Juif  dans  le  Livre  intitulé,  Seder  Olam> 
dont  Janfénius  de  Gand  cite  ces  paro- 
les Latines  que  je  rapporterai  en  Fran- 
çois :  Nos  Maîtres  _,  les  Juges  &  Ma  gif 
irats  compofant  le  Grand  Sanhédrin  _, 
perfonnages  célèbres  dans  le  monde  j  ont 

fait  ce  Règlement  à  perpétuité 

L'Auteur  ajoute  ici  une  viiion  mira- 
culeufe  qui  a  toute  l'apparence  d'un 
conte  dont  il  veut  autorifer  la  coutume 
des  Tranflations.  Quoique  l'Auteur  de 
l'Harmonie  l'explique  autrement;  quoi- 
qu'il  en  foit  il  continue  :  Nos  Maîtres 
ont  mis  ce  Règlement  entre  les  mains  du 
Rabbi  Elie\er  le  plus  confidèrable  de 
tous.  C'ejl  que  la  fête  des  Sorts  ne  fc~ 
voit  jamais  célébrée  le  fécond  5  le  qua-*- 
trieme  &  le  feptieme  jour  de  la  femai^ 
ne  :  ni  la  Pâque  ,  (  c'elr-à-dire  la  fcre 
des  Azymes  ,  )  le  fécond  _>  le  quatrième 
&  le  Jixieme  :  ni  le  commencement  de 
l'année  .,  (  la  Néomenie  Pafcale  )  le  fe^ 
cond  j  le  quatrième  &  le  Jixieme  :  ni  le 
jour  de  l'Expiation  ,  le  premier  j  le  troi-* 
/cerne  &  le  Jixieme. 

Les  caufes  de  ces  Tranflations  éroîent 
f  juftes  au  jugement  de  Grotius,  quoi* 


DlSSERTATI  ON    XXIX.     l£$ 

qu'il  ne  juge  pas  qu'on  en  ai:  eu  befoin 
cette  année  ,  qu'elles  dévoient  plutôc 
être  confidérées  comme  une  interpréta- 
tion de  la  Loi  que  comme  une  innova- 
tion. C'étoit  comme  j'ai  dit,  pour  évi- 
ter la  concurrence  de  plusieurs  fêtes  de 
fuite  ,  pendant  lefquelles  il  étoit  défen- 
du de  faire  des  œuvres  ferviles.  Car  Ci 
par  exemple  une  fête  des  Azymes  qui 
devoit  naturellement  arriver  le  Ven- 
dredi ,  eut  été  immédiatement  fuivie 
du  Sabbat ,  on  n'eût  pu  éviter  dans  les 
pays  chauds  où  les  Juifs  étoient  difper- 
fésj  que  les  corps  morts  qu'on  n'auroit 
pu  enterrer  pendant  ces  deux  jours  ne 
fe  fuifent  corrompus  avec  une  grande 
incommodité  des  familles.  Or  il  n'effc 
pas  vraifemblable  que  Dieu  eût  impofé 
aux  Juifs  l'obligation  d'obferver  une 
cérémonie  au  péril  d'un  fi  grand  incon- 
vénient. 

Il  fallut  donc  commencer  la  Transla- 
tion par  la  fcte  de  Pâque  ,  la  première 
de  Tannée,  de  laquelle  dépendoit  la 
Situation  de  toutes  les  autres.  Car  fi  la 
Pâque  fe  fut  célébrée  le  Lundi,  le  Mer- 
credi ou  le  Vendredi  ,  elle  auroit  fait 
tomber  d'autres  fêtes  en  concurrence 
avec  le  Sabbat ,  ou  elle  y  fût  tombée 
elle-même.  La  Pâque  au  Lundi  leur  eût 
donné  la  fête  de  l'Expiation  au  Ven- 

M  iij 


i-jo  Dissertation  XXIX. 
dredi  veille  du  Sabbat.  Au  Mercredi , 
elle  eut  Fait  arriver  cette  même  fête  le 
Dimanche  ,  lendemain-  du  Sabbat ,  en- 
fin au  Vendredi  la  Pâque  fe  fût  trouvée 
la  veille  du  Sabbat  :  &  de  plus  elle  eût 
fait  tomber  dans  le  Sabbat  même  le  fep- 
tieme  jour  des  Tabernacles ,  où  ils  don- 
noient  de  certaines  marques  publiques 
de  reconnoilTance ,  qu'ils  ne  fe  croyoïent 
pas  permifes  le  jour  du  Sabbat. 

Ceux  qui  avoient  établi  cette  Tranfla- 
tion  d'une  fête  dans  un  autre  jour,  s'é- 
toient  peut-être  autorifés  de  celle  que  le 
Roi  Ezéchias  fit  de  la  Pâque  générale 
du  premier  mois  dans  le  fécond,  contre 
l'ordonnance  de  Moïfe  ,  porté  par  des 
raifons  particulières  auxquelles  la  Loi 
n'avoit  eu  aucun  égard ,  comme  je  le 
dirai  plus  bas.  Cet  exemple  fit  voir  que 
la  Pâque  n'étoit  pas  fi  attachée  à  un 
jour  préfix  qu'on  ne  la  pût  transférer 
dans  un  autre  pour  quelque  néceiïité  , 
fans  qu'on  empêchât  de  la  célébrer  dans 
fon  jour  naturel. 

Or  l'année  33.  de  Jefus-Chrift  eft 
marquée  de  ces  deux  Translations  que 
je  viens  d'expliquer  félon  la  Tradition 
des  Juifs.  La  nouvelle  Lune  Pafchale  ou 
celle  qui  eft  la  plus  proche  de  l'équi- 
noxe  du  Printems  arriva  le  Jeudi  19 
Mars ,  à  quelques  minutes  après  midi. 


Dissertation  XXIX.  271 
Ainfi  félon  la  première  obfervation  ce 
jour-là  fur  rejette  pour  la  nouvelle  Lu- 
ne. Elle  devoir  donc  être  transférée  au 
lendemain  Vendredi.  Mais  parce  que 
fuivant  la  féconde  obfervation ,  le  Ven- 
dredi n'étoit  point  un  jour  de  Néomenie 
pour  éviter  la  concurrence  d^s  fêtes  , 
la  nouvelle  Lune  ôc  la  Néomenie  fut 
transférée  de  nouveau  au  Samedi  jour 
de  Sabbat',  ôc  par  conféquent  la  fête  de 
Pâque  ou  des  Azymes  qui  arrive  tou- 
jours le  m,  jour  d'après >  y  fut  aufli 
transférée. 

Mais  comme  cette  féconde  Transla- 
tion étoit  contraire  à  la  Loi  qui  rlxoit 
la  fête  des  Azymes  au  1 5  depuis  la  con- 
jonction ,  ce  fut  pour  plufieurs  un  fujet 
de  fcrupule,qui  donna  lieu  à  deux  diffé- 
rens  ufages.Les  uns  fuivoient  la  tradition 
fur  laquelle  on  regloit  l'ordre  public  ,  de 
qui  cette  année-là  transferoit  la  Pàque 
au  Vendredi  ,  &  la  fête  des  Azvmes  au 
Samedi.  Les  autres  fe  conformoient  à 
la  difpofition  de  la  Loi  qui  fixoit  la  Pâ- 
que au  14  &  les  Azymes  au  1 5.  Et  c'eft 
le  parti  que  prit  Jefus-Chrift  dans  cette 
dernière  Pâque  qu'il  avoit  à  faire  avant 
que  de  mourir.  Car  encore  qu'il  ait  pu 
luivre  les  années  précédentes  l'ordre  pu- 
blic fondé  fur  la  Tradition^  il  eft  cer- 
tain néanmoins  que  cette  denuete  fois 

M  iv 


171  Dissertation  XXIX. 
il  obferva  religieufement  la  Loi,  parce 
que  fa  mort  qui  étoit  fixée  au  jour  de  la 
Pâque  des  Juifs  ne  lui  permetroir  pas 
de  la  faire  avec  eux. 

Plus  fournis  à  la  Loi  de  fon  Père 
qu'aux  Traditions  judaïques,  il  célébra 
la  Pâque  dans  fon  tems  légitime.  Car 
fi  du  Vendredi  20  Mars  on  compte  14 
jours,  on  arrivera  au  Jeudi  1  Avril; 
&  comme  tes  14  jours  font  fol  aires  , 
il  ne  pouvoit  immoler  ni  manger  la 
Pâque  que  le  foir  du  14  jour.  C'eft 
donc  alors  qu'il  la  célébra  comme  plu- 
fieurs  autres  Juifs,  par  une  pratique  qui 
pour  hêtre  plus  de  l'ordre  public,  ne 
lailîoit  pas  d'avoir  été  reçue  dans  Tufa- 
ge.  C'eft  de  ceux-ci  que  parlent  faint 
Marc  &c  faint  Luc ,  lorfqu  ils  difent  que 
le  premier  jour  des  Azymes ,  les  Juifs 
immolaient  la  Pâque  j  quando  Pafcha 
immolahant.  Voilà  le  fait;  en  voici  le 
droit ,  &  l'on  étoit  obligé  par  la  Loi  dô 
V immoler  _,  in  qua  necejje  erat  occidï 
Pafcha.  Au  lieu  que  faint  Jean  ne  parle 
de  la  Pâque  que  félon  l'ordre  public 
réglé  par  la  Tradition  &  pratiqué  par 
le  plus  grand  nombre. 

Selon  ce  Syftême  Jefus-Chrifr.  n'an- 
ticipa point  extraordinairement  le  tems 
de  la  Pâque ,  ni  les  Juifs  ne  la  différèrent 
point.  Elle  fut  obfervée  de  part  &  d'au- 


Dissertation  XXIX.  275 
tre  dans  le  tems  qu'on  croyoit  légitime  , 
par  Jefus-Chrift  félon  la  Loi  de  Moïfe  , 
8c  par  les  Juifs  félon  la  Tradition  de 
leurs  Pères.  Ces  deux  ufages  étoienc 
permis,  &c  ceux  qui  les  fuivoient,  ne 
s'accufoient  point  réciproquement ,  les 
uns  d'anticipation  ,  cV  les  autres  de 
retardement  ;  parce  que  les  uns  &  les 
autres  fixoient  toujours  la  Pâque  au  14 
depuis  le  jour  où  ils  avoient  fixé  la  nou- 
velle Lune,  foit  félon  les  Tables  Aftro- 
nomiques ,  foit  en  fuiv^nt  la  Tradi- 
tion. 

§.  VI. 

Avantages  de  UEglife  dans  la  Tradi- 
tion Judaïque  _,  touchant  les  Tranfla- 
tions  des  Fêtes.  Réponfes  aux  Objec- 
tions contre  le  fait. 

La  commodité  fit  inventer  ces  Tranf- 
lations  par  les  Juifs  qui  fe  procurèrent 

f>ar  ce  moyen  la  liberté  de  ne  garder 
eurs  morts  qu'un  jour  ,  &  de  les  en- 
terrer le  lendemain  ,  au  lieu  que  dans 
la  concurrence  des  fêtes,  ils  étoient 
obligés  de  les  garder  quelquefois  deux 
jours  entiers,  &c  de  ne  les  enterrer  que 
le  troifieme.  Mais  les  Tranflations  nous 
font  encore  plus  commodes  qu'à  eux. 
{Iles  ont  déjà  toute  la  certitude  de 

Mv 


274  Dissertation  XXIX. 
fait  qu'on  y  puifle  fouhaiter  'y  les  Juifs 
d'aujourd'hui  les  reconnoi(Tent  comme 
une  de  leurs  Traditions,,  &  en  cette 
qualité  ils  les  pratiquent  du  confente- 
nient  de  l'Auteur»»  J'avoue,  dit- il,  Let. 
»  p.  31  qu'effectivement  ces  Tranfla- 
>î  rions  ne  font  point  feintes.  Ce  ne 
a?  font  point  les  Chrétiens  qui  fe  les 
j>  font  imaginées ,  les  Rabbins  les  pra- 
»  tiquent ,  ôc  donnent  des  règles  pour 
»  cela.  Ils  pofent  pour  fondement  qu'u- 
»  ne  fête  ne  doit  point  précéder  ou 
>5  fuivre  un  Samedi ,  afin  qu'il  n'y  ait 
»  point  deux  fêtes  de  fuite.  Ainfi  ils 
»  difpofent  tellement  leurs  Néomenies 
»  qu'elles  n'arrivent  jamais  ni  la  pre- 
>î  miere  férié,  ni  la  quatrième,  ni  la 
»  fixieme.  Ils  ne  veulent  pas  aulîi  que 
»  la  Pâque  fe  rencontre  ou  la  féconde 
j>  férié,  ou  la  quatrième,  ou  la  fixie- 

»  me Je  ne  contefte  donc  point 

que  les  Juifs  ne  foient  dans  les  prati- 
ques que  je  viens  de  marquer. 

D'ailleurs  elles  viennent  heut£ufe- 
ment  à  notre  fecours  pour  accorder  des 
paffages  qui  paroiflent  irréconciliables. 
Pour  juftifier  la  Tradition  de  la  dernière 
Pâque  de  Jefus-Chrift ,  &  pour  nous 
délivrer  de  la  néceflité  de  faire  dire  à 
l'Ecriture  ce  qu'elle  ne  dit  point,  ou 
plutôt  de  l'empêcher  de  dire  ce  qu'elle 


Dissertation  XXIX.  275 
dit  clairement ,  on  n'a  qu'à  fuppofer 
que  faine  Jean  qui  a  fupprimé  la  der- 
nière Pâque  de  Jefus-Chrilt  ,  comme 
ayant  été  fuffifamment  rapportée  avant 
lui ,  parle  de  la  Pâque  que  les  Juifs  fi- 
rent félon  la  Tradition  ,  &  que  les  trois 
autres  Evangéliftes  qui  n'ont  rien  dit  de 
celle  des  Juifs,  n'ont  rapporté  que  celle 
que  Jefus-Chrift  fit  félon  la  Loi.  Avec 
cela  feul  tout  eft  d'accord  dans  ces  Hif- 
toriens  facrés ,  &  rien  ne  s'y  dément. 
Qui  nous  empêche  donc  de  nous  préva- 
loir d'un  moyen  de  conciliation  qui  nous 
eft  offert  par  nos  adverfaires?  Pourquoi 
ennemis  de  nos  avantages  ne  nous  fer- 
virions-nous  pas  d'une  Tradition  fore 
utile,  qu'ils  nous  alfurent  qui  s'eft  tou- 
jours obfervée  parmi  eux  ,  depuis  le 
fécond  Temple  j  ufqu'à  la  deftrudtion  du 
troifieme,  &  qu'on  ne  peut  foupçonner 
qu'ils  ayent  fuppofée  pour  nous  favo- 
rifer  ? 

Cependant  il  n'a  pas  plu  à  l'Auteur 
de  s'en  fervir  ni  dans  Jon  Harmonie , 
ni  dans  fa  Lettre  au  R.  P.  F.  ni  dans 
fon  dernier  Traité  Hijîorique.  11  eft 
en  mauvaife  humeur  contre  les  Tradi- 
tions, ôc  il  aime  mieux  fe  jetter  en  de 
fàcheufes  extrémités  Et  qu'y  trouve- 
t-il  à  redire^  11  a  peur  qu'elles  ne  foient 
pas  allez  anciennes  :  Nous  n'avons  rien> 

M  vj 


i-jG    Dissertation  XXIX. 
dit-il ,  Let.  p.  32.  dans  l'antiquité ',  qui 
ne  nous  convainque  que  ces  Tranjlations 
font  une  imagination  des  Juifs  long-tems 
après  leur  difperfion. 

Mais  les  preuves  qu'il  en  rapporte 
font,  1.  Le  filence  de  l'Ecriture  ^  de 
Philon  &  de  Jofeph  \  argumens  néga- 
tifs qui  ne  prouvent  rien  par  eux-mê- 
mes j  &:  dont  le  premier  eft  fort  inu- 
tile ,  puifqu'on  avoue  que  les  Tradi- 
tions font  plus  nouvelles  que  l'Ecriture* 

1.  L'exemple  desQuartodécimans  qui 
faifoient  la  Pâque  avec  les  Juifs  quel- 
que }our  de  la  femaine  qu'elle  fe  ren- 
contrât:, c'eit- à-dire  que  tombât  le  14. 
//  ejl  confiant _,  dit- il >  Let.  p.  33.  par 
les  difputes  des  Quartodécimans  qui  vou- 
loient  que  dans  VEglife  Von  confervât 
le  Judaïfme  quant  à  la  Pâque  j  que  les 
Juifs  de  ce  tems-là  nav  oient  point  en- 
core la  coutume  de  transférer  la  Pâque 
ou  de  V exclure  de  certain  jours  j  comme 
depuis  ils  ont  fait. 

Cet  exemple  eft  fort  mal  allégué  :  car 
les  Auteurs  qui  fuppofent  les  Tranfla- 
tions  n'ont  jamais  prétendu  que  les  Juifs 
&  les  Quartodécimans  ayent  célébré  la 
Pâque  dans  un  autre  jour  que  le  14* 
Mais  ils  croyent  feulement  qu'ils  ont 
compté  pour  le  14  celui  qui  l'étoit  en 
effet  depuis  le  jour  inclusivement  où  la 


Dissertation  XXIX.  277 
nouvelle  Lune  pafchale  avoic  été  mar- 
quée ou  différée. 

La  troifieme  objection  fe  rire  de  la 
nouvelle  dare  desTranllations  que  Mai- 
monide  dir  clairement  n'avoir  été  en 
ufage  que  depuis  le  nouveau  Calendrier 
dreffé  par  R.  Ada ,  après  le  tems  de 
Jefus-Chrifl:  dont  il  s'agit  ici.  Car  alors^ 
félon  l'Abbé  Bartholocci ,  dans  fa  Bi- 
bliothèque Rabbinique  ,  ces  règles  tou- 
chant les  Translations  des  fêtes  n'étoienc 
point  en  ufage.  Tant  que  le  Temple  a 
fubiîfté  on  ne  digeroit  point  les  années 
par  cycles.  Mais  on  ouvroit  l'année,  ôc 
l'on  confacroit  les  Néomenies  par  la 
première  apparition  du  Croiifant. 

Voila  une  raifon  qui  prouve  invinci- 
blement les  Tranflations ,  comme  il 
paroîtra  au  §.  fuivant,  tant  ces  Parti- 
fans  des  Phafes  font  fins  &  heureux 
dans  leurs  raifonnemens.  En  attendant 
je  renvoie  l'Auteur  de  l'Harmonie  à 
un  favant  Chronologifte  j  c'eft  Sethus 
Calvifiuss  qui  aflure  que  félon  une  an- 
cienne Tradition  ,  ex  vctujiijjima  tra~ 
dïtione  y  les  Juifs  conformément  à'ia 
règle  établie  dans  le  Calendrier ,  ne 
commencent  jamais  leur  année,  c  elt- 
à-dire,  la  Néomenie  du  mois  Tifri  par 
la  première  férié,  ni  par  la  4.  ni  par  la 
l.  Ifag.  Chrouol.  p.  116.  lin.  2.  Cet  Au- 


178  Dissertation  XXIX. 
ceur  donc  reconnoit  que  la  Tradition 
des  Tranflations  eft  plus  vieille  que  le 
nouveau  Calendrier ,  puique  la  règle 
des  Tranflations  eft  fondée  fur  la  Tra- 
dition. Pour  tout  le  tems  qui  a  précé- 
dé ce  Calendrier ,  il  dit  que  depuis  la 
fottie  de  l'Egypte  jufqu'au  tems  d'Ale- 
xandre le  Grand  les  Juifs  n'avoient  pas 
de  Calendrier  qui  pût,  heure  pour  heure, 
ou  minute  pour  minute  ,  marquer  exac- 
tement les  nouvelles  Lunes ,  ibid.  p. 
108  &  109.  Mais  qu'après  le  tems 
d'Alexandre ,  lorfqu'avec  le  joug  des 
Macédoniens  ils  eurent  reçu  la  manière 
de  compter  les  années,  pratiquée  par  les 
Grecs,  environ  19  ans  après  la  publi- 
cation de  la  Période  de  Calippe  _,  ils  fui- 
virent  cette  Période  dans  le  règlement 
de  leurs  Néomenies  &  de  leurs  fêtes  ; 
8c  ils  en  uferent  jufqu'au  tems  de  Conf- 
tantin,  environ  pendant  600  ans.  Cette 
Période  eft  une  révolution  de  y  6  ans 
qui  comprend  quatre  fois  celle  de  19 
ans  inventée  par  Méton,,  ibid.  p.  113. 
Comme  néanmoins  ils  s'upperçurent 
que  par  le  défaut  de  cette  Période,  ils 
fe  trompoient  fouvent  de  deux  jours 
dans  la  célébration  de  leurs  fêtes ,  ils 
compoferent  un  nouveau  Calendrier, 
en  réglant  les  mois  par  le  mouvement 
moyen  de  la  Lune ,  plus  favorable  aux 


Dissertation  XXIX.  27$ 

Tranflations  que  la  Période  de  Calippe, 
&  c'eft  ce  que  fit  le  Rabbin  Hiiiel  vers 
Tan  3  $8  fous  1  Empire  de  Confiance. 
Voye\  Calvijius  ChronoL  Van  $61.  Si 
on  ne  fe  fatisfait  pas  de  ce  que  die 
Calvifîus ,  Maimonide  fuffira  pour  nous 
apprendre  qu'avec  la  Phafe  on  employoic 
encore  les  Tables  Aftronomiques. 

Le  même  Abbé  allègue  qu'il  paroît 
par  la  Mifna  &  par  la  Gemara  que  la 
fête  de  Pâque  a  été  fouvent  célébrée  le 
Lundi,  le  Mercredi  &  le  Vendredi. 
Mais  que  prouve  cette  raifon  ,  finon  que 
cet  ufage  n'étoit  pas  Ci  bien  établi ,  qu'on 
n'eût  la  liberté  de  fuivre  la  difpofition 
de  la  Loi?  Ces  exemples  ne  font  que 
juftifier  l'anticipation  que  Jefus^Chrift 
en  a  faite  le  Jeudi  au  foir ,  où  corn- 
mençoit  la  fête  du  Vendredi.  Et  ils 
autorifent  le  même  fens  qu'on  donne 
à  faint  Marc  &  à  faint  Luc  a  l'égard 
de  plufieurs  qui  uferent ,  comme  Jefus- 
Chrift,  de  la  même  anticipation.  Le 
premier  jour  des  Azymes  arriva  ,  ou 
l'on  immoloit  la  Pâque  s  &  où  il  f allô  U 
nécessairement  y  félon  la  difpofition  de 
U  Loi ,  quelU  fut  immolée» 


180   Dissertation  XXIX. 
§•  VII. 

1 1.  Preuve  ,  par  la  fuppofition  de  la 
première  Phafe  ou  apparition  de  la 
nouvelle  Lune.  Que  cette  Méthode 
efl  entièrement  parallèle  &  équiva- 
lente à  celle  des  Tranflations  régu- 
lières. 

Si  rout  ce  que  je  viens  de  dire  ne 
peut  réconcilier  les  Tranflations  avec 
l'Auteur ,  il  faut  avoir  recours  à  une 
autre  fuppofition  pour  expliquer  les  dé- 
lais de  la  Pâque  j  ce  fera  ma  1 1  Preuve  ; 
je  ne  doute  point  qu'il  ne  fe  rende  à 
l'autorité  que  je  vais  lui  citer  _,  puifque 
c'eft  la  fienne  :  Elle  doit  avoir  fur  fon 
efprit  le  poids  Se  le  pouvoir  d'une  jufte 
démonstration.  Il  établit  dans  fon  Trai- 
té 8c  dans  fa  Lettre  p.  50.  que  les  Juifs 
par  la  nouvelle  Lune  entendoient  fa  pre- 
mière Phafe  j  ou  apparition  \  c'eft  par 
elle  qu'ils  commencoient  leurs  mois j  & 
cefl  ce  qu  il  faut  bien  établir. 

111e  prouve  1.  parce  que  cette  ma- 
nière étoit  la  plus  naturelle  ,  la  plus  ai- 
fée  ,  &  la  plus  proportionnée  à  la  capa- 
cité des  Juifs  ,  qui  fans  calcul  n'eufient 
pu  connoitre  le  moment  précis  de  la 
conjonction  de  la  Lune  avec  le  SoleiL 


Dissertation  XXIX.  2$  1 
Or ,  dit-il  j  il  y  a  de  l'apparence  que 
Dieu  n'exigea  pas  d'eux  de  commencer 
leurs  mois  d'une  manière  qu'il  leur  eût 
été  difficile  de  lui  obéir.  Cette  raifon 
n'eft  guère  démonftrative ,  puifque  l'Au- 
teur prétend  ailleurs  que  c'étoit  au  San- 
hédrin, de  non  aux  (Impies  Juifs  à  dé- 
clarer le  jour  de  la  Néomenie.  Or  trois 
pages  plus  bas  ,  fans  aller  plus  loin ,  il 
reconnoît  après  Maimonide  dans  le 
Sanhédrin  une  grande  connoifTance  des 
règles  de  l'Aftronomie  :  Chaque  mois  y 
dit- il 3  p.  53  ,  le  Sanhédrin  recherchent 
par  les  principes  de  V Ajlronomie  >  non- 
feulement  le  tems  que  la  Lune  devait 
paroure  j  mais  encore  toutes jes  aijfere/i" 
tes  difpofuions  ;  &  cejl  par-là  que  les 
Juges  reconnoijjbient  Ji  ce  quon  leur  rap- 
portoit  êtoit  conforme  à  la  vérité.  Ce 
n'étoit  donc  pas  faute  de  connoiftance 
&  d'habileté  dans  l'Aftronomie  que  les 
Juifs  regloient  les  mois ,  Se  par  confé- 
quent  toutes  chofes  par  la  feule  vue  de 
la  première  Phafe  de  la  Lune. 

Mais  Ci  cette  raifon  elt  foible  ,  il  la 
foutient  par  l'autorité  de  Jofeph  &  de 
Philon,  &:  ce  qui  eft  plus  que  tout  cela, 
par  le  favant  Maimonide  ,  qui  en  fait 
un  article  de  foi  Judaïque ,  Tr.  hift.  p. 
5  2.  Lorfque  Dieu  dit  à  Moïfe  :  Ce 
mois  fera  le  premier  des  mois  ,  il  lui  fit 


*8i  Dissertation  XXIX. 
voir  la  Lune  qui  commencoït  à  paroi- 
tre  j  &  lui  dit  que  lorfqud  la  verroit 
dans  la  même  figure  il  confacrât  la  Nco- 
menie.  Après  cet  ordre  ,  qui  eut  ofé 
douter  fans  facrilege ,  que  l'apparition 
du  premier  Croiflant  ouvroit  le  mois , 
ôc  étoitle  moment  d'où  fe  comptoit  la 
nouvelle  Lune. 

Or  de  ce  principe  il  s'enfuit  claire- 
ment que  les  Juifs  célébroient  la  Pâque 
auiîl  tard   que  fi  la  Tranflati'on   civile 
eût  été  en  ufage.  Car  la  nouvelle  Lune 
étant  différée  jufqu'au  premier  Croif- 
fant,  le  14  qui  fe  comptoit  fur  cette 
première  Phafe  fe  differoit  à  propor- 
tion \  ce  pour  montrer  que  jô  ne  l'a- 
vance point  au  hafard ,  il  fe  trouve  à 
la  lettre ,  que  l'année  3  3  de  l'Ere  com- 
mune où  Jefus  Chrift  mourut,  le    14 
jour  de  la  Lune  ,   foit  par  la  Tranfla- 
tion  ,  foit  par  la  nouvelle  Phafe ,  tomba 
le  même  jour  2  Avril.  Cela  paroît  dans 
la  fupputation  que  M.  leFebvre,  à  la 
prière  de  l'Auteur ,  a  faite  de  huit  an- 
nées, &  qu'il  a  inférée  dans  fon  Traité 
Hiftorique  :  &  dans  celle  que  Calvi- 
fîus,  dans  fon  introduction  ,  a  faite  des 
quatre  premières  de  ces  mêmes  années. 
Voici  celle  de  l'année  3  3   dont  il  s'a- 
git- 

Selon  M.  leFebvre,  p.  108.  l'année 


Dissertation  XXIX.  283 
3  3  de  notre  Ere ,  qui  avoit  D.  pour 
Lettre  Dominicale  ,  la  Lune  fut  nou- 
velle à  Jerufalem  le  Jeudi  19  Mars  à 
une  heure  30  minutes  après  midi.  p.  1 1 1 
à  la  fin.  Le  Vendredi  fuivant  20  Mars, 
le  lendemain  de  fa  conjonction,  la  Lu- 
ne à  6  heures  &  demie  du  foir ,  après 
que  le  Soleil  fut  couché ,  étoit  éloignée 
de  lui  de  17  dégrés.  Elle  put  donc  in- 
conteftablement  être  vifible  ce  foir-là 
félon  toutes  les  règles,  p.  112  à  la  fin. 
Ainfi  le  mois  Pafcal  commença  le  foir 
du  Vendredi  2©  Mars.  Comptez  de  là 
14  jours ,  vous  trouverez  que  le  qua- 
torzième commença  le  Jeudi  au  foir 
deuxième  Avril,  &  le  1  <  le  Vendredi 

au  foir  troifieme  Avril ,  où  fe  fit  Taprès 
midi  l'immolation  de  la  Pâque.  La 
grande  fête  des  Azymes  tomba  le  Same- 
di. Voilà  une  fupputation  fort  jufte. 
Voyons  maintenant  celle  de  Calvifius 
qui  admet  la  Tranilation. 

L'année  3  3  de  l'Ere  Chrétienne  ,  la 
nouvelle  Lune  moyenne ,  félon  la  Pério- 
de ufuée  (  c'eft  celle  de  Calippe  )  arri- 
va chez  les  Juifs  le  Jeudi  1 9  de  Mars  à 
la  13  heure,  c'eft-à-dire,  à  une  heure 
après  midi  16  minutes.  Or  comme  cette 
heure  paiTe  midi,  le  premier  jour  du 
premier  mois  fe  transfère  au  jour  fui- 
vant, je  dis  au  Vendredi.  Mais  com- 


2l§4  Dissertation  XXIX. 
me  le  Vendredi  ne  reçoit  point  la  nou- 
velle Lune ,  le  premier  jour  eft  trans- 
féré de  nouveau  au  Samedi  1 i  Mars , 
félon  la  Période  de  Calippe ,  &  félon 
le  mouvement  moyen  &  le  véritable  de 
la  Lune.  Si  de-là  on  compte  14  jours  , 
on  arrivera  au  Vendredi  3  Avril,  Se 
on  trouvera  que  cette  année  la  grande 
fête  des  Azymes  fut  célébrée  le  Samedi 
4  d'Avril. 

Cela  fe  juftirîe  encore  de  la  fête  des 
Azymes  des  autres  années,  comme  de 
celle  de  la  29  année  de  Jefus-Chrift  _> 
qui  félon  l'une  &  l'autre  méthode  ar- 
riva le  Dimanche  17  Avril  _,  celle  de 
l'iinaée  30  qui  tomba  le  Samedi  8 
Avril  ;  &  le  bon  eft  que  s'il  y  a  quelque 
différence ,  c'eft  que  la  première  Phafe 
eft:  quelquefois  fi  éloignée  de  la  vraie 
ou  moyenne  nouvelle  Lune,  qu'elle  re- 
cule Pâque  un  jour  plus  tard  que  la 
Tranflatîon.  C'eft  ce  qu'on  voit  dans 
Tanuée  3 1  où  félon  la  Translation  le 
jour  de  Pâque  arriva  le  Lundi  2.6  Mars, 
ôc  les  Azymes  le  Mardi  27  au  lieu 
que  félon  la  première  Phafe  la  Pâque  y 
dit  l'Auteur,  s'immola  h  27,  qui  étoit 
un  Mardi ,  &  par  conféquent  les  Azy- 
mes arrivèrent  le  lendemain  Mercredi 
28  Mars. 

A  quoi  fert  donc  tout  ce  que  l'Au- 


Dissertation  XXÎX  285 
teur  a  dit  avec  tant  d'étendue  pour  re- 
lever l'exactitude  des  Juifs  à  faire  la 
Pâque  dans  le  tems  convenable;  ôc 
pour  décrier  les  Tranflations  ;  puifque 
fi  l'exactitude  confifte  à  faire  chaque 
fête  le  plus  près  qu'il  fe  peut  du  tems 
où  elles  font  fixées  par  la  Loi,  les  nou- 
velles Phafes  &  les  Tranflations  fai- 
foient  arriver  la  Pâque  dans  le  même 
jour  j  &c  que,  qui  pis  eit,  fouvent  les 
nouvelles  Phafes  la  reculoient  plus  loin 
de  fon  jour  naturel  que  les  Tranllations? 
Eft-ce  être  exact  à  obferver  les  tems  que 
de  marquer  la  nouvelle  Lune  Pafchale, 
tantôt  au  1  &  tantôt  au  5  jour  après 
fa  conjonction  avec  le  Soleil  ?  C'eft  ce 
que  faifoient  les  Juifs ,  félon  l'Auteur. 
La  Lune  depuis  fa  conjonction  s'éloi- 
gne du  Soleil  le  premier  jour  de  1 2  dé- 
grés 11  minutes,  le  fécond  de  24  dé- 
grés 22  minutes,  &  ainfi  du  relie  juf- 
qu'a  fon  plein.  Que  s'en  fuit-il  de-là? 
Une  chofe  alTez  plaifante.  C'eft  que  l'an- 
née $6  de  Jefus-Chrift  ,  la  nouvelle 
Lune  arriva  le  Vendredi  \G  Mars  à  6 
heures  trois  quarts  du  foir.  Tout  le  Sa- 
medi elle  fut  encore  invifible  :  Elle  ne 
-put  être.  vifibU  ,  dit  l'Auteur  p.  105  ,  que 
le  Dimanche  dix- huitième  de  Mars  au 
foir  quelle  fut  éloignée  du  Soleil  de  24 
de grés  j  c'eft-à-dire  de  deux  jours  en-" 


•ï86  Dissertation  XXIX. 
tiers  j  &  c'eft  alors  au  commencement 
du  troifîeme  qu'on  commença  à  comp- 
ter la  nouvelle  Lune.  Celles  des  autres 
années  ne  furent  viiîbles  de  même  qu'é- 
tant éloignées  du  Soleil  de  2.0 ,  de  1 1  8c 
de  23  dégrés,  c'eft-à-dire  de  près  de 
deux  jours  ;  &  c'étoit  à  cette  première 
Phafe  ou  apparition  que  commençoic 
la  nouvelle  Lune. 

Qui  ne  voit  donc  que  la  méthode 
des  Phafes  retombe  dans  celle  des  Trans- 
lations ,  &  que  tout  ce  que  l'Auteur 
dit  en  faveur  des  premières ,  quadre  Ci 
jufte  aux  fécondes ,  qu'il  ne  peut  dé- 
créditer les  fécondes  comme  il  tâche  inu- 
tilement de  faire  ,  qu'il  ne  détruife  fans 
y  penfer  les  premières ,  parce  qu'on  ne 
peut  prefque  jamais  obferver  les  Phafes 
fans  Translation.  11  ne  le  croit  pas  néan- 
moins ,  comme  il  paroît  par  ce  qu'il  dit 
au  fujet  de  la  Pâque  de  l'an  33.  La 
grande  fêti  des  Azymes  ,  dit- il,  p.  113, 
tomba  le  Samedi  \  ainfi  il  n'y  eut  point 
deux  fêtes  de  fuite,  qui  euffent  obligé  les 
Juifs,  Ji  en  ce  tems-là  les  Tranflations 
euffent  été  en  ufage  ,  de  transférer  la 
Pâque.  Et  pourquoi  la  fête  tomba-t-elle 
le  Samedi ,  finon  parce  que  la  nouvelle 
Lune  Pafchale  avoit  été  transférée  du 
Jeudi  19  Mars  j  où  arriva  fa  conjonc- 
tion ?  au  foir  du  lendemain ,  c'eft-à-dire* 


Dissertation  XXIX.  1S7 
au  commencement  du  Samedi ,  où  ar- 
riva fa  première  Phafe  f  Ce  fut  pour 
éviter  cette  concurrence  que  la  Tranfla- 
tion  s'étoit  faite  dès  la  nouvelle  Lune. 
11  ne  faut  donc  pas  s'étonner  s'il  n'y 
eut  point  deux  fêtes  de  fuite. 

Ainfi  l'Auteur  par  une  erreur  qui  lui 
eft  favorable  ,  fuppofe  la  Tranflation  en 
la  rejettant.  Que  coûtoit  aux  Juifs ,  dit- 
il,  p.  43  ,  qu'en  fit  la  Pâque  le  jour 
quelle  fe  rencontroiO.  Rien  fans  doute; 
mais  comme  il  l'a  reconnu  lui-même 
ci-delïus  §.  XXXII,  ils  prenoient  leurs 
mefures  de  loin  pour  la  faire  rencontrer 
dans  un  jour  commode  ,  &  qui  ne  fut 
précédé  ni  fuivi  par  aucune  fête  \  ils 
appelloient  le  14  du  mois  celui  qu'ils 
comptoient  le  14  depuis  le  premier 
Croilfant,  &  qui  étoit  en  effet  le  1 5  ou 
le  16  depuis  la  conjonction  de  la  Lune 
avec  le  Soleil. 

L'Auteur  n'a  donc  aucun  fujet  de  fe 
récrier  contre  lesTranflations ,  puifqu'il 
les  admet  lui-même  après  fon  favanc 
Rabbin  Maimonide  ,  lorfqu'il  les  ex- 
plique ;  car  il  dit  clairement ,  p.  6 S  ,  que 
la  rai  fin  pourquoi  on  diffère  la  Néomenic 
dans  le  mois  de  Tifri  j  c'ejl parce  que  la 
Lune  ne  paroit  pas  aujjl-tôt  que  les  Ta-* 
blés  le  marquent.  Cet  aveu  eft  fort  in- 
génu j  de  n  au  lieu  du  terme  différer , 


*88  Dissertation  XXIX. 
l'Auteur  fe  fût  fervi  de  transférer  ;  qui 
eft  fynonime  ou  équivalent ,  la  difpute 
étoit  finie  ;  car  fur  cette  propofition 
de  Maimonide ,  on  peut  faire  cet  argu- 
ment fans  réplique.  Différer  la  Néo- 
menie  à  un  autre  jour ,  c'eft  la  trans- 
férer y  Ôc  la  différer  ,  parce  que  la  Lune 
ne  paroît  pas ,  c'eft  la  transférer  de  la 
Conjon&ion  de  la  Lune  avec  le  Soleil 
jufqu'à  fa  première  apparition.  Or  fé- 
lon Maimonide ,  dès  le  tems  de  Moïfe , 
lorfque  la  Lune  ne  paroifloit  pas  ,  on 
différoit  la  Néomenie  jufqu'à  la  pre- 
mière Phafe  :  Donc ,  félon  les  Rabbins 
les  Tranflations  de  la  Néomenie ,  ôc 
par  conféquent  de  la  Pâque  étoient  en 
ufage  depuis  Moïfe. 

§.  VIII, 

III.  Preuve.  Que  rien  n'a  pu  empê~ 
cher  que  Je  fus  -  Çhrijl  n'aie  célébré j 
félon  la  Loi  j  la  dernière  Pâque  j  ni 
la  Tradition  des  Tranflations  _,  ni 
celle  de  la  première  Phafe. 

Comme  cette  Tradition  reculoit  la 
Pâque  loin  du  vrai  14  du  mois  où 
Moïfe  l'avoit  placée,  il  eft  fort  naturel 
de  penfer  que  ce  fut  un  fujet  de  peine 
&  ae  fcrupule  pour  les  gens  de  bien ,  <k 

que 


Dissertation  XXIX.      2S9 
que  cette  diverfité  de  fentimens  donna 
lieu  à  deux    ufages  dirîerens   dans    la 
célébration  de  la  Pâque.   L'un  de   ceux 
qui  comptant  le  14.    fur  la   vraie  nou- 
velle Lune  ,  quelque  jour  que  l'un  &c 
l'autre  arrivaient  dans  la  femaine  ,  im- 
moloient  la  Pâque  dans   le  jour   précis 
où  la   Loi   l'avoit  fixée   :    On   ne  peut 
point  fuppofer,  dit  l'Auteur  ,  p.  112.  que 
les  Juijs  ayent  été  dans   une  Jl  grande 
ignorance  de    V  Afironomie  j    qu'ils    ne 
pujjent  pas  favoir    non  -  feulement    le 
jour  où  la  Lune  étoit  ajfe^   éloignée    du 
Soleil  pour  être  vue  3  mais  encore  celui 
où  elle  étoit  en  conjonction  avec  le  So- 
leil pour  y  fixer  la  nouvelle  Lune  Paf- 
cale  ,  &c  pour  y  déterminer  le  quator- 
zième.   Depuis   Alexandre  on    ne  doit 
pas  s'imaginer  qu'il  n'y  eut  aucun  AJÏra~ 
nome  che^  les  Juifs  ;    la  Tribu    d'Iffa- 
char  y  dit  Maimonide  _,  étudioit  V ' AJlro- 
no  mie  3   p.  78.    Ils  fe  conduifoient  par 
la  Période  de  Calippe.  11  y  a  néanmoins 
apparence  que  le  nombre  de  ceux  qui 
fuivoient  ce  premier   ufage  étoit  arfez 
petit  pour  ne  pas  faire   de   différence 
lenlible  dans  le  peuple. 

L'autre  félon  la  Tradition  ,  Se  fur  le- 
quel l'ordre  public  étoit  réglé  ,  étoit  de 
ceux  qui  transferoient  la  nouvelle  Lune 
de  la  Paque  au  jour  fuivanc ,  foit  pour 

Tom.  IK  N 


xc)0  Dissertation  XXIX, 
éviter  la  concurrence  de  deux  fêtes  qui 
fe  fuivoient  ,  foit  parce  qu'ils  fixoienc 
la  nouvelle  Lune  à  la  première  Phafe, 
foit  par  quelqu'autre  raifon  que  nous  ne 
pouvons  pas  deviner. 

Je  prétens  que  Jesus-Christ  a  fait 
la  Pâque  félon  le  premier  ufage  ,  parce, 
qu'il  étoit  preffé  par  le  tems  de  fa  Paf- 
fion ,  marquée  par  fon  Père  au  lende- 
main, où  les  Juifs  dévoient  faire  la  leur 
félon  l'ufage  de  la  Tradition.  Je  me 
contenterai  de  cette  feule  preuve  tirée 
en  partie  du  principe  de  l'Auteur  ,  ôc 
fondée  d'ailleurs  fur  des  principes  in- 
conteftables.  Mais  avant  que  de  la  pro- 
pofer  je  fais  excufe  de  l'indécence  de  ce 
langage  ,  qui  ne  convient  nullement  à 
Jesus-Christ  jlajuftice&  la  vérité  fou- 
veraine  j  8c  dont  la  volonté  eft  la  règle 
de  tout  ce  qui  eft  jufte.  C'eft  une  efpe- 
ce  de  blafphême  de  prouver  que  Jesus- 
Christ  a  pu  faire  une  chofe  qu'il  a  fai- 
te félon  les  Evangéliftes  ^  comme  fi  on 
en  pouvoit  douter  ,  ou  que  la  chofe  eue 
befoin  de  preuve. 

Jesus-Christ  apuinnocemmentac- 
complir  à  la  lettre  la  Loi  de  la  Pâque  , 
c'eft-i-dire  ,  dans  le  jour  qui  félon  le 
mouvement  de  la  Lune  ,  qu'il  connoif- 
foit  bien  ,  &  qui  étoit  connu  du  public  j 
ctoit  le  quatorzième  depuis  fa  çonjon-: 


Dissertation  XXIX.  251 
ction  avec  le  Soleil.  Or  le  Jeudi  2  d'A- 
vril de  l'Année  33.  étoit  le  quatorzième, 
a  compter  depuis  le  20  Mars  où  tomba 
là  nouvelle  Lune  Pafchale.J  esus-Christ 
donc  put  célébrer  ce  Jeudi  fa  dernière 
Pâque  avec  (es  Difciples.  La  2.  propo- 
rtion efl:  fondée  fur  les  Tables  Agro- 
nomiques. Toute  la  difficulté  confifte 
dans  la  première  ,  ôc  pour  la  prouver 
je  demande  ce  qui  a  pu  empêcher  que 
Jesus-Chp.ist  n'ait  pu  célébrer  félon  la 
Loi  la  Pâque  dans  le  quatorzième  de- 
puis la  conjonction.  Ce  ne  peut  être 
que  la  Tradition  j  mais  quelle  Tradi- 
tion ?  Eft-ce  celle  des  Translations  ou 
celle  de  la  première  Phafe  f  Ce  n'efl: 
pas  déjà  la  première  ,  &  l'Auteur  ne 
m'en  défavouera  pas  *,  félon  lui  elles 
font  inouïes  ,  p.  75.  Il  n'y  en  a  aucun 
vejlige  dans  toute  l'antiquité  Judaïque. 
On  voit  dans  Jofeph  un  exemple  de  deux 
fêtes  qui  fe  juivent  immédiatement  : 
D'ailleurs  elles  font  inutiles  à  fon  gré  , 
ôc  du  coté  des  vivres  qu'on  pouvoic 
préparer  tous  les  jours  de  fêtes,  excepté 
le  Sabbat  j  8c  du  coté  des  morts  ,  que 
félon  Maimonide  _,  on  pouvoit  enterrer 
dès  le  premier  jour  de  fête  ,  p.  -2. 
pourv";  qu'on  fe  fervîc  pour  cet  office 
d.'"  1  j  c'eH:  a-dire  ,  d'un  hom- 

rr  •  :t  fujet  à  l1  Loi  de 

ij 


ic)i     Disse  rtàtion  XXIX, 
Moïfe  ;  3c  pour  le  fécond  jour  de  fête 
un  Juif  pouvoir  enterrer  un  Juif.  Elles 
n'ont  aucun  fondement  dans  l'Ecriture. 
Seroit-il pojfible  j  dit- il ,  Let.  p.  3 1.  que 
l'Ecriture    n'eut  point   preferit  ces    re-* 
gles  des  Tranflations  qu'on  devoil  faire 
des  fêtes  ;  &    qu'ayant  marqué  le  jour 
précis  de  la  Pâque  _,   elle  n'eût  point  en 
même-tems  ajouté  l'exception   _,   difanc 
par  exemple  qu'an    célékreroit  la  Pâque 
le  1 4.  du  premier  mois  _,  pourvu  que  ce 
ne  fût  ni  la  féconde  ni  la  quatrième  ■>  ni 
la  Jîxieme  férié.  Enfin  elles  font ,  dit- il , 
contraires  à  la  Loi  de  Dieu,  qui  avoit, 
p.    47.  fouvent  renouvelle  l'ordonnance 
de  faire  la  Pâque  le  jour  précis  que  la 
Loi  le  preferivoit  :  la  folemnité  de   la 
Pâque  j  dit  E^éclùel  de  fa  part ,  fe  célé- 
brera le  quatorzième  du  premier  mois  ; 
les  Juifs  ne  pouvoient   manquer    à    une 
Loi  dont  le  violement  devoit  être  puni 
de  mort.  Si  quelqu'un  étant  pur  _,   dit  le 
Livre  des  Nomh.  c.  9.  v.    13.  &  n'étant 
point  en  voyage  _,  ne  fait  pas  néanmoins 
la  Pâque  j  il  fera  exterminé  du  milieu, 
de  fon  peuple  _,  parce  qu'il  na  pas  offert 
en  fon    tems   le  facrifice  au    Seigneur, 
Tout   cela  effc  tiré   de  ce  que  l'Auteur 
allègue    contre   les  Tranflations.  Ainfi 
je  ne  doute  point  qu'il  ne  m'avoue  très- 
volontiejs ,  qu'au  moins  cette  annçe-U 


D  I  SS  E  RT  AT  I  O  N    XXIX.       295 

Jesus-Christ  n'a  du  avoir  aucun  égard 
à  la  Tradition  des  Tranflations  ,  3c 
qu'elle  n'a  point  dû  l'empêcher  de  célé- 
brer la  dernière  Pâque.  Comment  fe 
fût- il  réglé  par  des  Tranflations  inouies 
dans  toute  l'antiquité  ,  inutiles  à  leur 
fin  _,  fans  fondement  dans  l'Ecriture  , 
contraires  à  la  Loi  divine? 

Je  dis  la  même  chofe  de  la  Tradition 
de  la  première  Phafe  ou  apparition  du 
CroiOTant  :  3c  fi  l'Auteur  n'y  veut  pas 
confentir  ,  il  eft  aifé  de  l'y  contraindre 
par  cette  raifon  ;  que  dans  le  fond  la 
première  Phafe  prife  pour  la  nouvelle 
Lune  n'eft  autre  chofe  qu'une  Tranfla- 
rion  :  car  quelle  différence  y  a-t-ii  entre 
transférer  la  nouvelle  Lune  au  troisième 
jour  j  3c  différer  à  la  compter  jufqu'au 
premier  CroifTant ,  qui  fouvent  ne  pa- 
roîtque  le  troifieme  jour  ?  Ainfi  tout 
ce  que  les  Tranflations  ont  d'odieux  fe 
retrouve  dans  la  Néomenie  des  pre- 
mières Phafes  :  Si  celles-là  font  con- 
traires à  la  Loi  en  mettant  la  Paque 
hors  de  fon  jour  légitime  ,  on  doit  dire 
de  même  de  celle-ci  ,  à  moins  que  la 
même  chofe  ne  fût  permife  8c  inno- 
cente fous  le  nom  de  première  Phafe,  3c 
criminelle  3c  interdite  fous  le  nom  de 
Tranflation  j  ce  qui  feroit  fort  extra- 
ordinaire. 

Niij 


i«)4  Dissertation  XXIX. 

Je  conclus  de   là  que  rien    n'ayant 
empêché  que  Jésus- Christ  n'ait  fait  la 
dernière  Pâque  ^  ni  le  lieu  qui  n'étoit 
point  le  Temple  3  ni  le  jour  qui   étoit 
le   14.  ni  l'heure    qui  étoit  le  loir  du 
Jeudi  ,    ni  les  Translations  qui  étoienc 
des  Traditions  Judaïques  ,    ni  les  pre- 
mières Phafes  qui  font  de  pures  Tran/la- 
tions ,   ni  l'exemple  des  Juifs ,    qui  en 
les  fuivant  ne  faifoient  point  la  Pâque 
enfon  tems  :  il  l'a  donc  faite  comme  les- 
Evangéliftes  l'affurent,  Se  ce  fait  feulle? 
concilie  heureufement  ,  non-feulement 
entr'eux  ,   mais  encore  avec  les  Hiito- 
riens  Juifs  ,  qui  ne  difent  rien  qui  lui 
foit  contraire  ,    Se  avec  la  créance    de 
l'Eglife  ,  qui  en  a  toujours  fait  une  par- 
tie de  fa  Tradition.  Il  n'y  a  que  les  Rab- 
bins qui  courent  un  peu  de  rifque  dans 
cette  occafion  ,  Se  fur-tout  la  vifion  de 
Maimonide  ,   qui  a  voulu  ,  pour  ainu* 
dire  ,  confacrer  les  premières  phafes,  Se 
en  faire  un  point  de  Religion  ,  lorfqu'il 
nous  conte  que  Dieu ,  p.  51.52.  en  di- 
fant  à  Moife^ce  mois  fera  le  premier  mois,, 
lui  fit  voir  la  Lune  qui  commencoit  de 
paraître  _,  &  lui  ordonna  de  confacrer  la 
Néomenie    lorfquil  la  verroit  dans    la 
même  figure.    Mais    l'Auteur   fage   Se 
pieux  comme  il  eft,  ne  doit  point  avoir 
de  regret  à  abandonner  des  gens  enne- 


Disse  r  t  a  t  ion  XXIX.     295 

mis  de  Jesus-Christ  ,  menteurs  de  pro- 
feflion ,  Ecrivains  indignes  de  toute 
créance ,  ôc  qui  décréditent  la  vérité 
quand  ils  la  font  palTer  par  leur  plume. 
Au  pis  aller  il  ne  refufera  pas  à  Je*fus- 
Chrift  le  pouvoir  de  fe  difpenfer  de  cette 
obligation  prétendue  dans  une  occafion 
où  prefle  par  la  proximité  defaPafïion  , 
il  vouloit  donner  avant  que  de  l'abolir  , 
cette  dernière  marque  de  fon  obéifiance 
sl  la  Loi. 

§.  ix. 

V.  Preuve.  Quejijefus-Ckrijtnapoint 
fait  la  dernière  Pâque  j  il  s'enfuit 
néceffairement  cette  fauffete  que  les 
Apôtres  aujfi  ne  Vont  point  faite. 

Si  le  Jeudi  au  foir  Jefus  -  Chrift  ne 
fit  pas  la  Pâque,  c'eft  une  fuite  inévi- 
table que  les  Apôtres  ne  la  firent  point 
auiîi  ;  &  j'avoue  ,  fi  l'on  veut  que  cette 
omillion  leur  caufa  d'autant  moins  de 
peine  ,  que  ne  prévoyant  nullement  la 
mort  de  leur  Maître  ,  ils  s'attendoient 
a  la  faire  le  lendemain  avec  lui.  Mais 
comme  le  lendemain  Jefus-Chrilt  atta- 
ché à  la  Croix  rendoit  les  derniers  fou- 
pirs  à  la  même  heure  qu'on  immoloit 
Us  Agneaux  3  il  s'enfuit  2.  que  le  len- 

Niv 


Z96      Dissertation  XXIX. 
demain  les  Apôtres  ne  firent  non  plus  la 
Pâque  que  le   jour  précèdent  ,   ni  par 
confcquent  cette  année-là. 

L'Auteur  de  l'Harmonie  voit  les  in- 
convéniens  de  cette  conféquence  ,  quel- 
que parti  qu'il  prenne.  S'il   la  nie ,  on 
le  prie  de  nous  dire  quand  &  en  quel 
lieu  ils  purent  célébrer  cette  Pâque, dé- 
folés  &z  confondus  comme  ils  étoient. 
Se  rafiemblerent-ils  dans  la  même  mai- 
ion  que  le  jour  précédente  Mais  ce  fut 
à  la  mort  de  Jefus-Chrift  ou  jamais, que 
s'accomplit  la  Prophétie  dont  il  les  avoir 
menacés  :  Je  frapperai  le  Pufteur ,  &  les 
brebis  feront  difperfees  ;  &  voici  l'heure  _, 
oà    vous  féparant   &  allant    chacun  de 
votre  côté  _,  vous  me  laiffere^  tout  feuL 
Chacun  alla-t-il  donc  s'afïocier  a  quel- 
qu'autre    bande    Pafchale  ,    en    qualité 
d'ombre  ou  d'hôte  furnuméraire  ?Mais 
comment  auroient-ils  pu  feulement  fouf-' 
frir  la  vue  des  autres  Juifs  ,  qui  les  au- 
roient  reconnus  pour  les  Difciples  d'un 
homme  qui  venoit  d'être  puni  de  mort 
comme  un  faux  Prophète  ?  Comment 
la  crainte  d'être  arrêtés  ,   &  le  péril  que 
Pierre  avoit  à  peine   échappé   la    nuit 
précédente  ,  leur  eût-il  permis  de  fe  fier 
à  perfonne  ?   Dans  cette  confternation 
tout  leur  devoit  être   fufpect.  Il  n'y  a 
donc  pas  moyen  de  demeurer  dans  cette 
fuppofuioa. 


Dissertation  XXIX.  297 
L'Auteur  fans  doute  avouera ,  comme 
il  fait  dans  fon  Harmonie  ,  que  cette 
année-là  ils  ne  firent  point  la  Pâque 
figurative  ,  qui  leur  étoit  d'autant  moins 
néceiTaire  ,  qu'ils  avoient  reçu  la  vraie 
Pâque  dans  l'Euchariltie.  Mais  com- 
ment les  Apôtres  auroient-ils  connu 
dès  lors  cette  vérité  de  Religion,  que  le 
Corps  3c  le  Sang  de  Jefus-Chrift  étoient 
l'accompliftement  du  facrifice  de  la  Pâ- 
que ,  eux  qui  n'avoient  pas  alors  la 
moindre  penfée  de  la  mort  de  Jefus- 
Chrift  j  &  qui  ne  purent  jamais  la  com- 
prendre ,  quelque  foin  qu'il  prit  de  les 
en  avertir  ?  Ils  ne  connurent  ce  Myftere 
que  par  les  entretiens  qu'il  eut  avec  eux 
après  fa  Réfurrection  :  ainft  ils  furent 
convaincus  ,  félon  le  fyftême  de  l'Au- 
teur ,  que  contre  Pordonnance  expretfe 
de  Dieu  ils  avoient  manqué  cette  année- 
là  à  faire  h  Pâque  ,  Se  ils  crurent  avoir 
mérité  la  mort,  félon  les  termes  de  la 
Loi:  Si  quelqu'un  étant  pur  &  n'étant 
point  en  voyage  _,  ne  fait  pas  néanmoins 
la  Pâque  _,  il  fera  exterminé  du  milieu 
de  fon  peuple  >  parce  qu  Un  a  pas  offert 
en  fon  tems  le  facrifice  au  Seigneur.  Il 
portera  lui- même  la  peine  de  fon  péché. 
Nomb.  9.  13.  L'Auteur  leur  en  donne- 
rai-il  difpenfe  ?  Ou  bien  trouvera-t  il 
quelque  moyen  pour  les  fauver  de  cet 

N  v 


iç)î  Dissertation  XXDT. 
arrêt??  Il  les  renvoyera  peut-être  au  14; 
du  fécond  mois ,  pour  leur  faire  fup- 
pléer  ce  qu'ils  avoient  manqué  dans  le 
premier.  L'expédient  feroit  julte  j  fi  ce 
manquement  eût  pufe  réparer  par  quel- 
que caufe  qu'il  fut  arrivé  :  Mais  la  Loi 
n'accordoit  cette  reifource  qu'à  ceux  qui 
ctoient  légalement  immondes  ôc  aux 
voyageurs  abfens.  Je  ne  parle  pas  des 
Translations  extraordinaires  qui  fe  fai- 
foient  quelquefois  par  autorité  publi- 
que. Or  les  Apôtres  n'étoient  point  dans 
les  cas  de  cette  exception  ;  ils  étoienc 
purifiés  comme  Jefus-Chrift  le  recon- 
nbxc  ,  Jam  vos  mundi  efiis  ,  &  ils 
étoient  à  Jérufalem.  Ils  mériroientdone 
la  mort  pour  avoir  manqué  à  célébrer 
la  Paque. 

L'Auteur  croit  que  la  feule  propofi- 
tionde  manger  _,  après  l'Agneau  Pafchal, 
d'un  nouveau  mets  quoique  fpirituel  3 
comme  l'étoit  l'Euchariftie  ,  leur  eût 
fait  horreur  j  parce  quelle  étoit  con- 
traire à  une  coutume  qu'ils  croyoient 
fainte.  Quelle  horreur,  donc ,  &c  quel 
fcrupule  leur  devoir  caufer  le  manque- 
ment à  une  Loi,  qu'ils  dévoient  juger 
bien  plus  fainte  Se  plus  indifpenfable 
que  toutes  les  Traditions  Pharifaïques  ? 
Eft-il  poffible  que  Jefus-Chrift  allant  à 
la  mort  les  eût  abandonnés  en  proye  i 


Disse  rtation  XXIX.  299 
ces  reproches  intérieurs  ,  à  ces  remords 
^e  confcience  ,  qui  dévoient  aggraver 
d'un  (i  grand  poids  la  défolation  ÔC  la 
douleur  où  ils  étoient  déjà  plongés  ? 
Or  comme  tout  cela  eft  faux  &  impoflî- 
ble  ,  il  eft  conftant  qu'ils  ont  fait  la 
dernière  Paque  ,  &  que  Jefus-Chrift 
l'a  faite  avec  eux  avant  que  de  s'enga- 
ger dans  la  carrière  de  fa  Pailîon. 

§.  X. 

Fondement  de  l'opinion  contraire  ;    & 
1.  Autorités  tirées  des  domejliques 
de  la  Foi. 

Voilà  en  gros  le  fondement  folide 
de  l'opinion  de  l'Eglife  ,  qui  croit  que 
Jefus-Chrift  a  célébré  la  dernière  Paque 
avec  fes  Apôtres;  &  je  crois  que  l'Au- 
teur fans  faire  tort  à  la  réputation  de 
fon  efprit  &  de  fon  habileté  pouvoir  s'en 
tenir  la.  L'opinion  contraire  fe  fonde 
aufti  en  autorités  ,  en  partages  de  l'E- 
criture ,  de  en  raifonnemens  j  6c  il  eft 
jufte  de  les  examiner  pour  leur  faire 
juftice.  Mais  j'efpere  qu'on  verra  qu'il 
n'y  a  rien  de  plus  frivole  que  ces  au- 
torités ,  ni  de  plus  forcé  que  ces  paca- 
ges ,  ni  de  moins  concluant  que  ces 
raifonnemens. 

Nvj 


500      Dissertation  XXIX. 

On  fe  fert  de  deux  iortes  d'autorités; 
les  unes  tirées  des  Chrétiens ,  qui  fon? 
lesdomeftiquesde  la  foi  ;  les  autres  des 
étrangers ,  je  dis  des  Juifs  &  des   Rab- 
bins.  Nous  commencerons  cet  examen 
par  les  premières,  &c  entre  celles-ci,  par 
les  plus  anciennes,  qui  font  celles  des 
Pères.  On  brigue  leur  faveur  pour  ce 
parti  ;  mais  quoiqu'on  falïe  ,  ils  ne  lui 
font  point  propices.  Les  plus  favorables 
font  ceux  qui  n'ont  rien  écrit  de   cette 
queltion  ,  èc  qui  ainfi  demeurant  dans 
la  neutralité  n'empêchent  pas  que  cha- 
cun n'abonde  en   fon  fens.  Quelques- 
uns  ,  comme  Origene  ,  faint  Hilairec^ 
faintChryfoftome  appliquent  à    l'Eu- 
chariftie  le  fens  allégorique  de  laPâque, 
Ôc   quoiqu'ils  fe  foient    déclarés    pour 
l'opini  on  commune ,  on  ne  lailfe  pas  de 
mettre  à  profit  cette  allégorie.    Quel- 
ques autres  parmi  lefquels  on  cite  faint 
Juftin  ,   Tertulien,  faint  Irenée  de  faine 
Cyrille  ,    témoignent    feulement    que 
Jefus-Chrift  fut  crucihé  le  même  jour 
que  les  Juifs  immoloient  la  Pâque.  Ce 
qui  eft  vrai ,  mais  ce  qui  n'empêche  pas 
qu'il  ne  l'ait  pu  Elire  le  jour  précèdent, 
Il  ne  faut  pas  omettre  que  faint  Juftin  &C 
faint  Irenée  enfeignent  feulement  que 
l'Agneau  Pafchal  devoit  félon  la  Loi  être 
immolé  dans,  la  Yii|e.  de  Jérufalem;par~ 


Dissertation  XXIX.  $01 
<e  que  c'eft-lâ  où  Jefus-Chrift:  dévoie 
fourfrir  ]  l'un  &  l'autre  ne  fait  point 
mention  du  Temple.  Les  autres  Pères 
cy-deifus  nommés  font  clairement  pour 
la  dernière  Pâque  de  Jefus-Chrift. 

Mais  à  leur  défaut  on  fait  grand  fond 
fur  l'Ouvrage  d'un  Auteur  inconnu  , 
que  M.  du  Cange  a  fait  imprimer  fous 
le  titre  de  Chronique  Pafchale,  connue 
autrefois  fous  le  nom  de  Chronique 
d3 Alexandrie.  A  la  tete  de  l'Ouvrage 
il  y  a  un  grand  difeours  touchant  la 
Pâque,  tiiTîi  de  fentimens  contraires, 
comme  d'Objections  Ôc  de  Réponfes,  &c 
qui  néanmoins  eft  uni  comme  li  le  mê- 
me Auteur  y  parloir  toujours  ,  &  fans 
qu'il  y  paroilfe  aucune  autre  marquede 
diftinttion  ou  de  dialogue  que  par  la 
contrariété  des  fentimens.  Autant  qu'on 
en  peut  juger  _,  c'effc  le  fragment  d'une 
difpute  entre  un  Quartodeciman  de  un 
Orthodoxe. 

Le  premier,  pour  prouver  qu'il  fauc 
faire  la  Pâque  dans  le  14.  du  premier 
mois ,  quelque  femaine  &  quelque  jour 
qu'il  arrive  ,  cite  la  Loi  de  l'Exode  : 
Recîe  à  lege  pr&fcriptum  ejl  _,  &c.  Il 
cite  encore  l'exemple  de  Jefus-Chrift  : 
Fecit  Pafcha  hac  die  y  ideo  necejfe  efi 
ut  eodem  modo  faciam  _,   quo  fecit  Do~ 

minus,  Mais  pour  fe  difculper  de  la 


3©i  Dissertation  XXIX. 
conformité  avec  les  Juifs  ,  il  prétend 
que  depuis  la  ruine  de  Jérufalem  ,  ils 
ont  négligé  par  l'endurciflement  de  leur 
cœur  la  Loi  du  tems  de  la  Pâque ,  qu'ils 
font  avant  l'équinoxe  du  Printems.  Ec 
que  c'en:  ce  que  Dieu  leur  reproche  par 
le  Prophète  :  Leur  cœur  ejl  toujours 
dans  l'égarement  ,  aujji  dans  ma  colère 
je  leur  ai  déclaré  a\  ec  ferment  qu  ils  n  en- 
treront jamais  dans  mon  repos. 

L'Ortodoxe  ou  l'Auteur  fait  don- 
ner à  ce  Quartodeciman  un  démenti 
par  Pierre  Evêque  d'Alexandrie  ,  à  l'é- 
gard de  cette  erreur  qu'il  attribue  aux 
Juifs  ,  parce  qu'elle  retomberoit  fur 
Moïfe  ,  fur  Jofué  ,  fur  les  Prophètes. 
Et  après  avoit  allégué  faint  Athanafe  , 
il  prétend  pour  mieux  réfuter  le  Quar- 
todeciman  ,  que  Jefus-Chrifl  n'a  point 
même  fait  la  dernière  Pâque  ,  bien  loin 
qu'il  l'ait  faite  le  14.  11  cite  pour  cela 
faint  Jean  qui  n'en  dit  pas  un  mot.  Il 
foutient  qu'on  ne  peut  prouver  le  con- 
traire ni  par  les  Evangéliites  ni  par  au- 
cuns de  Apôtres  :  Quod  neque  &  fanclis 
Evangelifiis  didicimus  y  neque  quifquam 
ex  Beatis  Apojlolis  nohis  tradidit.  11 
croit  au  contraire  très- évident  par  les 
Ev.mgéliftes ,  que  Jefus-Chriit  n'a  point 
mangé  la  dernière  Pâque  ,  de  laudatis 
Evangelifiis  j  &    ex  Patrum  doclrinï$ 


Dissertation  XXIX.  30$ 
patet  omnino.  Ainfi  il  ne  conre  pour 
rien  tout  ce  que  trois  Evangéliftes  en 
rapportent. 

11  allègue  faint  Hypofite  Evêque  de 
Porto  pour  fon  parti  ,  &  il  lui  fait 
avancer  ,  comme  de  quelque  Evangé- 
lifte,  ces  paroles  prétendues  de  Jefus- 
Chrift  qu'il  n'a  jamais  dites  ;  &  qui 
pis  eft  ,  dont  il  a  dit  tout  le  contraire 
dans  trois  Evangéliftes  :  je  ne  fais  pas 
encore  la  Pâque.  Quia  non  adhue  man- 
duco  Pa/cha.  Ce  qui  eft  une  infigne  fal- 
fifi'cation. 

Il  allègue  Apollinaire  Evèque  de 
Jeraple  ,  qui  de  ce  que  quelques-uns 
eftiment  fur  le  rapport  de  faint  Mat- 
thieu ,  que  Jefus-Chrift  a  mangé  l'A- 
gneau le  14.  avec  (es  Difciples,  8c  qu'il 
a  fouffert  le  grand  jour  des  Azymes  ? 
atque  ita  dicere  Matthdtum  ,  en  con- 
clut de  cela  feul  que  leur  interprétation 
eft  donc  contraire  à  la  Loi  ,  de  que  l'E- 
vangélifte  leur  eft  oppofé  :  Unde  legl 
contraria  eft  eorum  interpretatio  Hfque 
adverfari  videntur  Evangelia.  N'eft- 
ce  pas  là  une  conféquence  fans  répli- 
que ? 

Il  allègue  enfin  Clément  d'Alexan- 
drie ,  qui  femble  fuppofer  que  le  1 4.  les 
Difciples  demandèrent  à  Jefus-Chrift 
où  il  vouloit qu'on  lui  apprêtât  la  Pi- 


'|04  Dissertation  XXIX. 
€]ue  :  Difcipulos  jlatim  edocu'u  figura 
myflcrïtim  1 4.  quâ  etiam  illum  roga- 
runt  ,  ubi  vis  pare/nus  tibi  Pafcha  man~ 
duc  are  ?  &c  qui  néanmoins  par  une  con- 
tradiction viuble  enfeigne  que  le  marin 
du  14.  où  Jefus-Chrift  fourrrit,  les  Pon- 
tifes &  les  Docteurs  l'ayant  mené  au 
Palais  j  n'encrèrent  point  dans  le  Pré- 
toire. 

11  n'en  faut  pas  davantage  pour  rejet-y 
ter  cet  Auteur  inconnu  avec  ceux  qu'il 
cite  fauflement  lotis  des  noms  illuftres  , 
ôc  qu'il  fait  parler  comme  s'ils  n'avoient 
pas  le  fens  commun.  11  faut  mettre  en 
même  rang  d'autres  Auteurs  qu'on  pro- 
duit encore  contre  la  dernière  Pâque  de 
Jefus-Chrift  .,  Se  qui  étant  d'ailleurs 
aufti  récufables  qu'ils  le  font ,  décrédi- 
tent plusletu  parti  qu'ils  ne  l'autorifent. 
Comme  Antoine  de  Dominis,  Villega- 
gnon  ,  &c.  Auiïi  on  ne  conte  pas  beau- 
coup fur  leur  autorité  ,  &  je  ne  m'y  ar- 
rêterai pas  davantage. 


Dissertation  XXIX.      ^o~$ 

§XI. 

Autorités  étrangères  contre  la  dernière 
Pâque.  Rabbins  témoins  non-receva- 
bles  touchant  les  chofes  où  Jefus- 
Chrijl  ejl  intérejje. 

Il  faut  venir  aux  autorités  étrangères 
des  Rabbins  qu'on  prend  dans  cette 
difpute  pour  arbitres  fouverains ,  ou  du 
moins  pour  témoins  irréprochables.  Ce 
nJeft  pas  qu'ils  ayent  écrit  touchant  la 
dernière  Pâque  de  Jefus-Chrift ,  ou  in- 
finué  feulement  qu'il  ne  l'a  pas  faite. 
Mais  on  reçoit  pour  confiant  tout  ce 
qu'il  leur  a  plu  écrire  touchant  les  cé- 
rémonies &  les  autres  circonftances  de 
la  Pâque  ;  Se  on  en  fait  une  règle  ,  à 
laquelle  on  applique  tout  ce  que  les 
Ecrivains  facrés  &  les  Auteurs  Ecclé- 
ilaftiques  nous  en  ont  lailfé  par  écrit. 
S'ils  en  font  différens  en  quelque  chofe, 
on  fait  grâce  aux  premiers ,  &  à  la  fa- 
veur de  quelque  violence  qu'on  leur 
fait  fourTrir  ,  on  fait  leur  conciliation 
avec  les  Rabbins.  Mais  on  traite  les 
féconds  à  la  rigueur  _,  &  fi  ce  qu'ils  ont 
écrit  de  la  dernière  Pâque  de  Jefus- 
Chrift  ne  s'accorde  non-feulement  avec 
les  fuppoficions  de  ces  Maîtres  irrefra- 


$o£      DrSSERTATlON    XXIX. 

gables  ,  mais  même  avec  toutes  lescora- 
féquences  qu'on  en  tire  ,  il  eft  rejette 
fans  rémiflion.  On  ne  peut  pas  pouffer 
plus  loin  le  refpect  &  la  déférence  pour 
les  uns,  ni  la  févérité  pour  les  autres. 

Cependant  le  témoignage  des  Rab- 
bins, dont  il  nous  relie  des  écrits  ,  eft 
marqué  de  tout  ce  qui  peut  rendre  félon 
le  Droit  des  témoins  reprochables. 

i.  Ils  n'ont  ni  vu  ni  entendu  les 
chofes  qu'ils  rapportent  ,  parce  qu'ils 
font  poftérieurs  de  plufieurs  ficelés  au 
tems  où  elles  fe  paffoient ,  ôc  aux  faits 
auxquels  on  les  applique.  Ainfi  ils  don- 
nent au  moins  un  violent  foupçon  que 
tout  ce  qu'ils  rapportent  eft  l'ouvrage 
de  leur  imagination  &  un  Roman  fait  à 
plaifir;  ou  du  moins  s'ils  font  finceres , 
ils  parlent  au  hazard  &  fur  le  rapport 
d'autrui  de  ce  qu'ils  n'ont  jamais  vu.  La 
Mifna  ,  qui  eft  le  premier  recueil  du 
Droit  Judaïque  fut  dreffée  ,  félon  Cal- 
vifius  ,  en  190.  (îx  vingt  ans  ou  environ 
après  la  ruine  du  Temple.  Le  Talmud 
de  Jérufalem  en  369.  Le  Talmud Baby- 
lonique  fut  commencé  en  476.  &  achevé 
en  506. 

Comment  après  cela  l'Auteur  de 
l'Harmonie  peut-il  fe  plaindre  du  peu 
de  créance  qu'on  donne  aux  Juifs, com- 
me Ji  des  Auteurs  ,    dit-il  p.  190.  né- 


I)lbSliRTÀTlON     XXIX.         307 

toient  pas  croyables  en  ce  qu'ils  rappor~ 
tent  des    coutumes  de  leur    nation.     Il 
reconnoit  ailleurs  que  du  tems  des  Rab- 
bins le  Temple  ne  fubfijloit  plus  ,  &  il 
pouvoir  ajouter  depuis  plufieurs  fiécles 
à  regard  de  ceux  à  qui  il  donne  le  plus 
d'autorité,  p.  155.  puifque  Maimonide  , 
dans  fon    Traité  du  Jubilé  j     dit    qu'il 
écrit  l'an  1 1 07.  depuis  la  dejlruction  du 
Temple  qui  répond  à  l'an  1 179.  de  notre 
Ere.  11  avoue    encore   que    depuis    la 
deftruction  du  Temple  les  Juifs  ne  fai- 
foient  plus  la  Pâque  ,  ni   aucun    autre 
facrifice  ,  parce  qu'ils  ne  pouvoient  fa- 
crifler  que  dans  le  Temple.  Cependant 
il  s'agit  ici  de  coutumes  qu'il  prétend 
qui  s'y  pratiquoient  ,  comme  de  l'im- 
molation de  la  Pâque,  &  il  fe  plaindra 
qu'on  ne  les  croit  pas  en  ce  qu'ils  rap- 
portent de  ces  Coutumes  qu'ils  n'ont  ja- 
mais vues.  Il  fait  plus  :  il  prétend  je  ne 
fçai  comment  que  ces     Coutumes  des 
Juifs  fe  pratiquoient  encore  de  leur  tems  , 
lors    mime   que  le  Temple  ne  fubfijloit 
plus,  Eft-ce  que  le  Temple  étant  ruiné  , 
les  Coutumes  qui  ne  pouvoient  s'obfer- 
ver  que  dans  le  Temple  étoient  encore 
en  vigueur?   11  le  faut  bien ,  puifque  les 
Rabbins  Auteurs  de  la  Mifna  &   com- 
pilateurs du  Talmud  ,  qui  vivoient  les 
uns  à  la  h  11  du  11.  iiécle  ,   les  autres  à  la. 


'3oS  Dissertation  XXIX. 
fin  du  V.  Se  au  commencement  du  VI. 
ôc  les  autres ,  comme  Maimonide,  dans 
le  XII.  ne  font ,  dit  l'Auteur  ,  qu'ex- 
pliquer ce  que  V Ecriture  dit  en  peu  de 
mots  y  comme  on  écrit  pour  ceux  qui  ont 
vu  pratiquer  les  chofes.  Toutes  les  an- 
nées ,  les  Juifs  de  ces  fiécles  V.  VI.  ôc 
XII.  voy oient  avec  quelles  cérémonies  Je 
faifoit  la  Pâquc  ,  qui  avoit  ceiTé  dès 
l'année  70.  Voila  une  étrange  préten- 
tion. 

II.  Les  Rabbins  ne  font  pas  feule- 
ment poftérieurs  au  tems  dont  il  s'agit, 
ils  font  encore  contraires  aux  Auteurs 
contemporains ,  comme  font  Philon  &c 
Jofeph  ;  on  verra  dans  la  fuite  cette 
contrariété  palpable.  Or  c'eft  une  règle 
du  bon  fens ,  que  dans  le  choix  de  plu- 
fieurs  Auteurs  qui  ont  écrit  Phiftoire  , 
on  doit  préférer  ceux  qui  ont  été  té- 
moins oculaires  des  chofes ,  ou  qui  ont 
vécu  peu  après  qu'elles  fe  font  pallées  y 
c'eft  ce  qu'il  faut  répondre  à  cette  autre 
plainte.  On  croit  ,  dit-on  p.  1 2.9.  ce 
que  les  Grecs  &  les  Romains  nous  difent 
de  leurs  propres  Coutumes  :  quelle  rai- 
fon  avons-nous  pour  croire  que  tout  ce 
quon  trouve  dans  les  Livres  des  Juifs 
touchant  leurs  cérémonies  ne  font  que  des 
contes  ?  C'eft  que  les  Grecs  &  les 
Romains  nous  rapportent  ce  qui  étoit 


Dissertation  XXIX.  309 
en  ufage  de  leur  terns  ;  &  à  l'égard  des 
chofes  qu'ils  n'ont  pas  vues  5  ils  n'a-, 
voîent  aucun  intérêt  à  les  faldfier  ,  & 
ils  s'accordent  avec  ceux  qui  en  ont  écrit 
les  premiers.  Les  Rabbins  au  contraire 
outre  les  motifs  fecrets  qui  lesportoienc 
à  falfiher  leur  hiftoire  à  caufe  des  Chré- 
tiens ,  ils  ne  conviennent  en  cela  ni 
avec  l'Ecriture  ni  avec  les  Auteurs  con- 
temporains. 

111.  Selon  une  autre  règle  de  Droite 
un  homme  convaincu  de  crime  ,  &  fur 
tout  de  parjure  &  de  faux  témoignage, 
qui  y  perfevere  encore  ,  ôc  qui  pour 
cela  a  encouru  une  note  d'infamie  3  n'ëft 
point  reçu  en  témoignage  ,  parce  qu'on 
préfume  que  celui  qui  a  été  une  fois 
menteur  &  trompeur  dans  un  rapport  5 
peut  l'être  en  tous  les  autres.  Or  on 
fait  que  la  Mifna  ,  la  Geumara  ,  &-le 
Talmud  font  remplis  de  folies  palpa- 
bles ,  de  menfonges  groiliers,  de  blaf- 
phemes  même  contre  Dieu.  Il  feroic 
infini  d'en  rapporter  tous  les  exemples 
que  ces  Livres  nous  en  fournirent  j  je 
me  contente  de  ceux  qui  regardent  la 
matière  de  la  Pâque  :  ôc  pour  agir  de 
meilleure  foi  ,  je  ne  prendrai  que  ceux 
que  l'Auteur  nous  allègue  du  plus  fag# 
de  cous  les  Rabbins  ,  Maimonide  ,  qui 
ayant  entrepris  de  ne  repréfeaterle  Tal- 


510  Dissertation  XXIX. 
mud  que  par  les  endroits  les  plus  rai- 
fonnables  ,  a  fuccombé  fous  une  diffi- 
cile entreprife  ,  8c  n'a  pu  éviter  de  dire 
encore  cent  extravagances.  Cela  fervira 
de  réponfe  à  la  plainte  du  peu  d'ejlime 
qu  on  fait  des  Juifs  ,  &  de  ce  quon  ne 
dijlingue  point  ce  qu'ils  ont  de  bon  d'a- 
vec les  chofes  fauffes  &  inutiles  dont 
leurs  Livres  font  pleins.  Cette  plainte 
eft  fort  injufte  ;  car  enfin  qui  fera  ce 
difcernement ,  &  fur  quoi  fe  doit  -  on 
régler  pour  ne  fi  pas  méprendre  ?  Qui 
ofera  fe  fier  dans  des  chofes  de  fait  a  des 
gens  qu'on  a  furpris  en  tant  de  menfon- 
ges,  Ôc  qui  jugera  fur  leur  rapport  de  ce 
que  Jefus-Chrift  a  du  ou  n'a  pas  du 
faire  ?  11  eft  vifible  que  dès  lors  ils  font 
indignes  de  toute  créance  dans  les  vérités 
même  qu'ils  avanceroient  ,  ôc  dont  on 
n'auroit  point  d'autre  preuve  que  leur 
dépofition  ,  parce  qu'il  feroit  impofiible 
de  les  démêler  d'avec  les  fauftetés  , 
dont  on  avoue  que  leurs  Livres  font 
pleins. 

IV.  Les  Rabbins  font  des  étrangers 
a  notre  égard  j  ce  iont  même  nos  enne- 
mis déclarés.  11  eft  donc  contre  l'équité 
naturelle  de  les  prendre  pour  Juges  de 
nos  dirTérens  y  &c  même  de  tirer  de 
leurs  dépofitions  des  conféquences  pour 
les  régler.  Dans  les  démêlés,    particu- 


Dissertation  XXIX.  311 
liers  le  Droit  ne  reçoit  point  les  témoi- 
gnages des  Juifs  &  des  infidèles  ;  à  plus 
forte  raifon  ils  ne  feront  pas  recevables 
dans  les  différens  de  Religion  :  Contra 
Chrijlianum  nec  Jud&us  nec  Pagamus  rec- 
tè  tcjlimonla  dicent. 

Le  V.  réproche  qu'on  leur  peut  faire  , 
fe  tire  des  caractères  particuliers  de  leurs 
menfonges.  Il  y  en  a  deux  très-recon- 
noillables,  dont  le  premier  confiiîedans 
une  contrariété  fenfible  de  leurs  Tradi? 
rions ,  à  toutes  les  circonstances  de  la 
dernière  Pâque  de  Jefus  Chrift,quie(tla 
feule  que  les  Evangéliftes  ayent  marquée* 
Sur  ce  fondement  je  prétens, félon  tou- 
tes les  apparences ,  que  pour  convaincre 
Jefus-Chrift  de  prévarication  &  pour  le 
rendre  odieux  lui  &  fa  Religion  à  toute 
la  poftérité  Judaïque  ,  ils  ont  faliihé 
leurs  coutumes,  outré*  leur  difcipline  5 
affecté  d'établir  en  règlement  le  contre- 
pied  de  tout  ce  qu'a  fait  Jefus-Chrift 
dans  fa  dernière  Pâque;  que  pour  la 
décrier  comme  un  violement  de  la  Loi  s 
les  Rabbins  ont  fabriqué  exprès  un 
fy  (terne  nouveau  de  la  H  que  ,  qui  ne 
peut  s'allier  avec  cell<  J?  Jefus-Chriffc 
a  l'égard  de  prefque  toutes  les  circonf- 
tances. 

Le  fécond  caractère  confifte  dans  une 
affectation  vifible  de  faintetc  &  de  mi^ 


5i*  Dissertation  XXIX. 
racles.  Frappés  de  tant  d'actions  héroï- 
ques ,  &  de  tant  de  merveilles  que  les 
Chrétiens  faifoient  de  tous  côtés ,  de 
avec  une  évidence  que  nulle  chicanne- 
rie  ne  pouvoir  niobfcurcirni  calomnier, 
les  Rabbins  crurent  qu'il  leur  feroit 
honteux  de  ne  pouvoir  produire  rien  de 
femblable  dans  leur  Religion  :  dans  ce 
deffein  il  eft  très  -  probable  qu'ils  ont 
groffi  5  exagéré  ,  outré  toutes  chofes  au- 
delà  des  juftes  bornes  que  la  nature  a 
mifes  aux  chofes  ;  ils  ont  porté  l'obfer- 
vation  de  la  Loi  a  une  exactitude  méta- 
phyfique  :  mais  dans  la  pratique  ils  fe 
remettent  bien-tôt  au  large.  Le  (impie 
&  le  naturel  ne  les  fatisfait  pas;  ils  veu- 
lent du  miraculeux  par  tout  j  Se  ils  en 
font  fi  mauvais  ménagers  ,  que  le  mira- 
culeux donne  fouvent  dans  l'impofliblc 
Ôc  dans  l'extravagant.  Il  ne  faut  pas 
différer  davantage  à  donner  des  exem- 
ples de  ces  deux  fortes  de  caractères^ 
les  unscalomnieux  envers  Jefus-Chriftj 
les  autres  flatteurs  &  honorables  pour 
la  Synagogue.  Mais  il  eft  jufte  de  com- 
mencer par  les  premiers  ;  8c  j'efpere 
qu'à  voir  la  contrariété  palpable  qui  eft 
entre  ces  réglemens ,  &  ce  que  les 
Evangéliftes  nous  rapportent  de  la  der- 
nière Pâque  de  Jefus-Chrift  ,  on  fera 
convaincu  que  ces  réglemens  qui  n'ont 

aucun 


Dissertation  XXIX  5 1 5 
aucun  fondement  dans  l'Ecriture  ,  ont 
été  faits  exprès  après  coup  par  les  Rab- 
bins, pour  faire  regarder  par  les  Juifs 
comme  une  profanation  digne  de  toute 
leur  horreur  ,  cette  Pâque  qu'ils  fuppo- 
fent  par  le  rapport  des  Evangéliites  , 
que  Jefus-Chrill  a  faite  comme  la  der- 
nière adtion  de  fa  vie  avant  fa  Paillon, 

§.  XII. 

Que  les  Rabbins  en  compofant  leurs  Re~ 
glemens  chimériques  touchant  la  Pâ- 
que ,   on  eu  en  vue  de  condamner  de 
facrilege  la  dernière  Pâque  de  Jefus- 
Chnft. 

La  I.  circonftance  eft  celle  du  tems. 
Jefus-Chrift ,  comme  on  Ta  vu ,  n'a  point 
fait  la  dernière  Pâque  le  même  jour  que 
les  Juifs.  Et  comme  les  Maimonides  ne 
pouvoient  pas  douter  qu'il  ne  Peut  faite 
dans  le  jour  marqué  par  la  Loi ,  qui 
étoit  le  14  après  la  conjonction  de  la 
Lune  avec  le  Soleil ,  il  faut  qu'ils  ayent 
trouvé  à  propos  de  fabriquer  un  Règle- 
ment contraire  ,  dont  il  n'y  a  aucune 
trace  dans  l'Ecriture  ,  qui  eft  de  ne 
conter  la  nouvelle  Lune  que  depuis* 
l'apparition  du  premier  Croilfant ,  qui 
Jeur  donna  le  14  un  jour  plus  tard  qu'd 
Tome  IF%  Q 


^14  Dissertation  XXIX. 
Jefus-Chrift  ;  c'eft  -  à  -  dire ,  de  rendre 
perpétuelles  les  Translations  qui  écoienç 
attachées  à  certains  jours  de  la  femaine. 
Afin  que  comme  les  trois  premiers  Evan- 
géliftes  en  rapportant  la  dernière  Pâque 
de  Jefus-Chrift  _,  n'en  avoient  pas  mar- 
qué le  jour,  quelque  jour  qu'il  l'eût  fai- 
te dans  le  vrai  14  il  l'eût  toujours  fait® 
contre  la  règle  des  Phafes ,  fans  qu'on 
pût  l'excufer  ,  en  difant  que  peut-être 
cette  année  -  là  il  n'y  avoir  point  de 
Translation  ;  ôc  qu'ainfi  Jefus-Chrift 
avoit  fait  la  Pâque  le  même  jour  que 
les  Juifs.  Pour  cela  ils  revêtent  le  San- 
hédrin d'un  pouvoir  abfolu  :  Maimo- 
nide  ,  dit  l'Auteur  p.  5  5  ,  prouve  que 
c  étoit  à  lui  à  régler  généralement  tout 
ce  qui  regardoit  le  Calendrier  ,  à  indi- 
quer les  Néomenies  _,  les  fêtes  ,  &  à  in- 
tercaler l'année  j  &c.  Si  quelqu'un  y 
eût  manqué  avec  connoiffance  _>  ne  faifant 
pas  ce  facrifice  le  j  4  jour  ordonné  par 
le  Sanhédrin,  fans  en  être  empêché  par 
quelque  impureté  légale  ou  par  un  voya- 
ge y  il  étoit  puni  de  la  peine  Chereth  > 
c'eft- à -dire,  du  dernier  fupplice.  Ainft 
au  gré  des  Rabbins  Jefus-Chrift  étoit 
digne  de  mort  pour  avoir  fait  la  Pâque 
un  jour  avant  les  Juifs.  AuJJi  Maimo- 
nide  dit  que  V obligation  de  V immoler 
l*  après-midi  de  ce  14  étpit  fi  grande  4 


Dissertation  XXJX.  $i$ 
que  fi  on  Vavoit  fait  une  heure  plutôt  _, 
cauroit  été  un  facrifice  profane ,  p.  145, 
Qu'étoit-ce  donc  de  le  prévenir  d'un 
jour  tour  entier,  finon  un  horrible  fa-? 
crilege  ?  c'eft  la  conféquence  des  Rab- 
bins j  3c  l'Auteur  qui  en  convient,  n'a 
point  trouvé  d'autre  expédient  pour 
iauver  la  vie  &  l'innocence  à  Jefus- 
Chrifl:,  que  de  nier  qu'il  ait  fait  cette 
dernière  Pâque.  Car ,  dit-il  p.  5  5  ,  quand 
le  Sanhédrin  fe  feroit  trompé  en  ordon- 
nant que  la  Pâque  ne  fe  fît  que  le  Ven- 
dredi ,  comme  les  Juifs  la  rirent,  lorfi 
quelle  fe  devoit  faire  le  Jeudi  j  où  l'on 
ïuppole  que  Jefus-Chrift  la  fit ,  les  Apô* 
très  &  l'hôte  qui  prêta  fa  maifon  fa 
Jeroient  Jlandalifés  avec  jujlice  de  ce 
qu'il  ne  s'étoit  pas  afjujetti  aux  ordon* 
nances  du  Sanhédrin. 

II.  Les  Chrétiens  auroient  pu  excu- 
fer  l'anticipation  de  Jefus-Chrift  par  la 
coutume  qu'ont  les  Juifs  de  doubler 
leurs  principales  fêtes,  c'eft-â  dire,  de 
les  célébrer  deux  jours  de  fuite  :  Ainfï 
Jefus-Chrift  avoit  le  choix  de  l'un  de 
ces  deux  jours  pour  y  célébrer  la  Pâque, 
Mais  Maimonide  &  l'Auteur  s'y  oppo- 
fent  p.  5  8.  Le  premier  dit  formellement, 
que  pendant  que  le  Sanhédrin  a  fubfifté, 
on  ne  doubloit  les  fètes  que  dans  les 
lieux  éloignés ,  où  on  ne  pouvoir  pa$ 

O  ij 


3i6  Dissertation  XXIX. 
lavoir  certainement  le  jour  qu'elles  fe 
faifoient  dans  la  Paleftine,  &  il  déclare 
que  tout  cela  elt  une  nouveauté.  Jefus- 
Chrift  donc  qui  étoit  à  Jérufalem  n'é- 
toit  point  dans  cette  efpece. 

III.  Si  Jefus-Chrift  a  fait  la  Pâque , 
c'a  été  conftamment  dans  une  maifon 
particulière.  Maimonide  dans  fon  Trai- 
té du  facrifice  de  l'Agneau  Pafchal ,  p. 
130,  décide  au  contraire  c^x  il  n  étoit 
point  permis  d'immoler  la  Pâque  ailleurs 
que  dans  le  Temple  ;  que  celui  qui  l'au- 
roit  fait  auroit  été  puni  _,  parce  que  la 
Loi  étoit  exprejje  qu'on  ne  pouvoit  im- 
moler la  Pâque  que  dans  un  lieu  choijï» 
C'eft  une  fauiTe  allégation  de  l'Ecriture. 
Mais  comme  l'Auteur  eftaflez  bon  pour 
l'allouer  ,  &  même  pour  accufer  à* étu- 
dier peu  V Ecriture  ceux  qui  entendent 
ce  lieu  choijl  de  toute  la  ville  de  Jéru- 
falem. Let.  p.  44  ,  il  a  voulu  par  piété  , 
en  niant  la  dernière  Pâque  de  Jefus- 
Chrift  ,  ôter  aux  Juifs  ce  moyen  fur  de 
fe  difculper  du  crime  de  fa  mort,  per- 
fuadé  par  tout  ce  qu'il  a  écrit  contre 
Philon  ,  qu'une  Pâque  immolée  à  l'é- 
cart dans  une  maifon  particulière ,  eft 
une  action  fchifmatique  qui  mérite  un 
châtiment  exemplaire. 

IV.  Les  deux  Apôtres  commis  pour 
préparer  la  Pâque  ne  reçurent  cetce  conv 


Dis  S  E  R  T  A  TI  O  N  XXIX.      317 

million  que  le  foir  du  14  &  ils  n'eu- 
rent pas  même  le  loifir  de  nettoyer  la 
maifon  du  pain  levé.  Cpendant  la  re- 
cherche devoit  s" en  faire  des  le  commen- 
cement du  jour  j  c'eft-à-dire  dès  le  foir 
précédent ,  qui  Jinijjbit  le  treizième,  p. 
176.  Les  fages ,  dit  Maimonide  ,  l3a- 
y oient  ainfi  ordonné.  Et  l'Auteur  plein 
d'un  refpect  religieux  pour  cette  ordon- 
nance :  Ce  foin  ,  dit- il,  ibid.  nous  paraît 
inutile  ,  mais  cétoit  pour  obéir  à  une 
Loi  rigoureufe.  Dieu  prévenoit  même  la 
juflice  des  hommes  par  des  maladies  j 
par  des  morts  fubites*  Ainfi  ce  nétoit 
pas  feulement  la  crainte  des  Magïflrats 
qui  rendoit  les  Juifs  fi  exacls.  Ils  crai- 
gnoient  les  Jugemens  de  Dieu.  Cette 
exeufe  des  Juifs  eft  une  exagération. 
Car  jamais  Dieu  n'a  ordonné  qu'on 
nettoyât  dès  le  foir  du  13  les  maifons 
du  pain  levé  ;  il  n'y  en  a  pas  un  feul 
mot  dans  toute  la  Loi.  Jamais  Dieu  n'a 
puni  perfonne  pour  y  avoir  manqué. 
Il  n'y  en  a  pas  un  feul  exemple;  Se  ces 
maladies  _,  ces  morts  fuhites  pour  ce  pré- 
tendu péché,  ne  font  que  des  terreurs 
paniques.  Tout  ce  que  Dieu  avoit  or- 
donné fur  cela  ,  eft  que  le  jour  des  Azy- 
mes qui  commençoit  des  le  foir  du  14 
il  ne  fe  trouvât  plus  de  pain  levé  dans 
les  maifons,  &c  qu'on  s'en  abftînt  pen- 

O  iij 


j i-8  Dissertation  XXIX. 
dant  fept  jours  :  Septem  diebus  a^yma 
comeditis  ,  i/2  die  primo  non  erit  fermen- 
tatum  in  domibus  veflris.  Tout  le  refte 
eft  de  l'invention  des  Rabbins ,  appa- 
remment pour  noircir  les  deux  Difciples 
Pierre  &  Jean  ,  &:  par  eux  la  dernière 
Pâque  de  Jefus-Chrift 

V.  De  ce  que  les  deux  Apôtres  Pierre 
&  Jean  ne  furent  point  au  Temple  ,  il 
fe  conclud  démonftrativement  que  la 
graifTe  de  l'Agneau  Pafcal  qu'ils  immo- 
lèrent, ne  fut  point  brûlée  fur  l'Autel 
des  holocauftes.  Autre  prévarication  de 
la  Pâque  de  Jefus-Chrift.  Car,  félon 
Maimonide ,  p.  1 5  <?  ,  onfaifoit  brûler  cl 
part  la  graijfe  de  chaque  victime»  Et 
plus  bas  :  Si  quelqu'un  eût  négligé  de 
la  faire  brûler  ,  de  forte  que  toute  la 
nuit  fe  fût  paffée  fans  quelle  eût  été 
mife  fur  V  Autel  ^  &  quainfi  elle  fût 
devenue  profane  y  il  auroit  ètè  coupable 
d'une  tranfgreffwn.  Qui  peut  donc  dou- 
ter qu'au  jugement  des  Rabbins  ,  la  der- 
nière Pâque  de  Jefus  -  Chrift  n'ait  été 
profane  ,  &c  que  lui-même  n'ait  été  un 
prévaricateur ,  ce  qui  eft  horrible  à  pen- 
ler ,  puifque  (es  deux  Difciples  ont  man- 
qué à  une  cérémonie  fi  elfentielle  ?  Et 
ne  doit-on  pas  favoir  bon  gré  â  l'Au- 
teur de  faire  tous  fes  efforts  ,  de  de  ten- 
ter même   l'impolfible  pour  empêcher 


Dissertation  XXIX.  519 
que  Jefus-Chrift  n'ait  célébré  cette  Pâ- 
que  fatale  à  fon  innocence  &c  à  fa  fain- 
reté  ?  Mais  il  vient  un  peu  tard  pour  y 
rcuflir ,  &  fon  oracle  Maimonide  ,  je 
crois ,  ne  l'en  avouera  pas. 

Aulîi  le  fondement  de  leur  opinion 
n'eft  guère  folide.  C'eft  ce  précepte  né- 
gatif de  l'Exode,  c.  23  v.  18.  Non  re- 
mancbit    adcps  folcmnitatïs    met  ufque 
mane.  La  graifje  de  l'hojlïe  qui  rnejl  of- 
ferte folemnellement  j  ne  demeurera  point 
jufquau  lendemain,  p.   159.  Si  le  Rab- 
bin n'avoit  en  vue  la  Pàque  de  Jefus- 
Chrifl ,    il   n'allcgueroit  pas  pour  l'A- 
gneau Pafchal  un  paflage  qui  ne  regarde 
que  les  victimes  qui  s'immoloient  dans 
le  Temple  ;  &c  c'eft  ici  le  fophifme  qu'on 
appelle  Ignoratio  elenchi ,  ou  prouver 
autre  chofe  que  ce  qui  eft  en  queftion. 
Mais  il  eût  cité  le  règlement  de  la  Loi 
touchant  l'Agneau  Pafchal ,  Exod.  c.  1  2. 
v.  10,  qui   porte,  qu'on  n  en  réfervera 
rien  pour  le  lendemain  \  que  s'il  en  refie 
quelque  chofe  on  le  brûlera.   Non  rema- 
nebit  quidquam    ex    eo  ufque   mane  j  fi 
quid  refiduum  fuerit ,  igné    comburetis. 
Ce  lieu  dit  la  même  chofe  que  celui 
qui  eft  cité  par  Maimonide.  Il  eft  d'ail- 
leurs   exprès  pour   la  Pâque.  Pourquoi 
ne  s'en  eit-il  pas  fervi  ?  C'eft  qu'il  avoir 
befoin  d'un  paflfage  qui  prouvât  que  la 

O  iv 


3io    Dissertation   XXIX. 
Pâque  s'immoloit  dans  le  Temple,  ôC 
que  lesDifciples  de  Jefus-Chrift  qui  l'a- 
voient    immolée    dans    une     maifon  , 
étoient  fchifmariques. 

V  I.  Les  Rabbins  ont  eu  tout  lieu 
de  croire  que  Jefus-Chrift  ne  parut  point 
dans  le  Temple ,  le  jour  qu'il  fit  avec 
fes  Difciples  la  dernière  Pâque.  Les 
Grands -Prêtres  avoient  dès  long-tems 
donné  ordre  de  l'arrêter ,  c'eût  été  ve- 
nir de  gaieté  de  cœur  fe  remettre  entre 
leurs  mains  :  Et  il  femble  ,  dit  l'Au- 
teur p.  16 1  ,  qu'il  attendit  la  nuit  pour 
venir  à  Jérufalem  _,  afin  de  nêtre  pas 
appercu  de  fes  ennemis.  En  voilà  affez  , 
félon  les  Rabbins ,  pour  le  rendre  irré- 
gulier ce  jour-là  à  l'égard  de  la  Paque. 
Le  jour  qu'on  immoloit  y  difent-ils  par 
l'Auteur  leur  Interprète  p.  262,  on  êtoit 
obligé  de  ccmparoitre  dans  h  Temple  & 
de  s'y  faire  voir  fans  doute  par  les  Prê- 
tres. 

Mais  comme  ils  favoient  par  l'E- 
vangile qu'il  l'avoit  faite  ,  ils  ne  fe  font 
pas  contentés  de  cette  irrégularité  pré- 
rendue, ils  ont  trouvé  dans  ce  défaut 
de  comparution  de  quoi  rendre  fa  Pa- 
que illégitime.  Si  on  avoït ,  dit  Mai- 
inonide  ,  immolé  dans  le  Temple  une 
victime  PafchaU  pour  un  homme  qui  fe- 
roit  hors  de  Jérufalem  ,  comme  on  pour- 


Dissertation  XXIX.  321 
roit  fuppofer  qu'ont  fait  les  deux  Dif- 
ciples  envoyés  par  Jefus-Chrift  pour 
préparer  la  Pâque ,  &  quon  eût  même 
verfé  le  fang  au  pied  de  l'Autel ,  il  ny 
pouvoit  participer  s'il  ne  venoit  que  le 
foir  à  Jérufalem  ;  //  devoit  attendre  le 
fécond  mois  pour  la  Pâque,  Cela  qua- 
dre  (î  j ufte  au  fait  dont  il  s'agit,  qu'il 
faut  fe  faire  violence  pour  ne  pas  croire 
que  ce  règlement  de  Maimonide  a  écé 
fait  exprès  en  vue  de  l'efpece  particu- 
lière de  la  dernière  Pâque  de  Jefus- 
Chrift.  Car  lorfqu'il  envoya  fes  deux 
Apôtres,  il  étoit  hors  de  Jérufalem  j  il 
n'y  vint  que  le  foir,  3c  il  trouva  une 
Pâque  préparée  en  fon  abfence. 

Àufli  l'Auteur  ne  manque  pas  d'en 
former  fa  conclufîon.  Quand  on  fuppo- 
fer  oit  ^  dit-il ,  que  Pierre  &  Jean  euffent 
été  au  Temple  le  Jeudi  après  midi  _,  & 
qu'Us  y  euffent  immolé  un  agneau  avec 
les  cérémonies  requifes  ;  Notre  Seigneur 
&  les  autres  Apôtres  n  auroient  pas  pu 
manger  de  cet  agneau  ,  n  étant  venus 
que  le  foir  à  Jérufalem,  Maimonide  dé- 
cide ce  cas  ;  &  vifiblement  afin  de  faire 
pafter  cette  Pâque  pour  un  facrifice  pro- 
fane. Mais  un  Auteur  Chrétien  en  fup- 
pofant  la  décifion  du  Rabbin  irréfra- 
gable ,  a  mieux  aimé  nier  cette  Pâque, 
que  de  l'attribuer  ainfi  deshonorée  à 

O  v 


3ii  Dissertation  XXIX. 
Jefus  -  Chrift ,  au  hafard  de  donner  la 
gêne  à  trois  Evangéliftes  qui  l'afïurent  , 
pour  les  obliger ,  non  pas  à  dire  le  con- 
traire ,  mais  au  moins  à  ne  le  dire  plus, 
ou  à  dire  route  autre  chofe.  Cela  lui  a 
paru  plus  refpechieux.  De  ce  fait ,  dit- 
il  ,  que  Notre  Seigneur  ne  vint  à  Jeru~ 
falem  que  le  foir ,  j'en  tire  cette  con- 
séquence :  qu  indubitablement  il  ne  fit 
point  la  Pâque  légale  ce  foir-là  ;  &  la 
raifon  qu'il  en  donne  plus  bas  j  eft  que 
Notre  Seigneur  saffujettiffoit  aux  cou- 
tumes des  Juifs ,  autrement  il  auroit 
feandalifé  fes  Difciples  >  &  celui  qui  le 
reçut  en  fa  maifon. 

Si  néanmoins  il  étoit  permis  de  pro- 
pofer  avec  refpedfc  fes  difficultés,  je  de- 
manderois  à  l'Auteur  de  l'Harmonie  ^ 
comment  cela  peut  s'accorder  avec  ce 
qu'il  a  reconnu  plus  haut  p.  146.  Quil 
n  étoit  pas  nécefjaire  que  ceux  qui  corn- 
pofoient  une  de  ces  Sociétés ,  allaffent 
au  Temple  ;  il  fuffifoit  quun  feul  offrit 
f  Agneau  PafchaL  Maimonide  le  dit  en 
termes  formels.  Après  cela  3  qui  oferoic 
en  doutera  Au  lieu  d'un  fubititut,  en 
voilà  deux  que  Jefus- Chrift  envoyé  of- 
frir la  Pâque  pour  lui  &  pour  fa  fa- 
mille :  &  Maimonide  n'eft  pas  encore 
coiffent. 

JLAureur  me  répondra  fans  doute  que 


Dl  SSERT  AT  IO  N    XXIX.     3  2.  J 

ce  Rabbin  parle  ici  de  l'immolation 
où  un  feul  fuffifoit  pour  plufieurs;  mais 
que  dans  la  déciflon  du  cas ,  il  parle  de 
la  comparution  perfonnelle  que  chacun 
devoir  faire  ce  jour-la  dans  le  Temple 
à  quelqu'heure  du  matin. 

Et  fur  quoi  eft  fondée  la  nécefiïté  de 
cette  comparution/*  Sur  cette  ordon- 
nance de  l'Exode ,c,  1 3 .  v.  17,  citée  par 
Maimonide ,  au  rapport  de  l'Auteur  ; 
Apparebit  omne  mafculinum  tuum  co- 
ram  Domino  Deo  tuo.  Tous  les  mâles 
qui  font  parmi  vous  viendront  fe  pré" 
fenter  devant  le  Seigneur.  Je  veux  croire 
pour  l'honneur  de  l'Auteur  que  ce  n'eft 
pas  lui  qui  a  retranché  de  ce  paifage  ces 
mots  eifentiels  ,  ter  in  anno ,  trois  fois 
Vannée  ;  mais  qu'il  n'a  fait  que  le  rap- 
porter tel  qu'il  eft  dans  (on.  Rabbin. 
Car  ces  mots  malicieufement  fupprimés, 
font  voir  qu'il  s'agit  en  cet  endroit  des 
trois  fêtes  principales  des  Juifs ,  des 
Azymes ,  de  la  Pentecôte  3  Se  des  Ta- 
bernacles ,  &:  que  l'obligation  de  s'y 
préfenter  devant  le  Seigneur ,  étoit  égale 
Se  de  même  forte  pour  toutes  les  trois. 

Or  les  Juifs  avoient  toute  la  femaine 
depuis  chacune  de  ces  trois  fêtes  pour 
fatisfaire  à  cette  obligation.  Cela  paroît 
par  l'exemple  de  Jefus-Chrift  même, 
qui  n'arriva  à  Jcrufalem  pour   la  ïhtc 


314   Dissertation    XXîX. 
des  Tabernacles ,  que  vers  le  milieu  de 
Ja  femaine ,    c'eft-à-dire ,   le    14  jour: 
Jam  autem  fejlo  médian  te.  Joan.  c.  7.  14. 
On  avoit  donc  le  même  tems  pour  fe 
repréfenter  à  la  fête  des  Azymes  :   Et 
rien  n'eft  plus  chimérique  que  de  retfer- 
rer  ,  comme  ont  fait  les  Rabbins  ,  cette 
obligation  dans  la  matinée  de  la  veille 
de  la  fête,  à  l'exclufion  de  toute  la  fe- 
maine. Pourquoi  n'eût-on  pas  fansfaic 
à  cette  ordonnance ,  en  fe  faifant  voir 
le  lendemain  de  l'immolation ,  qui  étoic 
la  grande  fête  des  Azymes  ?  Et  com- 
ment tant  de  millions  d'hommes  eufTent- 
ils  pu  dans  l'efpace  d'une  feule  matinée 
pafler  en  revue  des  Prêtres  ?  Y  étoit- 
on  obligé  même  au  péril  de  fa  vie  ?  Lqs 
fouverains   Prêtres    avoient  des  long- 
tems  envoyé  par  tout  des  ordres  exprès 

Î>our  arrêter  Jefus-Chrift  en  quelque 
ieu  qu'il  fe  trouvât.  Etoit-il  obligé , 
fous  peine  d'être  interdit  de  la  Pâque , 
de  s'aller  mettre  entre  les  mains  de  (es 
mortels  ennemis  ?  Enfin  cette  repréfen- 
tation  commandée  dans  l'Exode ,  trois 
fois  l'an  ,  ne  confiftoit  pas  feulement 
dans  cette  comparution  paiTagere  ;  mais 
a  fe  rendre  à  Jcrufalem  pour  y  célébrer 
les  trois  principales  fêtes. 

Qui  peut  donc  douter  après  cela,  que 
«es  règlement  fantaftiques  couchant  la 


Dissertation  XXIX.  315 
Pâque.,  n'ayent  été  drefles  après  coup 
par  les  Rabbins  ;  non  pour  prouver  que 
Jeius-Chrift  ne  Ta  pas  faite,  les  Hifto- 
riens  de  fa  vie  l'allurent  trop  claire- 
ment j  mais  pour  la  convaincre  de  facri- 
lege,  en  établitfant  des  conditions  arbi- 
traires qu'ils  favoient  bien  qu'il  n'avoic 
pas  obfervées. 

§.  XIII. 

Suite  des  Règle  mens  faits  à  plaijlr  par 

les  Rabbins  pour  cenfurer  la  dernière 

Pâque  de  Jefus-  Chrijl, 

s>  Vil.  Jefus- Chrifl:  dans  fa  dernière 
33  Pâque  n'a  point  obfervé  les  cérémo- 
35  nies  avec  lefquelles ,  félon  les  Rab- 
»  bins ,  on  préparoit  les  pains  azymes, 
95  p.  178.  Maimonide,  dit  l'Auteur  , 
«  donne  plufieurs  avis  pour  cela.  On 
35  prenoit  de  la  farine  de  deux  ou  trois 
3>  jours  bien  refroidie.  Ce  Docteur  exa- 
35  mine  ce  qui  peut  contribuer  à  la  fer- 
3>  mentation  ,  ou  à  l'empêcher.  Les 
3>  Juifs  prennent  garde  encore  aujour- 
3*  d'hui  que  le  bled  dont  ils  font  les  ga- 
3J  lettes  Pafchales  ou  azymes  n'ait  point 
33  été  mouillé  :  quand  un  fac  a  fervi  le 
33  refte  de  l'année ,  ils  le  découfent  &C 
v  le  lavent.  Ils  ne  le  mettent  pas  fur  un 


32.6  Dissertation  XXïX. 
îî  cheval  nud  ,  de  crainte  que  la  fueur 
33  ne  mouille  la  farine  ,  &  ne  la  faiTe 
s?  fermenter  par  la  chaleur.  Ils  font  pi- 
33  quer  de  nouveau  les  meules  des  mou- 
33  lins.  L'eau  dont  ils  fe  fervent  pour 
33  pétrir  ne  doit  point  avoir  vu  le  foleil 
s;  depuis  24  heures.  Ils  paîtriflent  dans 
33  un  lieu  frais  hors  du  foleil.  Toutes 
33  ces  précautions  fe  prennent ,  afin  que 
>3  la  pâte  ne  s'échauffe  point  jufqu'à  fe 
33  fermenter  j  Se  qu'ainfi  on  eût  dans  fa 
33  maifon,  au  lieu  d'azymes,  du  pain 
33  levé.  L'Auteur  leur  donne  à  toutes 
une  approbation  fans  téferve,  lorfqu'il 
ajoute  tout  de  fuite,  ibid.  Que  cela  fc 
jît  du  tems  de  Notre  Seigneur.  Cejl  une 
chofe  incontefiable.  La  Loi  y  obligeoit. 
Je  ne  fai  de  quelle  Loi  il  veut  parler. 
Au  moins  la  Loi  de  Moïfe  ne  dit  pas  un 
feul  mot  de  toutes  ces  obfervations  fu- 
perftitieufes  ;  &  il  n'eft  guère  plus  ex- 
cufable ,  lorfqu'il  en  prend  pour  garant 
ce  difeours  de  faint  Paul  :  Purifîe%-vous 
donc  du  vieux  levain ,  afin  que  vous 
foye^  une  pâte  nouvelle  &  toute  pure  j 
comme  vous  deve\  être  purs  &  fans 
aucun  levain  d'iniquité. 

Quoi  qu'il  en  foit ,  on  peut  aiïurer 
fans  crainte ,  que  les  deux  Apôtres  dépu- 
tés pour  préparer  la  Pâque ,  n'ont  rien 
fait  de  tout  ce  que  Mairnoiiide  a  jugé 


Dissertation  XXIX.  $ij 
tiéceflaire  pour  faire  le  pain  azyme  ;  de 
c'eft  même  pour  donner  lieu  de  faire 
cette  réflexion  que  l'Auteur  a  rapporté  fi 
exactement  tout  le  détail  de  cette  bou- 
langerie. Ainii  ces  deux  Difciples  ont 
fait  manger  à  Jefus  -  Chrift  &  à  leurs 
confrères  du  pain  levé ,  ou  qui  pouvoit 
n'avoir  pas  toutes  les  conditions  du  pain 
azyme;  &  par  conféquent  cette  Pâque 
a  été  profane. 

V 111.  Entre  les  cérémonies  Pafchales , 
il  eft  jufte  de  donner  un  rang  particulier 
à  celle  que  je  vais  citer,  comme  étant 
une  des  plus  effentielles.  C'eft  qu'on  R- 
nilïbit  tellement  le  fouper  par  l'Agneau 
Pafchal  3  qu'après  en  avoir  mangé ,  on 
ne  goûtoit  plus  de  rien.  A  la  fin ,  dit 
Maimonide,  p.  268,  on  mange  de  la  chair 
de  V Agneau  au  moins  de  la  groffeur  d'u- 
ne olive  j  &  après  on  ne  goûte  plus 
de  rien  j  afin  que  le  banquet  finiffant 
par  là  j  le  goût  de  la  chair  de  l'Agneau 
Pafchal  refte  plus  long  -  tems  dans  la 
bouche,  L'Auteur  en  conclut  que  Jefus- 
Chrift  qui  a  inftitué  l'Euchariftie  à  la 
fin  du  fouper  ,  n'avoit  point  mangé 
l'Agneau  Pafchal  ;  parce  ,  dit-il  p.  268 , 
que  fi  Notre  Seigneur  avoit  mangé  l'A- 
gneau Pafchal  avant  defe  lever  de  table , 
il  auroit  feandalifé  fes  Apôtres  lorfquil 
s'y  remit  j  &  qu'il  leur  propofa  un  autrt 


lji8  Dissertation  XXIX. 
repas.  Il  devait  être  fpirituel  ce  repas , 
dira-t-on.  Il  ejl  vrai.  Mais  les  Apô- 
tres ne  favoient  pas  ce  que  Notre  Sei- 
gneur alloit  faire  \  &  la  feule  propor- 
tion de  manger  de  nouveau  leur  auroit 
fait  horreur ,  comme  étant  contraire  à 
une  coutume  qu'ils  croy 'oient  fainte.  Cette 
expreflion  eft  un  peu  violente.  Mais 
qu'il  ne  s'alarme  point  tant.  Il  y  a  tout 
lieu  de  croire  ,  non  que  linftitution  de 
l'Eucharift-ie  auroit  été  un  violement  de 
la  Tradition  rapportée  par  Maimonide; 
mais  que  cette  Tradition  prétendue  a 
été  fabriquée  par  Maimonide  ,  ou  par 
les  autres  Rabbins ,  en  vue  de  l'inftitu- 
tion  de  l'Euchariftie.  Cet  endroit  qui 
nous  eft  fi  cher  &  fi  vénérable  ^  ce  Sa- 
crement ,  la  fource  de  toute  la  fainteté 
qui  eft  dans  l'Eglife  ,  leur  a  paru  trop 
beau  Se  trop  commode  par  la  date  de 
fon  inftitution,  pour  n'en  pas  faire  une 
horrible  prévarication.  C'eft  ce  qu'ils 
ont  fait  par  ce  Règlement  fantaftique , 
dont  il  ne  paroît  aucune  trace  dans  l'E- 
criture :  Que  la  dernière  chofe  au  on 
mangeoit  fut  la  chair  de  l'Agneau  Paf- 
ehal  dont  on  devoit  conferver  le  bon  goût , 
pag.  170. 

Car  en  quel  endroit  de  l'Ecriture  eft- 
il  preferit  qu'on  dévoie  finir  le  fouper 
par  un  morceau  çje  la  chair  de  l'Agneau  ?, 


Dissertation  XXIX.    315 

te  quelle   fainreté   les   Apôtres   trou- 
voient-ils  dans  cette  coutume  ?  Etoit- 
ce  ,  comme  dit  Maimonide  p.  268  ,  en 
ce  que  le  banquet  finirent  par  là  ,   le 
goût  de   la  chair  de   l'Agneau  Pafchal 
refloit  dans  la  bouche  ?  Us  avoient  donc 
bien  perdu  leur  tems  à  l'école  de  Jefus- 
Chrift,  &  ils  avoient  bien  mal  profité 
de  fes  inftructions ,  de  n'avoir  pas  ap- 
pris de  lui  ce  que  l'Apôtre  a  enfeigné 
depuis  aux  Corinthiens ,  c.  8.  v.  18.  Que 
le  manger  ne  fait  rien  pour  nous  rendre 
faints  &  profanes ,  agréables  ou  odieux 
aux  yeux  de  Dieu.  Efca  nos  non  com- 
mentât Deo.   On  ne  peut  aceufer  les 
Apôtres  d'une  plus  grofîiere  ignorance  ; 
ôc  c'efl:   alors  après  plus  de  trois   ans 
d'inftru&ion  ,  que  Jefus-Chrift  auroit 
eu  lieu  de  la  leur  reprocher  bien  plus 
vivement  que  dans  une  autre  occafion  : 
Adhuc    &    vos    Jine    intelleclu    ejlis  ? 
Ave^-vous  donc  encore  à  l'heure  qu'il  eft , 
Jî  peu   d'intelligence  î  En  effet ,  c'étoit 
une  conféquence  naturelle  de  ce  qu'il 
leur  avoit  enfeigné  autrefois ,  que  ce 
qui  entre  dans  l'homme  par  la  bouche, 
n'efl   pas  ce   qui  le  fouille  :  Non  quod 
intrat  in  os,    hoc  coinquinat  hominem\ 
ni  par  conféquent  ce  qui  le  rend  faint. 
Suppofons    néanmoins   qu'ils    ayent 
trouvé  une  grande  dévotion  à  confer- 


3$o  Dissertation   XXIX. 

ver  long-tems  le  goût  de  la  falive  de 
l'Agneau  Pafchal  ;  auroient-ils  pu  fans 
impiété  préférer  une  Tradition  Juive 
à  un  précepte  de  Jefus-Chrift  3  &  fe 
feandalifer  d'une  nouvelle  proportion 
de  manger  ,  qu'il  leur  fit ,  &c  qui  leur 
auroit  fait  perdre  le  goût  de  l'agneau  ? 
Ils  ont  allez  réfuté  ce  foupçon  inju- 
rieux par  ce  qu'ils  ont  fait  en  d'autres 
occafions.  Accoutumés  par  leur  Maître 
a  n'avoir  que  du  mépris  pour  les  Tradi- 
tions Pharifaïques ,  ils  ne  faifoient  point 
<ie  fcrupule ,  ni  de  manger  fans  avoir 
lavé  Leurs  mains  5  ni  de  rompre  des  épis 
entre  leurs  mains  le  jour  du  Sabbat , 
quand  ils  avoient  faim.  Grands  attentats 
au  jugement  des  Pharifiens. 

Mais  ils  n'ont  jamais  témoigné  plus 
hautement  la  déférence  univerfelle  qu'ils 
avoient  pour  toutes  les  paroles  de  Jefus- 
Chrift,  que  dans  la  Synagogue  de  Ca- 
pharnaiim.  Jefus-Chrift  fans  adouciffe- 
ment  leur  propofa  à  eux  &:  aux  Juifs  fa 
chair  à  manger  &  fon  fang  à  boire  ; 
propofition  qui  fembloit  violer  directe- 
ment toutes  les  Loix  naturelles  &  civi- 
les. Cependant  lorfque  les  autres  Dif- 
ciples  &  les  Juifs  révoltés  contre  cette 
idée ,  fe  retirèrent  de  fa  compagnie ,  les 
feuls  Apôtres  demeurèrent  fermes  dans 
la  foumiflion  >  &  ils  dirent  tous  à  Je- 


fus-Chrift  par  l'organe  de  faint  Pierre  : 
Seigneur  _,  où  irons  -  nous  ?  Vous  ave% 
les  paroles  de  la  vie  éternelle.  Er  on 
s'imaginera  que  s'il  eût  propofé  feule- 
ment un  morceau  à  manger  après  l'A- 
gneau Pafchal ,  ils  s'en  feroient  fcanda- 
lifés  jufqu'à  en  être  frappés  d'horreur}, 
Quelle  eue  été  leur  bizarrerie  de  rece- 
voir avec  une  pleine  déférence  une  pro- 
portion ,  qui  n'étant  point  expliquée, 
fembloit  choquer  les  bonnes  mœurs  , 
ôc  tous  les  fentimens  d'humanité  ,  ôc 
de  fe  foulever  contre  une  autre  ,  dont 
toute  l'énormité  confiftoit  à  violer  une 
Tradition  Pharifaïque  ? 

L'Auteur  doit  réparation  d'honneur 
aux  Apôtres  j  pour  leur  avoir  attribué 
à.  tous  une  difpofition  d'ame  envers  Je- 
fus-Chrift  j  dont  a  peine  Judas  eût  été 
capable.  Et  il  feroit  inutile  de  répon- 
dre,  que  comme  Jefus-Chrift,  ni  eux 
ne  mangèrent  point  l'Agneau  Pafchal, 
la  proportion  de  manger  l'Euchariftie 
ne  put  les  fcandalifer;  car  il  y  a,  ce  me 
femble,  une  grande  imprudence  à  faire 
dépendre  la  créance  ck  la  profonde  vé- 
nération des  Apôtres  pour  toutes  les 
paroles  de  Jefus-Chrift  ,  d'une  fuppofi- 
tion  auili  hafardeufe  ,  pour  ne  pas  dire 
aufli  fa  11  (Te  ,  que  celle  qu'il  n'a  pas  fait 
la  dernière  Pâque. 


33*   Dissertation    XXIX. 

On  peut  réduire  toutes  les  Traditions' 
des  Pharifiens  à  deux  efpeces.  Les  unes 
étoient  vaines ,  inutiles  6c  fuperftitieu- 
fes  ,  comme  celle  des  ablutions  généra- 
les &  fréquentes  de  tout  ce  qui  fervoit 
à  leur  ufage.  Les  autres  étoient  péril- 
leufes  &  damnabies  même  pour  la  conf- 
cience  ,  &  c'étoient  les  fautfes  interpré- 
tations des  Commandemens  de  Dieu  ; 
comme  eft.  celle  du  quatrième  touchant 
l'afîiftance  que  les  enfans  doivent  à  leurs 
pères  &  à  leurs  mères.  Jefus-Chrift  re- 
proche aux  Juifs  les  unes  &c  les  autres 
dans  l 'Evangile,  en  les  traitant  de  pré- 
ceptes arbitraires,  de  de  Traditions  hu- 
maines. Il  élevoit  fes  Apôtres  dans  cet 
efprit;  &  quelques-uns  l'ayant  averti 
que  les  Pharifiens  s'étoient  feandalifés 
de  cette  parole  :  Ce  qui  entre  dans  la 
bouche,  ri  eft  pas  ce  qui  fouille  l'homme  ; 
il  leur  répondit  :  Laiffe\  -  les  là  :  ce 
font  des  aveugles  qui  en  conduifent  d'au* 
très. 

Or  qui  peut  nier  que  le  précepte  de 
finir  le  repas  de  la  Pâque  par  l'Agneau 
Pafchai,  en  forte  qu'on  ne  goûte  plus 
d'aucun  mets  9  p,  268,  &c  cela  afin  que 
le  goût  en  refte  plus  long-tems  dans  la 
bouche  ,  que  ce  précepte ,  dis-je  ,  ne  foit 
une  Tradition  vaine,  Se  que  ce  ne  foit 
même  une  fotte  fuperftition  de  la  croire 


Dissertation  XXIX.  3 3 $ 
fainte.  On  ne  peut  donc  pas  prérendre 
que  les  Apôrres  eulfent  plus  déféré  aux 
Traditions  des  Pharifiens  j  qu'à  la  doc- 
trine de  leur  Maître ,  &  que  fi  lui- 
même  ne  s'y  fut  pas  fournis,  ils  en 
auroïent  pris  le  même  fcandale. 

IX.  Lorfqu'on  lit  ces  paroles  de  faint 
Marc  :  Sur  le  folr  il  vint  avec  les  dou\e 
Apôtres,  ôc  celles-ci  de  faint  Luc: 
L'heure  du  fouper  étant  venue  il  fe  mit 
à  table  _,  &  les  dou\e  Apôtres  avec  lui  : 
On  ne  peut  fe  former  d'autre  idée ,  finon 
qu'ils  commencèrent  le  fouper  Pafchal 
au  commencement  de  la  nuit ,  c'eft-à- 
dire  entre  fix  ou  fept  heures  du  foir.  Et 
comme  Jefus-Chrift ,  en  fe  mettant  à 
table  dit  d'abord  aux  Apôtres  qu'il  avoit 
toujours  defiré  avec  ardeur  de  mangée 
cette  Pâque  avec  eux  :  Et  chm  facla  effet 
kora  difeubuit ,  &  ait  illis  :  Dejïderio  de- 
flderavi  hoc  Pafcha  manducare  vobif- 
cum>  Luc.  c.  21.  v.  14.  1 5.  on  fe  repré- 
fente  qu'on  commença  le  fouper  par  l'A- 
gneau Pafchal  ;  ôc  on  donne  le  tort  à 
l'Auteur ,  qui  ne  fait  dire  ces  paroles  à 
Jefus-Chrift  ,  qu'après  fouper,  lorfqu'il 
voulut  inîtituer  le  Sacrement  de  l'Eucha* 
riftie  ,  p.  264.  C'efl  dans  le  tems  de  cette 
inflitution  j  félon  faint  Luc  même  _,  qu'il 
dit  qu'il  avoit  defîré  de  manger  cette- 
Pâaue  j  dont  il  ne  devo'u  plus  manger 


334  Dissertation  XXIX. 
avant  fa  mort.  Il  n  étoit  donc  plus  quef 
tion  de  la  Pâque  légale  qui  s' étoit  faite  y 
fi  elle  fe  fit ,  dans  le  premier  repas  ;  ce 
n  étoit  point  >  dis-je  a  f  Agneau  Pafchal 
que  Jefus  -  Chrijl  avoit  en  vue,  11  me 
permettra  de  lui  dire ,  qu'il  fe  trompe 
en  tout  cela.  Mais  il  y  aura  lieu  plus 
bas  de  reprendre  cette  matière. 

Qu'ont  fait  les  Rabbins  fur  cela  ?  Ils 
n'ont  pu  fe  réfoudre  à  lailTer  palTer  im- 
punément une  circonftance  (1  innocente 
ôc  "fi  conforme  à  la  Loi.  Pour  en  faire 
un  crime  à  Jefus-Chrift ,  ils  ont  ordonné 
que  la  Tradition  porteroit  :  Que  la  Pâ- 
que ne  fe  mangeoit  que  vers  le  minuit  9 
&  qu'on  pouvoit  la  manger  jufquau 
point  du  jour ,  p.  17Z.  Ce  que  Jefus- 
Chrift,  qui  étoit  à  minuit  chez  Caïphç 
ou  dans  le  Jardin  des  Oliviers  n'avoit 
eu  garde  d'obferver.  Mais  qu'y  a-t-il 
de  plus  extravagant  que  cette  ordon- 
nance ,  de  quelque  coté  qu'on  la  confé- 
déré ?  Il  ne  faut  que  fe  fouvenir  de  la 
première  Pâque  pour  la  réfuter.  Les 
premiers  nés  furent  tués  par  toute  l'E- 
gypte juftementâ  minuit  :  Dum  nox  in 
fuo  curfu  médium  iter  perageret.  Les 
Jfraclites  preffés  fans  relâche  par  les 
Egyptiens  ,  partirent  à  la  même  heure. 
Etoit  -  ce  donc  pour  eux  un  tems  de 
manger  l'Agneau  Pafchal  ?  Il  eft  vifible 


Dissertation  XXIX  33$ 
que  dans  l'incertitude  du  moment  où 
paflferoit  l'Ange  exterminateur ,  qui  écoit 
comme  le  fignal  de  leur  départ ,  ÔC 
pour  n'être  pas  furpris,  ils  le  mangèrent; 
le  plutôt  qu'ils  purent,  &  même,  com- 
me portoit  le  commandement, avec  pré- 
cipitation ,  feftinanter ,  étant  même  en 
le  mangeant  dans  la  pofture  et  dans  l'é- 
tat de  voyageurs  prêts  à  partir.  D'ail- 
leurs il  faut  confidérer  que  l'immola- 
tion de  la  Paque  fe  faifoit ,  félon  Jo- 
feph  ,  depuis  trois  heures  jufqu'à  cinq, 
tk  que  cette  dernière  heure  du  jour  juf- 
qu'à fix  étoit  employée  à  l'apprêter  ,  Se 
à  la  mettre  en  état  d'être  mangée,  pour 
n'être  pas  obligé  de  faire  cette  cuifine 
le  jour  du  Sabbat,  où  tomboit  fouvenc 
la  fête  de  Pâque ,  comme  elle  y  tomba 
en  effet  l'année  que  Jefus-Chrift  mou- 
rut. Par  quelle  raifon  myftérieufe  donc 
les  Juifs  auroient-ils  différé  jufques 
vers  le  minuit,  de  manger  une  viande 
cuite  &  apprêtée  fix  heures  auparavant  ? 
Au  moins  la  Loi  leur  commandoit  ex- 
preffément  de  manger  du  pain  fans  le- 
vain le  foir  du  14  jour  du  premier 
mois.  Or  ils  n'étoient  obligés  d'en  man- 
ger pour  la  première  fois  qu'au  repas  de 
l'Agneau  Pafchal.  Primo  menfe  ,  quarto, 
décima  die  menjîs  ad  vefperam  a\yma 
fomedetis,  Exod,  c.  iz.  y.  18,  Si  donc 


$ $6    Dissertation  XXIX. 
ils  n'eufFent  mangé  la  Pâque  que  vers  le 
minuit,  ils  auroient  pu  contre  la  Loi 
manger  du  pain  levé  le  foir  du  14,  de- 
puis 6  heures  jufqu'au  fouper  Pafchal. 

X.  Une  autre  irrégularité  pour  les 
Rabbins,  &  un  obftacle  invincible  pour 
l'Auteur  à  la  dernière  Pâque  de  Jefus- 
Chrift,  eft  ce  que  dit  faint  Matthieu, 
que  Notre  Seigneur  ne  coucha  pas  cette 
nuit  à  Jérufalem ,  &  qu'après  avoir 
foupé,  il  alla  fur  la  montagne  des  Oli- 
viers. Car  comme  on  étoit  obligé  cette 
nuit  -  là  de  coucher  à  Jérufalem  ,  on  en 
peut  conclure  j  que  ce  n  étoit  donc  pas  la 
nuit  où  fe  mangeoit  la  Pâque.  p.  166, 
Où  eft-ce  que  faint  Matthieu  allure  que 
Jefus-Chrift  ne  palTa  pas  à  Jérufalem  la 
nuit  de  la  dernière  Cène  ?  J'avoue  qu'il 
alla  fur  la  montagne  des  Oliviers  j  mais 
il  n'y  coucha  pas  :  les  foldats  le  rame- 
nèrent à  Jérufalem ,  Se  il  y  palTa  cette 
douloureufenuit  dans  la  maifon  deCaï- 
phe.  Ainfi  rien  n'empêche  de  ce  côté-là 
que  Jefus-Chrift  n'ait  pu  manger  la  der- 
nière Pâque. 

Mais ,  félon  les  Rabbins  ,  Y  Agneau 
Pafchal  ne  fe  mangeoit  que  vers  le  mi- 
nuit. Or  Jefus-Chrift  fortit  bien  aupara- 
vant de  Jérufalem  ,  p.  z6y.  Je  l'avoue 
çncore.  Mais  ce  précepte  de  ne  manger 
la  Pâque  qu'à  minuit,  ne  paroît,  comme 


Dissertation  XXIX.  3 57 
je  le  répète,  qu'une  Tradition  inventée) 
Se  faite  à  plaifir  pour  convaincre  do 
prévarication  la  dernière  Pâque  de  Je- 
ius-Chrift.  Ou  fi  elle  étoit  effective  ,  il 
Ja  faut  ranger  parmi  les  vaines  Tradi- 
tions qui  n'avoient  aucun  fondement 
dans  l'Ecriture ,  Se  pour  lefquelles  Je- 
fus-Chrift  n'avoit  que  du  mépris.  Tour, 
ce  que  l 'Ecriture  preferit  touchant  le 
sems  de  la  manducation  ,  eft  y  que  cette 
nuit  -  là  les  Hébreux  dévoient  manger  de 
la  chair  rôtie.  Et  edent  carnes  noble  illâ 
ajfas  igni.  Exod.  c.  12.  8.  Or  dans  le 
tems  de  l'Equinoxe  3  auquel  la  Pâque 
étoit  attachée  ,  la  nuit  commençoit  dès 
les  6  heures  du  foir ,  ôc  au  coucher  du 
foleil.  On  avoit  donc  dès-lors  la  liberté 
«le  commencer  le  feftin  Pafchal, 

XI.  Voici  un  Règlement  qui  eft  au 
moins  fondé  fur  l'écorce  de  la  Loi ,  je 
dis  fur  le  dehors  de  la  lettre,  Elle  dé- 
fend aux  lfraclites  de  porter  dehors  au- 
cune partie  de  la  chair  de  l'Agneau  Paf- 
chal :  Nec  efferctis  de  carnibus  ej us  foras  % 
ibid.  v.  46.  ce  qui   s'explique  de  foi- 
meme  par  l'ordre  qui  précède  immédia- 
tement, de  le  manger  tout  entier  dans  la 
même  maifon  :  In  una  domo  comedetur* 
La  Loi  donc   leur   défendoit  d'en  en- 
voyer dehors  quelque  part  à  leurs  amis  % 
comme  ils  avoient  accoutumé  d'en  ufeç 
Tome  IF.  P 


$$8  Dissertation  XXIX. 
dans  leurs  feftins  j  8c  pour  figurer  l'obli- 
gation de  n'accorder  la  Communion 
qu'à  ceux  qui  font  dans  l'Eglife  Catho- 
lique ,  dont  chaque  maifon  ctoit  la  fi- 
gure ,  8c  de  la  refufer  à  ceux  qui  en 
font  féparés  par  rhéréfie  5  ou  par  le 
fchifme. 

Les  Rabbins  toujours  excefîifs  dans 
leurs  Commentaires ,  ont  étendu  cette 
défenfe  jufqu'à  la  chair  de  l'Agneau 
mangée  8c  demi  digérée  ;  8c  par  cette 
raifon  ils  ont  obligé  les  Juifs  de  pafTer 
cette  nuit-là  a  Jerufalem ,  parce  qu'auiîi- 
tôt  que  la  chair  de  la  Pâque  avoir  été 
portée  hors  des  enceintes  de  cette  ville, 
elle  devenoit  fouillée,  p.  172.  Or  en 
fortant  après  foupé ,  ils  Pauroient  portée 
dehors  dans  leur  eftomach.  On  ne  peut 
pas  porter  plus  loin  le  rafinement.  Qu'ar- 
riva-t-il  ?  C'eft  que  Jefus  -  Chrift  qui 
entendoit  autrement  cette  Loi  que  les 
Rabbins  fortit  de  la  ville  avec  fes  Dif- 
ciples  après  le  fouper  Pafchal  ;  il  pa(Ta 
le  torrent  de  Cedron ,  il  fut  jufqu'a  Geth- 
femani  ,  village  fitué  fur  le  mont  des 
Oliviers  ,  8c  entra  dans  un  Jardin  où  il 
fut  pris.  Qui  peut  douter  après  un  fi 
manifefte  violement  de  la  défenfe  des 
Rabbins ,  que  la  chair  de  FAgneau  Paf- 
chal ,  que  lui  8c  (es  Difciples  avoient 
mangé,  ne  devînt  tout  d'un  coup  irn.^ 


Dissertation  XXIX.  3 3 9 
pure  &  profane  dans  leur  efëomach  ?  C'efl: 
au  moins  le  compte  &  la  prétention  des 
Rabbins.  Mais  l'Auteur  lage  ôc  pieux  > 
comme  il  eft,  ne  fouffrira  pas  un  fi 
grand  fcandale ,  &  il  l'empêchera  bien. 
Il  ne  peut  pas  faire  en  forte  que  cette 
nuit-là  Jefus-Chrift  ne  foit  point  forti 
de  Jérufalem.  Mais  pour  le  fauver  de 
la  profanation  fulminée  par  les  Rabbins , 
il  ne  confentira  jamais  qu'il  ait  mangé 
l'Agneau  Pafchai  :  De  ce  que  dit  faine 
Matthieu  ,  que  Notre  Seigneur  ne  cou- 
cha pas  cette  nuit  à  Jérufalem ,  &  qua- 
près  avoir  foupé  il  alla  fur  la  montagne 
des  Oliviers  \  j'en  puis  conclure  que  ce 
nétoit  donc  pas  la  nuit  oh  fe  mangeoit 
la  Pâque  ,  on  et  oit  obligé  cette  nuit-là 
de  coucher  à  Jérufalem.  p.  166, 

XII.  Enfin  les  Rabbins  feveres  cen- 
seurs de  la  dernière  Paque  de  Jefus- 
Chrift,  ont  obfervé  que  Pierre,  au  vu 
êc  fu  de  fon  Maître,  s'éroit  muni  d'u- 
ne épée  a  tout  événement,  lis  n'ont  pas 
manqué  de  faire  fur  cela  un  Règlement, 
qui  défend  aux  Juifs  de  rien  porter  les 
jours  de  fêtes ,  non  pas  même  le  cou- 
teau avec  lequel  ils  dévoient  égorger 
l'Agneau  Pafchai,  p.  171.  Ils  l'atta- 
choient  à  fes  cornes  ou  à  fa  toifon.  L'Au- 
teur approuve  cette  ordonnance.  Ce 
aétoit   pas  9  dit  -  il ,    une  fuperflition 

Pij 


540  Dissertât  ion  XXIX. 
vainc  ;  ôc  il  l'autorife  par  la  défenfe 
étroite  dans  Jérémie  de  porter  des  far- 
deaux les  jours  de  fêtes  ou  de  Sabbat ,. 
ôc  de  les  tranfporter  hors  de  fa  maifon^ 
Nolite  port  arc  pondéra  in  die  fabbati  ; 
nolite  ejicerc  onera  de  domibus  vejlris  , 
c.  17.  v.  21 ,  22.  Il  eil  vrai  que  la  con- 
clufion  s'étend  mille  fois  plus  loin  que 
la  preuve  ?  Car  quelle  proportion  y  a- 
t-il  entre  un  couteau  qu'on  porte  en  fa 
poche,  ôc  de  lourds  fardeaux  qu'on  ne 
peut  porter  que  fur  fes  épaules  ?  J'aime- 
rois  autant  dire  qu'il  leur  étoit  défendu 
«le  porter  aufli  leurs  habits  qui  pefoient 
plus  qu'un  couteau.  N'importe,  l'in- 
clination fuppléera  au  défaut  de  la  rai- 
fon  }  ôc  les  Rabbins  auront  toujours 
convaincu  faint  Pierre  d'une  grande  pré- 
varication d'avoir  porté  mie  épée ,  un 
jour,  qui  après  la  manducation  de  l'A- 
gneau Pafchal ,  devoit  être  pour  lui  ^ 
pour  fon  Maître ,  6c  pour  £gs  Collè- 
gues le  grand  jour  des  Azymes. 

Je  laille  toutes  les  autres  Traditions 
Rabbiniques ,  qui  ne  regardent  point 
notre  fujet,  ôc  qui  ne  font  fondées  que 
fur  l'autorité  des  gens  qui  n'en  ont  point 
parmi  nous ,  ôc  qui  étant  décriés  par 
leurs  menfonges  n'en  doivent  point 
avoit  par  toute  la  terre.  Je  m'étonne 
feulement  de  ce  qu'on  les  approuve ,  dô 


Dissertation  XXIX.  5 4 1 
ce  qu'on  s'efforce  de  canonifer  j  pour 
ainfi  dire ,  ces  vaines  Traditions  fous 
le  nom  de  Coutumes;  qu'on  y  foumet 
Jefus-Chrift  même,  tk  que  fur  l'auto- 
rité de  ces  ennemis  de  l'Eglife,  on  re- 
jette des  Traditions  qui  y  ont  été  re- 
çues dès  le  commencement. 

§.  XIV. 

Réponfe  à  tout  ce  qu'on  peut  alléguer  ^ 
pour  difculper  les  Juifs  de  la  fuper- 
cherie  d-e  leurs  prétendus  Reglemens 
touchant  la  Pâque. 

Voilà  douze  Chefs  eiïentiels  rappor- 
tés par  FAuteur  dans  fon  Traité  Hifto- 
rique  de  la  Pâque,  fans  compter  ceux 
qu'il  n'a  pas  cités  ;  car  je  lui  fais  vo- 
lontiers ma  déclaration ,  que  je  ne  perds 
pas  le  tems  a  lire  ces  fortes  de  Livres. 
Je  prétends  que  félon  toutes  les  apparen- 
ces ils  ont  été  fabriqués  exprès  par  les 
Rabbins ,  poar  avoir  de  quoi  calom- 
nier la  dernière  Pâque  de  Jefus-Chrift, 
&:  l'accufer  de  profanation  &  de  facri- 
lege.  Il  me  reprochera  peut-être  que 
c'eit  moi  -  même  qui  les  calomnie  ,  & 
que  je  fuppofe  ce  qui  ell  en  queftion, 
pout  avoir  lieu  de  leur  impofer  ce  mau- 
vais deffein.  Que  pour  faire  voir  qu'ea 

P  iij 


54i  Dissertation  XXIX. 
cela  ils  n'ont  jamais  fongé  ni  à  Jefus- 
Chrift ,  ni  à  fa  dernière  Pâque  ,  ils  ne 
lui  ont  jamais  appliqué  ces  Reglemens 
pour  le  convaincre  de  les  avoir  violés  ; 
mais  qu'ils  fe  contentent  de  les  rappor- 
ter comme  une  partie  de  leurs  Coutu- 
mes, en  laifTant  aux  Chrétiens  d'en  fai- 
re ,  fi  bon  leur  femble ,  l'application  à 
qui  il  leur  plaira. 

Je  réponds  déjà  que  les  Rabbins  n'é- 
toient  pas  fi  mauvais  politiques ,  que 
de  s'attirer  par  ces  applications  mali- 
gnes la  haine  8c  la  persécution  des  Prin- 
ces Chrétiens  fous  lefquels  ils  vivoient. 
Ils  avoient  déjà  afTez  de  peine,  odieux 
comme  ils  étoient  à  tous  les  peuples,  à 
fe  maintenir  par  leur  fîlence  dans  la  paix 
qu'on  leur  accordoit.  Mais  ce  qu'ils 
n'ofoient  pas  écrire,  rien  ne  les  empê- 
choit  de  le  débiter  en  fecret  dans  les 
maifons,  &  même  dans  les  Synagogues 
à  des  gens  qui  étoient  de  ferment  de  ne 
rien  révéler  de  ce  qui  s'y  pafioit  j  de  il 
ne  faut  pas  s'étonner  fi  les  Juifs  abufés 
par  ces  mauvais  Maîtres ,  ont  conçu  de 
confervent  encore  tant  d'horreur  pour 
Jefus-  Chrift  ,  Se  pour  fa  Religion. 

D'ailleurs,  pour  me  difculper  de  la 
pétition  de  principe  que  l'Auteur  pour- 
roit  m'imputer,  je  veux  bien  lui  rendre 
compte  des  moyens  dont  je  me  fers  pour 


Dissertation  XXIX.  345 
les  accufer  de  ce  méchant  artifice  j  &  je 
ne  crains  point  de  l'exciter  à  leur  faire 
juftice. 

Le  1 .  moyen  eft ,  que  l'Ecriture  ayant 
ordonné  la  Pâque  avec  toutes  les  céré- 
monies ôc  toutes  les  circonftances  qui 
s'y  dévoient  obferver  ;  la  plupart  de  ces 
Reglemens  Rabbiniques  font  contraires 
à  l'Ecriture  &  incompatibles  avec  fes 
ordonnances.  C'eft  ce  qu'on  verra  dans 
la  fuite  j  quoique  l'Auteur  ait  écrit  far 
le  fujet  des  Pâques  d'Ezéchias  ^  d'Ofias 
&  d'Efdras,  que  ce  que  nous  difent  les 
Rabbins  ejl  Ji  conforme  à  l'Ecriture  ^ 
au  on  ne  le  peut  point  prendre  pour  des 
ficlions.  Trait,  p.   129. 

Le  2  eft ,  que  les  autres  Reglemens 
qui  ne  paroiffent  pas  formellement  op- 
pofés  à  l'Ecriture  ,  font  des  additions 
arbitraires ,  qui  n'y  ont  aucun  fonde- 
ment ,  non  plus  que  dans  Jofeph  ni  dans 
Philon  ,  qui  font  leurs  Hiftoriens  ;  Sz 
elles  font  telles  que  les  Rabbins  n'ont 
pas  eu  foin  de  les  retenir  dans  les  bor- 
nes du  vraifemblable  j  &  même  du  pof- 
fible. 

Le  5.  eft  l'oppofition  fi  jufte  &  Ci  me- 
furée  qui  eft  entre  ces  Reglemens  pré- 
tendus ,  &  toutes  les  circonftances  de  la 
dernière  Pâque  de  Jefus-Chrift  j  car  il 
vy  a  pas  fait  une  démarche  qui  ne  foit 

Piv 


»44  Dissertation  XXIX. 
condamnée  par  une  Loi  contraire,  fous 
peine  dépêché  & fouvent  de  mort.  Ainfi 
il  faut  qu'ils  l'ayent  fuivi  pas  à  pas,  pour 
faire  après  coup  de  toutes  fes  actions  au- 
tant de  tranfgreflions  capitales  -y  ou  que 
par  un  hafard  fans  exemple  ,  toutes 
leurs  Traditions  fe  foient  trouvé  oppo- 
fées  à  tout  ce  qu'a  fait  Jefus-Chrift  j  ou 
qu'enfin  Jefus-Chrift  ait  affecté  de  pren- 
dre dans  fa  conduite  le  contraire  de  leurs 
Traditions.  Or  comme  le  hafard  ne 
peut  avoir  lieu  dans  une  fi  longue  fuite 
d'actions  &c  de  défenfes ,  &  qu'on  ne 
peut  d'ailleurs  attribuer  a  Jefus-Chrift 
un  deffein  fi  bas ,  que  de  violer  fans  né- 
ceflité  exprès  les  Traditions  des  Juifs  , 
il  ne  refte  autre  chofe,  finon  que  pour 
décrier  les  actions  de  Jefus-Chrift,  les 
Kabbins  ont  fabriqué  exprès  des  Re- 
^lumens  tout  contraires. 

Quelques  vioîens  que  foient  ces  foup- 
çons ,  je  ne  les  donne  néanmoins  que 
pour  des  foupçons  qui  ne  démontrent 
peut-être  pas  entièrement  la  mauvaife 
Foi  des  Rabbins ,  mais  qui  la  rendent 
au  moins  très-probable.  Mais  je  fou- 
nens  qu'il  y  a  affez  de  lumière  pour 
donner  à  un  Auteur  Chrétien  de  grands 
fujets  de  défiance,  qu'il  peut  y  avoir 
de  la  fupercherie  dans  une  contrariété 
{}  exacte  entre  ces  Reglewens  des  Rab- 


DlSSERTATI   ON    XXIX.     % 45 

bins  &  les  circonftances  de  la  dernière 
Pâque  de  Jefus-Chrift  \  Se  pour  l'obli- 
ger à  ne  faire  pas  ce  partage  injufte 
entr'eux  &  les  Evangéliftes ,  de  pren- 
dre les  Traditions  de  ceux-là  pour  des 
principes ,  &  les  témoignages  de  ceux- 
ci  pour  des  objections. 

Mais  autant  qu'ils  fe  font  appliqués 
à  noircir  par  leurs  Traditions  la  der- 
nière Paque  de  Jefus  -  Chriffc ,  autant 
ont-ils  eu  de  foin  de  relever  la  fainteté 
de  la  leur  par  des  circonftances  toutes 
miraculeufes^  indignes  par  l'un  &  par 
l'autre  d'être  écoutés  &  d'être  reçus  en 
témoignage  par  les  Chrétiens  dans  les 
différends  qu'ils  ont  à  démêler  enfem- 
ble  touchant  la  Paque  de  Jefus-Chrift 
fk  les  autres  dogmes  de  leur  Religion. 
C'eft  ce  fécond  caractère  de  merveilles 
&  de  fainteté  qu'il  me  refte  à  juftifler, 
pour  convaincre  les  Rabbins  d'être  de 
faux  témoins ,  par  les  menfonges  ridi- 
cules qu'ils  ont  mêlés  dans  leurs  Tra- 
ditions. 

§.  XV. 

Fauffe    cxaCïuude     du  Sanhédrin   dans 

l'obfervation  de  la  nouvelle  Lune 

de  chaque  mois, 

I!  faut  commencer  par  la  premiers 


34^  Dissertation  XXIX. 

cérémonie  j  qui  éroit  de  déclarer  la 
nouvelle  Lune ,  ou  le  premier  jour  du 
mois  Nifan  ,  parce  que  c'eft  de-là  que 
dépend  le  14  où  fe  faifoit  l'immolation 
de  la  Pâque.  On  nous  fait  voir  ,  Traité 
Hift.  p.  5 1  ,  qu'en  cela  leur  exactitude 
allait  jufquau  fcrupule.  Ils  avoient 
deux  moyens  pour  s'affurer  de  la  nou- 
velle Lune.  Le  premier  étoit  de  con- 
fulter  les  Tables  Aftronomiques.  Le 
fécond  étoit  d'obferver  la  première  ap- 
parition de  la  Lune  où  ils  avoient  ac- 
coutumé de  la  fixer  :  tous  deux  en  ufa- 
ge  ,  quoique  l'un  ou  l'autre  fût  absolu- 
ment inutile.  Car  (1  les  Tables  mar- 
quoient  infailliblement  la  nouvelle  Lu- 
ne ,  quel  befoin  avoient-ils  de  l'obfer- 
vation/*  C'eft  qu'il  étoit  efTentiel  qu'on 
ne  célébrât  la  Néomenie  que  par  l'or- 
dre du  grand  Sanhédrin  :  or  les  Tables 
Aftronomiques  étoient  ou  pouvoient 
être  entre  les  mains  de  tout  le  monde. 
Tout  le  monde  pouvoit  de  même  obfer- 
ver  le  premier  CroifTant  fans  erreur. 
Mais  pour  faire  dépendre  du  Sanhédrin 
la  nouvelle  Lune  ,  il  envoyoit  fur  les 
hautes  montagnes  âçs  exprès  pour  l'ob- 
ferver  j  il  la  fixoit  fur  leur  rapport  à 
fon  jour  ,  &  le  chef  du  Sanhédrin  pro- 
nonçoit  à  haute  voix  Mechudas  _,  c'eft- 
à-dire3  le  jour  de  la  Néomenie  eft  con- 


Dissertation  XXIX  347 
facré  ;  &  le  mot  Mechudas  retentifloit 
aufli-tôt  par  toute  la  ville.  Toutes  les 
obfervations  particulières  étoient  fans 
autorité  ,  de  n'étoient  comptées  pour 
rien. 

On  voit  d'abord  que  cette  méthode 
étoit  fujette  à  de  grands  abus.  Car  com- 
me le  Sanhédrin  n'étoit  pas  infaillible, 
s'il  fe  Fût  trompé  dans  la  détermination 
de  la  Néoménie  ,  étoit-on  obligé  de  le 
fuivre  ?  Oui  fans  doute.  Ce  que  le 
Sanhédrin  avoit  ordonné  touchant  la. 
confécration  de  la  Néoménie  _,  bien  que 
fondé  fur  quelque  erreur  j  &  fait  avec 
imprudence  ou  par  violence  ,  devoit 
s y exécuter  ,p.  54.  Quoi ,  contre  la  difpo- 
fîtion  même  de  la  Loi  ?  Qu'étoit  donc 
devenue  cette  exactitude  fcrupuleufe ,  8c 
qui  alloit  jufqu'à  la  Religion  ;  puif- 
qu  après  tout  >  la  Néoménie  ,  8c  par 
conséquent  la  Pâque  dépendoit  de  la 
fantaiile  du  Sanhédrin  ,  fi  ce  n'eft  peur- 
être  que  la  Loi  même  ne  lui  donnât  dif- 
penfe  de  violer  fes  préceptes  f  Aufli  il 
ne  manquoit  pas  de  ce  pouvoir,  8c  le 
voici,  comme  prétend  Maimonide,  bien 
marqué  dans  le  Lévirique,  ch.  25,  37.  Ce 
font- là  ,  dit  Dieu  à  Moïfe,  les  fêtes  que 
vous  indiquerez.  On  ne  peut  qu'on  ne 
s'inferive  en  faux  contre  ce  Commen- 
taire qui  détruit  fon  texte.  C'efl:  au  con- 

P  vj 


$ 4-5  Dissertation  XXIX. 
traire  une  ordonnance  expreffè  de  célé- 
brer les  fèces  dans  les  propres  jours  qui 
leur  font  aiïîgnés  dans  ce  Chapitre.  Le 
texte  porte  à  la  lettre  ;  Voilà  les  jours 
d'ajfemblées  j  que  vous  appellerez  des 
afj'emblées  faintes  .  .  .  Vous  y  fere^  cha- 
que chofe  en  fon  jour:  Rem  diei  in  die 
fuo.  Lors  donc  que  le  Sanhédrin  maï- 
quoit  d'autres  jours  pour  les  fêtes  que  la 
Xoi  n'avoit  preferites  ,  les  Juifs  fi  reli- 
gieux obfervateurs  de  la  Loi,  pouvoient- 
îls  balancer  un  moment  à  prendre  parti 
«entre 'Dieu  &  le  Sanhédrin  ? 

Or  ils  dévoient  regarder  la  Néome- 
-nie  fixée  à  la  première  Phafe  de  la  Lune, 
comme  un  violement  de  la  Loi ,  qui  l'at- 
tache au  contraire  à  fa  conjonction  avec 
le  Soleil.  Car  de  cette  conjonction  à  la 
première  apparition  il  y  a  quelquefois 
deux  jours  entiers  d'intervalle.  Ce  n'ér 
toit  donc  plus  faire  chaque  fête  en  fon 
jour  5  ni  chaque  cérémonie  en  fa  fête  : 
Rem  diei  in  die  fuo.  N'importe.  11  fal- 
îoit  fuivre  le  Sanhédrin  ;  &  pour  ôter 
tous  les  ferupuies ,  Lorfque  Dieu  dit  à 
Moïfe  :  Ce  mois  fera  le  premier  des  moisy 
il  lui  fit  voir  la  Lune  qui  commencoit 
•de  paroître  ;  &  il  lui  dit  que  lorf qu'il 
laverroit  dans  la  même  figure  >  il  con- 
fëLCrât  laNéomenie ,  /?.  5 1 ,  $  1.  C'eft  Mai' 
^nfionide  qui  rend  ce  témoignage  •;  Aur 


Dissertation  XXIX.  344 
torité-au-deiliis  de  toute  exception.  Qui 
eût  ofé  après  cela  condamner  une  prati- 
que que  Dieu  même  avoit  ordonnée  ?  Il 
n'y  a  fans  doute  que  la  révélation  qui 
ait  pu  apprendre  à  ce  Rabbin  une  Tra- 
dition dent  l'Ecriture  ne  parle  point , 
&  qu'en  fuivant  le  texte  on  auroit  lieu 
de  placer  plutôt  dans  le  8  ou  le  9  du 
mois ,  à  caufe  du  précepte  qui  fuit  im- 
médiatement 5  Que  les  Hébreux  fe  pour- 
voient dès  le  iOj  d'un  agneau  pour  la 
Paque.  Mais  il  faut  faire  un  acte  de  foi 
pour  croire  Maimonide. 

Après  tout ,  ces  paroles  de  Dieu  à 
Moïfe  regardent  toute  la  République , 
&  ne  reftraignent  point  au  Sanhédrin 
le  pouvoir  de  déclarer  la  Néomenie. 
Ce  qui  manque  donc  à  cet  ordre  ,  eft 
fuppléé  par  un  autre ,  au  rapport  dti 
même  Auteur  :  Moïfe  >  dit-il,  p.  60 , 
avoit  reçu  cet  ordre  fur  la  montagne  de 
Sinaïy  que  pendant  que  ce  Tribunal  fub- 
fijleroit ,  on  déclarât  la  Néomenie  ^  lorf- 
que  la  Lune  auroit  paru  ,  &  que  dans 
la  fuite  des  tems ,  lorfquil  n'y  auroit 
plus  de  Sanhédrin ,  on  n'eut  plus  d'égard 
aux  Phafes  de  la  Lune  ,  mais  aux  feules 
Tables  Ajlronomiques ,  comme  nous  f ai" 
fins  à  préfent.  En  vérité  ,  ce  Rabbin 
n'oublie  rien  j  &  il  a  pourvu  à  tout.  Car 
•enfin  il  étoit  un  peu  fcandaleux  qu« 


5  5©       Dl  S  SERT  ATION    XXIX. 

Dieu  en  donnant  à  Moïfe  un  ordre  ab- 
folu  ôc  fans  limitation,  n'eût  pas  prévu 
que  les  Juifs  tomberoient  un  jour  dans 
un  état  où  il  leur  feroit  impoflible  de 
lui  obéir.  Il  a  donc  fallu  le  rendre  con- 
ditionnel ,  &  en  reftraindre  la  vigueur 
à  la  durée  &  au  règne  du  Sanhédrin. 
Rien  n'eft  plus  exa&. 

Mais  je  craindrois  que  cette  exactitu- 
de même  ne  fît  ériger  Maimonide  en 
Prophète  des  chofes    paiïees  j  Se  que 
cet  ordre  prétendu  daté  du  mont  Sinaï 
n'eut  été  compofé  après  coup  vers  la 
fin  du    12  fiecle.  Car    qui  croira  que 
Moïfe  eût  averti  le  Sanhédrin ,    qu'il 
viendroit  un  tems  où  le  Sanhédrin  mê- 
me  ne  feroit  plus,  &  par  conféquent 
où  toute  la  République  feroit  renverfée? 
Tous  les  Juifs  n'ont-ils  pas  été  perfua- 
<{és  que  l'alliance  que  Dieu  avoir  faite 
avec  eux  par  Fentremife  de  leur  Législa- 
teur étoit  éternelle,  fondés  fur  ces  pa- 
roles &  fur  plusieurs  autres  femblables  : 
Paclum   efl  fempiternum  j   paclum  falis 
femphernum.  N'en  coûta- 1- il  pas  la  vie 
à  faint  Etienne  pour  avoir  prononcé  ce 
blafphème  prétendu  pour  tous  les  Juifs  : 
Que  Je/us  de  Nazareth  détruira  ce  lieu 
faint  y  Se  ce  qui  eft  encore  plus  effroya- 
ble ,  qu'il  changera  les  ordonnances  que 
Moïfe  a  laijfées  aux  Juifs  j  A  et,  6 .  1 4. 


Dissertation  XXIX.  351 
&  par  conféquent  robfervation  de  la 
première  Phafe  de  la  Lune  ?  Ne  fut-ce 
pas  même  ce  qui  fit  conclure  la  mort 
de  Jefus-Chrift  ,  que  la  terreur  panique 
qu'ils  eurent  que  tous  les  Juifs  croyant 
en  lui ,  il  ne  reftât  plus  perfonne  pour 
défendre  la  ville  Se  le  Temple,  &  que 
les  Romains  venant  dans  un  11  fâcheux 
contre-tems  ne  ruinaient  l'un  &  l'autre 
avec  toute  la  nation  :  Et  ventent  Romani> 
&  tollent  nojlrum  locum  &  gentem.  Ce- 
pendant voici  un  Rabbin  qui  nous  dit 
froidement ,  qu'on  s'attendoit  à  cette 
révolution  dès  le  mont  Sinaï_,  plus  de 
24  ou  25  fiecles  auparavant,  5c  qui 
nous  en  fait  la  Prophétie  environ  1 100 
ans  après  qu'elle  eft  arrivée;  mais  ces 
prédictions  Rabbiniques  demandent  une 
déférence  aveugle ,  cV  non  pas  des  dif- 
euffions  critiques.  Continuons  donc  la 
déclaration  de  la  nouvelle  Lune. 

§.   XVI. 

Incommodité  inutile  des  ohfervations  ocu- 
laires ;  prodiges  incompréhenjibles  de 
vîtejje  dans  les  ohfervations  de  la  nou- 
velle Lune  j  &  dans  les  mejfagers  de 
la  Né  orne  nie. 

Avant  que  de  palTer  outre,  il  faut 


*j5i  Dissertation  XXIX. 
qu'on  me  développe  un  embarras  que  je 
trouve  en  mon  chemin.  C'eft  une  con- 
tradiction qui  faute  aux  yeux.  On  re- 
connoît,  p.  6o,  que  la  Synagogue  navoit 
point  de  privilège  particulier  qui  la  ren- 
dît infaillible  dans  la  déclaration  des 
nouvelles  Lunes.  Mais  >  dit-on,  p.  Gi  , 
elle  ne  Je  pouvoit  pas  tromper  en  fe  fer- 
yant  de  Tables  défeclueufes  &  de  Cy- 
cles imparfaits ,  puifquelle  rien  avoit 
point  du  tout.  Du  tems  de  Notre  Sei~ 
gneur  on  ne  regloit  pas  les  fêtes  Juives 
par  des  Tables  &  des  Cycles  ;  cétoit 
par  la  feule  vue  de  la  première  Phafc 
de  la  Lune  qu'on  regloit  les  mois ,  & 
par  conféquent  toutes  chofes.  Comment 
peut-on  accorder  ce  paradoxe  avec  ce 
qu'on  a  reconnu  plus  haut  après  Mai- 
monide ,  p.  53,  que  chaque  mois  le  San- 
hédrin recherchoit  par  les  principes  de 
V AJlronomie  3  non- feulement  le  tems  que 
la  Tune  devoit  paroitre  ,  mais  encore 
toutes  fes  différentes  dïfpofitions  ;Ji  elle 
feroit  inclinée  vers  le  Septentrion  ou  vers 
le  Midi  ;  fi  elle  paroîtroit  grande  ou 
petite  ;  comme  elle  tourneront  la  pointe 
de  fes  cornes  :  &  cefl  par- là  que  les 
Juges  reconnoiffoient  fi  ce  qu'on  leur  rap- 
portoit  étoit  conforme  à  la  vérité.  Les 
règles  ou  les  principes  de  l'AuTonomie 
ae  comprennent  -  ils  pas  les  Tables  & 


Dissertation   XXIX.     355 
les  Cycles  Agronomiques  ? 

Je  demeurerai  donc  dans  cette  fé- 
conde fuppofition  j  8c  je  remarquerai, 
fur  la  foi  du  même  Rabbin ,  qu'on  en- 
voyoic  fur  les  hautes  montagnes  des 
perfonnes  de  bonne  vie  &  dignes  de  foi , 
p.  5  3 ,  pour  découvrir  la  Lune.  Car  on 
ne  fe  iioit  pas  à  toutes  fortes  de  gens9 
de  on  ne  fe  contentoit  pas  qu'ils  mon- 
taiïent  fur  le  haut  du  Temple  3  qui  étoit 
lui-même  fitué  fur  une  montagne.  Ce- 
pendant ,  dit  Maimonide  ,  le  grand 
Sanhédrin  examinoit  avec  foin  félon  les 
règles  de  V Aftronomie  fi  la  Lune  paroi- 
troit  le  30  du  mois  3  ou  fi.  elle  ne  paroi- 
troit  pas.  Pourquoi  donc  députoient- 
ils  ces  obfervateurs  d'office  pour  faire 
cette  découverte  ?  Eft-ce  qu'ils  ne  fe 
floient  pas  à  leurs  propres  règles?  Tout 
au  contraire  :  Si  on  favoit  par  les  Ta- 
bles Afironomiques  que  la  Lune  ne  pou- 
voir  point  paroître  ce  jour-  la  _,  on  ri  at- 
tendoit  point  les  envoyés.  En  vérité  cette 
commifllon  étoit  une  grande  mommerie. 
Car  enfin  s'ils  favoient  par  les  Tables 
que  la  Lune  ne  paroîtroit  point  3  pour- 
quoi les  envoyoient  -  ils  découvrir  ce 
qui  ne  devoit  point  paroître.  S* ils  reve- 
naient j  dit  notre  Rabbin  ,  comme  ayant 
ru  la  Lune  3  on  les  prenoit  pour  des  men- 
zeurs.  S'ils  ne  le  favoient  pas ,  que  ne 


^54       D  IS  SE  R  T  AT  ION    XXIX. 

confultoient-ils  leurs  Tables  avant  que 
de  les  envoyer.  Rien  n'étoit  donc  non- 
feulement  plus  inutile ,  mais  encore  plus 
incommode  pour  le  public  que  ces  voya- 
ges y  puifqu'en  attendant  les  obferva- 
tions  ,  le  jour  demeuroit  toujours  en 
fufpens,  on  ne  favoit  à"  quel  mois  il 
devoit  appartenir.  Ou  plutôt,  puifqu'on 
redreiToit  leurs  obfervations  par  les  Ta- 
bles j  il  eft.  vifible  contre  ce  qu'on  a 
prétendu  plus  haut,  p.  6 1  ,  qu'on  regloit 
les  fêtes  Juives  par  des  Tables  &  par 
des  Cycles  j  &  non  par  la  feule  vue  de 
la  première  Phafe  de  la  Lune  _,  puifqu'on 
ne  fuivoit  les  obfervations  qu'autant 
qu'elles  s'accordoient  avec  les  Tables. 

Si  l'Auteur  a  bien  pris  les  fentimens 
des  Rabbins ,  de  quoi  je  veux  bien  me 
fier  en  lui,  il  ne  faut  que  cette  contra- 
diction pour  faire  voir  leur  étourdifle- 
ment  &  leur  fatuité.  Elle  eft  fi  palpable 
que  Calvifius  par  charité  ou  autrement, 
a  cru  leur  devoir  attribuer  une  conduite 
plus  raifonnable  :  Comme,  dit- il,  depuis 
leur  fortie  de  V Egypte  jufquau  tems 
d'Alexandre  le  Grand ,  le  cours  ou  le 
mouvement  de  la  Lune  nétoit  pas  encore 
bien  connu  ,  ils  navoient  point  de  Calen- 
drier affe^  exact  pour  leur  marquer 
r  heure  &  la  minute  des  nouvelles  Lunes. 
Auffi  les  Rabbins  nous  témoignent  dans 


Dissertation  XXIX.     3 5 5 

leurs  écrits  ,  qu'autrefois  parmi  les  Ifraé- 
lites  il  y  avoit  des  gens  gagés  pour  ob- 
ferver  la  nouvelle  Lune  _,  &  qui  l'ayant 
vue  aujji  -  tôt  quelle  étoit  fortie  de  fa 
conjonction  avec  le  foleilj  en  répandoient 
le  bruit  par  des  cris  publics  _,  &  indi- 
quoient  la  Néomenie.  On  obfervoit  fur- 
tout  cette  coutume  dans  les  lieux  où  le 
Tabernacle  étoit  dreffé ,  &  enfuite  à 
Jérufalem  depuis  que  Salomon  eut  fait 
conjlruire  le  Temple.  Cela  me  paroi  t  de 
bon  fens ,  parce  qu'il  eft  fort  naturel 
de  fuppiéer  par  les  obfervations  ocu- 
laires au  défaut  de  la  fcience  du  cours 
des  aftres  :  mais  rien  n'eft  moins  fenfé 
que  d'envoyer  fpéculer  le  Croiflant , 
lorfqu'on  fçait  infailliblement  s'il  doit 
ou  ne  doit  pas  paroître ,  pour  avoir  le 
plaidr  de  voir  (1  les  fpéculations  font 
conformes  aux  Ephémérides. 

Il  ajoute  plus  bas  ,  que  depuis  le  rè- 
gne d'Alexandre  le  Grand ,  les  Juifs 
fuivirent  la  Période  deCalippe  dans  la 
détermination  de  leurs  Néomenies  8c  de 
leurs  autres  fêtes ,  8c  en  uferent  environ 
pendant  £00  ans,  c'eft-à-dire  ,  jufqu'au 
tems  du  Grand  Conftantin  ,  &  que  pen- 
dant tout  ce  tems  on  efr  prefque  aftliré 
8c  de  la  mefure  des  années  Judaïques , 
8c  de  la  date  de  la  célébration  de  leurs 
Pâques. 


556     Dissertation    XXï)t. 

Les  députés  venoienc  en  diligence 
faire  leur  rapport  pour  fe  trouver  au 
feftin  dont  on  les  régaloit  à  leur  retour, 
p.  54.  Il  y  avoit  du  furnaturel  dans  leur 
diligence  ;  car  ils  ne  pouvoient  ap- 
percevoir  la  Lune  naitTante  qu'après  le 
coucher  du  foleil  vers  le  tems  de  l'Equi- 
noxe.  Ils  partoient  auiîi-tôt  chacun  de 
la  montagne  qu'ils  avoient  choilie,  car 
ils  ne  fe  poftoient  pas  tous  fur  la  même  , 
nhn  que  fi  la  Lune  étoit  cachée  dans  un 
nuage  à  l'égard  d'un  afpect,  elle  pût 
être  vue  à  découvert  dans  un  autre.  Ce- 
pendant &  par  une  merveille  furpre- 
nante,  ils  fe  trouvoient  tous  le  foir  mê- 
me à  Jérufalem ,  affez  à  tems  pour  af- 
filier au  feftin  préparé  qui  les  atten- 
doit. 

Quand  on  ne  voudroit  pas  admettre 
ce  miracle  pour  ces  petits  voyages  qui  ne 
fortoient  point  de  la  Judée ,  on  ne  pour- 
roit  l'éviter,  lorfqu'on  envoyoit  dans 
les  pays  éloignés  la  déclaration  de  la 
Néomenie  &  des  autres  fêtes  que  le 
Sanhédrin  avoit  dreffée.  Car  depuis  que 
Dieu  l'eût  ordonné  à  Moïfe  fur  le  mont 
de  Sinaï,  il  falloit  tous  les  mois  de  l'an- 
née que  le  Sanhédrin  annonçât  par  des 
courriers  la  Néomenie  &  les  autres  prin- 
cipales fêtes  aux  Juifs  difperfés  par  tou- 
te la  terre,  dans  l'Efpagne,  dans  l'Ira- 


Dissertation  XXIX.    557 
lie,   dans  les  Gaules .,  dans  la  Perfe» 
dans  tout  L'Orient ,  &:  généralement  dans- 
tous  les  lieux  dont  on  voit  le  dénom- 
brement _,  Acl.  c.  2.,  v.  10,  11.  En  vain 
ils  auroient  vu  le  premier  Croiffant  de 
leurs  yeux,  il  falloir  que  le  Sanhédrin 
leur  apprît  que  c'étoit  le  CroilTant ,  au* 
trement   ils  fe  fuifent  défiés  de  leurs, 
propres  yeux.  Mais  par  quelle  voie  leur 
apprenoit-on  cette  nouvelle  f  II  y  en  a- 
voit  deux  d'une  extrême  diligence.  C'elt 
toujours  Maimonide  qui  parle.  La  1. 
étoit  de  l'annoncer  par  des  flambeaux- 
qu'on  allumoit  fur  les  hautes  montagnes  y 
p.  57.  Mais  par  malheur  les  Samaritains 
jaloux   ayant   fait  la  même   chofe  en 
d'autres  tems  ,  trompèrent  les  Juifs,  de 
obligèrent  ainfi  le  Sanhédrin  à  prendre 
d'autres  mefures.  La  2.  fut  donc  d*en- 
voyer  des  Meffàgers  exprès.  Quelqu'un 
après  cela  a  ofe  douter  comment  les 
Juifs  répandus  par  tout  le  monde  pou* 
y/oient  s'accorder  dans  la  célébration  de 
leurs  fêtes  3  p.  56.  Mais  ceux  qui  pro- 
pofent  ce  doute  font  gens  incrédules ,' 
qui  ne  favent  pas  que  les  miracles  é- 
toient  ordinaires  dans  le  gouvernement 
de  la  Synagogue  ^  ôc  que   la  manière 
dont  le  Sanhédrin  faifoit  connoitre  à  tous 
les  Juifs  du  monde  ce  qu'il  avoit  déter- 
miné touchant  les  Néomenies  lève  toutes 
bs  difficultés. 


5 $ 8   Dissertation  XXIX, 

Car  dans  les  lieux  >  dit  Maimonides 
où  ceux  qui  portoient  la  nouvelle  de  la 
nouvelle  Lune pouvoient  arriver  à  terns^ 
comme  dans  la  Paleftine  &  dans  la  Sy- 
rie, qui  n'ont  que  l'étendue  de  6  à  7 
degrés,  c'eft-à -dire  ,  environ  de  150 
lieues  ,  on  ne  faifoit  chaque  fête  que 
pendant  un  jour  j  comme  la  Loi  nous 
l'ordonne  j  p.  57  ,  qui  étoit  le  premier 
jour  du  mois ,  &  le  lendemain  de  la  dé- 
couverte du  premier  CroifTant.  Or  la 
fête  de  la  Néomenie  commençoit  dès 
le  foir  précédent.  Ainfi  pour  arriver  à 
tems ,  il  falioit  qu'étant  partis  de  Jéru- 
falem  après  le  retour  des  fpéculateurs 
de  la  Lune ,  ils  arrivaient  ce  foir  même 
dans  tous  ces  lieux. 

Mais    ceux    qui    et  oient  Ji  éloignés  > 
(  car  les  Juifs  étoient  répandus  par  route 
la  terre  ,  )   qu'ils  ne  pouvoient  appren- 
dre  que  fort    tard  les  déclarations   du 
Sanhédrin  j  ils  célébroient  pendant  deux 
jours  chaque  folemnité.    C'efl:   que    les 
Courriers    du   Sanhédrin    n'arrivoienc 
dans  tous  les  lieux  du  monde  que  le  foir 
du  jour  de  la  Néomenie.  Il  fe  trouvoit 
ainfi  qu'ils  la  célébroient  deux  jours  de 
fuite.  Le  premier  pour  obéir  à  la  Loi, 
ou  à  la  première  apparition  de  la  Lune; 
mais  parce  que  PobéifTance   à    la  Loi 
nétok  d'aucun  mérite  fans  l'attache  du 


Dissertation  XXIX.  359. 
Sanhédrin,  ils  célébroient laNéomenie 
le  fécond  jour  pour  obéir  aux  ordres  du 
Sanhédrin  'y  Se  après  qu'il  fur  aboli ,  ils 
firent  par  coutume  ce  qu'ils  faifoient 
autrefois  par  obéiifance. 

Il  ne  s'eil:  jamais  rien  imaginé  de 
plus  admirable,  &  tous  les  miracles  de 
la  Religion  Chrétienne  ne  font  rien  en 
comparaifon.  Car  on  ne  peut  concevoir 
autrement  la  chofe ,  qu'en  fe  représen- 
tant qu'au  premier  jour  de  chaque  mois 
Ôc  à  toutes  les  grandes  fêtes  de  l'année, 
ces  meflagers  montoient  fur  les  portil- 
lons d'Eole ,  &  prenant  chacun  leur 
route  aux  quatre  coins  du  monde,  ils 
en  portoient  la  nouvelle  à  tous  les  Juifs, 
en  parcourant  les  lieux  où  ils  demeu- 
roient  :  ou  bien  le  miracle  d'Habacuc 
fe  renouvelloit  autant  de  fois ,  &  des 
Anges  les  prenant  par  les  cheveux ,  les 
tranfportoient  en  un  moment  par  tout 
où  les  Juifs  étoient  répandus.  Car  s'ils 
n'euirent  fait  ces  voyages  que  par  les 
voies  ordinaires,  les  Juifs  des  Provinces 
éloignées  euffent  appris  de  célébré  la 
Néomenie ,  les  uns  plutôt,  les  autres 
plus  tard  j  chaque  Synagogue  félon  fa 
diftance  de  Jérufalem  j  &z  quelques-unes, 
ce  qui  eût  été  fort  fcandaleux ,  ne  l'euf- 
fent  faite  qu'au  milieu  du  mois  j  ni  les. 
autres  qu'à  la  fin. 


%6o    Dissertation   XXIX. 
§.   XVII. 

Plan  du  Temple  de  Jérufalem  félon  Jo+ 
feph.  Roman  des  Rabbins  touchant 
l3 immolation  de  la  Pâque.  Confe'quen* 
ce  qu'on  en  tire  contre  la  dernière  Pâ- 
que de  Je/us- Chrifl. 

Puifque  nous  fommes  fur  les  mira- 
cles des  Rabbins ,  il  en  faut  continuer 
la  matière ,  &  nous'ne  choifirons  que 
ceux  dont  on  fe  fert  pour  convaincre 
de  faïuTeté  la  dernière  Pâque  de  Jefus- 
Chrift  que  nous  défendons.  N'eft  -  ce 
pas  à  moi  une  grande  témérité  de  fou- 
tenir  une  caufe  contre  laquelle  le  Ciel 
s'eft  déclaré  par  tant  de  miracles  ?  Mais 
pour  mettre  toute  cette  matière  dans  un 
plus  grand  jour,  il  eft  bon  de  donner 
ici  en  peu  de  mots  le  plan  du  Temple 
de  Jérufalem  ,  félon  la  defcription  que 
Jofeph  témoin  oculaire  en  a  faite  ,  fort 
différente  de  celle  que  les  Rabbins  nous 
ont  laiffée. 

Le  Mont  Moria,  fur  lequel  le  Tem- 
ple étoit  bâti ,  étoit  un  Tertre  haut , 
pierreux ,  &  efcarpé  de  tous  côtés,  linon 
du  côté  du  Septentrion  où  la  pente  étoiç 
plus  aifée ,  &c  la  vallée  moins  profonde. 
Comme  à  peine  le   haut  auroit   pn 

contenir 


Dissertation   XXIX.     $6t 
contenir  l'édifice  du  Temple  &c  l'Autel , 
Salomon  ,  pour  en  étendre  l'enceinte  , 
le  ht  enfermer  depuis  le  pied  juiquM  la 
hauteur   de    300  coudées  ,    de  quatre 
grandes  &  foutes  murailles  ,  qui  le  joi- 
gnoient  dans  les  angles  ,  &  qui  étoient 
bâties  de   pierres  de   40    coudées  ;    &c 
ayant  fait  combler  de  terre  l'entre- deux 
dss  murs  &  de  la  montagne  ,  il  lit  une 
grande    place  quarrée  de    500   pas   de 
tour ,  Se  dont  chaque  coté  éroit  de  1  2  5 
pas  ou  d'un  îtade.  Le  long  de  ces  côtés 
regnoient  quatre  grandes  galeries  d'une 
magnificence    iingulicre.  Celle  qui  re- 
gardoit  le  Midi  s'appeiioit  la  Galène  du 
Roi  ou  de  Salomon,  Ôc  elle  avoit  qua- 
tre ran^s  de  colonnes  qui  faifoient  amiî 
trois  allées  pour  fe  promener ,  dont  celle 
du  milieu  avoit  45  pieds  de  large  fur 
100  de  hauteur  j  &  celles  des  deux  cô- 
tés étoient  chacune  de  50  pieds  de  lar- 
ge &  hautes  de  50.  Elles  étoient  comme 
celle  du  Roi  lambrilfées  de  cèdre,  mais 
fans  aucun  ornement  de  fculpture.  C'eft 
dms  cette  Galerie  de  Salomon  que  Je- 
fus-Chrift,  fe  promenoir  quelquefois  en 
Hiver ,  afin  de  s'échauffe*  ;  comme  il 
paroi t  qu'il  arriva  le  jour  de  la  Dédi- 
cace. Joan.  c.  10,  22. 

On  entroit  par  6  portes  dans  ce  pre- 
mier quarré  qui  écoïc  ouvert  a  tout  le 
Tome  IK  Q 


562.  Dissertation  XXIX. 
monde  ,  Ôc  où  les  Juifs  immondes  &c 
les  Gentils  avoient  également  droit  de 
faiie  leurs  prières.  Celle  de  la  Galerie 
du  Roi  qui  donnoit  vers  le  Midi  s'ap- 
pelloit  la  Belle-Porte _,  à  caufe  des  or- 
nemens  dont  elle  étoit  enrichie }  &  com- 
me celle  de  l'Orient  ,  elle  conduifoit 
par  un  long  Efcalier  dans  la  ville.  On 
fortoit  de  la  Galerie  de  l'Occident  par 
quatre  autres  qui  menoient  en  divers 
quartiers.  Tout  le  refte  de  cet  Enclos 
qu'on  nommoit  le  Parvis  des  Gentils 
etoit  pavé  de  diverfes  fortes  de  pierres. 
Mais  comme  il  n'alloit  depuis  le  pied  que 
jufqu'à  la  hauteur  de  300  coudées,  la 
Montagne  qui  s'élevoit  encore  au  deiïus, 
donna  lieu  à  un  fécond  Enclos  quarré 
comme  le  premier  qu'on  y  ménagea 
pour  y  bâtir  le  Temple. 

On  montoit  dans  cet  Enclos  intérieur 
de  trois  côtés  par  un  Efcalier  de  14  de- 
grés jufqu'à  un  terre- plain  long  de  dix 
coudées ,  au  bout  duquel  on  montoit  en- 
core 5  dégrés  jufqu'à  la  porte  de  l'En- 
clos. Ou  côté  de  l'Orient  le  tertein  é- 
toit  plus  bas  de  ces  5  dégrés,  qui  ne  s'y 
trouvoient  point.  Le  mur  qui  féparoit 
le  fécond  Enclos  du  premier  étoit  haut 
par  dehors  de  40  coudées,  &  de  25  par 
dedans ,  parce  que  l'Efcalier  étoit  pris 
dans  l'épaiffeur  de  la  muraille.  Du  côté 


Dissertation  XXIX.  $£j 
du  Septentrion  &  du  Midi  on  y  entroic 
par  8  portes  _,  4  de  chaque  coté  ,  hau- 
tes de  30  coudées  fur  autant  de  largeur  , 
entre  lefquelles  le  long  des  murs  ,  on 
avoir  pratiqué  des  Salles  ou  des  Sacrifties, 
où  l'on  mettoit  diverfes  chofes  qui  fer- 
voient  à  Fufage  du  Temple.  Mais  du 
côté  de  l'Orient  il  n'y  avoit  qu'une 
porte  plus  ample  Se  plus  ornée  que  les 
autres  j  &  c'eft  celle  par  où  entroienc 
les  femmes. 

Cet  Enclos  dans  fa  capacité  compre- 
noit  4  Parvis,  diftingués  entr'eux  par 
des  baluftrades  allez  balTesj  deux  pour 
les  hommes  du  coté  du  Septentrion  &c 
du  Midi ,  longs  &  larges  de  30  coudées  ; 
un  troifieme  pour  les  femmes  du  côté 
de  l'Orient,  large  de  40  coudées j  & 
au  milieu  des  trois  un  quatrième  réfervé 
pour  les  Prêtres  ,  qui  fut  187  coudées 
de  long,  en  avoit  1 3  5  de  large. 

Au  milieu  de  ce  Parvis  on  trouvoit 
d'abord  l'Autel  des  Holocauftes ,  qui 
avoit  en  quarré  50  coudées  ,  &  1  5  de 
hauteur.  On  y  montoit  du  côté  du  Midi 
par  une  rampe  douce  &  aifée.  L'Autel 
étoit  féparé  du  Temple  par  un  efpace 
qui  conduifoit  au  Vefhbule  ,  où  l'on 
montoit  par  un  Efcalier  de  1 1  dégrés  : 
l'entrée  haute  de  70  coudées,  6V  large 
de  i  5 ,  n'avoit  point  de  porte  &  demeu- 

Qij 


$4     Dissertation  XXTX. 

a  i-.ui-ouvs  ouverte  Le  Veitibule  te- 
noit  toute  la  Lice  du  Temple  p.tr  100 
coudées  de  Lojag  fur  autant  de  hauteur, 
de  40  de  largeur» 

De-! i  on  entroit  duis  le  Bâtiment  des 
deux  Sanctuaires,  qui  n'étoient  iéparcs 
entr'eux  qule  par  un  grand  voile  3  qui  fut 
déchiré  du  haut  en  bas  au  moment  de 
la  mort  de  Jefus-Chriit.  Dans  ce  pre- 
mier Sanctuaire. qu'on  nommoit  fîmple- 
ment  le  Saint,  ik  qui  étoit  long  de  40 
coudées  fur  20  de  largeur  j  là,  dis-je  , 
étoient  le  Chandelier  à  iept  branches  , 
la  Table  des  pains  expofes ,  &  l'Autel 
des  parfums  ,  le  tout  d'or  malïîf  j  &C 
c'eft-là  que  le  Prêtre  qui  écoit  en  femai- 
ne  entroit  tous  les  jours  pour  y  offrir 
le  Sacrifice  du  p.rfum. 

Du  premier  Sanctuaire  on  entroit  par 
le  voile  dans  le  iecond,  qu'on  nommoit 
le  Saint  des  Saints ,  qui  fur  la  même 
hauteur  de  60  coudées ,  c\:  la  même 
largeur  de  20,  n'avoit  que  20  coudée? 
de  long.  Là  autrefois  étoit  l'Arche  à 
l'ombre  des  ailes  de  deux  grands  Ché- 
rubins. Ce  faint  lieu  écoit  inacceihbie  à. 
tout  autre  qu'au  grand  Prêtre  ,  qui  n'y 
entroit  qu'une  fois  l'année ,,  le  jour  de- 
l'Expiation  folemnelle. 

Enfin  le  long  des  deux  Sanctuaires  en 
dehors  regnoieiit  plufieurs  Chambres  > 


Dissertation  XXIX.  3 £5 
011  les  Prêtres  qui  étoient  en  1  emaine  de- 
meuroient  pendant  le  tems  de  leur  fonc- 
tion. 

Voilà  en  abrégé  l'idée  du  Temple  de 
Jérufalem  que  Capelle  a  recueillie  de 
Jofeph  ,  qui  ayant  vu  leTerrple  lur  pié, 
&c  y  ayant  fervi  en  qualité  de  Prêtre  ,  en 
devoit  bien  (avoir  les  mefures.  On  doit 
juger  par -là  quelle  créance  on  doit  aux 
Rabbins ,  qui  ont  vécu  plufieurs  fiecles 
après  la  dêftru&ion  de  Jérufalem  ,  6c 
qui  convenant  en  quelque  chofe  avec 
Jofeph  ,,  nous  en  ont  fait  une  peinture 
toute  différente  ,  dans  la  îltuation  gé- 
nérale du  Temple  fur  la-Montagne  , 
dans  le  nombre  j  dans  les  mefures  ,  & 
en  pluiieurs  autres  chofes  qu'il  feroit 
trop  long  de  rapporter  ici  :  ce  que  nous 
en  avons  dit  ne  devant  fervir  que  de 
préliminaire  à  la  defcription  magnifi- 
que qu'ils  nous  ont  faite  à  plai(ir  de  la 
Pâque  qu'ils  n'ont  jamais  vue. 

Le  favant  Rabbin  que  nous  avons 
déjà  cite  tan:  de  fois,  enfeigne  p.  154, 
»  que  tous  les  agneaux  s'immoloient 
»  dans  le  Temple.  Que  les  Prêtres , 
j>  qui  iervoient  tous  dans  cette  grande 
»  K..mnité,  fe  rangeoient  fur  diflcren- 
ij  tes  hits,  ayant  à  la  main  des  coupes 
ïî  pour  recevoir  le  fang  des  victimes ,  &: 
*y  le  porter  de  main  en  main  jufqu'a 

Qi>) 


$66  Dissertation  XXIX. 
j>  l'Autel ,  au  pied  duquel  il  étoit  ré- 
as  pandu.  Que  les  coupes  d'une  file  é- 
»  toient  d'or ,  &  celles  de  l'autre  d'ar- 
v  gent,  p.  149.  Que  les  Laïques  qui  of- 
33  froient  les  agneaux  fe  partageoient  en 
»  trois  bandes  3  qui  étoient  tout  -  à.  -  la 
»  fois  dans  le  Temple  ,  mais  chacun  en 
«  dittérens  quartiers.  Que  la  première 
»  bande  étant  entrée  dans  l'Azaraou  le 
>j  lieu  de  l'immolation  ,  on  en  fermoit 
»  la  porte  jufqu'à  ce  qu'elle  fut  achevée, 
>5  que  chaque  particulier  immoloit  fon 
>»  agneau  au  bout  de  chaque  file  \  ôc 
»  fans  fortir  de  la  place  il  en  faifoit 
«  égouter  tout  le  fang  dans  la  coupe  du 
s?  Prêtre  qui  étoit  le  plus  proche  ,  il 
»  ôtoit  la  peau  &  en  féparoit  la  graifle. 
33  Que  le  Prêtre  donnoit  cette  coupe  à 
33  celui  qui  le  précédoit  vers  l'Autel ,  où 
35  en  un  inftant  elle  étoit  portée  de  main 
33  en  main  ,  p.  1 5 1 ,  &  en  revenoit  par 
33  une  autre  file.  Un  autre  Rabbin  néan- 
33  moins  a  jugé  qu'il  feroit  plus  mer- 
35  veilleux  j  que  chacun  reçût  &  donnât 
33  en  mème-tems  d'une  main  une  coupe 
*3  pleine  ,  &  de  l'autre  une  vuide  3  ôc 
33  que  cela  fe  fît  avec  tant  d'adrelfe  , 
33  &  Ci  promptement ,  que  les  coupes 
33  femblaffent  voler  ,  allant  comme  des 
33  traits ,  p.  152.  Au  moins  il  a(ïure  que 
»>  les  Prêtres  fe  préparoient  à  cet  exer- 


Dissertation  XXIX.  % Gj 
»  cice  pendant  30  jours  avant  Pâque , 
»  afin  de  ne  pas  faire  de  fautes ,  p.  153. 
»  Après  que  l'immolation  de  la  pre- 
»  miere  bande  étoit  achevée  on  lavoic 
jî  l'Azara  \  6c  les  deux  autres  qui  y  en- 
»  troientenfuitefaifoientiucceflivemeiK 
>s  la  leur  avec  les  mêmes  cérémonies. 
On  immoloit  ainfi ,  félon  que  Jofeph 
le  rapporte,  256500  victimes  dans  l'ef- 
pace  de  deux  heures,  c'eft-à-dire  ,  de- 
puis trois  heures  après  midi  jufques 
à  cinq. 

De  cette  fuppofition  que  l'Auteur  de 
l'Harmonie  reçoit  avec  une  entière  dé- 
férence ,  il  conclut  démonftrativement 
que  Jefus  -  Chrilr.  n'a  donc  pas  fait  la 
dernière  Pâque  ,  parce  que  tous  les  a- 
gneaux  n'ayant  été  immolés  que  le  Ven- 
dredi fuivant ,  celui  qu'il  auroit  mangé 
le  Jeudi  n'auroit  pu  être  immolé  dans 
le  Temple.  Aufli  ce  n'elt  point  dans  le 
Temple  que  Jefus-Chrift  envoya  Pierre 
&  Jean  faire  la  préparation  de  la  Pâque; 
mais  dans  la  maifon  d'un  particulier  ,  où, 
l'Agneau  Pafchal  ne  pouvoit  être  immo- 
lé. On  jugera  de  la  valeur  &  du  poids 
de  certe  conféquence  après  que  nous 
aurons  remarqué  ,  je  ne  dis  pas  feule- 
ment le  grand  &c  le  iublime  de  ce  narré  , 
dont  j'ai  omis  exprès  plufieurs  circonf- 
tances  qui  ne  font  rien  pour  notre  fu- 

Qiv 


■3  6%    Dissertation  XXIX. 
jet;   mais   le  miraculeux  &  le  furpre- 
nant  qui  y  éclate  par  tout. 

:  §.   XVIII. 

Miracles  prodigieux    de  la   Pâque   des 

Rabbins  ,    à  l'égard  des  lieux  ; 

&  i.  dans  le  Tabernacle. 

Examinons  les  merveilles  qui  regar- 
dent le  lieu,  ck  commençons  par  l'an- 
cien Tabernacle,  qui  étoit  comme  un 
.Temple  portatif  8c  ambulatoire  ,  où 
pendant  480  ans  on  a  offert  tous  les 
Sacrifices  ,  ôc  par  confcquent  la  Pâque  , 
ainfi  qu'on  le  prétend.  Le  parvis  du 
Tabernacle  étoit  un  grand  efpacequarré, 
formé  par  des  colonnes  pofées  d'efpace 
en  efpace  ,  auxquelles  étoient  attachées 
des  tapiffenes,  qui  lui  tendient  lieu  de 
murs,  &  qui  l'enfermoient  de  tous  co- 
tés. Il  n'y  a  qu'à  confidérer  l'étendue 
que  l'Ecriture  lui  donne  ,  pour  juger  fi 
tout  le  peuple  a  pu  immoler  dans  fon 
.enceinte  :  Ce  nejî  pas  ici ,  dit  l'Auteur 
p.  i$6,  le  lieu  d'examiner  quelle  pou- 
voit  être  l'étendue  du  Tabernacle.  Il  a 
raifon  de  fuir  cet  examen  comme  un 
ccucil.  11  a  bien  vu  que  fi  le  lyfteme 
de  la  Pâque  Rabbi nique  dépend  des 
inclûtes  de  ce  lieu  faint ,  il  faut  renon- 


Dissertation  XXIX.  369 
cer  au  fyftême,  &  ne  s'oppofer  plus  à 
la  dernière  Paque  de  Jefus-Chrift.  Nous 
ne  lailTerons  donc  pas  à' examiner  cette 
étendue  ;  car  enfin  quand  donc  fera-ce 
le  lieu  de  mefurer  le  Tabernacle  ,  fînon 
dans  une  occadon  comme  celle-ci ,  d'où 
dépend  la  vérité  ou  la  faufleté  de  cette 
Tradition  des  Rabbins ,  que  les  Juifs 
immoloient  la  Pâque  dans  le  Temple  ; 
parce  qu'on  n'a  pu  faire  dans  le  Temple 
depuis  qu'il  fut  bâti ,  que  ce  qu'on  avoic 
fait  autrefois  dans  le  Tabernacle. 

Selon  l'Exode ,  c.  27 ,  v.  1 8  ,  le  Parvis 
du  Tabernacle  avoir  100  coudées  de 
long  fur  50  de  large,  qui  multipliées 
les  unes  par  les  autres,  font  une  furface 
de  5000  coudées  en  quarré.  Au  mi- 
lieu de  cet  efpace  étoit  le  Tabernacle 
long  de  50  coudées  &  large  de  10,  qui 
font  300  coudées  en  quarré.  Devant 
le  Tabernacle  étoit  l'Autel  des  Holo- 
cauftes  long  de  5  coudées ,  &c  large 
d'autant  j  qui  font  en  quarré  1 5  cou- 
dées. Comme  on  n  immoloit  pas  les  vic- 
times Pafchales  ,  ni  fur  l'Autel ,  ni  dans 
le  Tabernacle ,  il  faut  retrancher  du 
Parvis  les  fur  faces  de  l'un  de  de  l'autre. 
Si  donc  on  déduit  325  coudées  de  5  000 
il  en  reftera  467^  pour  le  lieu  de  l'im- 
molation de  la  Paque.  Voilà  le  terrein 
que  nous  avons  en  notre  difpofitioiu 

Qv 


370  Dissertation  XXIX. 

Voici  le  monde  qu'il  y  faut  placer. 

Il  fortit  de  l'Egypte ,  félon  le  Livre 
des  Nombres ,  c.  i .  603  5  5 o  hommes  ca- 
pables de  porter  les  armes ,  fans  comp- 
ter les  femmes ,  les  vieillards ,  les  enfans, 
les  jeunes -gens  au-deflous  de  20  ans, 
ôc  un  nombre  innombrable  d'Egyptiens 
de  tout  fexe  &  de  tout  âge,  la  plupart 
Profélytes ,  &  qui  par  cette  raifon  s'é- 
toient  donnes  à  eux.  Si  je  fais  monter 
tout  ce  monde  à  trois  millions  de  per- 
fonnes ,  je  ne  crois  pas  qu'on  m'en  dédi- 
fe,  mais  je  prévois  qu'on  ne  leur  per- 
mettra pas  d'allifter  tous  dans  le  Parvis 
du  Tabernacle  à  l'immolation  de  la  Pâ- 
que.  On  fait  fagement  de  s'accommo- 
der aux  Loix  de  la  Nature ,  au  hazard 
de  violenter  un  peu  la  lettre  du  Texte., 
qui  attribue  l'immolation  généralement 
à  tout  le  peuple  :  Immolabitquc  eum 
unïverfa  multitude*. 

Distribuons  donc  ces  trois  millions 
en  petites  familles  ou  fociétés,  chacune 
de  1  5  perfonnes ,  nombre  moyen  entre 
10  &  10  dont  elles  pouvoient  être 
compofées  ,  pour  manger  la  Pâque  :  ce 
feront  deux  cens  mille  familles,  dont 
nous  enverrons  les  Chefs  chargés  d'au- 
tant d'agneaux  dnns  le  Parvis  du  Taber- 
nacle pour  les  immoler.  Il  s'agit  de 
trouver  où  les  placer  fur  un  terrein  de 


Dissertation  XXIX.  371 
4675  coudées  en  quatre.  Eu  vériré 
i'entrepnfe  n'eft  pas  fans  difficulté  ,  8c 
on  fuccomberoit  fous  une  bien  moin- 
dre. //  ne  faut  pas  néanmoins  que  cela 
nous  effraye  ;  la  difficulté  nefi  pas  in- 
furmontable  _,  p.  146.  Il  effc  des  efprits 
à  qui  tout  elt  facile,  8c  qui  ne  s'embar- 
ralfent  de  rien.  Ils  placeront  tous  ces 
offrans  à  leur  aife  ,  8c  ils  auront  encore 
du  terrein  de  refte  pour  les  Prêtres  8c 
pour  les  Lévites ,  qui  fe  trouveront  alors 
au  nombre  de  8580. 

Comme  il  faut  par  nécedité  réduire 
les  coudées  en  pouces  j  8c  les  pouces  en 
lignes  pour  ne  faire  point  de  jalouile  $ 
4675  coudées  nous  donneront  130900 
pouces _,  ou  1570800  lignes,  qui  étant 
partagées  entre  100000  hommes  ne 
donneront  à  chacun  que  7  lignes  fort 
juftesj  8c  le  furplus  fera  partagé  entre 
les  Mimltres.  On  ne  peut  pas  mieux 
ménager  un  terrein  li  précieux.  11  faut 
avouer  que  rien  n'eu:  împolîible  à  la 
toute-puilïance  des  Rabbins. 

Audi  ce  nen  eft  là  qu'un  coup  d'ef- 
fai  alfez  léger.  Car  (1  la  Pâque  qui  fe  fit 
auprès  du  Mont  Smai  un  an  après  la 
forrie  de  l'Egypte  fut  (1  miracnleufe  , 
que  fera-ce  de  toutes  celles  qui  fe  firent 
pendant  plus  de  440  ans  dans  la  Pa- 
lestine ,   lorfquc  les  Tribus  d'Ifracl  fe 


37*  Dissertation  XXIX. 
furent  multipliées  à  l'infini  j  &  félon 
l'expreifion  de  l'Ecriture,  étoient  deve- 
nues aulli  innombrables  que  le  fable  de 
la  mer ,  comme  nous  le  voyons  fous  le 
règne  de  David  dans  ceconfeilqueChu- 
fai  donna  à  Abfalom  :  Commande-^  que 
depuis  Dan  jufquà  Berfabée  on  levé  & 
qu'on  ajjemble  auprès  de  vous  tout  le 
peuple  d'Ijra'èl  dans  une  armée  innom- 
brable comme  le  fable  de  la  mer,  Con- 
gregetur  ad  te  univerfus  Ifra'el  à  Dan 
ufque  Berfabœe  quafi  arena  maris  innu- 
/nerabilis,  i  Rois ,  c.  17,  y.  1 1  j  comme 
il  paroît  encore  fous  le  règne  de  Salo- 
lîion  avant  la  conftrudfcion  du  Temple  : 
Juda  &  Ifra'èl  innumerabiles  fcut  arena 
maris  in  multitudine.  Que  fera- ce,  dis— 
-  je ,  de  toutes  ces  Pâques  qui  fe  firent 
dans  le  Tabernacle  auprès  de  Jéricho  , 
dans  Galgala  ,  dans  Silo,  dans  Nobé  , 
dans  Gabaon  ?  A-t  on  jamais  vu  un 
fpe£tacle  plus  prodigieux  &  plus  incon- 
cevable? Il  faifoit  beau  voir  tant  de 
milliers  d'hommes  dans  un  efpace  fi 
étroit  ,  &  dont  chacun  ne  tenoit  pas 
tant  de  place  qu'un  épi  de  blé. 

La  conclufion  que  j'en  tire  eft,  qu'on 
n'a  pu  rien  faire  dans  le  Temple  tou- 
chant les  iacrifices  _,  que  ce  qu'on  avoit 
fait  autrefois  dans  le  Tabernacle ,  qui 
croit  un  Temple  mobile  &  portatif,  de 

/ 


Dl  SSER  T  ATION    XXIX.     $7$ 

où  toutes  les  coutumes  qui  regardoient 
les  facrifices  ont  été  obfervées  480  ans 
avant  la  conftruclion  du  Temple.  Or 
nous  ne  liions  point  dans  i'Ectiture  que 
les  Ifraclites  ayent  jamais  fait  la  Pâque 
dans  le  Tabernacle  ni  dans  l'enceinte 
de  fon  Parvis  :  Et  félon  les  mefures 
qu'elle  en  a  faites  j  il  étoit  abfolument 
impoflible  qu'elle  y  fût  célébrée ,  tant 
par  la  petiteife  de  l'efpace  ,  que  par  les 
ruirTeaux  de  fang  qui  l'auroient  inondé. 
On  n'a  donc  point  fait  la  Pâque  dans  le 
Temple  de  Jérufalem  qui  a  fuccédé  au 
Tabernacle  ,  parce  que  Dieu  n'a  fait 
depuis  l'Egypte  aucune  nouvelle  difpo- 
fmon  pour  l'immolation  de  la  Pâque  ; 
ôc  qu'un  ufage  qui  a  duré  près  de  V. 
fiecles  ne  peut  pas  être  changé  par  le 
changement  du  lieu  de  facrifice. 

Mais  il  fiut  juftiher  cette  conclufîon 
plus  particulièrement  par  les  mefures 
mêmes  du  Temple  ;  &  il  paroîtra  que 
Ç\  on  ne  devoit  pas  immoler  la  Pâque 
dans  le  Temple  ^  parce  qu'elle  ne  l'a- 
voir jamais  été  dans  le  Tabernacle  j  on 
ne  le  pouvoit  pas  aulîi ,  parce  que  la  pe- 
titeife du  terrein  ne  le  permettoit  pas. 


374  Dissertation    XXIX, 

§.  XIX. 

Continuation  des  miracles  de  la  Pâque 

Rabbinique ,  qui  regardent   le  lieu 

dans  le  Temple  de  Jérufalem. 

Il  e(t  inconcevable  que  le  Temple  de 
Jérufalem  pût  naturellement  contenir 
dans  Ton  enceinte  autant  de  perfonnes 
que  la  coutume  avoir  réglé  qu'il  y  en 
devoit  avoir  _,  pour  manger  un  fi  prodi- 
gieux nombre  d'agneaux.  Jofeph  té- 
moigne que  pour  chacun  il  y  avoit  au 
moins  dix  perfonnes,  &  que  ce  nombre 
pouvoit  même  aller  jufqu'à  10.  Prenons 
donc  encore  un  nombre  moyen ,  c'eil- 
à-dire  15  perfonnes  pour  chaque  victi- 
me, 8c  nous  trouverons  3847500  per- 
fonnes pour  256500  agneaux.  A  ce 
nombre  il  faut  ajouter  encore  celui  des 
Prêtres ,  dont  les  24  familles  fervoient 
toutes  dans  les  trois  grandes  fêtes  de 
l'année  ,  &  encore  plus  dans  celle  de 
Pâque.  Jofeph  écrivant  contre  Appion  , 
compte  en  chacune  ,de  ces  24  ClafTes 
plus  de  5000  Prêtres  ,  qui  font  le 
nombre  de  120000.  Il  en  falloit  ,  dit 
l'Auteur  de  l'Harmonie,  un  grand  nom- 
bre pour  l'immolation  de  tant  d'a- 
gneaux ,  p.  1 54.  Si  on  ajoute  le  nombre 


Dissertation  XXX.  3 75 
des  Prêtres  à  celui  des  Laïques  qui  or- 
froieuc  les  agneaux  ,  on  trouvera  que  la 
fomme  totale  montoit  à  trois  millions 
neuf  cens  foixante  fept  mille  cinq  cens 
perfonnes  qui  étoient  enfemble  dans 
l'enceinte  du  Temple.  Enfin  à  ce  nom- 
bre prodigieux  il  faut  encore  ajouter  les 
Lévites,  furcroîr  très-confidérable.  Ils 
dévoient  tous  aififter  à  la  cérémonie  de 
la  Pâque  en  qualité  de  Miniftres  ,  in- 
férieurs ou  fubalrernes. 

La  Tribu  de  Lévi  fe  divifoit  en  trois 
branches ,  qui  font  celles  de  Gerfon,  de 
Caath  &  de  Merari. 

Pour  fupputer  leur  nombre ,  il  faut 
confidérer  qu'au  fortir  de  l'Egypte  tous 
les  Lévites  depuis  30  ans  jufqu'a  50  qui 
e(t  le  tems  de  leur  miniftere,  montoienr, 
comme  j'ai  dit ,  au  nombre  de  8580, 
celui  des  4  enfans  de  Caath  étoit  de 
2750.  J'en  prends  la  quatrième  partie 
pour  Amram  fon  aine,  père  d'Aarori 
&  de  Moi'fe,  &  cette  divifion  lui  don- 
nera 687  petits  fils  qu'il  faut  partager 
entre  Moïfe  &  Aaron-  Ce  feront  545. 
enfans  pour  chacun,  tous  Prêtres  ,  qui 
étant  déduits  du  nombre  total  des  8  580 
Lévites ,  il  reliera  8237  fimples  Lévi- 
tes. Sur  cela  je  dis,  fi  343  Prècres  à  là 
fortie  de  l'Egypte  fe  font  multipliés  , 
félon  Jofeph ,,  jufqu'à  être  au  tems  de 


37^    Dissertation    XXIX. 

Jefus-Chnft  plus  de  120000  hommes, 
quel  fera  le  nombre  que  8237  Lévites 
auront  produits  dans  le  même  tems  ;  fi 
on  compte  bien  ,  on  trouvera,  iauf  er- 
reur de  calcul,,  près  de  trois  millions 
de  Lévites  ,  c'eft-à-dire  ,  280000  qui 
étant  joints  au  nombre  des  Prêtres  & 
des  Laïques  _,  feront  fix  millions  huit 
cens  quarante-fept  mille  cinq  cens  per- 
fonnes. 

>j  Car  tous  les  Juifs,  dit  l'Auteur,  p. 
«  141  ,  y  dévoient  are  préfensj  Dieu 
»  Tavoit  ainfi  ordonné  dès  la  première 
j)  inftitution  de  la  Pâque.  Toute  la  mul- 
33  tïtude  des  enfans  d'JJraèl  l'immolera 
s>  au  foir.  Exod.  c.  1  2  ,  v.  6.  Dans  le 
a?  Latin  il  y  a  :  Immolabitque  eum  uni- 
55  yerfa  multitudo  filiorum  lfraël  ad  vef- 
53  peram  ^  p.  142.  Ce  mot  Latin  multi- 
5>  tudo ,  a  trompé  plusieurs  perfonnes 
s?  qui  fe  font  imaginées  que  la  Loi  vou- 
«  ioit  feulement  que  tous  les  Juifs  fans 
»?  exception  immolaient  la  Pâque,  mais 
>3  fans  obligation  de  le  faire  autrement 
33  qu'en  particulier.  Ce  n'elt  pas  là  le 
33  fens.  Dans  l'Hébreu  il  y  a  Cahal  _, 
33  qui  (îgnifie  affemblée ,  &  répond  à  ces 

33  mots  Grecs,    crvvetycoy^  ,    c,KKh  y\(jI  cl 

53  commeon  le  voit  dans  les  Septantes  3c 
n  dans  Philon.  On  en  trouvera  une 
35  foule  de  preuves  dans  le  Tréfor  de 


Dissertation  XXIX.  377 
Pagnin  &  dans  les  Concordances  Hé- 
braïques. Les  Septantes  traduifene 
ainfi  le  pa(Tage  dont  il  eft  queftion  : 
Toute  la  multitude  de  V  Affemblée  ou 
Synagogue.  L'original  dit  encore  da- 
vantage \  car  il  y  a  deux  difrérens 
mots  cjui  fignihent  Ajjemblee ,  Cho- 
Cehal  ada  _,  c'eft-à-dire  en  Latin  ,  To- 
tus  cœtus  congrégation! s  :  Toute  Vaf- 
femblée  de  tous  les  Ifraè'lites.  La  Para- 
phrafe  Chaldaïque  a  exprimé  l'Hé- 
breu ,  Toute  ï  Eglijè  des  Enfans  d'If- 
rael  affemblés  ;  c  elt  comme  il  y  a 
dans  l'original  de  cette  Paraphrafe  ;  car 
dans  l'interprète  Latin  on  trouve  feu- 
lement ,  omnis  Ecclefia.  Il  devoit  a- 
jouter  pour  exprimer  l'original,  con- 
gregata.  Ce  feroit-là  un  étrange  lan- 
gage fi  cela  vouloit  dire  que  chaque 
lfraclite  tueroit  l'Agneau  Pafchal  fé- 
parément.  Tous  les  Juifs  fe  dévoient 
donc  trouver  dans  le  Temple  à  l'heure 
que  l'on  immoloit  la  Paque.  Aufîî 
une  des  raifons  d'Ezéchias  pour  diffé- 
rer la  Paque  ,  fut  que  les  Ifraè'lites  n'a- 
voient  pas  pu  encore  venir  à  Jéru- 
falem  :  Populus  nondum  congre gatus 
fuerat  in  Jerufalem.  1.  Parai,  c.  30,  y. 
3.  Je  lai(Te  toutes  les  autres  preuves 
que  l'Auteur,/?.  143  ,  tire  en  grand  nom- 
bre de  Jofeph  &  de  Philon ,  pour  crier , 


378  Dissertation  XXIX. 
miracle  !  Quoi ,  près  de  fept  millions 
de  perfonnes,  fans  compter  plus  de  deux 
cens  cinquante  fix  mille  agneaux  tous 
compris  dans  le  quarté  intérieur  du  Tem- 
ple de  Jétufalem  !  Car  les  Talmudiftes 
»  racontent  comme  un  miracle  que  tant 
j)  de  monde  fe  pût  trouver  à  la  fois  fans 
>3  s'incommoder  ,  p.  1  48.  Les  Ijraelites , 
33  dit  un  Rabbin  _,  étoient  extrêmement 
55 PreJfes  dans  le  Temple  ,  &  la  Glofe 
33  ajoute,  de  forte  qu'à  peine  touchoient- 
33  ils  la  terre  du  bout  des  pieds ,  &  ce- 
y>  pendant  dans  le  tems  de  l'adoration  ils 
>#■  avoient  ajfe%  d'efpace.  Cette  Glofe 
n'en  dit  pas  alfez.  Il  falloir  que  ces  If- 
raëlites  eufTent  le  privilège  des  corps 
glorieux  ,  qui  n'occupent  que  la  place 
qu'ils  veulent,  ou  qui  pénètrent  les  di- 
menfîons  des  autres  corps  j  car  dans  le 
tems  de  l'adoration  ,  c'eft  à-dire  ,  du 
facrifice ,  on  ne  pouvoir  éviter  qu'on  ne 
fît  plufîeurs  mouvemens  qui  euflfent  été 
impolîibles ,  fi  tout  étant  plein  ,  les 
corps  n'euflfent  pa(Té  au  travers  les  uns 
des  autres.  On  ne  peut  s'empêcher,  à  la 
▼ue  d'une  chofe  fi  prodigieuie,  de  criée 
encore ,  miracle  ! 


Dissertation    XXIX.     379 

§.  XX. 

Nullité  des  moyens  d' accommodement  » 
qui  conjiflent  dans  la  réduction  du 
nombre  des  personnes ,  &  dans  la  mul- 
tiplie atiou  du  terre  in, 

L'Auteur  de  l'Harmonie  néanmoins 
veut  foulager  la  peine  qu'il  y  a  à  s'ima- 
giner un  prodige  (î  incompréhenfible  \ 
8c  il  s'y  prend  en  deux  manières.  La  î. 
en  diminuant  le  nombre  de  ceux  qui  af- 
fîftoient  dans  le  Temple  à  l'immolation 
de  la  Pâque.  La  1.  en  augmentant  le 
terrein  ,  8c  en  allongeant  les  mefures  du 
Temple. 

>5 1.  11  nous  dit,  p.  146,  qu'il  n'étoit 
>3  pas  néceflaire  que  tous  ceux  qui  fai- 
>j  foient  la  Pâque  fe  trouvaient  dans  le 
«  Temple  dans  le  tems  de  l'immolation 
des  agneaux  ;  il  fuffifoit  qu'un  feul  of- 
frit l'Agneau  Pafchal  pour  la  compagnie 
dont  il  étoit ,  pour  le  manger.  Mai- 
monide  le  dit  en  termes  formels  :  Vingt 
perfonnes  ,  dit- il  ,  pouvoient  s' affembler 
pour  manger  un  agneau.  On  en  députoit 
un  pour  l'offrir  &  l'immoler  dans  le 
Temple  au  nom  de  tous. 

Mais  ce  moyen  d'accommodement 
n'eft  point  receyable  >  parce  qu'Une  peiK 


3S0  Dissertation  XXIX, 
s'allier  avec  ce  qu'on  a  reconnu  plus 
haut  touchant  l'afliitance  générale  de 
tout  le  peuple  à  l'immolation  de  la  Pâ- 
que. Tous  les  Juifs ,  dit-on  ,  fe  dévoient 
trouver  dans  le  Temple  à  l  heure  qu'on 
immoloit  la  Pâque  ,  p.  142.  Comment 
ne  voit-on  pas  qu'on  renonce  par  cette 
réduction  à  l'avantage  qu'on  tiroit  du 
paffage  de  l'Exode  :  Immolabitque  eum 
univerfa  multitudo  filiorum  Ifraél.  Tout 
compté  ,  tout  rabbatu  ,  il  fe  trouve  que 
toute  cette  multitude  n'eft  que  la  vingtiè- 
me partie  du  peuple  ^  &  encore  moins , 
puifque  félon  le  Talmud ,  ce  nombre  alloit 
encore  plus  loin  dans  chaque  fociétéqui 
fe  formoit  pour  manger  l'Agneau  Paf- 
chal  j  p.  146.  Et  que  deviennent  donc 
toutes  ces  autorités  tirées  de  l'Hébreu  ,, 
•  des  Septantes ,  de  la  Paraphrafe  Chaldaï- 
que  ,  du  Tréfor  de  Pagnin  ,  des  Con- 
cordances Hébraïques  ,  de  Philon  ,  Se 
de  Jofeph,  pour  prouver  que  Dieu  avoit 
ordonné  des  la  première  injlitution  de  la 
Pâque  y  que  tous  les  Juifs  y  fuffent  pré- 
fens  ?  p.  141.  Il  v  a  la  même  proportion 
de  1  à  20,  que  de  5  à  100.  Le  Roi  com- 
mande à  une  Compagnie  de  cent  Offi- 
ciers d'affilier  tous  aune  cérémonie. Au 
lieu  de  s'y  rendre ,  ils  y  en  députent  cinq 
de  leur  Corps.  Peut-on  dire  de  bonne 
foi  que  toute  la  Compagnie  y  a  aflifté  : 


Dissertation  XXIX.  3 Si 
Vniverja  multitudo  f  Ce  ferolt  -  la  un 
étrange  langage  ,  fi  cela  vouloit  dire  que 
cent  Officiers  le  font  rendus  à  la  céré- 
monie,  h  on  ne  l'entend  par  Procu- 
reur. 

Après  avoir  réduit  le  nombre  des  af- 
fîftans  a  300000  perfonnes ,  lAtueur 
étend  l'enceinte  du  Temple  pour  foula- 
ger  notre  imagination,  qui  auroit  peine 
»  à  les  y  placer  j  de  il  trouve  qu'en 
s>  donnant  500  coudées  ,  ou  dix  mille. 
»  pouces  à  chaque  côté  de  la  grande  en- 
»  ceinte  du  Temple  j  la  furface  de  touc 
s?  le  grand  Quarré  fera  de  cent  millions 
55  de  pouces  ,  qui  partagés  entre  trois 
55  cens  mille  perfonnes  ,  à  quoi  l'Au- 
55  teur  réduit  tous  les  aQiltans,  donne-» 
55  ront  à  chacun  333  pouces  ;  ce  qui  fait 
35  un  peu  plus  qu'un  pied  &  demi  en 
35  quarré  ,  efpace  plus  que  fuffifant  pour 
35  des  gens  qui  fe  tiennent  debout  ik  qui 
35  fe  preilent  :  de  pour  nous  faire  valoir 
la  grâce  qu'il  nous  fait,  il  nous  dé- 
clare qu'il  ne  fait  ici  la  coudée  que  de 
20  pouces  ,  au  lieu  que  Villalpand  fait 
l'aire  du  Temple  pour  le  moins  fix  fois 
plus  grande  qu'on  ne  la  fait  ici.  Ou 
entre  dans  ce  menu  détail  pour  nous 
difpenfer  de  faire  fur  l'autorité  des  Rab- 
bins un  acte  de  foi  auiîï  difficile  que 
nous  l'avons  vu  dans  le  §.  précédent,  ÔC 


382  Dissertation  XXIX. 
j'ai  beaucoup  de  reconnoiffance  pour 
celui  qui  nous  donne  cette  exemption. 
Mais  dans  le  fonds  la  difpenfe  eft  nulle, 
&  après  toutes  les  déductions  qu'il  faut 
faire,  je  ne  me  fens  nullement  déchar- 
gé- 

I.  Viilalpand  ne  doit  point  are  allé- 
gué en  cette  occafion.  Le  Temple  d'E- 
zéchiel,  dont  il  a  fupputé  les  mefures, 
n'eft  ni  le  Temple  de  Salomon  ni  le 
'Temple  rebâti  par  Hérode.  C'eft  l'idée 
ou  le  defïein  d'un  Temple  qui  n'a  point 
encore  été  exécuté ,  ôc  qui  a  tout  l'air 
d'être  une  Parabole  j  ou  une  allégorie 
qui  repréfente  l'Eglife.  C'eft  la  même 
chofe  que  fi  on  vouloit  prendre  les  di- 
mensions de  l'ancienne  ville  de  Jérufa- 
lem  fur  les  mefures  de  la  nouvelle  Jéru- 
falem  _,  qu'un  Ange  prend  dans  l'Apo- 
calvpfe. 

D'ailleurs ,  pour  nous  mettre  au  large 
l'Auteur  nous  préfente  la  mefure  de 
l'aire  du  grand  Quarré  du  Temple.  Mais 
c'eft  encore  nous  donner  le  change.  Il 
jie  s'agit  pas  ici  de  la  grande  enceinte  du 
Temple,  où  tout  le  monde  pouvoit  en- 
trer, Juifs  de  Gentils,  purs  &  immon- 
des. On  y  pouvoir  prier  j  mais  comme 
il  n'y  avoit  point  d'Autel,  on  n'y  a  ja- 
mais fait  de  facrifice1.  11  n'eft  ici  quef- 
tion,    félon  Iqs  Rabbins  même,  que 


Dissertation  XXIX.  383 
du  Quarré  ou  de  l'Enclos  intérieur  où 
l'on  Douvoic  facnlier.  Car  ils  nous  con- 
tent que  coûte  l'aflemblée  Paichale  fe  di- 
vifoit  en  trois  bandes  }  que  lorfque  la 
première  étoit  entrée  dans  PAzara,  on 
en  fermoit  les  portes ,  &  que  les  deux 
autres  étant  dehors ,  attendoient  pour 
entrer  que  ia  cérémonie  rut  finie.  Quel- 
les étoient  ces  portes  fermées ,  linon 
celles  du  Quarré  intérieur  ?  Et  quel 
étoit  le  lieu  où  les  autres  bandes  arten- 
doient ,  finon  le  grand  Quarré  de  de- 
hors ?  Car  hors  de  ce  Quarré  il  n'y  a- 
voit  que  des  Efcaliers  longs  à  perte  de 
vue  ,  qui  n'étoient  pas  des  places  com- 
modes pour  loger  deux  cens  mille  per- 
sonnes avec  autant  d'agneaux. 

Encore  ce  Quarré  intérieur  ne  peut-il 
pas  iervir  ici  tout  entier,  &  il  faut  por- 
ter encore  le  retranchement  plus  loin. 
Selon  lesTalmudiftes  mêmes,  auxquels 
on  donne  ici  une  autorité  fouveraine , 
toute  la  lon^eur  du  terrein  de  l'Orient 
en  Occident ,  fans  y  comprendre  les 
portes  &  les  Sacrifties  attachées  au  mur, 
étoit  de  187  coudées,  &  la  largeur  du 
Midi  au  Septentrion,  de  1 3  5  coudées, 
qui  font  152.45  coudées  en  quarré.  De 
tout  ce  terrein  les  Talmudiftes  n'ont 
pris  pour  le  lieu  des  facrifices  qu'un  es- 
pace long  de  76  coudées  ,  &  large  de 


584  Dissertation  XXIX. 
60  qui  font  en  quarré  4560  coudées 
qu'il  faudroit  partager  fans  jaloufîe  en- 
tre les  Prêtres  ,  les  Lévites  ,  les  oftrans 
&  les  viétimes  j  &  fans  calculer  on  voie 
tout  d'un  coup  que  chaque  corps  n'au- 
roit  pas  un  demi  pouce  pour  fe  placer; 
ce  qui  feroit  un  miracle  un  peu  vio- 
lent. 

Pour  le  réduire  donc  un  peu  plus 
dans  la  portée  de  l'efprit ,  1.  l'Auteur 
retranche  les  agneaux,  dont  il  trouve  à 
propos  que  chacun  porte  le  (ien ,  non 
dans  fes  mains,  mais  fur  fa  tête,/?.  149, 
afin  qu'il  foit  compris  dans  la  même 
colonne  de  l'efpace  qu'occupe  celui  qui 
le  porte.  Quoique  cette  figure  de  Juifs 
cocrTés  chacun  de  leur  agneau  ,  foit  un 
peu  bizarre,  je  ne  m'y  oppofe  point.  2. 
11  réduit  le  nombre  de  tous  les  Minif- 
tres,  tant  Prêtres  que  Lévites,  &  des 
ofTrans,  a  tioiscens  mille  hommes. 

3.II  voudra  peut-être  prendre  tout  le 
terrein  de  l'Enclos ,  qui  monte  en  quarré 
à  2.52.45  coudées.  J'y  confens  néan- 
moins encore,  pourvu  qu'il  en  retran- 
che les  efpaces  du  Veftibule  ,  des  Sanc- 
tuaires ,  de  l'Autel  ,  &  de  la  rampe 
par  où  on  montoit  fur  l'Autel  ,  qui 
constamment  ne  font  point  des  lieux 
d'immolation.  Le  Temple  qui  compre- 
noit  le  Veftibule  &  le  Sanctuaire  étoit 

long 


Dissertation    XXÎX.     3S5 
long  de  1 00  coudées  j  &  large  d'autant, 
Se  il  occupoit  ainfî   10000   coudées    en 
quarré.  L'Autel  ,  félon  Jofeph  témoin 
oculaire  ,   avoit  en  longueur  &  en  lar- 
geer  50   coudées   }   ce    feroient    1500 
coudées  en  quarré.  Mais  je  mécontente 
desdimenfions  plus  petites  que  les  Tal- 
mudiftes  lui  donnent,  qui  font   de    32 
coudées  en  longueur  fur  autant  de  large, 
ôc  qui  font  1014  coudées  quarrées.  La 
rampe  avoit  la  même  largeur  que  l'Au- 
tel de  31  coudées,  ôc  la  pente   s'éten- 
doit   à  30  coudées  en  long  qui  font  en 
quarré    960  coudées.  Ces  trois  efpaces 
joints    enfemble    font  11 984   coudées 
qu'il  faut  retrancher  des  2.5145   de  tout 
i'Enclos  j  &  il  réitéra  1 3 16 1    coudées  de 
terrain  à  partager  entre   100000    hom- 
mes,  le  tiers  des  offrans  ;  entre  120000 
Prêtres  ,  de  2880000  Lévites ,  qui  font 
en  tout  trois   millions  cent  mille   per- 
sonnes.  Comme  chacun   n'aura  pas  fa 
coudée  ,   ni  même  fon  pied  ,  il  les  faut 
réduire  en   371308  pouces ,  &  les  pou- 
ces en  44  5  5  606  lignes }  tk  alors  chacun 
trouvera  pour  fe  placer  commodément 
tm  peu  moins  de  deux  lignes  :   a  mtoins 
de  pouvoir  être  de  purs  efprits  ils  ne  pou- 
voient  pas  occuper  moins  de  place. 

Que  feroit-ce  donc  Ci  je  n'avois  don- 
ne avec  le  Talmud  à  l'Azara  ,    c  eft-à- 

Tom.  U\  R 


x%6  Dissertation  XXIX. 
dire  au  lieu  où  fefaifoit  l'immolation 
de  la  Pâque  ,  que  1 1.  coudées  fur  135. 
de  longueur  ,  qui  font  1485.  coudées  en 
quarré,  ou  41580.  pouces,  8c  qui  don- 
neroient  à  chacun  des  trois  cens  mille 
une  ligne  &  environ  8.  points.  L'Au- 
teur doute  fur  cela  ,  p.  1 5  5.7?  les  Tal- 
mudifles  doivent  avoir  autant  d'autorité 
dans  ce  qui  regarde  les  me  fur  es  du  Tem- 
ple ,  que  dans  ce  qu'ils  rapportent  des 
Coutumes  des  Juifs  ;  Se  pour  faire  pan- 
cher  la  balance  du  côté  de  la  négative  , 
il  allègue  que  ces  coutumes  fe  prati- 
quoient  encore  de  leur  tems  ,  au  lieu  que 
le  Temple  ne  fubfifloit  plus.  Mais  il  n'y 
penfepas. 

Sur  quoi  peut- il  former  un  doute  fi 
déraifonnable  ?  Je  l'ai  dit  plus  haut,  Se 
il  eftbon  de  le  répéter  ici.  11  s'agit  ici 
de  Coutume  ,  qui ,  comme  il  le  prétend, 
11e  fe  pouvoit  pratiquer  que  dans  le 
Temple  }  je  dis  de  l'immolation  de  la 
Pâque  ,  Se  des  cérémonies  qu'on  y  ob- 
fervoit.  11  reconnoit  que  du  tems  des 
Rabbins ,  dont  il  nous  refte  des  écrits  , 
le  Temple  ne  fubfifloit  plus  \  Se  il  nous 
vient  de  dire  que  les  Coutumes  fe  prati- 
quoient  encore  de  leur  tems.  Eit-ce  qu'on 
pouvoit  pratiquer  des  Coutumes  dans  un 
Temple  qui  ne  fubfifloit  plus  ?  ou,  il 
après  la  ruine  du  Temple  ,  les  Juifs  ne 


Dissertation  XXIX.  387 
laifîoient  pas  d'immoler  ailleurs  la  Pâ- 
que  qui  ne  pouvoir  l'être  que  dans  le 
Temple  ? 

Pour  moi  je  crois  que  lesTalmudiftes 
ont  autanr  d'aurorité  dans  les  mefures 
du  Temple  que  dans  les  Coutumes  9 
c'eft-à-dire  ,  qu'ils  n'en  ont  point  du 
tout  ;  car  n'ayant  pu  vok  ni  les  unes  ni 
les  autres  ,  ils  n'en  pouvoient  parler 
qu'au  hazard  ,  &  fur  le  rapport  d'au- 
trui.  Or  l'Auteur  avoue  qu'ils  fe  font 
terriblement  éblouis  dans  les  mefures. 
Celles  de  Jofeph  témoin  oculaire  ne  s'ac- 
cordent nullement  avec  celles  des  Rab- 
bins ,  comme  on  le  peut  juftifier  par  le 
Traité  de  Louis  Capelle  ,  qui  eil  au- 
devant  de  la  Polyglotte.  Comment  donc 
mériteroient-ils  d'être  écoutés  fur  les 
Coutumes  &:  fur  les  cérémonies  qu'ils 
n'ont  jamais  vues ,  non  plus  que  les  me- 
fures ?  Des  gens  convaincus  d'erreur 
dans  un  point  inféparablement  lié  avec 
un  autre,  peuvent-ils  conferver  pour  le 
fécond  cette  autorité  qu'ils  ont  perdue  à 
i'égard  du  premier  ?  11  faut  néanmoins 
nous  contenter  de  ce  qu'on  nous  donne. 
Il  n'en  fera  pas  moins  vrai ,  quoi  qu'on 
en  dife  ,  que  par  un  miracle  épouvan- 
table ,  il  failoit  que  tous  ces  corps-là  , 
en  y  comprenant  les  Lévites ,  euifent  le 
privilège  des    efprics ,  qui  n'occupenc 

Rij 


388     Dissertation  XXIX. 
qu'un  point  imperceptible. 

§.  XXI. 

Prodiges  Rabbiniques  touchant  le  mou- 

yement  &  la  pénétration  des  corps 

dans  l'immolation  delà  Pâque, 

Les  miracles  qui  regardent  le  mouve- 
ment ,  ne  le  cèdent  point  à  ceux  qui 
concernent  le  lieu  :  car  fi  ceux-ci  con- 
fîftoient  dans  la  pénétration  des  dimen- 
lîons  j  de  dans  la  fituation  de  plufieurs 
corps  en  une  même  place;  ceux-là  ne  fe 
peuvent  comprendre  qu'en  attribuant  à 
ces  corps  une  fubtilité  qui  les  fit  pafler 
fans  obftacle  au  travers  les  uns  des  au- 
tres ,  Se  une  agilité  qui  les  tranfportâc 
d'un  terme  à  l'autre  fans  paffer  par  le 
milieu.  On  ne  pouvoir  éviter  de  faire 
divers  mouvemens  dans  le  Teanple  ,  de 
dans  le  Tabernacle  au  tems  de  l'immo- 
lation. On  me  dira  que  les  files  des 
Prêtres,  qui  faifoient  porter  de  main 
en  main  le  fang  des  victimes  jufqu'à 
l'Autel  les  difpenfoient  de  fe  remuer 
pour  cela.  Mais  les  Laïques  quiimmo- 
loient ,  dévoient  fans  doute  fe  mouvoir 
pour  fe  fuccéder  les  uns  aux  autres  dans 
le  même  lieu.  Or  comment  fe  remuer 
où  tout  ett  plein  f  On  fçait  que  le  mou- 


Disse  ht  a  tion  XXIX.  $S$ 
vement  ne  fe  fait  que  parce  que  les  corps 
voiiîns  cèdent  à  celui  qui  fe  remue  ,  6c 
lui  donnent  palTage  :  que  s'ils  ne  cèdent 
pas,  il  n'y  a  point  de  mouvement ,  &c 
chaque  corps  demeure  en  fa  place.  Ainil 
aucun  ne  fe  pouvoit  remuer  quefes  voi- 
fins  ne  lui  cédaflent  leur  place  dans  la 
ligne  de  fon  mouvement.  Mais  où  pou- 
voient-ils  fe  retirer ,  puifque  tout  étoic 
plein  j  &  qu'il  n'y  avoit  point  de  vuide 
à  remplir  ?  11  falloit  nécefTairementque 
par  une  grande  incommodité  à  chaque 
mouvement  toute  l'alTemblée  fe  remuât, 
8c  que  chacun  changeât  de  place  ,  ou , 
ce  qui  ne  fe  pouvoit  faire  fans  miracle» 
que  ceux  qui  le  remuoient  ne  trouvaient 
point  dans  les  autres  d'obftacles  à  leur 
mouvement,  &  qu'ils  pafTafTent  tous  aa 
travers  les  uns  des  autres.  Je  donne  le 
choix  de  ces  deux  moyens. 

D'ailleurs  ,  comme  il  y  avoit  des 
corps  immobiles  &  incapables  de  céder 
au  mouvement  des  autres  ,  on  ne  peut 
s'empêcher  d'avoir  recours  au  miracle  , 
fi  l'on  ne  veut  rendre  impolTible  les  mou- 
vemens  de  plufieurs  corps.  Je  m'expli- 
ue  :  fi  nous  recevons  pour  un  tems  la 
aulfe  fuppofition  que  tout  le  grand 
Quarré  fervoit  à  l'immolation  de  la 
Pâque  ,  on  efl:  obligé  déranger  les  Prê- 
tres en  diverfes  files  ?  qui  de  l'Autel, 

R  iij 


? 


390     Dissertation  XXIX. 

comme  de  leur  centre  ,  s'étendoient  juf- 
qu'aux  extrémités  j  c'eft- à-dire  ,  juf- 
qu'aux  galeries  qui  bornoientce  Quarré 
extérieur.  En  effet ,  fans  cette  longue 
étendue  de  files  ,  à  peine  pourroit-on 
employer  ces  120000  Prêtres,  qui  néan- 
moins dévoient  tous  fervir  à  la  fête  de 
Pâques.  Rangeons-les  donc  en  fix-vingts 
files  y  compofées  chacune  de  1000  Prê- 
tres. Je  fuis  feulement  en  peine  par  où 
nous  les  ferons  fortir  du  Quarré  inté- 
rieur ,  qui  étoit  environné  d'une  mu- 
raille haute  par  dehors  de  40.  coudées, 
6c  par  dedans  de  25. 

11  n'y  avoir  que  fept  portes,  félon  les 
Talmudiftes ,  p.  1 56.  or  il  eft  impoiîî- 
ble  que  toutes  ces  files  ayent  pu  paiTer 
par  ces  fept  portes.  Mais  il  y  a  une  ref- 
fource  forr  aifée  dans  le  monde  du  Tal- 
mud  ,  c'eft:  que  les  murailles  du  Quarré 
intérieur  j  &  les  Sales  ou  Sacrifties  qui 
y  étoient  attachées  par  dedans  ,  quoique 
naturellement  immobiles  ,  devenoient 
fluides  pour  fe  laifTer  pénétrer  par  les 
files  des  Prêtres. 

Il  y  auroit  de  l'ennui  à  développer 
toutes  les  fuites  prodigieufes  qui  font 
enfermées  dans  ces  commencemens. 
L'Auteur  les  pénètre  tout  d'un  coup. 
Mais  comme  on  eft  porté  A  fe  dillimuler 
à  foi- même  les  impollibilités  du  parti 


Dissertation  XXIX.  391 
où  l'on  s'eft  engagé  ,  j'ai  été  bien-aife, 
par  ce  peu  que  je  lui  en  ai  remis  devant 
les  yeux  ,  de  lui  donner  lieu  d'apperce- 
voir  même  ce  que  je  n'en  ai  pas  dit  _,  &c 
d'examiner  s'il  peut  dévorer  toutes  ces 
difficultés  ,  femblable  à  celui  dont  il 
eft  parlé  dans  le  Livre  de  Job ,  c.  40.  v. 
28.  Ecce  abforbebit  fluvium  _,  &  non  mi~ 
rabitur  _,  &  habet  fiduciam  quoi  influât 
Jordanis  in  os  ejus*  Je  n'ai  rien  outré  ni 
falfifié,  au  moins  volontairement  j  Se 
qui  foit  de  ma  connoiffance.  S'il  s'eft 
gliifé  par  mégarde  &  malgré  moi ,  quel- 
que erreur  dans  le  calcul ,  il  me  la  doit 
pardonner  ,  elle  ne  va  pas  à  une  grande 
conféquence. 

§.XXÏI. 

Miracle*  dans  le  tems  ou  dans  la  durée 
de  toute  la  cérémonie  Pafchale  _,  dijïri- 
buée  entre  les  facrifiecs  particuliers* 

Il  ne  me  refte  plus  à  repréfenter  que 
les  miracles  qui  regardent  le  tems.  Les 
Rabbins  y  ont  foute  nu  jufqu'au  bout 
leur  caractère  de  Taumaturgues.  Ils  ont 
tellement  enchéri  fur  Moïfe^  qu'il  fem- 
ble  que  ce  Prophète  au  prix  d'eux  n'é- 
toit  qu'un  apprentif  en  fait  de  prodi- 
ges. 

Riv 


55)1     Dl  S  S  ERTATION   XXIX. 

Le  tems  que  la  Loi  détermine  pour 
l'immolation  de  la  Pâque  eft  celui  qui 
fe  paffe  entre  le  Soleil  couchant  &  le 
Soleil  couché ,  félon  la  lettre ,  inter  duas 
vefperas\  ce  qui,  à  la  rigueur  ,  ne  com- 
prendroit  qu'une  heure ,  depuis  5  juf- 
qu'à 6  pendant  l'Equinoxe.  Mais  parce 
que  la  préparation  entière  demandoit 
plus  de  tems  ,  on  a  étendu  le  couchant 
jufqu'à  l'efpace  de  trois  heures  ,  dont  la 
dernière  depuis  5  jufqu'à  6  étoit  em- 
ployée à  rôtir  l'Agneau  Pafchal  ,  &  les 
deux  précédentes  étoient  confacrées  à 
l'immolation.  C'eft  ce  que  nous  appre- 
nons de  Jofeph  ,  qui  étant  Sacrificateur, 
devoit  bien  favoir  le  tems  où  corn- 
mençoit  .,  &  où  finifïbit  une  cérémonie 
où  il  avoit  alîifté  plusieurs  fois.  A  la 
fête  de  Pâque  _,  dit- il,  on  facrifïe  les 
Agneaux  depuis  la  neuvième  heure  du 
jour  jufquà  l'onzième  _,  1.  7.  de  la  Guer- 
re j  c'eft-à-dire  ,  depuis  trois  heures 
après  midi  jufqu'à  cinq  ,  vers  le  tems  de 
LEquinoxe.  11  laiffe  entendre  que  la  i  1 
heure  ,  qui  eft  la  dernière  du  jour ,  étoic 
deftinée  à  la  cuifine. 

Les  Rabbins  n'ont  rien  changé  dans 
ce  Règlement,  finon  qu'ils  ont  avancé 
environ  d'une  heure  le  tems  de  l'immo- 
lation. Maimonide  cité  par  l'Auteur, p. 
«  145  ,  dit  que  l'obligation  d'immoler 


Dissertation  XXIX.  % 9 j 
*>  la  Pâque  le  foir  du  1 4  écoit  fi  grande  , 
>5  que  fi  on  l'avoir  fait  une  heure  plu- 
»  tôt ,  ç'auroitété  un  facrifice  propha- 
«  ne.  Les  Juifs  dans  laMifna  établiiîent 
»  cecte  maxime  fur  la  foumilîion  exacte 
»?  qu'on  doit  à  la  Loi  j  qui  déterminant 
»  un  certain  tems,marquoit clairement 
»  qu'on  ne  le  pouvoit  pas  faire  dans 
3)  un  autre.  Or  elle  détermine  le  tems 
»  dans  ces  paroles  :  lmmolabifquc 
Phafe  vefperc  ad  Jolis  occafum  j  quando 
egrejfus  es  de  ^Egypto  :  Vous  immo- 
lerez la  Pâque  vers  le  foir ,  qui  ejl  le  tems 
où  vous  êtes  forti  de  l'Egypte.  Deut.  c. 
16.  6. 

Il  efl:  maintenant  fort  aifc  de  régler 
le  tems  que  duroit  ,  félon  les  Rabbins, 
l'immolation  de  chaque  agneau.  On  les 
égorgeoit  au  bout  des  files  ,  afin  que 
leur  fang  put  être  porté  de  main  en 
main  jufqu'à  l'Autel.  Suppofonsqueles 
Prêtres  fe  diftribuafTent  en  120  files; 
comme  en  effet ,  c'e^t  plus  qu'il  ne  s'en 
pouvoit  ranger  dans  cj  petit  nombre  de 
portes  par  où  elles  devoienr  s'étendre  du 
petit  Quarré  dans  le  grand.  Ainfi  on  ne 
pouvoir  immoler  à  la  fois  que  120 
agneaux.  Il  y  en  avoit  quelquefois,  félon 
Jofeph  ,  25  5600  deftinés  au  facrifice  , 
qui  étant  divifés  par  120  files  ,  don- 
naient à  chacune  2130  agneaux  à  immo- 

Rv 


394  Dissertation  XXIX. 
1er  dans  l'efpace  de  deux  heures.  Er 
comme  deux  heures  comprennent  120 
minutes  ,  fi  on  les  partage  entre  les 
2130  agneaux  ,  on  trouvera  que  dans 
l'efpace  d'une  minute  on  devoit  immo- 
ler 17  agneaux  ,  ce  qui  n'iroit  encore 
qu'à  2040  agneaux  immolés.  11  en  ré- 
itéra 90  dont  il  faudra  rejetter  par 
furcroit  l'immolation  fur  90  minutes  , 
à  chacune  le  fien.  Et  pour  terminer 
clairement  ce  compte  de  120  minutes  , 
il  y  en  avoit  90  dans  chacune  defquel- 
les  on  facrifioit  18  agneaux  ,  &  30  où 
dans  chacune  on  en  facrifioit  17.  Et  en 
quoi  confiftoit  ce  facrifice  ?  1.  A  égor- 
ger l'agneau.  2.  A  biffer  égouter  tout 
fon  fang  dans  une  coupe  qui  alloit  de 
main  en  main  jufqu'à  l'Autel  le  long 
d'une  file  de  mille  Prêtres.  3.  A  lui 
pafTer  un  bâton  entre  les  jambes  liées. 
4.  A  le  fufpendre  a  un  crochet  ,  où  au 
moins  fur  l'épaule  de  fon  compagnon 
&  fur  la  fienne.  5.  A  lui  ouvrir  le  ven- 
dre. 6.  A  en  fcparer  la  graiffe.  7.  A 
la  mettre  en  réferve  dans  un  plat  pour 
être  brûlée  fur  l'Autel.  8.  A  dépouiller 
l'agneau.  Et  tout  cela  dans  la  1  8  ou  la 
17  partie  d'une  minute.  On  ne  peut 
pas  mieux  ménager  un  tems  fi  court  ôc 
fi  précieux.  On  nous  dit  que  les  coupes 
fembloient  voler  jufquà  l'Autel  ,   tant 


Dissertation  XXIX.  3 9 5 
elles  alloient  vite.  C'en  eft  trop  peu  dire 
pour  une  fi  grande  diligence  ;  il  falloir, 
qu'elles  enflent  la  vîtelfe  de  l'éclair,  qui 
patte  dans  un  clin  d'œil  de  l'Orient  à. 
l'Occident.  Et  ce  qui  eft  inconcevable  > 
chaque  Prêtre  devoit  avoir  le  loifir  de 
donner  une  coupe  pleine  de  fang  à  un  de 
fes  voitins ,  qui  en  même-tems  lui  en 
donnoit  une  vuide  ,  &  tout  de  fuite  de 
donner  à  l'autre  cette  coupe  vuide  à  un 
autre  qui  lui  en  donnoit  une  pleine. 

Je  dis  cela  dans  la  fuppofition  que  le 
flux  &  le  reflux  des  coupes  fe  fit  par  la 
mcme  file.  Car  je  fçai  qu'ailleurs  on 
fuppofe  ,  ce  qui  feroit  un  peu  plus  em- 
barrallant }  qu'une  file  de  Prêtres  rece~ 
volt  les  coupes  pleines  de  fang  _,  &  qu'une 
autre  file  Us  rapportoit  vuides.  Let.p.  515 
parce  qu'alors  chaque  agneau  Pafchal  oc- 
cupant deux  files ,  il  raudroit  les  dou- 
bler ,  Se  de  120  en  faire  240  qui  cau- 
feroient  un  peu  d'embarras  dans  les  fept 
portes  où  elles  dévoient  palfer. 

Qu'y  a-t-il  de  plus  miraculeux  que 
toute  cette  cérémonie  f  On  veut  dimi- 
nuer notre  étonnement  par  l'exemple  du 
grand  nombre  de  victimes  que  Salomon 
fit  immoler  le  jour  de  la  Dédicace  du 
Temple  jufqu'au  nombre  de  210000 
brebis.  Mais  en  cela  il  n'y  avoit  rien 
d'extraordinaire,  ni  pour  le  tems  >  ni 

Rvj 


39^  Dissertation  XXIX. 
pour  le  lieu  des  facrifices  ,  ni  pour  h? 
nombre  des  victimes.  Tout  le  jour  de 
la  Dédicace  fut  employé  à  ce  pieux  offi- 
ce ,  au  lieu  qu'on  n'avoitque  deux  heu- 
res pour  immoler  la  Paque.  Une  partie 
de  ces  facrifices  de  Salomon  le  fit  dans 
les  rues  pendant  la  marche  de  la  pompe 
de  la  Translation  de  l'Arche.  Le  Roi 
Salomon  &  tout  le  peuple  d'Ifra'èl  qui 
syétoit  afjemblé  auprès  de  lui  >marchoient 
devant  V Arche  ,  &  on  immoloit  cepen- 
dant  des  brebis  &  des  bœufs  fans  nom- 
bre &  fans  prix  y  3.  Rois  5  c.  8.  C'eft 
ainfi  que  lorfque  David  la  transfera  de 
la  maifon  d'Obededom  dans  la  fienne  ; 
de  fix  pas  en  fix  pas  il  immoloit  un  bœuf 
êc  un  bélier  :  Cumque  tranfeendiffent 
qui  portabant  arcam  Dominifex  paffus , 
immolabat  bovem  &  arietem.i.  Rois,  c. 
6.  Ainfi  toute  la  ville  de  Jérufalem  étoit 
le  lieu  du  facrifice.  Ici  au  contraire  on 
prétend  que  toutes  les  victimes  de  la  Pa- 
que dévoient  s'immoler  dans  l'enceinte 
du  Temple.  Enfin  quelle  proportion  y 
a-t-il  de  22000  bœufs  &  de  120000 
brebis  qui  font  142000  victimes,,  avec 
25  5600  agneaux  ?  11  y  a  différence  de 
près  de  la  moitié.  11  faut  donc  recon- 
noître  que  la  Dédicace  de  Salomon  n'eft 
pas  comparable  à  la  Paque  des  Rabbins. 
Elle  ne  pouvoit  prefque    s'accomplir 


Dissertation  XXIX.  5 97 
fans  le  miracle  du  mouvement  en  un 
inftant. 

On  croira  peur-être  que  je  dis  cela 
pour  égayer  un  peu  cette  matière  en- 
nuyeufe.  Mais  il  y  a  des  admirateurs  des 
écrits  des  Rabbins  ,  qui  ,  bien  loin  de 
me  défavouer  ,  enchériront  encore  fur 
tout  ce  que  je  dis  par  un  nouveau  fur- 
croit  de  merveilles.  Cunaeus  ,  Auteur 
d'ailleurs  fort  habile  dans  fa  République 
des  Hébreux  jy  1.  2.  ayant  promis  dans  le 
tit.  du  ch.  13.  des  chofes  fingulieres  & 
prefqu  incroyables  touchant  la  fête  de 
Pâque  :  De  fejlo  Pafchatis  Jingulare 
quid  ,  &  pene  fupra  fidem  ;  accomplir 
fa  promeffe,  non  par  ces  longues  files 
de  Prêtres,  rangés  en  double  haie,  qu'il 
avoit  lues  fans  doute  dans  Maimonide  ; 
maisenfaifant  immoler  fur  le  même  Au- 
tel des  Holocauftes  les  25  5600  agneaux 
de  Jofeph  :  Porrb  harum  omnium  (vicli~ 
marum  )    immolatio  facla  in  uno  altari 

tfl. 

Que  peur-on  ajourer  à  cerre  merveille  ? 
Pour  moi  je  n'oferois  m'y  oppofer  ,  de 
peur  que  pour  punir  mon  incrédulité,  il 
ne  prenne  envie  à  quelqu'aurre  d'enché- 
rir encore  par  dépir  fur  Cunxus  ,  &  de 
me  foutenir  que  l'immolation  s'en  fai- 
foit  en  moins  de  deux  heures  dans  le 
même  endroit  de  l'Autel ,  qui  ayant; 


$98      DlSSERTATÎON   XXIX. 

félon  les  Talmudiftes  3 1  coudées  en 
quarré  ,  pouvoit  au  moins  fervir  en 
même-  teins  à  plufieurs  facrifîces.  Il  faut 
pardonnet  ces  actes  de  foi  a  ceux  qui  re- 
çoivent avec  refpect  tout  ce  qui  vient  de 
la  part  des  Rabbins,  fans  fe  mettre  fort 
en  peine  s'ils  s'accordent  ou  non  avec  les 
Auteurs  contemporains  ôc  avec  les  té- 
moins oculaires.  Mais  ceux  qui  ne  fe 
font  pas  une  Religion  de  les  croire  aveu- 
glement ,  en  concluront  que  tous  ces 
faits  ne  font  que  des  fables  mal  concer- 
tées ,  qui  à  force  d 'affecter  le  merveil- 
leux ,  donnent  dans  Timpollible.  Qu'ils 
les  ont  fabriquées  exprès  pour  étourdir 
les  Gentils ,  foit  Chrétiens ,  foit  idolâ- 
tres du  récit  des  merveilles  prérendues 
de  leur  Judaïfme}  Se  fur  tout  pour  leur 
donner  une  idée  magnifique  de  la  Pâ- 
que ,  la  première  ôc  la  principale  de  leurs 
fêtes. 

§.    XXIII. 

Sainteté  exigée  par  les  Rabbins  pour  la 
Pâque  dans  l'intention  exprejje  _,  dans 
l'attention  continuelle  ,  &  dans  la 
manière  de  rôtir  l'Agneau  PafchaL 

Après  les  miracles  examinons  les  cé- 
rémonies qui  marquent  la  fainteté  pré- 


.  Dissertation  XXIX.  3 99 
tendue  des  Juifs  dans  l'exacte  obferva-^ 
tion  de  la  Loi  de  la  Pâque  ;  de  ne  choi- 
fiflbns  que  celles  qu'on  mec  en  preuve 
contre  la  dernière  Pâque  de  Jefus- 
Chrift. 

La  I.  circonftance  fort  contraire  à  ceux 
qui  veulent  que  Notre-Seigneur  ait  pu 
faire  la  Pâque  féparement  fans  la  parti- 
»  cipationdes  Prêtres  ,  eft  que  dans  le 
»  facrifice  de  la  Pâque  ^  comme  dans  tous 
>s  les  autres,  ceux  qui  étoient  députés 
»  pour  l'offrir  j  dévoient  marquer  leur 
»  intention  ,  p.  157.  La  Mifna  veut 
»  qu'on  dife  exprelfement  fi  c'eft  pour 
»  la  Pâque  qu'on  offre.  Or  il  eft  bien 
certain  que  le  Jeudi  où  l'on  prétend  que 
Jefus-Chrift  fit  la  Pâque  .,  ni  lui  j  ni  les 
deux  Difciples  députés  pour  l'apprêter  , 
ne  déclarèrent  point  aux  Prêtres  que  leur 
intention  étoit  de  manger  la  Pâque. 

Je  réponds  déjà  pour  ceux  qui  croyent 
que  les  Juifs  la  firent  le  Jeudi  comme 
Jefus-Chnft,  qu'on  avance  cela  en  l'air; 
que  fi  cette  déclaration  étoit  néceffaire, 
rien  n'empêche  que  les  Difciples  ne 
Payent  pu  faire ,  &:  le  filence  de  l'Ecri- 
ture ne  feroit  pas  une  raifon  pour  ne  le 
croire  pas ,  puifque  tout  ce  qui  s'eft  fait 
n'a  pas  été  écrit.  Mais  comme  je  ne 
puis  pas  ufer  de  cette  réponfe,  moi  qui 
tiens  que  la  Pâque  des  Juifs  ne  fe  fit  que 


Î4oo  Dissertation  XXIX. 
le  Vendredi  :  Je  demande  feulement  fur 
quoi  eft  fondée  la  nécefîité  de  cette  dé- 
claration .<*  Sur  ce  partage  ,  répond  Mai- 
monide  :  T u  facrïficras  la  Pâqueau  Sei- 
gneur _,  Deut.  c.  1 6.  v.  i .  Or  il  faut  que 
l'intention  d'obéir  foit  jointe  à  Tobéif- 
fance  \  Se  afin  qu'on  n'en  doute  point , 
il  faut  la  déclarer. 

Mais  fauf  le  refpecl  qu'on  doit  à  la 
Mifna  8c  à  fon  Interprète  Maimonide  , 
n'eft-ce  pas  aflfez  qu'on  obéifte  à  la  Loi  ? 
de  cette  obéiftance  effective  ne  lui  fatis- 
fait-elle  pas  >  puifqu'elle  eft  inféparable 
de  l'intention  f  Car  qui  ferok  affez  in- 
fenfé  pour  faire  tout  ce  que  la  Loi  com- 
mande, &  n'avoir  pas  l'intention  de  lui 
obéir  ?  Que  s'il  la  faut  déclarer ,  ache- 
ter un  agneau  qui  a  toutes  les  conditions 
requifes  par  la  Loi ,  l'apporter  dans  le 
Temple  le  foir  du  14  de  Nifan  ,  ÔC 
l'égorger  en  même-tems  qu'on  immole 
tous  les  autres ,  n'eft  ce  pas  une  déclara- 
tion bien  expreife  qu'on  veut  faire  la 
Paque  ?  Et  celui  qui  feroit  afifez  bizarre 
pour  ne  vouloir  pas  faire  la  Paque,  en 
faifant  tout  ce  que  la  Loi  commande 
pour  cela  ,  feroit- il  fcrupule  de  mentir 
en  déclarant  aux  Prêtres  une  intention 
qu'il  n'auroit  point  eue? Non  fans  dou- 
te :  mais  cette  déclaration  étoit  nécellai- 
re  pour  la  famteté  Judaïque, 


Dissertation  XXIX.  40T 
II.  Les  Rabbins  n'en  demeurent  pas 
là  ,  &  ils  la  portent  jufqu'â  défendre 
aux  Juifs  la  moindre  diffraction  pendant 
toute  la  cérémonie ,  fouis  peine  à  eux  de 
n'offrir  à  Dieu  qu'une  Pâque  fouillée  5c 
profane.  Maimonidc  ,  nous  dit  l'Au- 
teur p.  157.  pouffe  la  chofe  fi  loin  _,  que 
fi  en  immolant  la  victime  on  avoit  penfé 
à  une  autre  forte  de  victime  \  le  Jacri- 
fice  auroit  été  imparfait.  Il  a  flatté  ,  &C 
même  énervé  la  penfée  de  ce  Rabbin  , 
qu'il  repréfente  ailleurs  dans  toute  fa 
force  ,  Let.  p.  35.  Elle  eft  tirée  de  (on 
Livre  Corban  Pefach.  c.  15.  De facris 
temeratis  j  Des  facrifices  fouillés.  Agnus 
Pafchalis  3  fi  per  immolationem  ejusno- 
men  aliud  cogitaretur  _,  feu  nomen  alte- 
ri  us  viclimA  ,  feu  nomen  befli a  profanée  5 
utique  temeraretur.  Si  pendant  l'immo- 
lation de  V Agneau  Pafchal _,  il  venolt 
feulement  dans  l'efprit  Vidée  ou  le  nom 
de  quelqu  autre  chofe  j  foit  que  ce  fut 
le  nom  d'une  autre  victime  jou  celui  d'un 
animal  profane  ou  immonde  ,  la  Pâque 
deviendroit  profane.  Or  qui  peut  répon- 
dre que  faint  Pierre  &:  faim  Jean  n'ayent 
pas  eu  quelque  diflraCtion  femblable  , 
6c  qu'en  préparant  la  Pâque  pour  le 
Seigneur,  ils  n'ayent  pas  fongéouàla 
Pâque  de  l'année  précédente  ,  ou  aux 
«Jeux  animaux,  dont  l'un  le  porta  dans 


40i  Dissertation  XXIX. 
fon  entrée  à  Jérufalem.  Il  n'y  a  fans 
doute  que  Dieu  qui  le  fâche.  Quoi 
qu'il  en  foit  ,  voilà  une  perfection  telle 
qu'elle  fe  peut  trouver  dans  les  Anges 
&c  dans  les  Saints  du  Ciel;  &  je  ne  fcai 
fi  l'homme  dans  l'état  d'innocence  en 
étoit  capable.  Mais  où  eft-ce  que  Mai- 
monide  a  trouvé  un  commandement  fi 
difficile  ?  Dans  l'Exode,  c.  12.  v.  27. 
Vous  leur  dire% ,  dit  Dieu  à  Moïfe ,  c'eJZ 
la  victime  du  paffage  du  Seigneur.  La 
preuve  eft  aufli  merveilleufe  que  la  thé- 
fe  ;  &  après  cela  on  ne  doit  plus  douter 
de  la  nullité  de  la  dernière  Pâque  de 
Jefus-Chrift. 

Une  autre  preuve  miraculeufe  de  la 
fainteté  des  Juifs  dans  la  célébration  de 
la  Pâque  ,  eft  la  fcrupuleufe  obfervation 
de  cette  Loi  :  Vous  ne  mangere^  rien 
qui  foit  crû  ,  ou  qui  foit  cuit  dans  l'eau  3 
mais  feulement  rôti  au  feu  ,  p.  1 6 1 .  Mai- 
monide  dit  que  celui  qui  auroit  mangé 
de  la  chair  de  l'Agneau  Pafchal  bouillie, 
feulement  de  la  grofTeur  d'une  olive,  au- 
roit été  condamné  au  fouet.  Pour  éviter 
»  ce  crime  &  ce  malheur  ,  il  enfeigne  , 
3J  ibid.  Que  la  véritable  manière  de  rô- 
>j  tir  V Agneau  3  eft  de  lui  pajfer  depuis 
55  la  tête  jufquau  bas  une  broche  de 
55  bois  ,  de  le  f uf pendre  dans  un  four  par 
»  cette  broche  j  &  de  faire  du  feu  deffous  j 


Dissertation  XXIX.  405 

53  ainji  la  broche  nétoit  pas  couchée  fe- 
»  Ion  notre  ufage.  Elle  demeuroit  droite 
j>  pendant  que  le  feu  qui  étoit  autour 
«  cuifoit  V Agneau.  Quelqu'un  croira 
peut-être  que  naturellement  la  broche  &: 
PAgneauqui  ne  tournoient  point,  dé- 
voient brûler.  Mais  c'eft  en  cela  que 
confiftoit  le  miracle.  S'ils  PeulTent  tour- 
né devant  le  feu ,  dans  une  broche  de 
fer  ,  comme  on  en  ufe  parmi  nous  ,  il 
n'y  auroit  eu  en  cela  rien  d'extraordi- 
naire. Cela  ne  comenroit  pas  ces  gens- 
là  avides  de  miracles  ,  Judù  Jîgna  pe- 
tunt.  11  a  donc  fallu  fe  fervir  d'une  bro- 
che de  bois ,  &  la  tenir  droite  &  immo- 
bile avec  fa  charge  au-deffus  du  feu ,  en 
faifant  défenfe  au  feu  de  brûler  la  broche 
&  la  charge. 

Ce  n'eft  pas  tout ,  l'importance  eft  de 
bien  choifir  le  bois  dont  on  veut  faire  la 
broche,  p.  161.  Prefque  tous  les  bois 
»?  rendent  de  Peau  quand  ils  font  écauf- 
»  fés  :  ce  qui  feroit  un  mal  dans  cette 
»  occafion  ;  car  Peau  fe  mêlant  avec 
»  l'Agneau .,  fa  chair  feroit  plutôt  bouil- 
»  lie  que  rôtie.  On  dira  peut-être  que 
cela  n'étoit  pas  fort  à*  craindre ,  puifque 
le  bois  ne  rendant  l'eau  que  lorfqu'ii 
brûle,  il  ne  la  rend  que  par  les  bouts, 
fort  loin  de  l'Agneau  j  qui  étoit  au  mi- 
lieu de  la  broche.  N'importe  la  fainteté 


404  Dissertation  XXIX. 

Judaïque  demandoit  cette  exactitude. 
Mais  enfin  de  quel  boisdevoit-on  ufer? 
La  Mifna  prefcrit  du  bois  de  grenadier, 
parce  que  ,  dit  notre  Docteur  Juif,  ce 
bois  ne  rend  point  d'eau  quand  il  eft 
échauffé. 

Or  eft  il  vraifemblable  que  Pierre  Se 
Jean  ayent  eu  cette  précaution  ?  11  eft 
hors  de  doute  qu'ils  ne  firent  manger  à 
leur  Maître  qu'une  Paque  bouillie  dans 
la  broche  ,  &  par  conféquent  facrilége. 
Eurent-ils  feulement  la  diferétion  de  fé- 
parer  les  entrailles  de  la  victime  pour 
les  faire  rôtir  à  part  ,  parce  qu'étant 
humides  ,  elles  dévoient  naturellement 
bouillir  dans  le  ventre  de  l'Agneau  ? 
Cela  eft  en  effet  fort  incertain. 

§.  XXIV. 

Réponfc  aux  pajfages  de  V ancien  Tejla- 
ment  cités  contre  la  dernière  Paque  de 
Jefus-Chrifl.  En  quel  fens  tout  le 
Peuple  d3 Ifraél  étoit  obligé  d'immoler 
V Agneau  PafchaL 

Si  l'Auteur  de  l'Harmonie  ne  nous 
oppofoitque  les  Rabbins,  nous  nous  en 
déferions  à  peu  de  fraix  ,  en  rejettant 
leurs  témoignages  comme  une  monnoie 
de  faux  alloi.  Mais  comme  il  les  fou- 


Dissertation  XXIX.  405 
tienc  par  l'autorité  facrée  de  l'Ecriture, 
ôc  ce  qui  eft  merveilleux  ,  qu'il  n'épar- 
gne pas  même  les  Evangéliftes,  qui  nous 
apprennent  que  Jefus-Chrift  a  fait  la 
dernière  Pâque  ;  il  eft  jufte  de  féparer 
l'Ecriture  d'avec  la  Mifna  ,  &  l'Evangile 
d'avec  le  Talmud  ,  pour  rendre  à  cha- 
cun d'eux  ce  qui  lui  appartient.  J'exa- 
minerai les  pafTages  qu'il  nous  objecte  3 
félonie  rang  qu'ils  tiennent  dans  l'an- 
cien &  dans  le  nouveau  Teftament. 

Le  I.  qui  fe  préfente  eft  dans  l'Exode 
c.  12.  v.  6.  Immolabitque  eum  univerfa 
multitude  filiorum  Ifraèl  ad  vefperam. 
Toute  la  multitude,  de  Enfans  d*  Ifraèl 
immolera  V Agneau  Pafchal  au  foir.  Que 
conclud-il  de-la  ?  Que  félon  l'Original 
les  Septente  ,  les  Parapharafes  ,  &  les 
Hiftoriens  ,  lefens  de  la  Loi  étoit  que 
tous  les  Ifraèlites  dévoient  s' 'ajfembler 
pour  l'immolation  de  la  Pâque  y  Let.  p. 
41.  J'y  confens  de  bon  cœur;  &  pour 
le  témoigner  ,  je  trouve  très-conforme 
au  bon  lens  que  pour  faire  la  première 
Pâque  dans  l'Egypte  ,  Moïfe  ait  alTern- 
blé  dans  un  même  lieu  tout  le  peuple 
d'Ifracl  ,  pour  être  en  état  de  partir  in- 
ceffammentau  premier  ordre  qui  devoit 
venir  après  la  mort  des  premiers  nés. 
Les  enfans  d* Ifraèl  partirent  de  Kamefft 
dans  Sccoth  au  nombre  d'environ  600000 


406    DlSSER  TATION    XXIX. 

hommes  de  pie  >  fans  compter  les  enfans 
6*  une  multitude  innombrable  de  toutes 
fortes  de  gens.  Par  conféquent  il  y  a  voie 
affemblé  tout  ce  monde  pour  y  célébrer 
laPâque.  Jufques-là  nous  n'aurons  au- 
cun différend. 

llconclud  en  2.  lieu  de  cette  convo- 
cation que  la  Pâque  fe  devoit  donc  faire 
dans  le  Temple  \  8c  moi  par  la  même 
raifon  j'ajoutedans  le  Tabernacle.  Mais 
comme  on  eft  frappé  d'abord  de  l'énor- 
me difproportion  qu'il  y  avoit  de  cette 
multitude  innombrable  avec  desefpaces 
(\  petits  ;  il  retracte  bien-tôt  ce  qu'il  a 
avancé  :  //  riétoit  pas  néceffaire  j  dit-il 
p.  42.  que  tous  fe  trouvaient  dans  le 
Temple  à  V heure  de  V immolation.  Il 
?i'y  avoit  pas  la  dixième  partie  du  peu- 
ple qui  fût  obligée  de  fe  trouver  à  l'af- 
femblée  qui  fe  faifoit  dans  le  Temple,  Il 
fe  relâche  encore  plus  fur  l'autorité  de 
Jofeph ,  qui  témoigne  que  pour  manger 
un  agneau  on  s'afîembloit  quelquefois 
au  nombre  de  vingt  perfonnes.  //  fc 
pouvoit faire  ,  dit- il  Let.  p.  43.  qu'il 
ri  y  eût  que  la  quinzième  ,  8c  j'ajoute 
la  vingtième  partie  du  peuple  qui  fe  trou- 
yât  dans  le  Temple.  J'appelle  cela  une 
rétra&ation  ,  8c  c'en  eft  même  plus  que 
je  ne  demande.  Car  j'en  conclus, que, 
félon  ce  fyûeme ,  toute  la  multitude,  des. 


Dissertation    XXIX.     407 

tnfans  d'Ifra'ël  nimmoloit  donc  pas  V  A- 
gneau  Pafchal.  Que  fî  on  s'opiniâtre  à 
foutenir  l'un  &  l'autre  ,  j'appellerai  cela 
une  contradiction.  Car  en  quel  bon  fens 
peut-on  dire  :  Tout  le  peuple  dévoie 
immoler  la  Pàque.  Mais  ce  n'étoit  pas 
tout  le  peuple  qui  devoit  immoler  ,  il 
n'y  en  avoit  que  la  quinzième  ou  la 
vingtième  partie  ?  11  eft  donc  réduit  à 
avouer  Tune  de  ces  deux  extrémités ,  ou 
contre  le  ben  fens ,  que  la  1 5  ou  la  20 
partie  du  peuple  ett  tout  le  peuple  ,  ou 
contreles  paroles  exprefles  de  l'Ecriture, 
que  tout  le  peuple  n'immoloit  pas  l'A- 
gneau Pafchal. 

Puis  donc  qu'il  faut  trouver  un  fens 
raifonnable  à  l'Ecriture,  on  n'a  déjà  qu'à 
prendre  toute  cette  multitude  dans  un 
fens  diitributif  pour  chaque  famille  du 
peuple, dans  le  même  fens  qu'on difoit, 
tout  le  peuple pay oit  le  tribut  au  Temple , 
c'eft-à-direj  chaque  particulier  du  peu- 
ple. On  ne  peut  éviter  cette  diftribution, 
puifqu'on  n'immoloit  pas  pour  un  feul 
agneau  }  mais  que  dans  le  Temple  mê- 
me l'Auteur  avoue  que  chaque  chef  de 
famille  immoloit  le  fien.  Or  le  fens 
collectif  donneroit  cette  idée,  que  tout 
le  peuple  feroit  alfemblé  pour  immoler 
un  feul  agneau  ,  immolabit  eum.  D'ail- 
leurs ,  il  faut  expliquer  cette  aflemblée 


*4oS  Dissertation  XXIX. 
générale  dans  le  même  lieu  ,  non  par 
rapporta  un  lieu  particulier  ;  comme  un 
Temple  ou  un  Tabernacle  ;  mais  à  une 
ville  >  ou  à  l'enceinte  d'une  grande  ha- 
bitation en  l'oppofant  à  toutes  les  autres 
villes  de  la  Judée.  De  cinquante  exem- 
ples que  j'en  pourrois  citer ,  je  me  con- 
tente d'un  feul ,  d'autant  plus  fort  qu'il 
regarde  la  Pâque  dont  il  s'agit.  On  na- 
voit  pu  faire  la  Pâque  en  fon  tems^parce 
que  le  peuple  ne  s*  et  oit  pas  encore  a  (Je  ta- 
blé dans  la  ville  de  Jérufalem  .  2.  Par.  c. 
3  o  V.  3 .  Et  populus  nondum  congregatus 
fuerat  in  Jérufalem.  Voilà  l'alTemblée 
générale  dans  le  même  lieu  que  la  Loi 
demande  pour  le  facrifice  de  la  Pâque. 

Sur  cela  je  demande  à  rout  homme 
tant  foit  peu  Latin  ,  lequel  de  ces  deux 
fens  exprime  mieux  la  généralité  de 
l'alTemblée  du  peuple  :  Vnïverfa  multi- 
tudo  congre gâta  ;  le  premier  conçu  en 
ces  termes  :  La  quinzième  partie  du 
peuple  a  ((emblée  dans  le  Tabernacle  ou 
dans  le  Temple  immolera  V Agneau  Paf- 
chal.  Ou  le  fécond  en  cette  forte  :  Tout 
le  peuple  généralement  affemblé  à  Jéru- 
falem _,  ou  dans  quelqu  autre  ville  _,  fera 
chacun  che%  foi  cette  immolation.  11  ne 
faut  qu'entendre  les  termes  pour  préfé- 
rer la  féconde  traduction. 

11  elt  vrai  qu'on  aie  fait  pas  dans  le 

fyfteme 


Dissertation  XXIX.  40a 
fyftème  de  la  Pâque  du  Temple  roue  ce 
qu'on  voudroit  bien  ;  Se  on  eft  terrible- 
ment gêné  entre  coûte  la  multitude  de  le 
Temple.  Si  on  diminue  le  nombre  des 
ofFrans  jufqu'à  la  1 5  ou  la  20  partie  du 
peuple  ,  pour  les  faire  tenir  tous  dans  le 
Temple  ,  on  s'éloigne  de  toute  la  mul~ 
tltude.  Si  pour  s'en  rapprocher  on  veut 
multiplier  le  nombre  des  ofFrans,  on  ne 
peut  plus  les  faire  tenir  dans  l'enceinte 
du  Temple.  C'eft  un  embarras  dont  on 
ne  peut  fortir.  Il  n'y  a  que  les  Rabbins 
qui  s'en  jouent  à  la  faveur  des  miracles 
qui  ne  leur  coûtent  rien  ,  &  que  des 
Auteurs  Chrétiens  n'oferoientpas  adop- 
ter. 

Revenons  donc  à  notre  paffage  ,  & 
difons  qu'il  prouve  invinciblement  que 
la  première  Paque  fut  immolée  dans  les 
maifons  particulières  ,  Se  par  chaque 
chef  de  famille  au  milieu  de  (es  domefti- 
ques  ,  pour  être  plus  à  portée  de  faire 
l'afperfion  du  fang  fur  le  haut  de  la 
porte  *,  cette  Loi  a  été  faite  lorfqu'il  n'y 
avoit  encore  ni  Prêtres,  ni  Tabernacle  , 
ni  Temple.  Ainfi  rien  de  tout  cela  n'é- 
toitnccelfaire  à  l'immolation  de  la  Pa- 
que. Autrement  la  première  eût  été  fort 
irréguliere  &  défe&ueufe  ;  cependant 
quelle  Paque  a  du  être  plus  exa&e  &C 
plus  conforme  à  la  Loi  que  la  première 
Tome  IV.  S 


410     Dissertation  XXIX. 
qui  s'eft  faite  fous  les  yeux  mêmes  du 


Législateur. 


§.  XXV, 


Que  la  première  difpofition  de  la  Pâque 
n'a  point  été  changée  par  les  Loix 
des  autres  facrifices.  Différences  entre 
ces  facrifices  &  celui  de  la  Pâque  r 

L'Auteur  fe  récrie  contre  cette  pro- 
portion y  Let.  p.  48  ,  &  il  ne  peut  a£e% 
témoigner  la  furprife  ou  il  efl  de  ce  que 
ceux  qui  raifonnent  ainji  entendent  fi 
peu  l *  Ecriture  fainte  ,  qu'ils  ne  com- 
prennent pas  qu'alors  Dieu  navoitpoinc 
encore  fait  de  difiinciion  de  Laïques  & 
de  Prêtres  ,  que  le  Tabernacle  nétoit 
point  fait  _,  &  que  le  Temple  ne  fut  bâti 
que  plufieurs  fiécles  après.  Ce  feroit  en 
effet  une  fort  grofîiere  ignorance.  Mais 
comment  pourroient  -  ils  ignorer  des 
chofes  fur  quoi  tout  leur  raifonue- 
ment  eft  fondé.  Le  voici  dans  toute  fa 
force.  11  faut  juger  de  toutes  les  Pâques 
par  la  première  pour  ce  qui  regarde  les 
principales  circonftances  du  lieu  ,  du 
rems  ,  des  Minières  Se  des  vidlimes.  Or 
à  la  première  Pâque,  félon  l 'Auteur,  Ler. 
p.  48  ,  /'/  ne  pouvait  pas  y  avoir  de  Lot 
pour  faire  la  Paque  dans  un  certain   lieu 


Dissertation  XXIX.  411 
particulier  ,  comme  le  Tabernacle  &  le 
Temple  ,  puifqu'ils  n'étoient  pas  con- 
ftruits  '}  ni  on  ne  pouvoit  pas  avoir  re-> 
cours  au  minijlcre  des  Prêtres  ,  Ler.  pa 
48,  parce  qu'ils  n'étoient  pas  encore  éta- 
blis. Donc  ni  le  Tabernacle  _,  ni  le  Tem- 
ple ,  ni  les  Prêtres  n'ont  été  néceflaires 
à  toutes  les  Pâques  qui  ont  fuivi  la  pre- 
mière. En  effet,  Dieu  pouvoit-il  mar- 
quer plus  fentiblement  que  la  Pâque  ne 
dépendoit  d'aucune  de  ces  deux  circon- 
stances du  lieu  &c  des  perfonnes  ,  que 
par  les  dattes  dont  celle  de  la  Pâque  étoic 
antérieure  à  l'autre;  c'ell- à-dire,  en  éta- 
blitfant  cette  fête  dans  un  tems  où  il  nj 
avoit  encore  ni  Prêtres  >  ni  Temple  ,  ni 
Tabernacle  ? 

L'Auteur  nie  donc  cette  conféquen- 
ce,  8c  ce  principe  fur  quoi  elle  eft  fon- 
dée :  Qu'il  faut  juger  de  toutes  les  Pâ- 
ques par  la  première.  II  prétend  au  con- 
traire qu'après  le  Tabernacle  drejje  & 
les  Prêtres  choijis  ,  les  chofes  changèrent ; 
ce  qui  étoit  permis  auparavant  devint 
un  crime  y  Let.  p.  48.  Voici  comme  il 
le  prouve.  La  Pâque  j  dit-il  dans  le 
Traité  hift.  p.  1 1  8  _,  ejl  appellée  par  tout 
en  l'Ecriture  un  facrifice  \  fur  quoi  il 
cite  l'Exode  _,  c.  13  ,  v.  18.  Vous  ne  myim~ 
molere%  point  avec  du  levain  ;  le  fan  g 
de  la  yielime  qui  mejl  immolée  ,    &  la 

Sij 


4ii  Dissertation  XXIX. 
graijfe  de  Vhofiie  qui  mefi  offerte  ne  de- 
meureront point  jufquau  lendemain, 
C'eft  de  la  Pâque  qu'il  parle.  C'eft  une 
bonne  théfe  fout  mal  prouvée.  Car  il  on 
confulte  l'endroit  ,  on  verra  qu'il  ne 
parle  point  de  la  Pâque  en  particulier  , 
mais  des  trois  grandes  fêtes ,  dont  la  Pâ- 
que étoit  la  première.  Or  ceux  qui  nie- 
roient  que  l'Agneau  Pafchal  fût  un  fa- 
crifice ,  pourroient  dire  que  pour  obéir 
à  ce  précepte,  qui  eft  général  pour  tous 
les  facrifices  ,  il  fuffifoit  de  l'accomplir 
dans  ceux  de  la  Pentecôte  ,  de  la  fête 
des  Tabernacles ,  &  dans  toutes  les  au- 
tres de  Tannée  ;  &  qu'ainfi  la  preuve  de 
l'Auteur  eft  une  pure  illufion  :  Mais 
cela  n'eft  point  néceflaire  pour  prouver 
le  facrifice  de  la  Pâque  ;  on  n'a  befoin 
que  de  la  première  Loi  :  Immolabitque 
eum  univerfa  multitudo  ,  parce  que  l'im- 
molation ne  tombe  que  fur  une  victime, 
6c  toute  victime  immolée  eft  un  facri- 
fice. J'avoue  donc  fort  volontiers  que 
la  Pâque  eft  un  vrai  facrifice, 

A  cette  proportion  il  ajoute  .,  Trait. 
Hift.  p.  166  :  Or  il  eft  confiant  qu'on 
ne  pouvoit  faire  de  facrifice  que  dans  le 
Tabernacle  depuis  qu'il  fut  dreffé  _,  & 
enfuite  dans  le  Temple  après  qu'il  eut  été 
bâti.  Il  ne  refte  plus  qu'à  conclure  que 
la  Pâque  ne  s'immoloic  donc  que  dans 


Dissertation  XXIX.  415 
le  Tabernacle,  ou  dans  le  Temple.  J'at- 
tens  avec  impatience  la  preuve  de  cette 
féconde  proposition  ,  où  eft  toute  la 
difficulté.  La  voici ,  ibid.  p.  117  ,  tirée 
du  Lévitique  ,  c.  1 7 ,  v.  3 .  Si  un  homme 
de  la  maifon  d'ifraél  j  quel  qu'il  p^ijje 
être  j  ayant  tué  un  bœuf  ou  une  brebis 
dans  le  champ  _,  ou  hors  du  champ  _,  ne  la 
préfente  pas  à  l'entrée  du  Tabernacle 
pour  être  offerts  au  Seigneur  j  il  fera 
condamné  à  mort.  Et  plus  bas ,  v.  5.  Les 
enfans  a" Ifraél  doivent  préfenter  au  Prê- 
tre les   hojlies   qu'ils    auroient  égorgées 

dans  les  champs  ,    afin    que les 

Prêtres  les  immolent  au  Seigneur  com- 
me des  hojlies  pacifiques.  Enfin  ,  ib.  p. 
1 18.  plus  bas ,  v.  13.  Prene^  bien  garde 
de  ne  point  offrir  vos  holocaujles  dans 
tous  les  lieux  que  vous  verre\.  Maïs  of- 
fre^  vos  hojlies  dans  le  lieu  que  le  Sei- 
gneur votre  Dieu  aura  choifi  dans  F  une 
de  vos  Tribus  _,  6c.  Sur  cela  il  prétend 
que  Dieu  par  l'érection  du  Sacerdoce  & 
par  les  règles  du  facrifice ,  a  changé  toute 
la  difpofition  qu'il  avoit  faite  en  Egypte 
pour  l'immolation  de  la  Paque. 

Mais  il  ne  faut  pas  être  fort  entendu, 
dans  l'Ecriture  fainte  ,  Let.  p.  48.  pour 
voir  que  dans  tous  ces  lieux  on  nous 
donne  le  change  ,  &  qu'on  applique 
fans  raifon  à  l'Agneau  Pafchal  des  Ré- 

S  iij 


414      Dissertation  XXIX. 
glemens  qui  ne  regardent  que  les  facri- 
rkes,  foit  publics  .,  ou  particuliers ,  qui 
pouvoienr  s'offrir  tous  les  jours. 

Cela  fe  démontre  ,  I.  par  la  datte  de 
ces  Ordonnances.  Il  eft  certain  que  les 
Réglemens  prefcrits  dans  le  Lévitique 
pour  le  lieu ,  &  les  autres  circonftan- 
ces  de  tous  les  facrifîces  ordinaires  font 
poftérieures  à  la  Loi  delà  Pâquepourle 
moins  de  1 3  mois.  Si  donc  Dieu  en  fai- 
fant  ces  nouveaux  réglemens  qui  défen- 
dent de  facrifier  hors  du  Tabernacle  & 
du  Temple ,  eût  voulu  changer  la  pre- 
mière difpofition  de  laLoiPafchale,qui 
commandoit  d'immoler  la  Pâque  dans 
les  maifons  ,  il  eût  dérogé  à  cette  Loi 
par  une  mention  expreiTe  ;  car  c'efl  une 
maxime  qui  a  lieu  dans  la  Religion 
comme  dans  les  états  :  Que  les  Loix 
poftérieures  n'aboliflenr  point  celles  qui 
les  précédent  ,  à  moins  que  celles-là  ne 
dérogent  à  celles-ci  par  des  claufes  ex- 
prefles. 

On  doit  faire  ici  le  même  raifonne- 
ment  dont  l'Apôtre  prouve  que  l'allian- 
ce ou  la  promette  de  Dieu  à  Abraham 
n'a  pu  être  abolie  par  la  Loi  de  Moïfe  , 
poftérieure  de  430  ans  :  Tcjlamentum 
confirmatum  à  Deo  j  qu&  poj?  quadrin- 
gentos  &  trïginta  annos  facîa  ejl  Lex  j 
non  irritum  facit.  GaL  c.  3  ,  v.  17.  Mais 


Dissertation  XXIX.      415 
il  en  faut  juger  autrement ,  lorfque    le 
fécond  a&e  porte  une  dérogation  du  pre- 
mier.  Et  c'eft  par   cette  raifon  que  la 
nouvelle  alliance  a    aboli  l'ancienne  , 
comme  le  même  Apôtre    le  démontre 
dans  l'Epure  aux  Hébreux,  parce  que  le 
titre  de  nouvelle ,  qui  eft  donné  à  celle- 
là  par  les   Prophètes  mêmes  ,   eft  une 
qualité  dérogatoire   pour  celle  -  ci.  Il 
viendra  un  tems  ou  je  ferai  avec  la  mai- 
fon  d'Ifraél  &  avec  la  mal/on  de  Juda 
une  alliance  nouvelle .......   En   V  appel- 

lant  nouvelle  il  a  fait  voir  que  la  pre- 
mière fe  pajfoit  &  vieillijjbit  \  or  ce  qui 
Je  paffe  &  vieillit  eft  proche  de  fa  fin  : 
D kendo  autem  novum  veteravit  prius  A 
quod  autem  anùquatur  &  fenefeit  _,  pro- 
pe  interitum  eft.  îlebr.  c.  8  j  v.  15. 

Ox  ii  on  fait  la  revue  de  ces  Parta- 
ges ,  qu'on  prétend  avoir  changé  la  dif- 
pofirion  du  lieu  Pc  des  Miniftres  de  la 
Pâque  }  on  n'en  trouvera  pas  un  feul 
qui  parle  feulement  de  la  Loi  &  de  la 
Fête  Pafchale.  Ils  ne  regardent  tous  que 
les  facrifices  parriculiers  &  ordinaires 
qui  pouvoient  s'offrir  tous  les  jours, 
comme  il  paroîtra  encore  plus  claire- 
ment par  la  démonftration  fuivante. 
Depuis  même  le  Lévitique  il  ne  s'eft 
fait  aucune  nouvelle  ordonnance  fur  le 
fujet  de  la  Pâque.  Quant  à  ce  qui  a  été 

SlY 


4i £  Dissertation  XXIX. 
ordonné  dans  l'Egypte  touchant  les  eir- 
confiances  principales  delà  Paque, com- 
me font  celles  du  lieu  ,  du  tems  ,  des 
Mimitres  &  des  Victimes  (  car  je  ne 
parle  pas  de  quelques  cérémonies  qui 
étoient  peut-être  attachées  à  la  conjon- 
cture du  tems  ,  comme  la  pofture  de- 
bout ,  le  bâton  à  la  main  ,  les  robes  re- 
trouvées ,  la  diligence  à  manger  )  tout 
le  relie  ,  dis-je  >  eft  demeuré  dans  toute 
fa  vigueur ,  ck  a  été  ordinairement  exé- 
cuté en  la  même  manière. 

II.  Cela  fe  démontre  par  la  nature 
de  tous  les  facrifices  fanglans  ,  qui  font 
prefcrits  dans  le  Lévitique  ,  &  marques 
dans  les  paffages  ci-deiîus  allégués.  Ils 
fe  réduifent  à  trois  efpéces  toutes  diffé- 
rentes du  facrifice  de  la  Pâque.  A  l'ho- 
locaufle  ,  au  facrifice  pour  le  péché,  &: 
au  facrifice  pacifique.  Ce  dénombre- 
ment eft  exact,  &  on  en  peut  conclure  , 
à  Texclufion  de  tout  autre.  Or  l'Agneau 
Pafchal  n'eft  compris  fous  aucun  de  ces 
trois  genres  _,  comme  il  eft  évident  par 
cette  feule  circonftance  qui  lui  eft  pro- 
pre, qu'il  étoit  tellement  deftiné  à  l'a? 
fage  des  offrans,  qu'aucun  autre  n'y 
avoit  part.  Ce  n'étoitdonc  point  un  ho- 
locaufte  ,  qui  fe  confumoit  tout  entier 
par  le  feu  a  la  gloire  de  Dieu  ,  à  l'ex- 
clufion  de  tout  autre  ;  ce  n'étoit  point 


Dissertation  XXIX.  417 
un  facrifice  pour  le  péché  qui  fe  parta- 
geoit  entre  Dieu  &c  les  Miniftres  ,  fans 
que  l'offrant  y  participât.  Ce  n'étoit  pas 
enfin  un  facrifice  pacifique  qui  fe  divi- 
foit  entre  Dieu ,  les  Miniftres  &  les  Of- 
frons. Voilà  tous  les  facrifices  ,  dont 
ces  PalTages  ci-deifus  cités  font  men- 
tion ,  dont  le  Lévitique  établit  les  régie- 
mens  ,  &  dont  il  interdit  l'ufage  hors  de 
l'enceinte  du  Tabernacle  &  du  Temple. 
Puis  donc  que  le  facrifice  de  la  Pàque  ri  y 
eft  point  compris  ,  avec  quelle  couleur 
peut-on  affûter  qu'il  devoir  s'offrir  né- 
cessairement dans  le  Tabernacle  ou  dans 
le  Temple  ? 

III.  Si  on  prend  la  peine  de  relire 
ces  Partages ,  les  facrifices  dont  ils  par- 
lent font  fi  bien  circonftanciés  par  les 
Victimes  &  par  les  Offrans  ,  qu'on  ne 
peut  les  confondre  avec  celui  de  la  Pâ- 
que.  Celui-ci  confifte  dans  un  Agneau 
mâle  d'un  an.  Les  Victimes  des  autres 
font  un  bœuf  ,  une  brebis  ,  une  chèvre. 
Le  premier  eft  un  facrifice  général  ,  qui 
s'offre  en  meme-tems  dans  un  certain 
jour  de  l'année  par  tout  le  peuple  j  c'eft- 
à-dire  ,  par  tous  les  chers  de  famille. 
Les  autres  font  des  facrifices  qui  fe  font 
par  des  particuliers  _,  fans  conféquence 
pour  les  autres  :  Homo  quïllbct  de  domo 
IfracL   Le  facrifice  de  la  Paque  ccoit 

S  v 


4i$  Dissertation  XXIX» 
commun  >  d'obligation  ,  &  commandé 
fous  peine  de  péché  &  de  mort  :  les 
autres  étoient  arbitraires  &  a  dévotion. 
Enfin  le  tems  du  facrifice  Pafchal  étoic 
fixé  au  foir  du  14  du  premier  mois ,  les 
autres  fe  pouvoient  offrir  à  toutes  les 
heures  du  jour  &  dans  tous  les  mois  de 
l'année.  Je  ne  fçai  comment  on  fe  peut 
inéprendre  dans  la  diftindbion  de  deux 
choies  fi  différentes. 

§.  XXVI. 

Que  la  Ville  de  Jérufalem,&  non  le  Tem~ 
pie  ni  le  Tabernacle  ^  étoit  ce  lieu  choijt 
que  Dieu  avoit  preferit  pour  y  célébrer 
la  Pâque. 

L'Auteur  ne  s'en  tient  pas  à  ces  lieux 
tirés  du  Lévitique  ;  mais  pour  faire  voir 
que  Dieu  avoit  changé  la  difpofition 
qu'il  avoit  faite  dans  l'Egypte  touchant 
la  Pâque  ,  il  produit  d'autres  autorites 
qu'il  croit  qui  y  dérogent  expreflement. 
Vous  immolerez  la  Pâque  au  Seigneur 
....  dans  le  lieu  que  le  Seigneur  votre 
Dieu  aura  choiji  pour  y  établir  fa  gloi- 
re &  fon  nom.  Deut.  c.  16  y  v.  9. 11  eft 
néanmoins  fi  perfuadéque  ce  lieu  choifi 
n'eft  ni  le  Temple  ni  le  Tabernacle,qu'il 
ajouta  immédiatenaent  après,  T.  p.  1 16. 


Dissertation  XXIX.  419 
Moife  infirme  clairement  que  ce  lieu  que 
Dieu  devait  choifïr  feroit  une  ville  _,  & 
que  ce  feroit  dans  cette  feule  ville  qu'il  fe- 
roit permis  de  faire  la  Pâque  •  vous  ne 
pourrez  pas  (  dit-il  plus  bas  )  immoler 
la  Pâque  indifféremment  dans  toutes  les 
villes  que  le  Seigneur  vous  aura  don- 
nées _,  mais  feulement  dans  le  lieu  que  le 
Seigneur  votre  Dieu  aura  choifi  pour  y 
établir fon  Nom.  Puis  donc  que  ni  le 
Tabernacle  ni  le  Temple  n'éroient  pas 
des  villes ,  qu'y  a-t-il  de  plus  formel 
pour  prouver  que  ni  l'un  ni  l'autre  n'é- 
roient  pas  le  lieu  où  l'on  devoit  im- 
moler la  Pâque  ?  Cependant  quatre  li- 
gnes plus  bas  ,  Il  efl  confiant  ,  dit-il  j, 
Tr.  hiit.  p.  11^,  qu'on  ne  pouvoit  faire 
.defacrifîce  ,  ni  par  conféquent  celui  de 
la  Pâque  _,  que  dans  le  Tabernacle  depuis 
-qu'il  fut  dreffé ,  &  enfuit  e  dans  le  Temple 
après  qu'il  eut  été  bâti. 

Quelle  difparate  !  11  vient  d'avouer .9 
sque  ce  lieu  que  Dieu  devoit  choifir  feroit 
une  ville  j  &  qui  ce  feroit  dans  cette  ville 
qu'il  feroit  permis  de  faire  la  Pâque. 
Comment  peut-il  en  fi  peu  de  rems  l'a*- 
•voir  oublié  ou  changer  de  fentiment? 
11  faut  néceflairement ,  ou  qu'il  prenne 
;le  Temple  &  le  Tabernacle  pour  des 
villes  ,  ou  qu'il  avoue  que  le  Temple 
kai  le  Tabernacle  .a'étoient  pas  le  lie» 


4*o  Dï$SîîiTArïoN   XXîX. 

choifi  de  Dieu  pour  la  Paque.  11  faut  donc 
le  prouver  en  forme. 

1.  On  ne  peut  déjà  douter  que  cette 
défignation  de  lieu  cho'ijl  pour  y  établir 
le  Nom  de  Dieu,  ne  convienne  à  la  ville 
de  Jérufalem  aulîi-bien  qu'au  Temple, 
dans  22  PafTaçes  où  cette  défionation 
commune  eft  marquée  j  puifque  fi  le 
choix  tombe  fur  le  Temple  entre  tous 
les  autres  ,  il  ne  tombe  pas  moins  fur 
Jérufalem  pour  y  bâtir  le  Temple  par 
préférence  aux  autres  villes. 

II.  De  ces  22  Paifàges  ,  il  y  en  a  on- 
ze où  cette  défi^nation  vague  &£  ambl- 
es o 

gue  eft  déterminée  à  la  ville  de  Jérufa- 
lem par  des  marques  qui  lui  font  pro- 
pres ,  &  qui  ne  conviennent  point  au 
Temple. 

Car  1.  ce  lieu  choifi  eft  un  lieu  où 
Dieu  promet  au  Ifraëlites  de  leur  don- 
ner une  demeure  tranquille  &  exempte 
de  toute  crainte,  ce  qui  ne  peut  convenir 
qu'à  une  Province  &  a  une  ville  qui 
en  eft  une  partie  :  Et  abfque  ullo  timoré 
habitetis  in  loco  quem  elegerit  Dominus 
JDeus  vefler.  Deut.  12.  11. 

2.  C'eft  un  lieu  où  l'on  devoit  man- 
ger la  Paque  immolée  :  Et  coques  & 
corne  des  in  loco  quem  elegerit  Dominus* 
Deut.  c.  16 ,  v.  7.  Comme  auflï  certai- 
nes fortes  de  dixmes  &  de  prémices 


Dissertation  XXIX.  411 
qu'on  avoir  offertes  ou  promifesàDieu. 
Deut.  c.  12.  Or  quoiqu'on  difpute  un 
peu  le  rerrain  à  l'égard  de  l'immolation  , 
on  fuccombe  fous  les  vaftes  préparatifs 
de  la  cuifine.  On  ne  trouve  point  aflez 
de  place  dans  le  Temple  pour  y  faire 
affeoir  tout  ce  peuple  à  autant  de  tables 
qu'il  y  avoit  de  familles  ou  de  petites 
focietés.  Comme  ,  dit- il  ,  Tr.  p.  1 33.  les 
cuïfines  du  Temple  ne  pouvoient  pas 
fuffîre  s  on  avoit  interprété  l'ordre  de 
Dieu  ,  &  après  avoir  fait  dans  le  Tem- 
ple l'ejfentiel  du  facrifice  ,  on  pouvoit 
defeendre  dans  la  ville  &  y  manger  ce 
qui  en  refioit.  Il  cite  pour  cela  ces  paro- 
les du  Deut.  c.  i<S,  v.  11  &  u.  Ce  fera 
dans  le  heu  que  le  Seigneur  votre  Dieu, 
aura  choifi  pour  y  établir  fa  gloire  & 
fon  nom  que  vous  apporterez  vos   holo- 

caufles Ce  fera  là  que  vous  fere^  des 

feflïns  de  réjouijfance  devant  le  Seigneur, 
Mais  comment  ne  voit-il  pas  qu'il  fe 
condamne  par  ce  Paffage  ?  Car  Ci  on 
devoit  faire  dans  le  lieu  choifi  des  feftins 
qu'il  étoit  impoflible  de  faire  dans  le 
Temple,  qui  ne  voit  que  le  Temple 
n'étoit  donc  pas  ce  lieu  choifi  ;  Se  Ci 
l'on  devoit  apporter  tous  lesholocauftes 
8c  toutes  les  hofties  dans  le  même  lieu 
où  l'on  devoit  faire  des  feftins  j  qui  ne 
voit  que  ce  lieu  ne  défigne  que  la  ville 


41 1    Dissertation   XXIX. 

de  Jérafalem ,  avec  exclufion  feulement 
des  autres  villes ,  &  que  c'étoit  dans 
{on  enceinte  &  non  pas  ailleurs,  qu'on 
devoit  offrir  à  Dieu  les  Victimes,  parce 
que  le  Temple  où  fe  faifoient  ces  obla- 
tions  étoitdans  l'enceinte  de  Jérufalem? 
Ce  précepte  eft  répété  fix  fois  en  divers 
endroits  du  Deutéronome. 

3.  C'eft  un  lieu  oùl'oncélcbroit  pen- 
dant fept  jours  les  principales  Fêtes  de 
l'année  :  Septem  diebus  Domino  Deo  tuo 
lelebrabis  inloco  quem  elegerit  Dominus» 
Deut.  c.  16,15.  Or  il  eft  bien  confiant 
que  les  Fêtes  fe  célébroientdans  la  ville, 
éc  qu'elles  étoient  violées  ,  quoiqu'in- 
iiocemment  dans  le  Temple,  parle  tra- 
vail continuel  des  facriflces. 

4.  C'eft  un  lieu  où  Ton  portoit  tou- 
tes les  caufes  obfcures  &  douteufes  pour 
-en  recevoir  la  décifiondes  chefs  du  peu- 
ple qui  y  préfidoient.  Si  difficile  &  am- 
biguum  apud  te  judicium  effe  perfpexe- 
ris ,  furge  &  afeende  ai  locum  quem  ele- 
gerit Dominus  Deus  tuus.  Deut.  c.  17, 
3.  Et  faciès  quodeumque  dixerin-t  qui 
pr&funt  loco  quem  elegerit  Dominus.  Or 
qui  peut  douter  que  les  Juges  j  les  Ma- 
giftrats  &  les  fouverains  Prêtres  mêmes 
ne  demeuraient  dans  la  ville  ,  &c  non 
dans  le  Temple. 

5<  C'eft  un  lieu  oùle$  Lévites  quit-. 


Dissertation  XXIX.  41  j 
tant  leur  pais  pouvoient  aller  s'établir 
pour  y  lervir  au  nom  du  Seigneur  ,  &• 
pour  y  jouir  des  mêmes  droits  que  les 
autres  Lévites  leurs  frères.  Si  exierit 
Lévites  ex  una  urbium  tuarum  ex  omnï 
Ifra'èl  in  qua  habitée  ,  &  voluerit  ventre 
dejiderans  locum  quem  elegerit  Domi- 
nas, Deut.  c.  18,6.  Cependant  les  Lé- 
vites n'habitoient  pas  dans  le  Temple  , 
mais  dans  la  ville. 

6.  Enfin  c'eft  un  lieu  qui  dans  l'im- 
molation de  la  Pâque  eft  préféré  à  tou- 
tes les  autres  villes  de  la  Paleftine.  On 
ne  peut  mieux  juger  (î  c'eft  le  Temple 
ou  la  ville  ,  que  par  les  exclurions  & 
les  oppohtions  des  autres  lieux  de  même 
efpece  :  Or  l'Ecriture  ne  nous  a  pas 
iaiffé  les  maîtres  de  ce  jugement.  Vous 
ne  pourrez  pas  ,  dit  Moïfe  ,  immoler  la 
Pâque  dans  quelque  ville  qu'il  vous 
plaira  ;  mais  feulement  dans  le  lieu  que 
le  Seigneur  votre  Dieu  aura  choi/i  pour 
y  établir  la  demeure  de  fon  nom.  Non 
poteris  immolare  Phafe  in  qualibet  ur- 
bium tuarum ....  fed  in  loco  quem  ele- 
gerit Dominus  Deus  tuus  ut  habitet  no- 
men  e/us  ibi.  Deut.  c.  16,5  ,  C.  Ce  lieu 
choifi  eft  donc  oppofé  à  toutes  les  autres 
villes  de  la  Terre  promife,  auxquelles  il 
donne  l'exclufîon  pour  l'immolation  de 
ia  Pique ,  &  par  conféquent  c'eft  une 


'4H  Dissertation  XXIX. 
ville  entière  ,  parce  qu'il  n'y  a  qu'une 
ville  qui  puilïe  faire  oppofîtion  aux  au- 
tres villes.  Si  la  Loi  écoit  exprimée  en 
ces  termes  :  Vous  ne  pourre^pas  immo- 
ler la  Pâque  dans  vos  maifons  ni  dans 
quelqu  autre  quartier  de  la  ville  ,  mais 
feulement  dans  le  lieu  que  le  Seigneur 
aura  choiji  ,  il  eft  fans  cloute  que  ce 
lieu  choiji  ne  pourroit  s'entendre  que 
du  Mont  Moria  ,  par  rapport  aux  autres 
quartiers  ,  ou  du  Temple  par  rapporc 
aux  maifons  particulières  \  parce  que  les 
lieux  fur  qui  tombe  l'exclulion  doivent 
être  de  même  efpéce  que  celui  qui  en 
eft  excepté  :  mais  comme  Dieu  com- 
mande d'immoler  la  Pâque  dans  un  cer- 
tain lieu  ,  à  l'exclufion  de  toutes  les  au- 
tres villes  ,  il  faut  pour  parler  raifonna- 
blement  que  ce  lieu  prefcrit  foit  aufli 
une  ville. 

III.  La  qualité  de  la  ville  choifïe  ne 
convient  pas  feulement  à  Jéiufalem,par 
des  marques  qui  ne  conviennent  point 
au  Temple ,  mais  il  y  a  dix-fept  ou  dix- 
huit  endroits  de  l'Ecriture  où  elle  lui  eft 
formellement  attribuée.  J'en  citerai 
quelques-uns  Se  je  cotterai  les  autres. 
Je  laijjerai  néanmoins  une  tribu  à  votre 
fils  ,  en  confidération  de  mon  ferviteur 
David  &  de  la  ville  de  Jéfufalem  que 
j'ai  choifie,  5.  Rois,c.  iijV,  1 3.  Le  Sei- 


Dissertation  XXIX.  41  j 
gneur  a  choifi  Sion>  il  fa  choijïe  pour  fa. 
demeure  :fy  habiterai  parce  que  je  l'ai 
choifie.  Pfeau.  1 3 1  ,  v.  13  ,  1 4.  * 

IV.  Ce  qui  démontre  clairement  la 
chofe  ,  eft  que  Ci  l'Ecriture  joint  enfem- 
ble  le  Temple  &c  la  ville  de  Jérufaiem  , 
elle  fait  toujours  tomber  le  choix  de 
Dieu  fur  la  ville  de  Jérufaiem  ,  de  elle 
attribue  feulement  au  Temple  d'être  le 
fiége  ou  la  demeure  du  nom  de  Dieu, 
ou  d'avoir  été  bâti  à  la  gloire  de  fon 
nom.  J'établirai  pour  jamais  mon  nom 
dans  ce  Temple  &  dans  Jérufaiem  que 
j'ai  choifie  entre  toutes  les  Tribus  d'If- 
raè'l  :  In  Templo  &  in  Jérufaiem  quam 
elegi  de  cunclis  Tribubus  Ifraè'l  .,  ponam 
nomen  meum  infempiternum.  4.  Rois  ,  c. 
21  j  v.  7.  Cette  jonction  du  Temple  8c 
de  la  ville  fe  trouve  en  huit  endroits  : 
on  n'a  qu'à  confulter  dans  la  Concorde 
ceux  que  j'ai  cottes  ci-delTus. 

V.  Lorfque  Jérufaiem  eft  marquée 
feule  ,  elle  eft  toujours  diftinguée  par 
le  choix  que  Dieu  en  a  fait  pour  y  éta- 
blir fon  nom  ,  c'eft-à-dire  ,  par  le  Tem- 
ple. Je  veux  qu'il  rejle   toujours  à   mon 

ferviteur  David  une  lampe    brillante  à 

*  Voyt7  de  plus  3.  Rois  c.  8.  ié.  ibid.  v.  44.  & 
4t.  ibid.  c.  1  1 .  v.  ;  3.  &  v.  je.  ibid.  c.  1 4.V.  1  / .  4. 
Rois  c.  2  j .  v.  7  •  ibid .  c.  2  3.  v.  27  •  2  .  Parai,  c.  6 .  v. 
5.  &  v.  34.  &  v.  si.  ibid,  c.  12.  v.  13'  ibid.  c.  3  3> 
v.  7. 


4i£  Dissertation  XXIX. 
mes  yeux  dans  la  ville  de  Jérufalem  ^ 
que  j3 aï  choifie  pour  y  faire  rcjider  mon 
nom  :  Ut  remaneat  lucerna  David  fervo 
meo  cunclis  diebus  coram  me  in  Jérufa- 
lem civitate  5  quam  elegi  ut  effet  nomen 
nteum  ibi.  3.  Reg.  c,  1 1  ,  v.  36.  Ainfi  il 
e(r  vifible  qu'il  faut  faire  cette  diftin- 
clion  entre  le  choix  de  Dieu  &  l'éta- 
bliiîement  de  fon  nom,  que  le  premier 
cft  toujours  attribué  à  Jérufalem  ,  &c  le 
fécond  au  Temple.  Cela  paroît  mani- 
feftement  dans  ce  lieu  du  4.  des  Rois , 
c»  23  ,  v.  27.  Je  renverferai  cette  ville  que 
favoïs  choijie  &  cette  maifon  dont  fa- 
vois  dit  que  mon  nom  y  demeureroit  tou- 
jours :  Projiciam  civitatem  hanc  quam 
elegi  _,  &  domum  de  qua  dixi  ,  erit  nomen 
meum  ibi. 

VI.  Il  n'y  a  qu'un  endroit  où  Dieu 
parlant  du  Temple  fans  le  joindre  avec 
Jérufalem  ,  dit  qu'il  l'a  choifi  pour  lui 
fervir  de  maifon  de  facrifice.  Elegi  lo- 
cum  ijlum  mihi  in  domum  facrifi c'a.  4. 
Reg.  c.  7  ,  v.  1  2  ;  ce  qui  ne  peut  infirmer 
la  conféquence  qui  fe  tire  de  tant  d'au- 
tres Partages  ,  que  le  choix  de  Dieu 
tombe  toujours  fur  la  ville  de  Jérufa- 
lem ,  &  que  c'eft  elle  qui  eft  dé  (ignée  par 
le  lieu  que  Dieu  a  choifi  par  préférence 
à  tous  les  autres  pour  y  établir  fou 
nom. 


Dissertation  XXIX.  417 
VII.  Enfin  je  ne  puis  mieux  fermer 
toutes  ces  autorités  que  par  cette  raifon, 
qui  n'y  laiffe  pas  la  moindre  difficulté. 
Le  Temple  ne  peut  être  ce  lieu  choifi , 
ôc  ce  titre  ne  lui  peut  convenir  que 
dans  le  même  fens  qu'il  conviendroit  à 
l'ancien  Tabernacle  auquel  le  Temple 
a  fuccédé  dans  l'office  de  contenir  le 
nom  de  Dieu.  Or  ce  titre  ne  peut  con- 
venir au  Tabernacle,  &  jamais  l'Ecri- 
ture ne  le  lui  a  attribué  :  car  1.  en  quel 
fens  peut-on  dire  qu'une  tente  ou  un 
pavillon  mobile  &  une maifon portative 
que  Dieu  s'eft  fait  conftruire ,  eft  un  lieu 
iixe  &  immobile  ,  qu'il  a  choifi  entre 
mille  autres  pour  y  établir  fa  demeure? 
Quels  font  ces  autres  lieux  auxquels 
Dieu  auroit  préféré  le  Tabernacle  ?  Dieu 
pouvoir  choifir  un  lieu  pour  y  faire  ré- 
pofer  fon  Tabernacle  ,  ôc  pour  y  réfi- 
cer.  C'eft  ainfi  qu'il  a  choifi  fucceflive- 
ment  Silo  ,  Nobé ,  Gabaon  ,  enfin  Jé- 
rufalem  :  mais  jamais  on  n'a  dit  que 
Dieu  ait  choifi  le  Tabernacle  pour  le 
lieu  de  fa  demeure  ,  parce  que  Dieu  ne 
le  féparoit  point  d'avec  lui-même.  Dieu 
demeuroit  dans  le  lieu  où  il  pîantoit  fon 
Tabernacle  y  ôc  quand  il  le  tranfporcoit 
ailleurs,  il  changeoit  de  demeure. 

2.   Les  règles  du  langage  ne  permet- 
tent pas  qu'on  exprime  par  le  futur  une 


r4iB    Dissertation    XXIX. 

action  paffée  ,  une  chofe  qu'on  a  déjà 
faite  depuis  plusieurs  années.  Or  Dieu 
ne  commence  à  parler  du  lieu  choifi  que 
dans  le  Deutéronome  ,  lorfqu'il  y  avoit 
déjà  plus  de  3  S  ans  que  le  Tabernacle 
étoit  drefifé  ,  puifque  le  Deutéronome 
n'a  été  écrit  qu'à  la  fin  de  la  vie  de 
Moïfe  ,  &  que  le  Tabernacle  fut  drelfé 
dès  la  féconde  année  après  la  fortie  de 
l'Egypte.  Cependant  ni  Dieu  ni  Moïfe 
ne  parlent  jamais  que  par  le  futur  du  lieu 
que  Dieu  devoit  choifir  pour  y  établir 
fon  nom ,  ad  locum  quem  elegerh  Do- 
minus.  Quelle  forte  de  Grammaire  fe- 
roit-ce  que  celle-là  t  Y  a-t-il  du  bon 
fens  à  dire  qu'on  choisira  pour  fa  de- 
meure un  lieu  où  Ton  demeure  depuis 
près  de  quarante  ans. 

3.  Si  ce  choix  de  Dieu  ne  pouvoir 
convenir  au  Tabernacle  ,  il  ne  pouvoic 
non  plus  quadrer  au  Temple  ,  quoiqu'il 
fût  encore  à  venir  ,  &  qu'il  dût  être 
ftable  &  immobile  ,  parce  que  Dieu  ne 
féparoit  point  fa  préfence  de  celle  du 
Temple  >  qui  eft  le  Palais  qu'il  s'étoit 
fait  bâtir.  Or  on  peut  bien  dire  qu'un 
Prince  choifit  une  ville  entre  toutes  les 
autres  j  pour  y  établir  fa  demeure  ,  & 
pour  y  bâtir  un  Palais ^ ces  deuxexpref- 
iions  étant  équivalentes  :  mais  jamais 
on  n'a  dit  qu'un  Prince  a  choifi  fon  Pa- 


Dissertation  XXIX.  429 
lais  entre  tous  les  autres  lieux  pour  y 
établir  fa  demeure  ,  ce  n'eft  pas  là  une 
matière  de  choix;  car  où  veut-on  que 
le  Roi  demeure  (mon  dans  le  Louvre  ? 
Le  Temple  elt  le  Palais  de  Dieu.  Entre 
toutes  les  villes  de  la  Terre  promifeil  a 
choifi  Jérufalem  pour  y  bâtir  le  Temple, 
jérufalem  eft  donc  le  lieu  qu'il  a  choid 
pour  y  établir  fa  demeure. 

Après  cela  il  ne  feroit  pas  nécelTaire 
de  répondre  a  une  autre  objection  que 
l'Auteur  propofe  en  ces  termes,Tr.  Hift. 
p.  130.  Ce  que"  nous  voyons  pratiquer  aux 
Juifs  depuis  la  dejlruclion  du  Temple  ^ 
ejl  une  demonflration  quilsy  immoloient 
la  Pâque,  Car  pourquoi  ne  la  peuvent* 
ils  plus  faire  _,  finon  parce  qu'ils  ne  peu~ 
yent  faire  aucun  facrifice  que  dans  le 
Temple  de  Jérufalem  _,  qui  ne  fubfîjle 
plus  ?  Cette  raifon  feroit  bonne  à  l'é- 
gard de  tous  les  autres  facrifices  ,  mais 
elle  ne  vaut  rien  à  l'égard  de  celui  de> 
la  Pâque.  Car  fi  Dieu  avoit  attaché  au 
Temple  les  autres  facrifices  ,  il  avoit 
attaché  celui  de  l'Agneau  Pafchal  à  la 
ville  qu'il  avoit  choifie  pour  y  établir 
fon  nom  &  fa  gloire.  L'enceinte  du 
Temple  étoit  nécelTaire  pour  facrifier, 
mais  l'enceintede  Jérufalem  l'étoit  pout 
immoler  ôc  pour  manger  la  Pâque  ,  à 
la  yus  ôc  comme  à  l'ombre,   du  Tem* 


4  $  o  Dissertation  XXIX. 
pie.  Les  Juifs  ne  peuvent  donc  plus 
Faire  ni  l'un  ni  l'autre  en  aucun  lieu  du 
monde;  parce  qu'il  n'y  a  plus  défor- 
mais pour  eux  ni  de  Temple  ni  de  ville 
de  Jérufalem  :  Dieu  a  toujours  eu  foin 
de  les  en  chafTer  depuis  leur  dernière 
défolation;  '&  quand  ils  s'y  établiroienr, 
fans  Temple  ,  ce  ne  feroit  qu'une  ville 
profane.  Ce  n'efl:  donc  pas  précifement 
faute  de  Temple  qu'ils  ne  facrifientplus 
la  Pâque  ,  comme  l'Auteur  le  fuppofe; 
c'eft  faute  de  ville  choifie  de  Dieu  par 
le  Temple  :  ce  font  deux  conditions 
nécefïaires  pour  célébrer  la  Pâque  ;  le 
Temple  eft  nécelTaire  à  la  ville  pour  la 
rendre  choifie ,  Ôc  la  ville  choifie  eft 
nécelfaire  au  Temple  pour  le  rendre  1§ 
Temple  de  Dieu. 

§.  XXVIÏ. 

Que  les  Pâques  d'E^échias  ,  de  Jojias 

&  d'Efdras  font  des   exceptions    qui 

ne  tirent  point  à  conféquence  pour  les 

autres  qui  les  précédèrent   ou  qui  les. 

fuivirent* 

On  nous  objecte  les  Pâques  d'Ezé- 
chias  dans  le  i.  Parai,  c.  30.  de  Jofias  , 
ibid.  chap.  3  5  ;  ôc  d'Efdras  ,  1.  1  c.  6 , 
qui  fe  firent  par  le  miniflere  des  Prê- 


Dissertation  XXIX.  431 
très  de  des  Lévites  :  d'où  l'on  rire  cette 
conféquence  qu'elles  fe  rirent    dans  le 
Temple  j  &c  à  l'égard  de  celle  d'Ezé- 
chias  :  Si  la  Pâque  j  dit  l'Auteur  ,  n'eût 
pas  dû  fe  faire  dans  7e   Temple  ,    &  que 
le  miniftere  des  Prêtres  n'y  eût  point  été 
requis  _,  pourquoi   ce    petit  nombre    de 
Prêtres  y  qui  furent  feuls   en  état  d'of- 
frir j  auroit-il  oblige  de  différer  la   Pâ- 
que  au  fécond  mois  ?   11  nous  cite  encore 
l'invitation  de  ce  pieux  Roi  aux  tribus 
d'iiracl.    ObéïJJe^    au   Seigneur  _,     leur 
difoit-il  _,  &  vene^  dans  fon  Sancluaire  , 
c'eit-à-dire  ,  dans  ton  Temple,   qu'il  a 
fanclifié  pour  toujours  ;  fur  quoi  il  fait 
cette  remarque  ,  Tr.    p.  125.  Qu'on  ex- 
hortoit  donc  les  Jfraëlites  de  venir  dans 
le  Temple  pour  y  offrir  la  Pâque. 

Pour  moi  je  n'empêche  point  que  la 
Pâque  d'Ezéchias  j  non  plus  que  les 
deux  autres  ,  n'ayent  été  immolées  dans 
le  Temple  par  les  Prêtres  &  par  les 
Lévites ,  au  défaut  de  Laïques ,  qui  n'é- 
toient  point  en  état  de  faire  eux-mêmes 
cette  fonction  ;  mais  je  foutiens  que  ce 
font  des  exceptions  &:  des  exemples  par- 
ticuliers ,  dont  on  ne  peut  tirer  aucune 
conféquence  pour  le  palfé  ni  pour  l'ave- 
jiir  ,  c'eft-à-dire  ,  pour  en  inférer  que 
les  Pâques  précédentes  &  les  fuivantes 
fe  foient  paflfées  en  la  même  manière  ; 


43 i  Dissertation  XXIX. 
&  je  crois  pouvoir  dire  de  ces  trois 
exemples  ce  que  dit  l'Auteur  de  la  pre- 
mière qui  fe  fit  dans  l'Egypte  fous  les 
yeux  de  Moïfe  ,  Tr.  p.  i  \6.  Ne  jugeons 
pas  de  toutes  les  Pâques  par  celle  d3E- 
^échias. 

On  n'a  qu'à  fe  repréfenter  l'état  mi- 
férable  où  le  peuple  d'Ifrac'l  avec  été 
avant  le  règne  d'Ezéchias  &  celui  de 
Jofias.  L'impie  Achas ,  le  père  du  pre- 
mier ,  facrifia  à  tous  les  Dieux  des  Sy- 
riens fes  vainqueurs  >  pour  fe  les  rendre 
favorables;  il  fit  ériger  à  Jérufalem  un 
Autel  tout  femblable  à  celui  qu'il  avoir 
vu  à  Damas, &  il  y  offrit  des  facuifices; 
il  pilla  tous  lesVafés  facrés  du  Tem- 
ple ,  il  en  ferma  les  portes  ,  &:  il  fie 
dreiïer  des  Autels  dans  toutes  les  rues 
de  Jérufalem  &c  dans  toutes  les  villes 
de  Juda  ,  pour  y  brûler  de  l'encens  j  8c 
lorfqu'après  fa  more  les  Prêtres  <k  les 
Lévites  ,  par  Tordre  d'Ezéchias  ,  tra- 
vaillèrent i  purifier  le  Temple  de  tou- 
tes les  immondices  qui  y  étoient ,  ils  n'en 
vinrent  à  bout  que  dans  feize  jours. 

Pour  Manaflfés  l'Ayeul  de  Jofias ,  il 
fuffit  de  dire  que  fon  règne  fut  diftin- 
gué  par  toutes  les  abominations  Se  les 
idolâtries  qui  fe  pratiquoient  par  les 
Gentils;  qu'il  entraîna  tout  Juda  &  les 
habitans  de  Jérufalem    dans    tous  le* 

défordres  h 


Dissertation  XXIX.  4;$ 
défordres ,  foit  de  Religion  ,  foit  de 
mœurs  ,  dom  il  leur  donna  l'exemple  ; 
ik  quoique  dans  fa  pénitence  il  ait  ch  ni- 
gé  tout  ce  qu'il  avoit  fait  dans  fon  infi- 
délité, après  la  mort  néanmoins  Amon 
fon  fils  rétablit  tout  ce  qu'il  avoit  chan- 
gé ,  &  laiifa  en  mourant  le  Royaume 
en  cet  état  déplorable  à  fon  fils  Jofias  j 
le  refte  de  la  Paleftine  étant  rempli  d'i- 
dolâtres. 

Quant  a  Efdras  ,    on   fait   que  fous 
lui   les  Juifs  revenoient  de  la  captivité 
de  Babylone  ,  où  ils  avoient  oublié  les 
Loix  &  les  coutumes  de  leur  Religion, 
faut- il   donc  s'étonner   fî   ces  deux 
pieux  Rois ,  Ezéchias  &  Jofias,  voulu- 
rent,    pour  ainfî  dire,  réconcilier  par 
la  célébration  de  la  Pique  le  Temple 
profané  par  tan:  de  facnlcges  &c  d'abo- 
minations ;  ôc  Ci  Efdras  trouva  bon  de 
dédier  fon  nouveau  Temple  par  la  mê- 
me cérémonie  ?  Ces  deux  Rois  fe  por- 
tèrent fans  doute  a  cette  réfolution  par 
pluiieurs  autres  raifons ,  dont  on  ne  peut 
rien  conclure  pour  les  autres  Piques. 

1.  Après  une  li  longue  interruption 
du  facnfice  de  cette  Fête, la  première  de 
toutes ,  ils  trouvèrent  bon  de  la  trans- 
férer des  mailons  dans  le  Temple  ,  afin 
de  la  rendre  plus  fobmnelle.  2.  Ceux 
qui  fireni  ta  Pique  fe  trouvèrent  en  II 
Tome  IK  T 


434  Dissertation  XXIX. 
petit  nombre  j  que  rien  n'empêcha  de 
ce  côté-la  qu'on  ne  la  put  immoler  dans 
le  Temple  pour  tout  le  monde.  De 
tous  ceux  qu'Ezéchias  invita,  il  n'y  eue 
que  la  tribu  de  Juda  ,  $t  quelques-uns, 
quidam  viri  .,  des  tribus  d'Azer  ,  de 
Mana (Tés  &  de  Zabulon  qui  fe  rendi- 
rent a  Jérufalem  ,  tout  le  refte  fe  moc- 
qua  de  fes  envoyés  &  les  fifrla  par  tout 
où  ils  pafTerent  :  II lis  irrident ib us  & 
fubfannantibus  cos.  Sous  Jofias  il  n'y 
eut  aufîi  que  la  tribu  de  Juda  qui  fit  la 
Pâque  avec  ce  peu  qui  étoit  refté  des 
dix  tribus  que  Salmanazar  avoit  trans- 
férées à  Babylone.  Auiii  l'immolation 
ne  fe  fit  pas  feulement  dans  le  Temple, 
mais  fans  en  fortir  les  Lévites  y  firent 
rôtir  tous  les  Agneaux  ,  &  cuire  dans 
des  chaudières  toutes  les  hofties  pacifi- 
ques ,  &  les  diftribuerent  à  tout  le  peu- 
ple :  marque  évidente  que  le  nombre 
des  communians  n'étoit  pas  fort  exhor- 
bitant.  Or  quelle  proportion  y  a-t-il 
d'une  tribu  à  tout  le  peuple  compofé  de 
fes  douze  tribus. 

3.  Ils  étoient  tous  dans  une  profonde 
ignorance  des  cérémonies  de  la  Pâque  : 
les  uns  avoient  eu  le  loifir  de  les  oublier 
fous  les  règnes  d'Achaz  ,  deManaiïés& 
d'Arnon  j  les  autres  ne  les  avoient  ja- 
mais ni  vues  ni  pratiquées.    11  fallut 


Dissertation  XX IX.  435 
donc  que  les  Prêtres  &  les  Lévites  s'en 
acquittaient  pour  ces  Laïques  qui  y  au- 
roient  commis  plnlieurs  fautes. 

4.   ils  étoient  prefque  rous  immon- 
des j  6c  par  coniéquent  hors  d'état  de 
fane  par  eux-mêmes  une  fonction  aufil 
fainte  que  celle  d'immoler  la  Pâque,  ôc 
même  de  la  manger  :    6V  il  fallut  qu'E- 
zéchias  plein  de  confiance  dans  la  bonté 
de  Dieu  leur  donnât  cette  difpenfe  de  la 
Loi,quine  permettoit  lamanducationde 
l'Agneau  Pafchal  qu'à  ceux  qui   étoienc 
purifiés.  Les  Prêtres  &  les  Lévites  fu- 
rent obligés  de  prêter  aux  Laïques  leur 
miniftere  pour  cette  immolation,  dont 
fans  cela  ils  auroient  dû  s'acquitter  eux- 
mêmes.  C'eit  pour  cette  raifon  que  Jo- 
fias  difoit  aux  Lévites  :  Vous    qui   êtes 
purs  j    immole^  la  Pâque  3  &  aïde^  vos 
frères  à  s'y  préparer  3  afin   qu'ils    puifi 
fent  faire  les    ckofes  félon    les     ordres 
eue  Dieu  nous  a  donnes  par   Mo'ife.  2. 
Parai,  c.    55.  G.  Ezéchias  même  trouva 
bon  de  différer  la  tienne  au  fécond  mois, 
par  deux  raifons.  La  i.  e'û  _,  que  vou- 
lant invirer  à  cette  Pâque  tout  le  peu- 
ple d'Ifracl  ,  des  long-tems  accoutumé 
au  fchifme  &:  à  l'idolâtrie  ,  ils  n'euflTent 
pu  chacun  dans  fa  famille  ,  faire  félon 
la  Loi  qu'ils  avoient  oubliée  ,   le  facri- 
nce  de  la  Pâque  j  &c  que  dans  le  pie- 

Tij 


4$6  Dissertation  XXÎX. 
mier  mois ,  il  fe  trouva  peu  de  Piètres 
purifiés  ,  &:  en  état  de  fuppléer  à  cette 
fonction  pour  les  Laïques.  Il  fallut 
donc  attendre  au  fécond  mois  ,  où  s'é- 
tant  purifiés  en  plus  grand  nombre  ,  ils 
purent  fuffire  à  l'immolation  de  tant 
d'agneaux. 

La  II.  eft,  que  ceux  des  Conviés  qui 
confentirent  à  l'invitation  du  Roi  ne  fe 
rendirent  pas  â  tems  à  Jérufalem  _,  pour 
faire  félon  la  Loi  la  Pâquedans  le  pre- 
mier mois  :  ce  qui  n'auroit  pas  dû  em- 
pêcher de  la  faire  en  foa  tems  ,  ceux 
qui  y  demeuroient  ,  &c  ceux  qui  s'y 
étoient  déjà  rendus  des  villes  éloignées*, 
mais  le  Roi  voulut  qu'ils  dirTéraflfent 
auiii  tous  la  Pâque  au  fécond  mois,  pour 
attendre  les  peuples  invités  ,  &r  pour 
rendre  ainfi  par  ce  concours  la  Pâque 
plus  foie  m  n  elle, 

5.  Enfin  comme  on  avoir  de  grands 
fujets  de  foupçons  qu'ils  ne  fulTent 
encore  idolâtres  ou  fchifmatiques,  on 
ne  crut  pas  fe  devoir  fier  a  eux  de  cette 
cérémonie  religieufe  ,  qu'ils  auroient 
peut-être  négligée  ,  ou  qu'ils  auroient 
pu  profaner  par  le  mélange  de  leurs 
anciennes  fuperftitions.  On  fit  donc  la 
Pâque  générale  dans  le  Temple  par  les 
mains  cjs  Prêtres  ,  &  on  fe  contenta 
d'en  rendre  les  Laïques  fpe&ateurs. 


Dissertation  XXIX.  437 
Des  Pâques  fi  extraordinaires  ,  quoi- 
qu'elles foient  écrites ,  ne  tirent  point 
à  conféquence  pour  celles  qui  les  ont 
précédées  ou  fuivies  :  aufii  n'ont-elles 
été  écrites  que  parce  qu'elles  étoient  ex- 
traordinaires ;  &  fi  elles  fe  fuifent  célé- 
brées félon  la  régie  commune  ,  l'Ecri- 
ture n'en  eût  pas  fait  plus  de  mention 
que  de  celles  qui  fe  font  faites  fous  les 
Juges  ,  fous  David  ,  fous  Salomon  3c 
fous  les  autres  Rois  de  Juda.  Cependant 
on  prouve  par  ces  trois  exemples  ,  que 
côtoie  une  obligation  de  préfenter  la  Pâ- 
que  au  Temple  ,  comme  toute  autre  of- 
frande :  la  coutume  interprète  la  Loi. 
Tr.  p.  112.  On  n'étend  pas  mal  le  nom 
&  l'idée  de  coutume.  Eft-ce  donc  que 
trois  exemples  avec  interruption  font 
une  coutume  f  Ou  bien  étoit-ce  la  cou- 
tume que  les  Rois  transféraient  la  Pâ- 
que  du  premier  mois  au  fécond  \  &c 
que  ceux  qui  la  faifoient  fufTent  aupa- 
ravant idolâtres  ,  fchifmatiques  ,  im- 
mondes ,  même  en  la  mangeant  _,  igno- 
rans  ,  en  petit  nombre  f  Qui  ne  voit  au 
contraire  qu'il  ne  faut  point  juger  des 
autres  Pâques  par  celles-là  ,  puifque 
l'Ecriture  déclare  que  depuis  Salomon 
jufqu'à  Ezéchias  ,  &c  depuis  Samuel  juf- 
qu'à  Ozias  il  ne  s'en  étoit  point  fait  de 
femblables  t 

T  i.j 


45 S    Dissertation   XXIX. 

§.   XXVIII. 

Réponfe  aux  lieux  tirés  des  Evangé- 
lifies  :  diverfes  fuppofitions  que  fait 
V Auteur  pour  les  éluder  &  pour  les 
rendre  inutiles  à  la  dernière  Pâque 
de  Jefus-Chrijl. 

Nous  voici  arrivés  aux  PafTages  tirés 
des  Evangéliftes  ,  qui  étant  les  Hifto- 
riens  de  la  dernière  Pâque  de  Jefus- 
Chriii ,  doivent  avoir  une  autoriré  iou- 
veraine  pour  régler  ce  qu'on  en  doit 
croire.  Auiîî  l'Auteur  du  Traité  Hifto- 
rique  p.  2.47.  avoue  que  tout  ce  qu'ils 
difent  ejl  vrai  j  &  il  ne  refufe  point 
queux  feuls  /oient  nos  Juges  dans  la 
dècijion  de  notre  queftion.  Mais  il  s'en 
faut  bien  qu'il  s'en  tienne  en  effet  à  leur 
décilion.  Il  cite  leur  témoignage  pour 
les  défarmer  de  tout  ce  qu'ils  ont  de 
contraire  a  fon  fyfteme  j  &c  afin  d'ôter 
tout  lieu  de  prife  fur  lui ,  il  n'aflure  les 
chofes  qu'en  chancelant ,  8c  pour  ainfi 
dire  ,  il  ne  combat  qu'en  retraite.  Je 
rien  conviens  pas  >  dit-il  p.  2  5  1 .  Je  riap- 
percois  point  fur  quoi  cela  efl  fondé. 
EJt-il  ïmpoffible  qu'ils  ayent  fait  cette 
demande  ?  Rien  n'oblige  de  croire.  Il  ri  y 
a  rien  qui  nous  empêche  de  croire  j    &c* 


Dissertation  XXIX.  4^9 
p.  25  5  ,  161  ,  2^3.  Ce  n'eft  pas  là  allé- 
guer des  preuves  ;  c'efl:  éluder  des  ob- 
jections}  ce  n'eft  pas  attaquer  fes  ad- 
verfaires  ,  c'efl:  fe  mettre  comme  ou 
peut  à  couvert  de  leurs  attaques.  Eu 
effet ,  les  fens  forcés  qu'il  donne  aux 
Evangéliftes ,  ne  fouffroient  pas  d'autres 
expreiîions.  Mais  avant  que  de  les  re- 
préfenter  ,  il  eft  bon  de  développer  les 
îuppofîtions  fur  lefquelles  ils  font  fon- 
des. J'appelle  cela  développer  ;  car 
comme  fans  prefque  affurer  rien  ,  il  ne 
fait  que  répondre  &  fe  défendre  ,  il  eft 
affez  difficile  de  fixer  ce  qu'il  veut  éta- 
blir. 

La  I.  fuppofition  qui  eft  fondée  fur 
faim  Luc ,  eft  que  lorfque  les  Difciples 
parièrent  à  Jefus-Chrift  touchant  le  lieu 
où  ils  dévoient  préparer  la  Pâque  ,  elle 
n'avoit  pas  encore  été  immolée  par  les 
Juifs  :  In  qua  neceffe  erat  occidi  Paf- 
cha.  p.  248.  Rien  n'eft  plus  raifonnable 
que  cette  fuppofition  \  car  pourquoi  lui 
auroient-ils  propofé  de  s'acquitter  d'une 
cérémonie  de  Religion  après  que  le 
tems  en  feroit  paflé  ? 

La  II.  eft  qu'ils  en  parlèrent  le  pro- 
pre jour  des  Azymes,  Primo  autem  die 
A^ymorum  ,  félon  faint  Matthieu  8c 
faint  Marc.  Saint  Luc  dit  encore  plus 
exDreffement  en  prétérit  :   Venu  autem 

T  iv 


44^       D  IS  SERT  ATI  ON    XXIX. 

elles  A^ymarum  ,  «àÔs.  Que  ce  jour 
des  Azymes  étoit  le  14.  du  mois  ,  de 
que  ce  14  commença  le  Jeudi  au  foir  , 
où  finiifoitle  13.  Mais  comme,  félon 
le  Lévitique,  c.  23  ,  v.  ^iLa  Pâque  du 
Seigneur fe  célèbre  le  foir  du  1 4.  jour  du 
premier  mois;  &  que  le  15.  du  même 
mois  efi  la  fête  folemnelle  des  Azymes  : 
il  efl  allez  naturel  d'expliquer  par  anti- 
cipation avec  faint  Auguftin  ce  premier 
jour  des  Azymes  marqué  par  les  Evan- 
géhftes  ,  comme  nous  difons  le  Samedi- 
Saint  à  midi ,  qu'enfin  la  fête  de  Pâque 
efl:  arrivée  :  néanmoins  l'Auteur  n'y 
confent  pas.  //  eft  encore  plus  naturel  ^ 
dit-il  p.  2 5  4.  d'expliquer  les  paroles  des 
Evangélifles  à  la  lettre.  Quel  intérêt 
prend- il  à  cela  ?  Il  paroîtra  dans  les 
fuppofitions  fuivantes. 

»  La  III.  Les  Difciples  ne  parlèrent 
s'  à  Jefus-Chrift  de  la  préparation  de  la 
»  Pâque ,  que  le  foir  après  le  coucher 
3?  du  Soleil,  ou  fort  avant  dans  l'aprcs- 
j>  midi  vers  les  3  ou  4  heures  ,  p.  249. 
»  Ou  plutôt  rien  n'oblige  de  penfer  que 
>j  ce  fur  avant  6.  heures  du  foir  que  \es 
35  Difciples  vinrent  trouver  Jefus-Chrift 
»?  pour  ce  fujet ,  p.  253.  On  dira  peut- 
are  qu'ils  s'y  prenoient  bien  tard.  11  eft 
vrai.  Etoit-ce  là  le  tems  de  préparer  tou- 
tes chofespour  la  Pâque  ?  C'étoitdonc 


Dissertation  XXIX.  441 
apparemment  pour  fouper  â  minuit  ? 
N'importe.  Ce  contre-tems  eft  nécef- 
faire  au  fyftême  'y  un  peu  plus  de  dili- 
gence gâteroit  tout  le  myftere,  C'eft  que 
ce  foir  prouve  merveilleufement  que 
Jefus-Chrift  n'a  point  fait  la  Pâque. 
Car  comme  elle  s'immoloit  vers  les 
3  heures  ,  fi  à  6  heures  du  foir  que 
[qs  Apôtres  parloient  à  Notre-Sei- 
gneur,  elle  ne  l'avoit  point  encore  été, 
elle  ne  pouvoit  donc  l'être  que  le  len- 
demain, &  par  conféquent  alors  le 
14  commençoit  feulement,  p.  149. 
Que  il  on  veut  opiniâtrement  que  ce 
foit  la  fin  du  14  ôc  le  commencement 
du  15,  on  doit  donc  auiîi  avouer  que  la 
Pâque  étoit  paffée,  &  qu'il  n'étoit  plus 
tems  de  penfer  a  l'immoler,  p.  250.  Or 
ce  feroitune  faute  inexcu fable  aux  Apô- 
tres de  parler  à  Jefus-Chrift  de  faire  la 
Pâque  lorfque  le  tems  en  feroit  pafTé  ; 
il  vaut  donc  mieux  pour  leur  honneur 
&■  pour  le  fyftëme  ,  qu'ils  ayent  fait  cet- 
te propofition  le  foir  qui  commençoic 
le  14  ou  celui  qui  finilîbit  le  13.  Cela 
eft  d'autant  plus  fubtil ,  que  de  quel- 
que côté  que  l'Auteur  foit  attaque  ,  il 
n!a  rien  â  craindre.  Car  enfin  â  6  heu- 
res du  foir  ,  quelque  jour  que  ce  foit, 
ce  n'eft  point  le  tems  d'immoler  la  Pâ- 
que. Si  c'etoit  le  foir  du  1 3  ,  le  tems 

T  v 


442.  Dissertation  XXîX. 
n'en  éroit  encore  pas  venu  ;  fi  c'étoit  le 
foir  du  14  ,  il  étoit  déjà  patte  ,  8c  Ton 
étoit  dans  le  15.  Mais  quelle  étoit  donc 
cette  Paque  que  les  Difciples  propofe- 
rent  a  Jefus-Chrift  ?  Ne  partaient- ils 
pas  du  fouper  qui  fe  devoit  faire  le 
Jeudi  ? 

»   11  nous  Tapprend  dans  la  IV.  fup- 
35  pofition.  Ils  pouvoient  parler   8c  du 
$*  fouper  de  ce  foir-là,  &  de  la  recher- 
33  che  du  pain  levé  par  où  commençoit 
33  la  préparation  de  la  Pâque  ,  p.  251.  11 
»>  n'eft    pas  impoffible  qu'ils  lui  ayent 
>3  fait  cette  demande  dans  un   tems   où 
33  l'on    devoit  effectivement  penfer    à 
33  choifir  un  lieu  ,  &  à  le    nettoyer   de 
»  tout   levain  ,  p.  2. 5  5  ,  à  préparer  un 
33  agneau  ,   des  Azymes ,  8c  les  autres 
3>  chofes  nécefïaires  à  la  folemnité   de 
33  Pâque  ,  p.  2.56.  Ainfi  ces  paroles  :  Où 
voulez-vous  que  nous  vous  apprêtions  la 
Pâque?   veulent  dire  _,  Ou  voulez-vous 
que  nous  nous  adrejfions  pour  avoir  une 
chambre  à  manger  demain  la  Pâque  ?    p. 
257.  On  dira  que  les  Evangéliftes  néan- 
moins témoignent  qu'ils  préparèrent  la 
Pâque  ce  jour-là  même  j    &  paraverunt 
Pafcha.   11  efl:  vrai.   Mais  il  faut  favoir 
ce  que  c'eft  que  cette  Pâque ,  de  en  quoi 
confifte  cette  préparation. 

La  V.  fuppofition  nous  l'apprendra* 


Dissertation  XXIX.  445 
»  Les  Apôtres  n'arrêtèrent  pas  feule- 
»  ment  une  chambre  3  ils  purent  encore 
»  acheter  des  gâteaux  azymes  ,  un 
»  agneau  ,  des  herbes  ameres  ,  8c  de 
«quoi  compofer  cette  fauce  nommée 
»  charojjet ,  qui  fe  fervoit  le  jour  de  la 
»  Pâque.  Voilà  la  Pâque  qu'ils  préparè- 
rent,  p.  259.  Au  refte  il  ne  paroîc 
point  qu'ils  ayent  été  au  Temple  ,  Se 
qu'ils  y  ayent  immolé  un  Agneau  Paf- 
chal.  Et  pour  leur  en  ôter  le  loifir  ,  il 
n'y  a  qu'à  faire 

La  VI.  fuppofition.  Rien  ne  nous 
empêche  de  croire  que  Notre-Sei- 
gneur  qui  les  avoit  envoyés  devant 
quand  le  Soleil  fut  couché  ,  ne  partit 
de  Bethanie,  ou  de  quelqu'autre  lieu 
plus  proche  de  la  ville  ,  que  lorfqu'il 
fut  entièrement  nuit.  p.  161. 11  paroît 
qu'il  vint  peu  de  tems  après  ,  qu'il 
trouva  le  fouper  préparé  ,  &c  qu'il  fe 
mit  à  table  ,  p.  2^3.  Il  y  a  de  I  appa- 
rence que  Notre-Seïgneur  fuivit  de 
fort  près  Pierre  &  Jean  ;  &  qu'étant 
arrivé  il  y  foupa.  Let.  p.  -j6  j  1.  35. 
Rien  n'oblige  néanmoins    de    croire 

r 

que  cette  préparation  ne  rut  pas  pour 
le  lendemain.  Mais  xromme  Jefus- 
Chrift  témoigne  qu'il  avoit  déhré 
avec  ardeur  de  manger  cette  Pâque 
avec  fes  Difciples ,    ce  qui   fuppofe 

Tvj 


444   Dissertation    XXIX. 
'»  qu'elle  étoit  préparée  &  préfente ,  il 
j>  faut  remédier  à  cet  inconvénient 

»  Par  la  VII.  fuppofition.  Ces  paro- 
»  les  :  J'ai  déjîré  avec  ardeur  j  &c. 
»  peuvent  avoir  ce  fens  ,  qu'il  avoit  at- 
»  tendu  avec  emprelfement  le  tems  de 
«  cette  tête  &  défiré  de  faire  ce  feftin 
»  Pafchal  ,  parce  qu'il  alloit  accomplir 
»  fon  grand  ouvrage  ,   pag.  2.65. 

§.   XXIX. 

Que  toutes  ces  fuppofitions  ,  excepté  ta 
première  ,  font  arbitraires  ,  forcées  y 
&  violentes  _,  f&uffzs  j  &  contraires 
au  refpeci  quon  doit  à  Jefus-Chriji  & 
aux  apôtres. 

Voila  l'explication  qu'on  donne  aux 
paroles  des  Ëvangéliftes  ,  &:  les  fuppo- 
fitions  qu'on  fait  pour  empêcher  qu'ils 
n'ayent  écrit  l'hiftoire  delà  dernière  Pâ- 
que  de  Jefus-Chrift.  S'il  eft  permis  de 
faire  l'horofcope  de  ce  nouveau  fyftême, 
on  peut  prédire  avec  certitude  qu'il  ne; 
paifera  point  ,  qu'il  mourra  dans  fa 
naiifance  ,  &  que  s'il  a  impofé  d'abord 
-à  quelques  Théologiens  parjla  facilité 
quJil  fembîe  donner  de  concilier  faine 
Jean  avec  les  autres  Ëvangéliftes ,  ils  ne 
\oudroient  pas  acheter  ce  léger  avantage 


Disse  ktation  XXIX.  445 
par  la  brouillerie  irréconciliable  de  ces 
trois  avec  le  bon  fens  &  avec  routes  les 
règles  du  langage.  Car  il  eft  aifé  de 
voir  que  toutes  ces  fuppofuions  ont 
deux  grands,  défauts ,  qui  doivent  leur 
ôter  toute  créance  dans  refprit  des  fa- 
ges.  Elles  font  ,  1.  arbitraires ,  fondées 
iur  rien  ,  elles  fuppoient  fans  preuve 
tout  ce  qui  eft  en  queftion.  Ce  font  de 
pures  pétitions  de  principe.  2.  Elles  fonc 
forcées ,  elles  font  violence  aux  chofes 
&  aux  paroles  ,  elles  donnent  la  gêne 
ordinaire  &c  extraordinaire  aux  Hifto- 
riens  facrés  ,  non  pour  leur  faire  dire 
ce  qu'ils  ne  difent  pas  ,  mais  pour  les 
empêcher  de  penfer  ôc  de  lignifier  ce 
qu'ils  difent  clairement.  Ainfi  elles  ont 
toutes  les  marques  de  fauifeté  ;  &  il 
fuffit  de  les  avoir  expofées ,  comme  j'ai 
fait  dans  les  mêmes  termes  qu'elles  font 
conçues ,  pour  les  faire  rejetterfans  au- 
tre difcuflion. 

Elles  font  arbitraires  5  3c  elles  font 
tournées  en  proportions  conditionnel- 
les :  Sî  ce  ne  fut  que  le  foir  _,  dit  l'Au- 
teur ,  p.  249.  après  le  coucher  du  Soleil 
que  les  Difcïples  parlèrent  a  Notre-  Sel" 

gneur de  préparer  la  Pâque  ,  c'étoit 

trop  tard  pour  le  14.  Fait-il  cette  ré- 
ponfe  affirmativement  ,  ou  feulement 
fous  condition  i  Si  c'elt  dans  le  fécond 


44^  Dissertation  XXIX. 
fens  ,  il  efl:  fort  aifé  de  le  facisfaire.  Il 
n'y  a  qu'a  envoyer  plutôt  les  Difcipies 
parler  à  Jefus  ;  &  afin  d'ôter  tout  lieu 
de  contefter ,  je  les  fais  partir  à  une  heu- 
re de  Bethanie  avec  fes  ordres  ,  pour 
aller  préparer  chez  un  de  fes  Difcipies 
tout  ce  qui  étoit  nécelfaire  pour  la  Pâ- 
que.  Je  me  fonde  en  cela  fur  ce  qu'ils 
dévoient  mefurer  le  tems  avec  la  natu- 
re &C  la  qualité  des  chofes  qu'ils 
avoient  à  faire,  &  principalement  fur  ce 
que  l'immolation  de  la  Pâque  étoit  fixée 
entre  3  heures  après  midi  de  5  heures. 
Ainfi  cette  fuppofition  eftraifonnable  , 
&  elle  eft  appuyée  fur  Thiftoire  même 
qui  porte  qu'ils  préparèrent  la  Pâque. 

Mais  par  cette  fuppofition  condition- 
nelle il  veut  dire  positivement  que  les 
Difcipies  ne  parlèrent  de  la  Pâque  ,  ÔC 
qu'ils  ne  partirent  pour  l'apprêter  que 
le  foir  après  le  Soleil  couché ,  afin  d'a- 
voir lieu  de  dire  que  fi  c'étoit  le  foir  du 
1 3  c'étoit  trop  tôt  pour  la  Pâque  qui  ne 
devoir  s'immoler  que  le  lendemain  à  3 
heures.  Que  fi  c'étoit  le  foir  du  14  c'é- 
toit trop  tard  ,  puifque  la  Pâque  étoit 
déjà  faite.  Sur  cela  il  triomphe  de  fes 
adverfaires  ,  &  les  regardant  en  pitié  , 
E toit  il  tems  s  dit-il  p.  250  _,  après  que 
la  folemnïté  de  la  Pâque  s' étoit  faite  de 
fonger  à  la  faire  ?   Et  ailleurs  p.   252. 


Dissertation  XXIX.  447 
Enfin  le  premier  jour  des  Azymes  y  quel 
qu'il  foit  3  étoit  venu.  Si  c'eft  le  1 5  étoit- 
il  tems  de  fe  préparer  à  faire  la  Pâque? 
Cela  eft  encore  répété  plus  bas  j  &  ce 
qui  eft  étrange  ,  en  attribuant  même 
cette  fuppofition  à  fesadverfaires  qui  la 
rejettent  >  Eft-H  plus  raifbnnable  de 
fuppofer ,  comme  on  le  fait  _,  que  ce  ne 
fut  qu'à  la  fin  du  14,  c  eft- à- dire  y  après 
que  la  Pâque  avoit  été  immolée  ,  & 
qu'il  n  étoit  plus  tems  de  s'y  préparer  ? 

tr  qui  eft-ce  qui  fait  une  fi  déraifon- 
nable  fuppofition  ?  Sont-ce  ceux  qui 
foutiennent  a  l'Auteur  ,  qu'on  ne  fau- 
roit  douter  que  ces  paroles  des  Difci- 
ples  ,  (  Où  voulez-vous  que  nous  pré- 
parions la  Pâque  ?  )  n'ayent  été  dites3 
■quelques  heures  avant  le  coucher  du  So- 
leil ?  p.  2  5  6.  L'Auteur  n'a  point  d'oreil- 
les pour  entendre  cela.  Ils  ne  les  font 
pas  dire  ,  comme  lui ,  le  foir  du  1 3.  Ils 
veulent  donc  ,  dit-il  ,  qu'elles  ayent  été 
dites  le  foir  du  i4,lorfquela  cérémonie 
étoit  paftee  _,  comme  s'il  n'y  avoit  point 
de  milieu  entre  ces  deux  foirs. 

Mais  lui  qui  les  place  au  foir  du  15 
ou  au  commencement  du  14  fans  le 
prouver  ,  comment  ne  voit-il  pas  qu'il 
fuppofe  ce  qui  eft  en  queftion  ,  par  une 
pure  pétition  de  principe.  Rien  n'oblige, 


448  Dissertation  XXIX. 
dit- il  p.  25  3.  de  penfer  que  ce  fut  avant 
6  heures  du  foir  que  les  Difciples  vin- 
rent  parler  de  la  Paque  à  Jefus-Chrijl  : 
Er  plus  bas  ,  p.  161  ,  en  attribuant  cette 
conduite  à  Jefus-Chrift  même.  //  n'y  a 
rien  5  dit-il  3  qui  nous  empêche  de  croire 
que  Notre- Seigneur  qui  les  avoit  en- 
voyés  devant  ,  quand  le  Soleil  fut  cou- 
che' ,  ne  partît ....  que  lorfquil  fut  en- 
tièrement nuit. 

Il  y  a  bien  des  raifons  qui  empêchent: 
d'avoir  cette  penfée  de  JeAas-Chrifl  Se 
des  Apôtres.  1.  Le  contre-tems  que 
l'Auteur  attribue  à  ceux-ci  de  s'avifer 
de  propofer  la  Paque  à  leur  Maître  dans 
un  jour  où  l'on  ne  la  falloir  pas  ;  &  qui 
pis  etr  ,  où  félon  la  Loi  on  ne  la  pou- 
voit  faire  j  foit  que  ce  fut  le  1 3  jour 
'finiiïant  ,  ou  le  1 5  commencé.  11  die 
qu\z  l'entrée  du  14  il  falloit  fe  pourvoir 
des  chofes  neceffaires  pour  folemnifer  la. 
Paque  _,  p.  16 1 .  En  répondant  ainfi  il  ne 
prévoyoir  pas  que  quelques  pages  plus 
bas  il  diroit,  qu'il  parait  que  Notre- 
Seigneur  vint  peu  de  tems  après  >  &  qu'il 
fe  mit  à  table  _,  p.  1&I.  Comme  donc  ce 
n'étoit  pas  là  le  feftin  de  la  Paque  ,  il 
ne  leur  donna  pas  le  loifir  de  faire  au- 
cuns préparatifs  pour  cela  \  mais  ils  ne 
purent  apprêter  que  le  fouper  de  ce 
jour-là  qu'il  trouva  eu  effet  préparé. 


Dissertation  XXIX.  449 
Il  dit  2.  p.  256  ,  qu'il  falloit  s'affurer 
à  Jérufalem  d'une  chambre  ou  l'on  pût 
faire  le  fejlin  Pafchal.  E toit- ce  le  tems 
de  faire  cette  recherche  lorfque  le  14  des 
A\ymes  étoit  commencé  ?  Pourquoi  at- 
tribuer toujours  à  fes  adverfaires  une 
faille  fuppofition  qu'ils  ne  font  point, 
ik  la  leur  attribuer  malgré  qu'ils  eu 
ayent  ;  pour  fe  donner  du  jeu  à  leurs 
dépens  ,  &  pour  fe  préparer  la  voie  à 
rejetter  leur  vraie  fuppofition,  ou  même, 
dit- il  p.  257  j  à  la  fin  du  14  ,  quelques 
heures  avant  le  coucher  du  Soleil.  H  eft 
fans  doute  que  s'ils  propoferent  la  chofe 
vers  le  midi  ou  une  heure  ,  ils  eurent 
allez  de  tems  pour  trouver  une  cham- 
bre ,  &  pour  faire  l'appareil  de  la  Pâ- 
que. 

Mais  ,  dit-il ,  p.  258  _,  l'on  ne  devoit 
pas  différer  au  lendemain  le  choix  d'un 
lieu  y  dans  un  tems  ou  il  y  avoit  un  nom- 
bre prodigieux  d'étrangers  à  Jérufalem. 
Cela  ne  fe  pouvoit  pas  retarder.  Mais 
cela  fe  pouvoit  avancer  dès  le  midi ,  8c 
on  trouve  étrange  qu'ils  ne  s'en  foient 
pas  avifés. 

D'ailleurs  cette  réponfe  fuppofe  que 
les  deux  Difciples  promoteurs  de  la  Pâ- 
que  ,  s'attendoient  à  parcourir  une  par- 
tie de  la  ville  pour  découvrir  quelque 
chambre  vuide  à  faire  la  Pâque.  Mais 


450  Dissertation  XXIX. 
ils  réfutent  affez  cette  fauflfe  imagina- 
non  ,  par  la  manière  dont  ils  s'expri- 
ment :  Ou  vous  plaît- il  que  nous  allions 
vous  préparer  ce  qu'il  faut  pour  manger 
la  Pâque  ?  Ils  ne  lui  demandent  pas 
permiiîion  d'aller  par  toute  la  ville  cher- 
cher un  lieu  propre  pour  cette  cérémo- 
nie ,  ce  qui  eût  en  effet  demandé  beau- 
coup de  tems  ;  mais  quel  étoit  le  lieu 
qu'il  avoit  en  vue  pour  cela,  tres-per- 
iuadés  qu'il  ne  fe  tromperoit  pas  dans 
fes  mefures ,  &  qu'ils  trouveroient  tou- 
res  chofes  comme  il  les  leur  auroit  mar- 
quées. AuiTi  l'Auteur  reconnoît,  p.  161 , 
Que  la  chambre  fe  trouva  toute  prête  _, 
&  qu'il  ne  leur  fallut  pas  beaucoup  de 
tems  pour  préparer  ce  qui  étoit  néceffai- 
re.  Mais  il  dit  cela  pour  prouver  qu'ils 
partirent  après  le  Soleil  couché.  Car  , 
quand  il  s'agit  de  les  faire  partir  à  la  fin 
du  1 5  ou  au  commencement  du  14,  il 
ne  le  dit  plus  j  il  s'en  fait  même  une 
objection.  Qu'on  ne  dife  point  que  ce  lieu 
fe  devoit  trouver  aifément  ,  parce  que 
Notre-Seigneur  le  marqua  \  les  Difci- 
ples  ne  s'y  attendoient  point  _,  p.  257.  A 
quoi  ne  s'attendoient-ils  point  f  Éft-ce 
que  Jefus-Chrift  leur  dût  marquer  un 
certain  lieu  tout  prêt  &  allure  ?  Us  par- 
lent donc  comme  leur  penfée  ;  car  ils 
lui  demandent  en  termes  exprès  :  Ou 


Dissertation    XXIX.     451 

vous  plait-il  que  nous  allions  ?  Eft-ce 
donc  que  Jefus-Chrift  le  leur  ayant  mar- 
qué ^  ils  le  trouveroient  déjà  occupé  par 
d'autres,  ou  que  le  Maître  ne  le  leur 
prêtèrent  pas  .^  Ils  fe  défioient  donc  delà 
Providence  infaillible  de  Jefus-Chrift  j 
8c  en  ce  cas  même  fans  perdre  tems  à 
courir  par  la  ville  ^  ils  n'auroient  eu  qu'à 
s'en  revenir  fur  leurs  pas  rendre  compte 
à  leur  Maître  de  ce  qui  leur  feroit  arri- 
vé. Ainfi  je  ne  fçai  à  quoi  les  Difciples 
ne  s'attendoient  point  ;  8c  il  feroit  peut- 
être  bien  empêché  de  le  dire. 

La  II.  raifon  eft  un  autre  contre-tems 
qu'on  fait  faire  aux  deux  Difciples  ; 
lorfqu'au  lieu  de  les  faire  parler  de  jour 
à  Jefus-Chrift  ,  on  leur  fait  juftement 
choifir  l'encrée  de  la  nuit ,  pour  propo- 
fer  la  Pâque  ,  8c  pour  la  préparer. 
L'heure  ne  pouvoir  être  plus  mal  choi- 
fie.  Etoit-ce  là  un  tems  fort  commode 
pour  chercher  une  maifon  ,  pour  en  net- 
toyer tous  les  coins  &  recoins  de  tour 
le  pain  levé  ,  à  cheifir  un  agneau  fans 
défaut ,  à  acheter  des  gâteaux  azymes 
&:  des  herbes  ameres  j  6c  afin  de  poufler 
la  chofe  à  bout  pour  tenir  tout  prêt  ce 
qui  devoit  entrer  dans  la  fauce  du  Cha- 
rojjet  ,  qui  ne  devoit  fervir  que  plus  de 
26  heures  après.  Pour  faire  tout  cela 
ils  avoientle  choix  du  1 5  qui  étoit  pa(Té, 


45 *  Dissertation  XXIX. 
ou  de  tout  le  14  qui  étoit  le  lende- 
main :  que  ne  prenoient-ils  l'un  ou  l'au- 
tre. Non  ,  il  faut  qu'ils  ne  s'en  avifenc 
que  le  foir  à  l'entrée  de  la  nuit  ;  celaeft 
eilentiel  au  fyftême  ;  au'ïi  cette  pré-, 
voyance  fuperrluë  n'eut-elle  point  d'ef- 
fet. Il  par  oh  ,  comme  nous  l'avons  vu  , 
p.  16 1 ,  que  J efus-Chrift  vint  peu  de  tems 
après  qu'ils  furent  partis  ,  &  qu'il  ne 
leur  donna  le  tems  que  d'apprêter  le 
fouper  de  ce  foir- là  ,  qu'il  trouva  pré- 
paré. 

Le  III.  motif  eft  que  par  un  cettain 
renversement  de  conduite  ils  parlent  à 
Jefus-Chrift  de  la  Pâque  qu'ils  ne  pré- 
parèrent pas  j  &:  ils  préparèrent  le  lou- 
per de  ce  foir-la ,  dont  ils  ne  lui  avoient 
point  patlé.  Ce  procédé  eft  un  peu  fur- 
prenant  ,  Se  néanmoins  c'eft  une  fuite 
naturelle  du  fyftême.  Car  après  qu'on  a 
repréfenté  à  l'Auteur,  qu'o/z  convenoit  y 
6V  lui-même  comme  les  autres  ,  p.  251, 
qu'ils  par  loient  à  Jefus-Chrijl  du  fouper 
qui  fe  dev oit  faire  ce  jour-là  même  Jeu- 
di. Je  tien  conviens  pas  j  dit  l'Auteur, 
en  défavouant  nettement  celui  qui  fai- 
foit  cette  avance  pour  lui.  Les  Apôtres 
ne  parlent  donc  point  du  fouper  de  ce 
foit-làque  Jefus-Chrift  néanmoins  trou- 
va peu  de  tems  après  tout  préparé.  Ce- 
pendant  une   ligne   plus  bas  l'Auteur 


Dissertation  XXîX.  4  5  3 
s'avife  ,  je  ne  fçai  comment  ,  d'avouer 
l'avance  qu'on  lui  avoir  prêtée.  Ils  pou- 
vaient parler  _,  dir-il  p.  151  ,  du  fouper 
de  ce  Jbir-là.  Il  convient  donc  mainte- 
nant de  ce  qu'il  venoitde  nier  une  ligne 
plus  haut.  11  ajoute  ,  <S'  de  la  recherche 
du  pain  levé  par  ou  commençait  la  pré- 
paration de  la  Pâque.  Et  par  conféquent 
de  tout  le  refte  \  car  pourquoi  Pauroient- 
ils  fupprimé  ,  C\  ce nJeft peut- être,  parce 
qu'il  eft  atTez  compris  dans  cette  re- 
cherche ?  Quoiqu'il  en  Toit  ,1a  2.  par- 
tie de  ma  proportion  eft  toujours  véri- 
table ,  parce  qu'ayant  à  peine  aiTez  de 
tems  pour  apprêter  le  fouper  de  ce  foir- 
là  ,  ils  n'eurent  pas  le  loifir  de  chercher 
le  pain  levé  ,  &  1  hôte  qui  avoit  mis  fa 
maifon  en  état  de  fervir  pour  la  Pâque, 
ne  leur  en  donna  pas  la  peine. 

IV.  Le  refpecl:  qu'on  doit  a  Jefus- 
Chrilt  devoit  empêcher  de  les  faire  par- 
tir après  le  Soleil  couché.  Car  (  j'ai  de 
la  peine  à  le  dire  ,  mais  je  ne  dois  pas 
le  diflimuler  )  tous  les  inconvéniensqui 
s'en  enfuivent  retombent  fur  la  fagelfe 
de  Jefus-Chrift.  11  les  envoie  a  une 
heure  indue'  travailler  A  1?  préparation 
de  la  Pâque  qu'il  prévoyo  ;>  :i  ou'ils 
n'aïuoient  pas  le  tems  ni  le  m  1  en  •': 
préparer.  Ec  il  leur  fait  acheter  fort 
inutilement  un  agneau  qu'il  favonbiea 


454  Dissertation  XXIX. 
qui  ne  leur  ferviroit  pas.  Cette  dépenfe 
fuperfluc  n  eft  pas  bien  réparée  par  ces 
deux  excufes.  La  i.  qu'il  fe  comportoit 
comme  fit  fa   mort  n'eut  pas    encore  été 
proche  \  car  cette  difiimulation  eft  con- 
traire à  ce  qu'il  leur  avoir  die  pontive- 
ment  que  dans  deux  jours  il  reroit  la 
Pâque  \  &:  qu'aufli-tôt  le  Fils  de  l'hom- 
me feroit  livré  pour  être  crucifié  :  Sci- 
tis  quia  pofi    hïduum  Pafcha  fiet  _,    & 
filïus  hominis  tradetur  ut  crucifigatur  : 
Or  c'éroir  alors  le  deuxième  jour.  Cette 
Pâque  étoit  donc  la  marque  de  la  pro- 
ximité  de    fa    mort.  La  i.  qu'i/  laifje 
penfer  fies   Difciples  que   cejl  pour  la 
Pâque  légale  qui!  les  envoie  ^    p.    258. 
11  eft  certain  que  ce  mot   parate  ,  pré- 
pare^-nous  _,  contient  non   une  permif- 
fion  ,    mais  un  ordre  exprès  d'apprêter 
quelque  Pâque.  Mais  comme   il  ne  la 
fpécifie   pas  ,    il   leur    permet  ,    félon 
l'Auteur  ,  de  croire  faunemenr  que  c'é- 
roit  la  Pâque  légale.  Quelle  Pâque  donc 
leur  commande- 1  il    poiitivement     de 
préparer  dans  ce  mot  parate  ï  L'Aureur 
ne  veut  pas  que  ce  foi:  la  Pâque  légale, 
le  bon  fens  ne  fouffre  pas  que  ce  foit  la 
Pâque  Euchariftique.  Quelle   eft  -  elle 
donc  ?   C'eft   une   Pâque    imaginaire, 
comme  il  paroîrra  dans  le  §  fuivant. 
Enfin  il  fait  dire  de  fa  part  à    celui 


Dissert  ation  XXIX.  45  5 
qu'il  avoir  choiû  pour  ion  hôte  ,  qu'il 
alloit  faire  la  Paque  chez  lui  avec  Tes 
Difciples  ,  apud  te  facio  Pafcha  eu  m 
Difcipulis  meis.  S'il  a  tenu  parole  ,  il  a 
donc  fait  la  Paque.  S'il  ne  l'a  pas  faite  , 
(  j'ai  horreur  de  le  dire  ,  )  il  parloir 
donc  contre  fa  pen fée ,  &  il  trompoit 
fon  hôte  par  une  fauGTe  promelTe. 

§.    XXX. 

Abus  que  fait  l'Auteur  du  nom  de  Fa- 
que.  Que  la  Paque  dejirée  par  Jefus- 
Chrijl  nefl  ni  la  Paque  mémoratïve  _, 
ni  CEuchariJiie  y  ni  le  pain  &  le  vin  , 
mais  ly Agneau  PafihaL  Grande  dif- 
férence entre  l'objet  du  déjlr  &  le 
motif, 

V.  Enfin  l'abus  qu'on  fait  du  nom  de 
Paque  ,  obligeoit  de  penfer  autrement 
qu'on  n"a  fait  de  toute  cette  matière. 
L'Auteur  de  l'Harmonie  le  fait  appli- 
quer par  Jefus  Chrift ,  parles  Apôtres, 
par  les  Evangéliftes  à  des  chofes  aux- 
quelles il  ne  convient  point.  Des  gâ- 
teaux _,  des  herbes  ameres ,  &  une  cer- 
taine fauce  ne  font  point  la  Paque.  Ce 
nom  convient  proprement  à  l'Agneau 
Pafchal ,  Ôc  de-là  il  fe communique  par 
analogie  à  tout  le  relie;  mais  c'eft  lorf- 


45 6    Dissertation    XXIX. 
qu'on  l'immoloit  &  qu'on    l'appretoit 
pour  le  manger  j    &    tant    quon  le  te- 
noit  lié  au  pic  du  lit ,   c'étoit  un  agneau, 
mais  cen'étoit  point  encore  la  Pâque. 

Ce  fur  donc  une  grande  fiuprife  à 
tous  les  Apôtres ,  lorfque  fans  voir  d'a- 
gneau fur  la  table  ,  Jefus  -  Chtift  leur 
dit ,  félon  l'Auteur ,  qu'il  avoit  dès  long- 
tems  un  grand  defir  de  manger  avec 
eux  cette  Pâque  qu'ils  voyoient.  Defi- 
derio  defideravi  hoc  Pafcha  manducare 
vobifcum.  L'Auteur  ,  Tr.  Hift.  p.  161 
confidére  ce  paffage  comme  le  principal 
point  de  la  difpute ,  &  comme  le  feul 
que  puijfent  alléguer  ceux  qui  croy oient 
que  Jefus-Chrïji  mangea  la  Pâque  lé- 
gale dans  ce  repas  ;  parce  que  les  autres 
ne  regardent  que  la  préparation  qui  fut 
pour  le  lendemain ,  au  lieu  que  celui-ci 
parle  de  la  manducation  actuelle.  Mais 
il  ne  s^en  incommode  guère. 

11  a  le  choix  de  trois  réponfes.  1.  Il 
pourroit  dire  que  Jefus-Chrift  parloir 
de  la  Pâque  mémorative  qu'on  mangeoit 
en  mémoire  de  la  vraie  Pâque  j  &  que 
Grotius  a  imaginée  fort  a  propos  pour 
répondre  aux  paflages  des  Evangéliftes. 
Mais  l'Auteur  n'adopte  point  cette  Pâ- 
que de  l'invention  de  Grotius ,  qui  n'a- 
voit  lieu  que  dans  les  lieux  éloignés  de 
Jérufalem,  Pour  les  deux  autres  répen- 

fes, 


Dissertation  XXIX.    4 5 7 
Ces,   il  paroit  que  l'Auteur  a  varié;  car 
dans/à  Lettre  au  R.  P.  F.  il  explique 
cette  Pâque  du  Saint-Sacrement ,  p.  tf  o. 
&c  dit' affirmativement  :  Je  n'abandonne 
pas  ce  paffœge'  Je  prétends  que  Notre- 
Sei'gneur  y  parle  de   l'EuchariJlie  qu'il 
alloit   inflituer.    Ce  préambule  ^    Defi- 
derio  delideravi  _,  le  démontre.  Cepen- 
dant  dans  fon  Traité  Hiftorique   il  fe 
contente  d'attribuer  ce  Commentaire  à 
plufieurs  Pères  de  l'Eglife  ,    dont  il  ne 
cite  que  Tertullien  j&  fans  l'avouer  ex- 
preflemenr.  Il  le  confirme  par  cette  rai- 
ion  que  Jefus-Chrijl  prononça  ces  paro- 
les  ,  J'ai  defiré  avec  ardeur  ,    &c.  dans 
le' tems  qu'il  inftitua  l 'Eucharijlie  ,  p. 
263.  &  par  cohféquent  lorfqu'il  nétoit 
plus  que/lion  de  la  Pâque   légale.  J'en 
attends  la  preuve.   C'eft ,  ajoute-t-il  _, 
cpL  après  avoir  pris  le  calice  _,   il  rendit 
grâces  ,   &  leur  dit  :  Prene^  -le    &  le 
di/lribue^  entre    vous  j     car  je   vous  dis 
que  je  ne  boirai  plus  du  fruit  de  la    vi- 
gne jufquà  ce  que  le  règne  de  Dieu  foit 
arrivé.  Puis  il  prit  le  pain  ,    &    ayant 
tendu  grâces   _,    il  le  rompit  ,     &    leur 
donna  ,   en  difant  :   Ceci  ejl  mon  Corps, 
Comme  ces  dernières  paroles  regardent 
conltamment  la  confécration  du  pain  au 
Corps  deJefus-Chrift   ,    il  veut    faire 
croire  que  celles  qui  les  précédent,  con- 
Tome  IF.  V 


458  Dissertation  XXIX. 
tiennent  la  confécration  du  Calice  Eu- 
chariftique  ;  &  c'eft  pour  cela  qu'il  a 
fupprimé  les  paroles  fuivantes  où  elle 
cil  contenue  :  II' prit  de  même  après  fou- 
per  le  Calice  ,  en  difant  :  Ce  Calice  ejl 
la  nouvelle  alliance  3  &c.  Mais  il  eft 
difficile  qu'en  cela  il  foie  de  bonne  foi. 
Car  1.  faim  Luc  auroit  renverfé  l'ordre 
des  deux  parties  de  l'Euchariftie  ,  en 
mettant  la  confécration  du  Calice  avant 
celle  du  pain.  1.  11  auroit  rapporté  deux 
fois  la  confécration  du  Calice  ;  la  pre- 
mière avant  celle  du  pain  ,  &  la  féconde 
après  :  deux  fautes  iignalées  ,  dont  on 
ne  peut  foupçonner  faint  Luc  le  plus 
élégant  des  Evangéliftes.  11  eft  donc 
certain  que  le  premier  Calice  eft  le  Ca- 
lice légal  que  le  Père  de  famille  diltri- 
buoit  à  toute  la  troupe  après  la  mandu- 
cation  de  la  Pâque  ;  ôc  qu'ainfi  ces  pa- 
roles ,  J'ai  defiré  avec  ardeur  de  man- 
ger la  Pâque  avec  vous ,  qui  précédent 
immédiatement,  ne  peuvent  s'entendre 
que  de  l'Agneau  Pafchal,&  qu'elles  fu- 
rent prononcées  pendant  qu'on  le  man- 
geoit.  Après  ces  deux  parties  de  la  Pâ- 
que ancienne  ,  je  dis  après  l'agneau  ôc 
le  breuvage  ,  Jefus-Chrift  établit  tout  de 
fuite  les  deux  parties  de  la  Pâque  nou- 
velle ,  fon  Corps  &  fon  Sang  ,  fous  les 
efpeces  du  pain  &  du  vin. 


Dissertation  XXIX.  459 
Quant  au  pafïage  de  faint  Matthieu  : 
Or  je  vous  dis  que  je  ne  boirai  plus 
déformais  de  ce  fruit  de  vigne  ,  &c.  que 
l'Auteur  nous  produit  comme  étant  la 
même  chofe  que  celui  de  faint  Luc;  il 
eft  vrai  qu'il  parle  du  fang  de  Jefus- 
Chrift  ,  aufli  il  fuit  immédiatement  la 
confécration  du  Calice  Euchariftique  j 
mais  je  nie  que  ce  foit  le  même  paftage 
que  celui  de  faint  Luc  :  je  foutiens  au 
contraire  qu'il  en  eft  tout  différent ,  ÔC 
par  les  paroles  que  l'on  peut  confronter, 
ôc  par  les  fujets  ,,  dont  l'un  eft  le  vin  , 
&c  l'autre  le  Sang  de  Jefus-Chrift  ^  &  par 
les  tems  où  ils  ont  été  prononces  _,  l'un 
devant,  &  l'autre  après  l'inftitution  de 
l'Euchariftie. 

L'Auteur  fans  doute  a  vu  tout  cela  ; 
aufli   ii  ne  paroît  pas  infifter  davantage 
fur  l'Euchariftie  ,   pour   lui   appliquer 
cette  Pâquedelirée  ;  en  quoi  il  eft  plus 
raifonnable  que  dans  fa  Lettre  au  R.  P. 
F.  Car  1 .  on  ne  peut  empêcher  que  cette 
Pâque  que  Jefus-Chrift  avoit  defiré  de 
manger  _,  ne  foit  la  même  que   les  deux 
difciples  avoient  préparée  ,  comme  il 
eft  bien  difficile  de  feparer ,  celle  qu'ils 
préparèrent  de  celle  qu'on  avoit  accou- 
tumé de  tuer.    Que  l'Auteur   life  cette 
fuite  avec  un  peu  d'attention   :   Le  jour 
qu'an  devoit  Immoler  la  Pâque  ,  les  Dif- 

Vij 


4^0     Dissertation  XXIX. 

ciples  dirent  à  Jejus  :  Où  vous  p lait- il 
que  nous  vous  préparions  ce  qu'il  faut 
pour  manger  la  Pâque  ?  Alle-^  ,  leur  dit- 
il ,  che%  un  tel.  Préparez-nous  toutes 
chofes  ,  afin  que  nous  mangions  la  Pâ- 
que. Ils  la  préparèrent  ;  &  Je/us  s'y 
étant  rendu  fur  le  foir  ,  il  leur  dit  :  J'ai 
défiré  avec  ardeur  de  manger  cette  Pâ- 
que avec  vous.  Par  quelles  machines 
peut-  on  empêcher  que  cette  Pâque  que 
Jefus-Chrift  mangea  après  l'avoir  long- 
rems  fouhaitée,  ne  foitla  même  que  les 
Difcipies  avoient  préparée  ,  8c  qu'on 
devoit  immoler  ce  jour- là.  L'Auteur  le 
peut  nier  par  l'engagement  de  fa  caufe  ; 
mais  je  doute  qu'il  en  foit  (incéremenc 
perfuadé.  Cependant  il  eft  confiant  que 
la  Pâque  qu'on  étoit  obligé  d'immoler 
ce  jour- là,  6V  que  les  Difcipies  prépa- 
rèrent n'étoit  point  l'Euchariftie.  Ce 
n'était  donc  pas  de  l'Euchariftie  que 
Jefus-Chrift  parloit. 

II.  Cette  Pâque  defirée  étoit  préfenre 
quand  Jefus-Chrift  dit  ces  paroles  ,  hoc 
Pafcha  manducare  vobifcum.  On  n'ap- 
plique le  pronom  démonftratif ,  hoc  , 
qu'à  un  objet  qu'on  a  devant  les  yeux  , 
ou  qui  n'eft  pas  éloigné.  Or  il  paroît 
par  faim  Luc  qu'alors  l'Euchariftie,  bien 
loin  d'être  trcfente ,  n'étoit  pas  encore 
inftituée.  L'hiftoire  n'en  eft  rapportée 


Dissertation  XXIX.  461 
que  4  verfets  plus  bas,  après  que  Jefus- 
Chrift  eut  protefté  qu'il  ne  mangeroic 
plus  de  la  Pâque  jufqu'à  ce  qu'elle 
trouvât  fon  accompliirement  dans  le 
Royaume  de  Dieu  ,  c'eft-à-dire  ,  dans 
l'Euchariftie  qu'il  alloit  inftituer  ,  & 
qu'il  ne  boiroit  plus  de  vin  juiqu'i  l'a- 
venemenr  du  Royaume  de  Dieu.  Puis 
donc  que  la  Pâque  écoit  préfente  &  que 
l'Euchariftie  ne  i'étoit  pas  ,  comment 
peut-on  alïurer  que  la  Pâque  étoit  l'Eu- 
chariftie ? 

Mais,  dit  l'Auteur  ,  p.  16$  ,  quel  at- 
trait Jef's-Chrijl  trouv oit-il  dans  la 
chair  de  C  Agneau  Pafchal  qu'il  avoit 
mangée  plufieurs  fois  ,  pour  le  déjirer 
avec  tant  d'ardeur  ?  Nimirum  verveci-, 
na  illum  Judaica  deleclaret  ,  dit  Tertul- 
lien  ,  cejl  fans  doute  qu'il  aimoit  la 
chair  de  mouton  ?  L'Auteur  ne  s'apper- 
çoit  pas  que  cette  objection  confond 
l'objet  du  defir  avec  le  motif  qui  le  fait 
délirer  ,  qui  fout  des  chofes  toutes  diftc- 
rentes.  Jefus-Chrift  fouhaitoit  dès  long- 
tems  de  manger  cette  année-là  l'Agneau 
Pafchal  avec  fes  Difciples.C'étoit  l'objet 
de  (es  vœux;  mais  ce  n'étoit  pas  le  mo- 
tif qui  le  lui  faifoit  fouhaiter.  C'étoit 
qu'après  la  manducation  de  cet  Agneau 
il  devoit  inftituer  le  Sacrement  de  fon 
Corps  6c  de  fon  Sangj  qui  étoit  un  des 

V  iij 


461       D  I  SSERTATION    XXIX. 

plus  illaftres  monumens  de  fon  amour 
pour  les  hommes.  11  n'y  a  pas  plus  de 
peine  à  diftinguer  ces  deux  chofes,qu'à 
comprendre  que  Jefus-Chrift  regardoit 
fon  abfence  de  Bethanie  pendant  la  ma- 
ladie de  Lazare  comme  un  objet  de  joie, 
dans  la  vue  d'affermir  la  foi  de  (es  Apô- 
tres :  Gaudco  propter  vos  ut  credatis  , 
quia  non  eram  ib'u  Quel  objet  de  joie  , 
dira-t-on ,  pouvoit-il  trouver  dans  cette 
abfence  qu'il  lui  étoit  arrivée  fi  fouvent? 
Ce  n'étoit  pas  cette  abfence  même  qu'il 
avoir  en  vue  ,  mais  la  foi  des  Difciples 
qui  devoit  recevoir  un  nouvel  accroifle- 
menc  de  \x  réfurre&ion  de  Lazare.  Or 
Fabfence  de  Jefus-Chrift  lui  donna  le 
loifirde  mourir,  &  à  Jefus-Chrift  le 
moyen  de  le  refïufciter. 

11  femble  donc  que  l'Auteur  lahTant 
croire  à  qui  le  voudra,  que  l'Eucha- 
riftie  étoit  cette  Pâque  defirée  de  Jefus- 
Chrift,  donne  pour  3.  réponfe  au  parta- 
ge ,  Dejîderio  dejideravi  ,  ôVc.  que 
Jefus-  Chrifl  en  dïfant  ces  paroles  :  J'ai 
dejiré  de  manger  cette  Pâque  ,  ceft-à- 
dïre  en  avertijjant  fes  Dijciples  ,  que 
c  étoit- là  le  dernier  repas  qu'il feroit  avec 
eux ,  regarda  le  pain  &  le  vin  dont  il 
ne  devoit  plus  goûter  qu  après  fa  Paf- 
Jion.  C'ejl  le  fens  naturel  de  ces  paroles. 
Et  il  ajoute  qu'il  y  a  cette  commodité 


Dissertât  l  on  XXXI.  ±<x, 
dans  cetre  explication  ,  que  Us  Pro\ 
tejlans  n'en  peuvent  tirer  aucun  avan- 
tage j  comme  s'il  avoit  appelle'  l'Eucha- 
rifeie  encore  après  la  confécration  pain 
&  vin.  C'en:  tout  le  contraire  j  loin 
d'ôter  ce  pafïage  aux  Proteitans,  il  leur 
donne  lieu  contre  fon  intention  de  prou- 
ver par  ces  paroles  ,  que  Jefus-Chrifl 
donne  à  TEucharifrie  les  noms  de  pain 
&  de  vin  ,  même  après  la  confécration. 
Car  félon  lui  ,  p.  Z64  ,  faint  Mathieu 
témoin  oculaire  ,  &  qui  rapporte  vrai- 
femblablement  les  chofes  dans  le  meme 
ordre  quelles  s  êtoient  faites  ,  met  ces 
paroles  en  que/lion  -  après  Vinftitution 
de  l3 Eucharijlie  :  Or  je  vous  dis  que  je 
ne  boirai  plus  du  fruit  de  la  vigne  ,  &c. 
D'ailleurs  il  eft  vifible  que  Jefus-Chnft 
parla  de  Ce  Calice  qu'il  venoit  de  attri- 
buer ,  en  difant  :  Ceci  ejl  mon  Sang  ,  le 
Sang  de  la  nouvelle  alliance  ,  &c.  Ce 
qui  paroit  par  le  pronom  démonftratif , 
qui  a  été  fupprimé,  je  ne  fçai  pourquoi, 
dans  la  citation  de  l'Auteur,  de  hoc  ge- 
nimine  vitis  }  de  ce  fruit  de  la  vigne. 
Qui  ne  von  pas  la  répétition  de  ce  pro- 
nom ,  hic  fanguis  ,  hoc  genimen  vitis  , 
&c.  qu'il  qualifie  maintenant  de  fruit 
de  la  vigne  ,  ce  qu'il  venoit  d'appeller 
fon  Sang  ,  ôc  le  fang  de  la  nouvelle 
alliance  ?  Si  donc,  félon  l'Auteur  ,  ce 

V  ir 


464   Dissertation  XXIX. 
fruit  de   la   vigne  eft  du  vin  naturel  , 
comment    enpèchera-t-il  que  le   Sang 
de  la  nouvelle  alliance   ne  foit  aulîî  du 
vin  naturel  ?  Cette  raifon  eft  d'autant 
plus  forte  qu'il  prétend  que   le  partage 
de  faint  Luc  ,  qui  certainement  parle 
du   vin  naturel  ôc  de  la  coupe  légale  , 
comme  il  paroît ,  parce  qu'il  porte  abfo- 
lument  ôc  fans   pronom  démonftrarif  , 
de  generatione  vitis  ;  je   ne  boirai  plus 
du  fruit  de  la  vigne,  il  prétend  ,  dis-je  , 
que  ce  partage  dit  la  même  chofe    que 
celui  de  faint  Matthieu  ,  ôc  par  confé- 
quent  qu'ils  parlent  tous  deux  du    vin 
Euchanftique  :,  ce  qui  eft  à  la  lettre  le 
compte  des  Proteftans.     Mais  on  n'eft 
pas  en  peine  comment  leur  orer  le  parta- 
ge de  faint  Matthieu,  dont  ils  abufent. 
On  n'a  qu'à  foutenir  au  contraire  que 
le  vin  dont  parle  faint  Luc  ,  eft   du  vin 
naturel  :  Je  ne  boirai  plus  du  fruit   de 
la  vigne ,  ôc  que  celui  de  faine  Matthieu 
eft  un  vin  métaphorique  :   Je  ne  boirai 
point  de  ce  fruit  de  la  vigne. 

Je  reviens  feulement  à  l'application 
que  l'Auteur  fait  du  nom  de  la  Paque  à 
du  pain  ôc  du  vin.  Je  dis  de  cette  Pa- 
que que  les  Juifs  immoloient  ,  que  les 
Difciples  propoferent  à  Jefus-Chrift  , 
que  Jefus-Chrift  les  envoya  préparer 
chez  un  de  fes  Difciples  x  qu'Us  pré- 


Dissertation  XXIX.  465 
parèrent  en  effet  ,  &  dont  Jefus-Chrift 
leur  dit  qu'il  avoir  une  extrême  envie 
de  la  manger  avec  eux  :  Si  on  veut  fça- 
voir  ce  que  c'eft  que  cette  Pâque  ,  l'Au- 
teur répondra  que  c'eft  du  pain  Ôc  du 
vin.  Elt-il  poilible  qu'il  ne  fente  pas  la 
violence  de  cette  catachrefe  f  Mais  au 
moins  je  lui  demande  comment  il  ne 
s'eft  pas  apperçu  qu'on  lui  pouvoit  allé- 
guer contre  le  pain  &  le  vin  la  même 
raifon  qu'il  avance  contre  l'Agneau  Paf- 
chal.  Quel  grand  attrait  .,  dit-il  p.  2.65, 
après  Tertullien  ,  trouvoit-il  dans  la 
chair  de  l'Agneau  Pafchal  qu'il  avoit 
mangé plufieurs  fois ,  pour  le  déjïrer  avec 
tant  d'ardeur.  Et  moi  je  lui  dis  après 
lui-même  ,  en  changeant  feulement  le 
fujet  de  la  propofition  :  S'il  ne  sagiffoit 
que  du  pain  &  du  vin  ,  pourquoi  ejt-ce 
qu'il  auroit  eu  cet  emprejfement  ?  Let. 
p.  80. 

Mais  n'efb-ce  pas  une  chofe  étrange 
de  fe  fervir  d'un  Auteur,  pour  détruire 
un  fait  qu'il  fuppofe  dans  les  paroles 
mêmes  qu'on  lui  emprunte  ?  Tertullien 
pofe  en  fait  que  Jefus-Chrift:  a  mangé 
la  Pâque  Judaïque  félon  le  delir  extrême 
qu'il  en  avoit  depuis  long-tems  \  non 
par   le  defir  de  manger  de  la  chair  d'a- 

J  •  T  1        * 

gneau  ,  ma1. 3  parce  qu'il  vouloir  ace 

il  .    Uni  jC 

\       'A 


àf66    Dissertation  XXIX. 
falutahe  ,  &  distribuera  (es  Difciples  fe 
pain  qu'il  avoit  fait  fon  Corps  :  Profef 
fus    itaquc  Je  concupifeentia   concupijfe 

edere  Pafcha  ut  fuum acceptum  pa- 

nem  &  dijlributum  Difcipulis  corpus 
ïllum  fuum  fecit.  Contr.  Marcion.  Et 
l'Auteur  au  contraire  ,  de  ce  que  Jefus- 
Chriit  n'avoit  point  d'attrait  pour  man- 
ger de  la  chair  d'agneau  ,  conclud 
qu'il  n'a  point  mangé  l'Agneau  Pafchal. 

§.   XXXI. 

Abus  du  premier  jour  des  Azymes  ,  que 
l'Auteur  met  tantôt  au  14  du  premier 
mois ,  tantôt  au  1  ^felon  qu'il  ejlprejjé 
par  f es  adverf aires- 

Après  les  violences  que  l'Auteur  a 
faites  à  la  Pâque  pour  lui  faire  fignifier 
route  autre  chofe  que  l'Agneau  Pafchal, 
il  eft  bon  de  voir  les  interprétations  for- 
cées qu'il  a  données  au  premier  jour  des 
Azymes ,  dont  les  trois  Evangéliftesont 
parlé  ,  comme  ayant  donné  occafion  à 
la  propoluion  de  la  Pâque  :  Venit  au- 
tem  d'us  A-^ymorum.  La  difficulté  eft 
fur  ce  venit  ,  au  prétérit  «Vô« ,  le  jour 
des  Azymes  ou  des  pains  fans  levain 
arriva  r  &  comment  on  peut  accordée 
avec  se  jour  ,  qui  écoit  le  1$  du,moi&> 


Dissertation  XXIX.  467 
ce  qu'ajoutent  les  Evangéliftes  ,  que 
c'étoit  alors  qu'on  immoloit  la  Pâque  , 
qui  néanmoins  félon  la  Loi  devoit  s'im  - 
moler  le  14.  Venit  autem  dies  A^ymo- 
rum  in  qua  neceffe  erat  occidï  Pafcha, 
Luc.  22.  7. 

L'Auteur  double  avec  les  Rabbins  ce 
premier  jour  des  Azymes  ;  il  mec  le 
premier  dans  le  14  jour  du  mois  5  qu'il 
fait  commencer  dès  le  foir  du  1 3 ,  &c  il 
place  le  fécond  (  il  on  peut  parler  ainfi 
d'un  premier  jour  ,  mais  je  ne  puis 
m'exprimer  autrement  fi  je  veux  me 
faire  entendre  )  il  place  ,  dis- je  ,  le  fé- 
cond dans  le  1 5  jour  du  mois  ,  qui 
commençoit  dès  la  fin  du  14.  Le  grand 
jour folemnel  des  Azymes ,  dit-il  p.  179, 
étoit  bien  le  quinzième  ,  comme  l'Ecri- 
ture le  dit  ,  &  cette  folemnité  duroit 
fept  jours....  mais  puifque  tout  le  14 
étoit  employé  à  exterminer  le  pain  levé... 
que  depuis  une  heure  jufqu  au  foir  la  Loi 
défendoit  d'en  manger  fur  peine  de  mort  j 
ce  qui  eft  une  idée  des  Rabbins  j  &  que 
les  Docteurs  ne  le  permettoient  pas  après 
dix  heures  du  matin  ;  ce  jour  pouvoit 
fans  doute  p^ffer  pour  un  jour  d'Azy- 
mes. Voilà  deux  premiers  jours  des  Azy- 
mes j  l'un  établi  dans  ces  paroles  du  Lc- 
vitique,c.  25,  v.  G. Le  1  5  jour  du  pre- 
mier mois  efl  la  feu  des  Axymts  ;  l'a  a- 

"*  X' 

Y  v; 


4^8      Dissertation   XXIX. 
tre  fondé  uniquement  fur  l'autorité  des 
Rabbins ,    &  fur   le    fens    chimérique 
qu'ils  donnent  à  cet  endroit  de  l'Exod. 
c.  1 1  ,  v.    15.  In  die  primo  non  erit  fer- 
menturn  In  domibus  vejlris  :  Des-le  pre- 
mier jour  il  ne  fe  trouvera  point  de  le- 
vain, dans  vos  maifons.  Quiconque  man- 
gera du  pain  levé  depuis  le  premier  jour 
jufquau   fèprieme  ,    périra    du    milieu 
d'Ifra'èl.  Car  ce   premier  jour  étoit  le 
1 5   du  mois  ,  comme  il  eft  clair  par  le 
Lévitique  que  j'ai  cité.  Ainfi  il  eft  vrai 
qu'il  falloir  avoir  fait  la  recherche   du 
pain  levé  dès  l'après-dinée  du  14,  &  (i 
Ton  le  veut  ainfi ,  dès  une  heure  après 
midi.  11  eft  vrai  encore  qu'il  y  avoit  dé- 
fenfe  fous  peine  de  mort  d'en  ufer  dès 
le  foir  qui  ouvroit  le  premier  jour  des 
Azymes  ,  c'eft- à-dire  dès  le  feftin  Paf- 
chal  jufqu'au   feptieme  jour.  Qu'a  fait 
l'Auteur  ?    Trop  crédule  aux  préceptes 
des  Rabbins  il  a  étendu  la  défenfe  du 
pain.levé  jufqu'au  tems  de  la  recherche; 
il  veut,p.  179, que  depuis  une  heure  juf- 
quau foir  la  Loi   défende  d'en   manger 
fur  peine  de  mort  ;  parce  que  Maimo^- 
nide  y  ce  favant  Rabbin ,  a  entendu  en- 
ce  fens  l'ordonnance  de  l'Exode  ,  In  die 
primo  non    erit  fermentum.  La    Tradi- 
diiion^  dit  ce  Rabbin  ,  nous^  apprend,  que 
êfç  grej/usr  jour  cjl  le  1 4  de.  Eifaru  ak 


Dissertation  XXIX.  469 

s'immoloit  la  Pâque.  p.  175. 

De-là  l'Auteur  ton  conféquemment  1 
£es  principes  p.  179  ,  compte  huit  jours 
d'Azymes  ,  ce  qu'il  tâche  de  confirmer 
par  Jofeph  \Nous  faifons ,  dit-il ,  la  fête 
des  Azymes  pendant  huit  jours,  Antiq. 
1.  2,c.  5.  Et  pour  fauver  la  contradic- 
tion avec  un  autre  lieu  où  il  dit  que  la 
jeté  des  Azymes  dure  fept  jours.  Ântiq. 
1.  3  j  c.  10  _,  l'Auteur  dit  que  d«ms  le  pre- 
mier paffage  Jofeph  parle  félon  la  Tra- 
dition ,  que  dans  le  fécond  où  il  parle 
félon  La  Loi ,  il  ne  dit  pas  que  la  con.- 
tume  neùt  pas  augmenté  le  nombre  des 
jours  Azymes,  p.  1 80, 

On  demandera  peut-être  par  quel  in- 
térêt l'Auteur  quittant  l'Ecriture  qui 
fixe  fi  expreiTement  le  premier  jour  des 
Azymes  au  1 5  5  l'avance  d'un  jour  avec 
les  Rabbins  ,&le  transfère  au  14.  C'eft 
qu'il  prétend  par  là  expliquer  du  14  ce 
jour  des  Azymes  ,  dont  parlent  les 
Evangéliftes  ,  venit  autem  dies  A^ymo- 
rum  :  il  le  prouve  par  l'obligation  qu'on 
avoit  d'y  immoler  la.  Pâque,  in  qua 
necejje  erat  occidi  Pafcha  ;  &  ce  qui  eft 
admirable  ,  il  en  conclud  que  Jefus- 
Chrift  n'a  point  fait  la  dernière  Pâque. 
Il  demande  feulement  qu'on  lui  accor- 
de en  grâce  que  les  Difciples  ,  comme 
cous,  l'avons,  vu  3  n'a  vent  parlé  de  la  I  '  i 


47©  Dissertation  XXIX. 

que    1  Jefus-Chnit  qu'après  lé   Soleil 
couché.   C'eft-IA  j  dira-ton  ,    route  la 
queition.   N'importe  ,  qu'on   le  lui  ac- 
corde ou  non  ,  il  ne  laiflera  pas  de  rai- 
fonner  ain(i.   Or  ce   foir  étoit  le  com- 
mencement du   14  &   alors   ce  n'étoic 
point   encore  le  tems  d'immoler  la  Pâ- 
que;  on  nel'immoloit  que  le  lendemain 
entre   3  &  5    heures  :  ou  ce  foir- là  en 
étoit  la  fin  , .  &  alors  le   1 5  étant  com- 
mencé, la  Pâqne  étoit  immolée,  &:  on 
ne  parloit  plus  que  de  la  manger.  Que 
fi  abfolument  on  ne  veut  pas  lui  accor- 
der fa  demande  ,  &  qu'on  prétende  que 
Jefus  Chrift  envoya  fes  Difciples  pré- 
parer la  Pâqne   quarre  ou  cinq  heures 
avant  le  coucher  du  Soleil  j   alors  quit- 
tant les  Rabbins  ,  il  prendra  avec  l'E- 
criture le  premier  des  Azymes  des  Evan- 
géliftes  pour  le  1 5  du  mois.  Si  on  veut  > 
dit-il  p.  25  1  ,  que  Jefius-Chrijl  en  donna 
Vordre  avant  le  coucher  du  Soleil  ,    il 
faut  aire  que  le  1 5  finififoit  le  Jeudi   au 
foir ,    &    que  par   conféquent  fi  Notre- 
Seigneur  mangea  l'Agneau  P  a  fichai ^  ce 
fût  le  fiei^ieme  ,  ce  qui  ne  fie  peut  pen- 
fier.    Et  quelle  néceflité  y  a-t-il   que  le 
15   finiffe  au   foir  du  Jeudi  f  Pourquoi 
ce  foir  ne  pourra-t-il  pas  être  la  fin  du 
14  pour  manger  la  Pâque  au  commen- 
cement du  1 5  l  C'eft^  dira-t-il  ■>  que  les 


Dissertation    XXIX.     4-r 
Evangéliftes  appellent  ce  jour- là  le  pre- 
mier des    Azymes.  Or   il  éroit  fixé    au 
15  du  mois.  Oui  félon  l'Ecriture.  Mais 
ne  nous  avez-vous  pas  dit  que  les  Rab- 
bins avaient  avancé  le  premier  des  Azy- 
mes dans  le  14  ?  Je  prends  donc    avec 
vous  au  fens  des    Rabbins  le  premier 
des   Azymes  marqué   par  les   Evangé- 
liftes \  6c  je  prérensque  le  14  entre  midi 
&  une  heure,  Jefus-Chrift  envoya  fes 
difciples  préparer  la  Pâque  qu'il  man- 
gea avec  eux  au  commencement  du  15. 
Cela  ne  fe  peut  pas  ,  dit-il ,  p.  2  5  iTcar 
fui f que  les  apôtres  ne  fongeren-t  à  pré- 
parer la    Pâque    que   quand  le  premier 
jour  des  Azymes  fût  commencé  ;   Venit  ^ 
il  faut  dire  l'une  de  ces  deux  c  ho  fes  :  ou 
en  prenant  ce  jour  au  fens  R?bbinique 
pour   le    14,   que  Notre- Seigneur    n  or- 
donna la  préparation  de  la  Pâque   qu'a- 
près que  le  jour  de'fon  immolation    étoit 
paffé  ,   &  dans  le  tems  qu'il    la  falloir 
manger  ,  favoir  à  l'entrée  du  1  5  ;  ou  ,fi 
Von  veut  ,  qu'il  en  donna  tordre   avant 
le  coucher  du  Soleil  ,  il  faut  dire  ,  en 
prenant  le  premier  des  Azymes  au  fens 
de  l'Ecriture  pour  le  1 5 ,  que  le    15  fi- 
niffoit  y  &   que  s'il  mangea  la  Pâque  y 
ce  fut  le  Jei^ieme.    Mais    l'Auteur  ne 
fourTrira  jamais  qu'en  prenant  avec  les 
Rabbins  le  premier  jour   des  Azymes. 


47*  Dissertation  XXIX. 
pour  le  14  j  Jefus-Chrift  aie  ordonné  la 
préparation  de  la  Pâque  avant  le  cou- 
cher du. Soleil  j  ni  qu'en  prenant  ce  jour 
avec  l'Ecriture  pour  le  1 5,  Jeius-Cnrift 
ait  mangé  la  Pâque  a  l'entrée  du  15. 
Ainfi  l'Auteur  fuyant  de  foir  en  foir  , 
&  fe  fauvant  tantôt  dans  le  premier  jour 
des  Azymes  au  fens  des  Rabbins  ,  ôç 
tantôt  dans  celui  de  l'Ecriture  ,  c'eft-à- 
dire  du  1 4  dans  le  1 5  ,  &  du  1 5  dans  le 
14  j  il  fe  joue  agréablement  de  fes  ad- 
verfaires  ,  tk  il  échappe  à  toutes  leurs 
prifes.  A  ceux  qui  difent  qu'0/2  etoit 
dans  le  premier  des  Azymes  félon  les 
Evangéliftes  ,  quand  les  Difciples  de- 
mandèrent  ou  ils  prépareraient  la  Pâque , 
p.  250  ,  il  répond  par  le  premier  des 
Azymes  félon  l'Ecriture  ,  que  Jl  avant 
le  foir  du  Jeudi  le  1 5  etoit  commencé 
quand  le  Soleil  fut  couché  _,  ce  fut  donc 
le  commencement  du  fei^ieme.  Ainfi  le 
tems  était  paffé non-Jeulement  d'immoler 
la  Pâque  5  mais  même  de  la  manger. 
Mais  à  ceux  qui  fuppofent  que  les  Apô- 
tres s'adreflerent  à  Notre  -  Seigneur 
avant  l'heure  où  commençoit  le  1 5  ,  il 
répond  félon  le  fens  des  Rabbins.  Enfin^ 
dit-il  ,  p.  252  ,  le  premier  jour  des  Azy- 
mes j  quel  qu'il  foit  ,  étoit  venu  ;  fi  c'ejl 
le  1  ^  étoït-il  tems  de  fe  préparer  à  faire: 
la.  Pa^ue  î 


Dissertation  XXIX.  475 
Tour  ce  jeu  des  paroles  roule  donc 
fur  l'équivoque  de  ce  premier  jour  des 
Azymes  qu'il  faut  démêler  ;  &  je  m'en 
vas  faire  voir  aufli  clair  que  le  jour  _,  que 
malgré  les  contes  des  Rabbins,  il  n'y 
en  a  jamais  eu  d'autre  que  celui  que  l'E- 
criture fixe  au  15  du  mois.  Que  les 
Evangéliftes  n'en  ont  parlé  que  dans  le 
fens  de  l'Ecriture  ,  quoiqu'ils  le  défi- 
gnent  par  l'immolation  de  la  Pâque  :  Et 
que  Jofephn'en  a  point  eu  d'autre  idée 
que  les  Evangéliftes,  quoiqu'il  ait  mar- 
qué huit  jours  pour  la  fête  des  Azy- 
mes. 

§.    XXXII. 

Que  les  Juifs  qui  comptoient  leurs  jours 
de  fête  d'un  foira  l'autre  foir  ,  comp- 
toient les  jours  civils  d'un  minuit  à 
l'autre  minuit. 

On  doit  diftinguer  avec  les  meilleurs 
Interprêtes  de  l'Ecriture  trois  fortes  de 
jours  parmi  les  Juifs  j  le  1  le  jour  na- 
turel de  24  heures,  qui  dure  depuis 
un  minuit  jufqu'a  l'autre  j  &  c'eft  celui 
dont  il  eft  dit  dans  la  Génefe  :  Il  fe 
fit  un  jour  du  foir  &  du  matin.  Faclum 
efl  vefpere  &  mane  dies  unus.  Le  2 
eft  le  jour  artificiel  qui  eft  la  durée  du 


474   Dissertation    XXIX. 
teins  que  le  Soleil  paroît  fur  l'horifon  > 
qui  eft  inégal  ielon  les  lieux  Se  les  fai- 
lons.  Le  3.  eft  le  jour  légal  ,  ou  le  jour 
de  fête  qui  fe  célébroit  depuis  un  foir 
jufqu'à  l'autre  \  Se  c'eft  touchant  cette 
forte  de  jours  que  Moïfea  fait  ce  règle- 
ment :    A  vefpera  ufque  ad  vefperam 
celebrabitis  Sabbata  veftra.  Levit.  c.  23  , 
v.    32.  Dans  le  tems  de  l'Equinoxe  le 
jour  artificiel  duroit  douze  heures  ;  le 
jour  naturel  commençoit  6  heures  plu- 
tôt ,  Se  finifïbit  6  heures  plus  tard  ;  Se 
le  jour  légal  commençoit  Se   finilïoit  6 
heures  avant  le  jour    naturel.    Encore 
donc  que  félon  la  Loi  les  Juifs  célébraf- 
fent  leurs  jours  de  fête  d'un  loir  à  l'au- 
tre ,  néanmoins  dans  l'ufage  public,  Se 
<%lnn  [g  J^n-aee  commun  ,  ilsfuivoient 
la  forme  des  Romains ,  qui  commen- 
çoient  leurs  jours  à  minuit  j  de  les  fi- 
niffoient  de  même  ,   comme  nous  i'ap- 
prenons  de  Cenforin  :  J'expoferai ,  dit- 
il  ,  toutes   les  parties  de  la  nuit    &  du 
jour  y  &  je  commencerai  par  le  munu'u  , 
qui  eft  le  commencement  &  la  fin  du  jour 
Romain  :  incipiam  a  noclc  média  _,  quod 
tempus  piincipium  &  pojtremum  eft  diei 
Romcnh  Et  il  eft  inoui  dans  toiue  l'an- 
tiquité Judaïque  qu'ils  ayent  compté  les 
jours  ordinaires  ou  naturels   depuis  le 
coucher  du  Soleil  jufqu'à  l'autre.  Cha- 


Dissertation  XXIX  475 
que  fête  commencent  dès  le  foir,  mais 
chaque  foir  ne  commençoit  pas  un  jour. 

Pererius  affure  comme  une  chofe  pref- 
que  indubitable  ,  que  ces  trois  fortes 
de  jours  étoient  en  ufage  parmi  les  Juifs} 
&  il  fe  vante  3  fi  cela  croit  nécefTaire  , 
qu'il  en  fourniroit  plufîeurs  exemples 
&  plufîeurs  preuves  tirées  de  l'Ecriture. 
Il  appelle  jour  naturel  celui  qui  dure 
d'un  matin  à  l'autre  ]  &  jour  d'ufage, 
celui  qui  dure  d'une  minuit  à  l'autre  , 
quoique  nous  appellions  aulîi  jour  na- 
turel celui  qui  fe  patte  entre  deux  mi- 
nuits. Prope  certum  efi ,  &  j  Jl  id  nunc 
ageretur  ,  multis  ex  empli  s  Scripturarum 
multifque  argumentis probari  poffet^apud 
Juddos  fuiffe  olim  in  ufu  triplex  genus 
dicrum  ,  dicm  feilicet  legalem  à  vefpera 
ad  vefperam ,  diem  naturalem  ab  ortu 
Solis  ad  ortum  ,  diem  ufualem  à  média 
nocle  ad  medïam  noclem.  Peref.  in  Gen. 
c.  1 ,  v.  5 .  Voici  quelques-unes  dçs  preu- 
ves qu'il  en  pouvoit  donner. 

I.  Si  che%  les  Juifs  .  comme  PAuteur 
l'afïure  p.  250,  chaque  foir  eut  toujours 
commencé  un  nouveau  jour  ,  auili  bien 
les  jours  civils  que  les  jours  de  fêtes  _, 
qu'étoit-il  befoin  de  faire  un  règlement 
pour  faire  commencer  les  jours  de  fete 
dès  le  foir  précédent ,  puifqu'il  n'y  au- 
roit  eu  en  cela  rien  de  particulier  y  & 


47^  Dissertation  XXIX. 
que  tous  les  jours  auroient  toujours 
commencé  par  le  îoirr*  Qui  ne  voit  que 
cette  Loi  j  A  vefpcra  ad  vefperam  cele- 
brabitis  Sabbata  vejlra  ,  eft  une  excep- 
tion à  la  forme  ordinaire  de  compter 
les  jours ,  &  qu'elle  avertit  les  Ifraclites 
de  commencer  les  jours  de  fête  par  le 
coucher  du  Soleil  ,  &  de  les  finir  de 
même  ,  &  non  par  le  minuit  comme  les 
jours  ordinaires  ?  C'eft  par  cette  raifon 
que  l'Eglife  n'a  point  preferit  d'autres 
termes  pour  le  commencement  tk  pour 
la  fin  des  jours  de  jeûne  ,  parce  qu'elle 
fuit  en  cela  la  forme  des  jours  ordinai- 
res >  qui  commencent  &  finirent  à  mi- 
nuit. 11  eût  donc  été  aufli  inutile  de 
dire  :  Vous  célébrerez  les  fêtes  d'un  foir 
à  l'autre  comme  de  dire  :  Vous  jeu- 
nere^  d'un  minuit  à  l'autre  minuit  ,  fi 
comme  nos  jours  font  bornés  par  deux 
minuits ,  ceux  des  Hébreux  l'eulTent  été 
par  deux  foirs. 

II.  Lorfqu'on  comptoit  les  jours  , 
foit  par  les  nombres  cardinaux  un,  deux, 
trois  ,  &c.  foit  par  les  ordinaux ,  le  pre- 
mier ,  le  fécond  ,  le  troifieme  ,  on  ne 
les  comptoit  pas  d'un  foir  à  l'autre  \  ce 
qui  auroit  fait  fouvent  un  fens  fort  ridi- 
cule. Quand  Abraham  alla  immoler  fon 
fils  fur  une  montagne, il  partit  de  grand 
matin ,  fummo  marie  j  il  marcha  deux 


Dissertation  XXIX.    477 
jours  ,  &  dès  le  3 .  jour  ,  levant  le  yeux , 
il  vit  cfe  loin  le  lieu  du  facrifice.  Peut- 
on  prétendre  avec  quelque  couleur  que 
ce  commencement  du  3.  jour  fut  le  cré- 
pufcule  du  fécond  ,  où  les  objets  loin- 
tains difparoillent  de  plus  en  plus  &  fe 
perdent  dans  les  ténèbres  ?  Moïfe  aver- 
tit les  lfraclites  de  fe  tenir  prêts  pour  le 
3.  jour,  parce  que  ce  jour-là  Dieu  de- 
voir defcendre  à  leurs  yeux  fur  le  Mont 
Sinaï  pour  leur  publier  fa  Loi.  Auffi- 
tôt  que  le  3 .  jour  fut  venu  ,  &c.  Quel 
étoit  ce  jour  ?   On    s'imaginera  peut- 
être  que   cela  fîgnifie ,   Auffi-tôt  que  le 
Soleil  fe  fut  coucké ',  &c.  mais  on  feroit 
bien-tôt  redreflfé  parla  fuite, qui  porte, 
&  que   l'aurore    commença  à  paroître  : 
Jamque  advenerat  tertius   aies   &  mane 
inclaruerat. 

1 1 1 .  Les  termes  à* hier  _,  aujourd'hui 
&  demain  ,  font  des  expreffions  du  jour 
qui  a  précédé ,  du  jour  préfenr  &  du 
jour  fuivant  :  or  ils  font  diftingués  non 
par  les  divers  foirs  \  ce  qui  feroit  encore 
un  fens  fort  extravagant  ,  mais  par  les 
divers  minuits  ,  comme  par  leurs  bor- 
nes naturelles.  Le  jour  d'hier  eft  celui 
qui  a  précédé  le  dernier  minuit.  Au- 
jourd'hui eft  le  jour  qui  depuis  le  der- 
nier minuit  durera  jufqu'au  minuit  pro- 
chain. Le  jour  de  demain  eft  celui  qui 


478  Dissertation  XXX.. 
commencera  à  minuit  prochain  &  du- 
rera jufqu'à  l'autre.  Un  feul  exemple 
fuffira  pour  expliquer  le  premier  &  le 
3.  de  ces  termes.  Moïfe  ayant  tué  un 
Egyptien  qui  maltraitoit  un  lfraëlite  , 
fortit  encore  le  lendemain  pour  vifiter 
les  frères  ;  Et  egrejus  die  altero.  Exod. 
c.  2  ,  .1 2  ,  &  ayant  repris  un  Hébreu  qui 
en  frappoit  un  autre  ,  l'agrelTeur  lui  dit 
infolemment  :  EJl-ce  que  tu  me  veux 
tuer  comme  tu  tuas  hier  F  Egyptien  ?  Il 
efl  donc  certain  que  la  féconde  fortie 
de  Moïfe  &c  cette  réponfe  infolente  de 
l'Hébreu  arrivèrent  le  même  jour  ,  & 
comme  je  le  fuppofe  dans  l'efpace  de  la 
première  heure  après  le  Soleil  couché. 
Peut- on  s'imaginer  férieufement  que 
cette  fortie  &  cette  réponfe  fe  puitTenc 
rencontrer  dans  le  même  jour  naturel 
où  Moïfe  avoit  tué  l'Egyptien  ?  Que  le 
texte  qui  porte  que  Moïfe  fortit  le  len- 
demain ,  peut  fignifier  qu'il  fortit  après 
le  Soleil  couché  ,  deux  ou  trois  heures 
après  avoir  fait  ce  coup  f  Et  qu'alors 
l'Hébreu  lui  reprocha  qu'hier  il  avoir 
tué  un  Egyptien  ,  c'eft-à-dire  ,  à  trois 
ou  quatre  heures  après  midi  ?  Cela  e(l  Ci 
chimérique  ,  que  j'aurois  honte  de  l'at- 
tribuer à  l'Auteur.  C'eft  néanmoins  une 
fuite  naturel!  :  de  ce  principe  :  On  fait 
que    les    Hébreux    ccmmencoient    leurs 


Disse  rtation  XXIX.  479 
jours  au  coucher  du  Soleil _,  p.  3  1.  Car, 
félon  lui  ,  le  crépufcule  qui  fuivit  la 
mort  de  l'Egyptien  donna  nai(Tance  à 
un  nouveau  jour.  Ainfi  ce  crépufcule 
pouvoit  être  ce  lendemain  oùMoïfefor- 
tit  pour  la  féconde  fois  ^  &c  l'après-midi 
précédent  fut  peut-être  ce  jour  d'hier 
où  il  tua  l'Egyptien  ,  ce  qui  eft  du  der- 
nier ridicule. 

IV.  On  ne  peut  fouhaiter  de  preuve 
plus  expreflfe  de  cette  diftin&ion  des 
jours  de  Fête  5c  des  jours  naturels,  que 
Tufage  qu'on  fuit  en  Italie  j  car  encore 
qu'on  y  commence  à  compter  les  heures 
par  le  coucher  du  Soleil  ,  les  6  heures 
néanmoins  devant  minuit  appartiennent 
au  jour  précédent,  &  le  jour  fuivanc 
ne  commence  qu'à  minuit.  Le  Diman- 
che de  Pâque  ne  commence  pas  le  Sa- 
medi au  foir  à  la  première  heure  de 
nuit ,  autrement  on  quittèroit  le  travail , 
8c  on  romproit  le  jeûne  &  l'abftinence 
du  Carême  )  mais  il  commence  à  mi- 
nuit ,  qui  eit  tantôt  à  la  4  heure  de 
nuit  ,  tantôt  à  la  6  ,  &  tantôt  à  la  8  , 
félon  les  diverfes  faifons  de  l'année.  Il 
en  étoit  de  même  de  l'ufage  des  Juifs  ; 
la  Fête  commençoit  dès  le  foir  ,  mais 
les  jours  alloienc  toujours  leui  rrain  or- 
dinaire, 6c  fe  comptoient  d'un  minuit 
à  l'autre.  Ainfi  c'eft  un  abus  d.QS  termes 


4§o  Dissertation  XXIX. 
de  dire  avec  l'Auteur  ,  p.  112.  Le  mois 
Pafchal  commence  le  foir  du  10  Mars, 
Cela  eft:  vrai  de  la  Fête  de  la  Néomenie, 
qui  étoit  attachée  au  premier  jour  du 
mois ,  parce  que  toutes  les  Fêtes  avan- 
çaient dans  le  jour  de  leur  veille  ,  de 
tout  le  tems  qui  s'écoule  entre  le  cou- 
cher du  Soleil  &  minuit  j  mais  cela 
n'eft  pas  vrai  du  premier  jour  du  mois 
Pafchal  ;  il  commença  à  minuit  comme 
tous  les  autres ,  de  on  ne  trouvera  point 
qu'aucun  Auteur  ait  parlé  autrement. 

V.  Les  trois  parties  du  jour  naturel 
font  le  matin  ,  le  midi  &  le  foir  j  le 
matin  comprend  les  heures  depuis  mi- 
nuit jufqu'au  lever  du  Soleil.  Nous  di- 
fons  fort  bien  à  deux  ou  trois  heures  du 
matin.  Le  foir  s'étend  depuis  le  cou- 
cher du  Soleil  jufqu'à  minuit  ,  &  l'on 
ditaufli  à  neuf,  à  dix  ,  à  onze  heures 
du  foir.  Le  midi  eft  juftement  le  milieu 
du  jour  également  éloigné  de  l'un  Se 
de  l'autre  minuit  ;  cette  diftinction  eft 
plus  ancienne  que  la  divifion  du  jour 
en  12  heures  j  qui  au  rapport  de  Cen- 
forin  ,  a  été  ignorée  à  Rome  pendant 
trois  cens  ans  depuis  fa  fondation  ,  ÔC 
n'a  été  connue ,  félon  Calvifius  ,  que 
l'an  du  monde  $666  &  282  avant  Je- 
fus  Chnft.  La  première  fois  que  l'Ecri- 
ture en  fait  mention ,  c'eft  dans   IHi- 

ftoire 


Dissertation    XXIX.    481 
ftoire  de  la  guérifon  d'Ezéchias ,  lorf- 
que  l'ombre  du  ftyle  de  l'horloge  d'A- 
chas  rétrograda  de  dix  degrés  ou  de  dix 
lignes.  Mais  la  diftintrion  du   joui  eu 
matin ,  midi  &  foir  eft  de  tous  les  tems , 
de  tous  les  Pays,  de  toutes  les  Nations. 
Elle  eft  marquée  dès  la  création  :  du 
fuir  qui  fuccéda  au  jour ,  &  du   matin 
qui  fuccéda  à  la  nuit  ,  il  fe  fit  le  pre- 
mier jour  ;  Faclus  eft  ve/pere  &    marie 
dies  primus.  La  Vulgate  porte  que  Dieu 
fe  promenoit  dans  le  Paradis  terreftre 
après  midi  :  Audiverunt  vocem  ambu- 
lantis  ad  auram  poft  meridiem.  Le  midi 
eft  marqué  dans  la  Genefe,  c.  43 ,  v.  16 , 
comme  le  tems  du  repas  qui  le  fait  au 
milieu  du   jour;   &  c'eft  ce  que  porte 
rétymologie  de  Meridies  quafi  médium 
dïci.  Cependant  on  nous  veut  perfuader 
que  cela  n'étoit  point  en  ufage  parmi  les 
Hébreux  \  mais  que   par  un  renverfe- 
ment  fans  exemple  _,   le  foir    étoit    le 
commencement  du  jour  _,  qu'ainfi    le 
matin  en   étoit  le   milieu;  le  midi  le 
troifieme  quart,  &:  un  fécond  foir  la 
fin.  Qui  croira  un  Ci  grand  paradoxe  ? 

VI.  Comme  les  Juifs  du  tems  de 
Jefus-Chrift  étoient  fournis  aux  Ro- 
mains ,  ils  ne  pouvoient  s'empêcher  d'a- 
voir commerce  dans  le  Civil  &  dans  la 
Police  avec  des  gens  qui  étoient  conti- 
Tome  IV,  X 


482  Dissertation  XXIX. 
nuellement  mêlés  avec  eux.  Il  falloit 
donc  que  dans  les  actes  publics  ils  comp- 
taient les  jours  de  la  même  manière. 
Or  les  Romains  comptoient  les  jours 
d'un  minuit  à  l'autre ,  les  Juifs  les  comp- 
toient  donc  ainfij  &  quand  ils  auroient 
eu  (  ce  qui  n'eft  pas  )  quelque  autre  ufa- 
ge  avant  la  conquête  de  leur  Province 
par  les  armes  de  Pompée ,  ils  auroient 
été  contraints,  par  la  néceflîté  du  com- 
merce ,  de  le  quitter  pour  celui  de  leurs 
vainqueurs  :  Car  quelle  brouillerie 
eut-ce  été,  fi  parlant  par  exemple  à  8 
heures  du  foir  d'une  action  qui  fe  feroit 
faite  quatre  heures  entières  auparavant, 
un  Romain  &  un  Juif  appelles  en  té- 
moignage ,  euiTent  rapporté  ;  le  premier , 
qu'elle  s'étoit  faite  ce  jour -là  même  à 
la  dixième  heure  ;  ôc  le  fécond,  le  jour 
précédent  à  la  vingt-deuxième  heure  ? 
Qu'auroit-on  pu  penfer,  finon  qu'ils 
euflent  parlé  de  deux  actions  différentes  ? 
C'eut  été  introduire  parmi  les  Juifs  Se 
les  Romains  une  conrulion  a  peu  près 
femblable  à  celle  qui  arriva  à  la  Tour 
de  Babel. 

VII.  Le  nombre  de  l'heure  où  arrive 
un  fait  hiftorique  détermine  infaillible- 
ment la  nature  du  jour  ;  parce  que  la 
première  heure  en  détermine  le  com- 
mencement ,  que  les  autres  eu  font  la 


Dissertation  XXîX.     48 5 
durée  ;  &  la  dernière,  la  fin  :  Sur  quoi 
on  peut  faire  ce  raifonnement  fur  les 
paroles  de  l'Auteur.  Les  Juifs  ont  pris 
des   Romains  la    manière  de  compter 
les  heures  du  jour.  Car  ,  dit-il ,  Traie 
hi/i,  p»   34,  che\  les  Juifs ,  comme  che^ 
les  Romains  _,  la  première  heure  fe  comp- 
toit  au  lever   du  Soleil  \  midi    étoit  la 
fixieme ,    &    la    neuvième    répondoit  à 
crois  heures  d'après  midi.  En  effet  tou- 
tes les  heures  qui  font  marquées  dans 
faint  Jean  comme  la  dixième  au  c.  1  ,  v. 
34,  la  fixieme  du  c.  iv,  v.  6,  &  du  c. 
xix ,  v.  1 4 ,  &  la  dixième  du  c.  iv ,  v.  5  z , 
fe  comptent  depuis  le  lever  du  Soleil. 
Les  Juifs  ont  donc  aufli  emprunté  des 
Romains  la  manière  de  compter  leurs 
jours ,  c'eft- à-dire  ,  de  les  commencer 
&  de  les  finir.  Or  les   Romains  divi- 
foient  la  nuit  en  4  veilles ,  &   le  jour 
artificiel  en  1 2  heures,  dont  la  première 
étoit  au  lever  du  Soleil ,  &  la  dernière 
à  fon   couchant  ;  ce  qui    n'empêchoic 
point  que  le  jour  naturel  ne  commençât 
a  minuit  3  &c  ne  finît   de  même.  11  en 
étoit  donc  ainfi  de  l'ufage  des  Juifs  ,  8c 
il  n'y  a  point  de  raifon  pourquoi  ils  au- 
roient  imité  les  Romains  en  un  points 
ôc  les  auroient  abandonnés  en  l'autre. 

VIII.  L'Auteur  de  l'Harmonie  pré- 
tendra peut-are  que  les  Juifs  n'ont  pris 

Xij 


484  Dissertation  XXIX. 
des  Romains  que  les  heures  du  jour  ar- 
tificiel ôc  les  veilles  de  la  nuit ,  &  nul- 
lement les  jours  naturels  qu'ils  com- 
mençoient  toujours  après  le  coucher  du 
Soleil.  Que  dira-t-il  donc.  Ci  on  lui 
trouve  un  jour  qui  continue  fous  le  mê- 
me nom  ,  non-feulement  après  le  So- 
leil couché  ,  mais  plufieurs  heures  dans 
la  nuit  fuivante  f  C'eft  le  Dimanche  de 
la  RéfurrecHon  de  Jefus-Chrift ,  que 
faint  Jean  appelle  le  premier  jour  de  la 
femaine ,  au  foir  duquel  Jefus-Chrifl: 
s'apparut  aux  Apôtres  :  Cum  ferb  effet 
die  ïllo  una  Sabbaïorum. 

Et  afin  que  l'Auteur  ne  dife  pas  en 
Tair  que  c'étoit  le  premier  foir  qui  pré- 
cède le  coucher  du  Soleil ,  il  en  doit 
juger  par  cette  fuite  d'actions  qui  fe 
firent  ce  foir-là  même.  Les  deux  Difci- 
ples  qui  allèrent  à  Emmaiis  y  arrivèrent 
fî  tard  ,  qu'ils  fe  fervirent  de  cette  rai- 
fon  pour  y  arrêter  Jefus  qu'ils  prenoient 
pour  un  voyageur  inconnu ,  fuppofant 
que  la  nuit  qui  approchoit  ne  lui  per- 
mettoit  pas  de  palîet  outre  :  Jam  advef- 
perafât  &  inclinata  ejl  elles.  Ce  qui 
fait  voir  pour  le  moins  que  le  Soleil 
étoit  tout  prêt  de  fe  coucher.  Depuis 
on  leur  prépara  à  manger,  ils  fe  mirent 
à  table ,  &c  après  y  avoir  demeuré  quel- 
que tems ,  ils  repaient  le  chemin  de 


Dissertation  XXIX.  385 
Jérufalem  où  il  y  avoit  60  ftades ,  c'eft- 
à-dire  ,  deux  grandes  lieues  &  demie  y 
que  des  gens  de  pied  comme  eux  ne  pou- 
voient  faire  commodément  qu'en  plus 
de  deux  heures.  Lorfqu'ils  arrivèrent, 
quelques  Difciples  racontoient  aux  au- 
tres l'apparition  de  Jefus-Chrift  à  Pier- 
re :  Enfuite  ils  firent  le  récit  de  tout  ce 
qui  leur  étoit  arrivé  dans  le  voyage 
d'Emmaiis.  Tous  ces  difcours  deman- 
doient  du  tems}  &  lorfqu'ils  parloient 
encore ,  dum  h<zc  loquuntur,  Jefus-Chrift 
s'apparut  aux  Apôtres. 

En  vérité,  fi  l'Auteur  prétend  encore 
que  tout  cela  fe  fit  dans  le  premier  foir, 
il  faut  que  comme  un  autre  Jofué  il 
arrête  le  Soleil  pour  l'empêcher  de  fe 
coucher.  Car  dans  le  cours  ordinaire  il 
étoit  impofiible  que  cette  longue  fuite 
d'actions  fe  pût  palfer  dans  la  duré  du 
premier  foir,  à  le  commencer  au  mo- 
ment où  les  deux  voyageurs  dirent  à  Je- 
fus-Chrift qu'/V  étoit  tard  y  &  que  le 
jour  étoit  fur  fon  déclin.  Cependant  l'E- 
vangélifte  nous  dit  que  cette  apparition 
de  Jefus-Chrift  qui  arriva  cette  nuit-là, 
commencée  de  deux  ou  trois  heures  ,  fe 
fit  le  foir  du  premier  jour  de  la  femaine  : 
Cum  fcro  effet  die  illo  una  Sabbatorum 
venït  Jefus ,  &c.  Alors  donc  ce  premier 
jour  duroit  encore  5  heures  après  le  So- 

X  iij 


4§t>  Dissertation  XXIX. 
leil  couché  ,  &  le  fécond  n'étoit  pas 
commencé  j  &  par  conséquent  chaque 
jour  ne  commençoit  pas  après  le  cou- 
cher du  Soleil  j  autrement  faint  Jean 
auroit  daté  cette  apparition  du  fécond 
jour  de  la  femaine  :  Cùm  fero  effet  die 
altero  Sabbatorum.  Si  l'Auteur  de  l'Har- 
monie ne  fe  rend  pas  à  cette  raiion  ,  je 
ne  fais  plus  rien  qui  le  pui(Te  faire  re- 
venir de  fes  anciens  préjugés. 

§.  XXX11I. 

Conféquences  des  jours  civils  qui  fe 
comptent  d'un  minuit  à  l'autre.  Nul" 
lités  de  tout  ce  qu  allègue  V Auteur 
pour  les  compter  de  foir  en  foir.  /. 
Conféqucnce, 

On  peut  tirer  de-la  plufieurs  confé- 
quences, qui  ferviront  à  démêler  toutes 
les  équivoques  qui  fe  mêlent  dans  cette 
matière. 

La  première  eft  que  tout  ce  qu'allègue 
l'Auteur ,  p.  48  &  49  ,  pour  fixer  le  com- 
mencement des  jours  au  coucher  du  So- 
leil ,  eft  nul  de  toute  nullité  &  tombe  de 
foi- même.  Dans  tout  le  rejle  de  l'Ecri- 
ture ,  dit-il ,  p.  49  ,  quand  il  eft  queftion  de 
compter  les  jours  l'on  commence  par  le 
foir.  Les  preuves  qu'il  en  donne  font 
toutes  tirées  des  jours  légaux  >  du  re- 


Dissertation  XXIX.    3 87 
glement  qu'en  fair  le  Lévitique ,  c.  2  3 ,  v. 
3  2  ,  &  que  j'ai  cité  ci-deiTus ,  du  repos 
du  Sabbat ,  qui  commencent  le  Ven- 
dredi au  foir  ;  de  routes  les  autres  céré- 
monies Juives,  où  il  failoit  obferver  un 
certain  nombre  de  jours.  Et  quoi  n'y  a- 
t-il  donc  que  les  jours  de  fêtes  ou  de 
cérémonies  qui  foient  comptés  dans  l'E- 
criture .?  E(r  ce  qu'Abraham  commença 
après  le  Soleil  couché  Ton  voyage  de  la 
Montagne  de  Moria,  &  que  ce  fut  dans 
le  3  crépufcule  qu'il  la  découvrit  ?  Je- 
fus-Chrift  partit  pour  la  Galilée  le  len- 
demain du  jour  qu'André  lui  amena  fon 
frère,  &  il  arriva  le  3  jour  à  Cana  où 
l'on  l'invita  à  des  Noces  :  Ce  lendemain 
jour  de  fon  départ,  étoit-ce  encore  l'en- 
trée de  la  nuit?  Goliath  renouvella  pen- 
dant 40  jours  fon   défi   à  l'armée  d'If- 
racl   :    Voilà  des   jours   bien  comptés. 
Faut  -  il   croire  qu'il  le  commença  Ôc 
qu'il  le  continua  toujours  au   coucher 
du  Soleil ,  comme  fi  le  tems  de  la  nuit 
étoit  fort  propre  pour  le  combat  ,   ou 
qu'il  eût  voulu  fe  battre  aux  flambeaux. 
Mais  à  quoi  eft-ce  que  je  m'amufe?  Il 
y  a  peut-être  plus  de  cent  paflages  dans 
l'Ecriture  où  les  jours,  je  dis  les  jours 
communs ,  font   comptés  ,   &  je  défie 
l'Auteur  d'en  citer  un  feul  où  les  jours 
fe  comptent  de  foir  en  foir. 

X  iv 


4S8    Dissertation    XXIX. 

Il  eit  vrai  que  l'Auteur  femble  en- 
core objecter  le  pafïage  de  la  Genefe, 
le  foir  &  le  matin  firent  un  jour  :  com- 
me li  le  foir  marqué  devant  le  matin 
donnoit  commencement  à  la  journée  , 
mais  cela  prouve  tout  le  contraire;  car 
ils  font  marqués  comme  les  deux  bor- 
nes du  jour  ôc  de  la  nuit  qui  précédè- 
rent ,  &  le  fens  de  ce  partage  efl:  que 
le  foir  qui  termina  le  jour  artificiel ,  & 
le  matin  qui  termina  la  nuir  fuivante 
firent  le  premier  jour  naturel. 

Aufli  la  raifon  fur  laquelle  il  fonde 
ce  commencement  du  jour  par  le  loir, 
me  paro:c  incompréhensible ,  parce,  dit- 
il  ,  après  un  Auteur  Ai  abe  \  que  les  Ara- 
bes &  les  Turcs  comptent  leurs  mois  de 
la  première  Phafe  ou  apparition  de  la 

Lune p.  48.  Cefi  le  foir  quelle  p a- 

TOit  pour  la  première  fois.  Les  Juifs  qui 
commencoient  leurs  mois  comme  les  Ara- 
bes à  la  première  Phafe  de  la  Lune ,  com- 
mencoient auffi  le  jour  au  coucher  du  So- 
leil. A  ce  compte  les  jours  feronr  lu- 
naires aufiï-biep  que  les  mois }  car  fi  le 
mois  commence  par  la  première  appari- 
rion  de  la  Lune  j  il  faut  que  le  premier 
jour  y  commence  aufli ,  puifque  chaque 
mois  commence  par  fon  premier  jour. 
Autrement  fi  le  mois  commençant  par 
le  premier  croilTant  vifible ,  le  jour  ne 


Dissertation  XXIX.  4S9 
commençoir  qu'après  le  Soleil  couché, 
il  fe  trouveroit  que  le  mois  commence- 
roit  plufieurs  heures  avant  fon  premier 
jour,  puifque  le  premier  croiffant  pa- 
roit  quelquefois  une  ou  deux  heures  a- 
vant  le  coucher  du  Soleil.  Or  qui  a  ja- 
mais entendu  parler  de  jours  lunaires, 
dont  le  premier  commence  le  foir  à  la 
première  apparition  du  croiffant  ?  Les 
autres  commenceront-ils  au  même  point 
que  le  premier  f  Non  ,  fans  doute ,  mais 
environ  trois  quarts  d'heure  plus  tard 
en  fuivant  le  cours  de  la  Lune.  Seront- 
ils  chacun  de  24  heures  comme  les 
jours  folaires  ,  quoique  le  premier  ait 
commencé  avant  fon  coucher?  Toutes 
ces  idées  font  nouvelles  6c  inouies  dans 
l'ulage  public.  11  eft  conftant  que  parmi 
les  Juifs  les  jours  étoient  folaires,  c'eft- 
à-dire,  fe  regloient  par  le  cours  du  So- 
leil de  non  par  le  cours  de  la  Lune,  qui 
change  toujours.  Et  lorfque  la  Loi 
commandoit  d'immoler  la  Pâque  le  14 
de  Nifan  au  foir  _,  ces  jours-là  fe  dé- 
voient compter  par  le  cours  du  Soleil, 
ad  vefperam  Jup.  Solis.  Autrement 
l'Auteur  ne  trouveroit  pas  fon  compte 
pour  le  jour  où  les  Juifs  firent  la  Pa- 
que.  Le  mois  Pafchal ,  dit-il  ,  p.  1 1  2  ,  1. 
penult.  &c  p.  1 1  3  ,  commencera  le  foir  du 
zo  j  compte^  de-là  14  jours    vous  trou» 

X  v 


490  Dissertation  XXIX. 
yere\  que  le  14  commença  le  1  Avril 
au  foir.  Il  fait  tous  ces  jours  folaires 
de  24  heures,  puifqu'il  les  fait  com- 
mencer au  foir,  ôc  bien  lui  en  prend  j 
car  s'il  les  regloit  par  le  mouvement  de 
la  Lune ,  on  trouveroit  que  fi  le  mois 
Pafchal  commença  à  la  première  Phafe 
le  20  Mars  à  6  heures  &  demie  diï 
foir,  le  14  commença  le  Jeudi  2  Avril 
à  5  heures  du  matin  42  minutes,  &  le 
1 5  le  Vendredi  à  6  heures  du  matin 
36  minutes.  Ainfi  contre  fon  fyftême 
tout  le  Jeudi  auroit  été  le  14,  &c  le  foir 
eût  été  le  tems  légitime  d'immoler  la 
Pâque  ,  comme  firent  les  deux  députés 
de  Jefus-Chrift  ,  &  tout  le  Vendredi 
auroit  été  le  1 5  ou  le  jour  de  la  Fête  des 
Azymes,  qui  commençant  dès  le  Jeudi 
après  le  coucher  du  Soleil ,  auroit  été  le 
tems  marqué  par  la  Loi  pour  manger 
la  Pâque ,  comme  il  fit  avec  fes  Difci- 
ples. 

Mais  fi  les  jours  ,  me  dira-t-on  ,  font 
réglés  par  le  cours  du  Soleil,,  comment 
les  mois  qui  font  compofés  de  jours 
peuvent- ils  être  lunaires  f  C'eft  que  la 
Lune  qui  ne  fait  pas  les  jours  par  fon. 
mouvement,  ne  laiffe  pas  de  leur  don- 
ner par  fes  diverfes  Phafes  ou  appari- 
tions le  rang  qu'ils  doivent  tenir  dans 
le  mois  depuis  une  nouvelle  Lune  juf; 


Dissertation  XXIX.  49 1 
qu'à  l'autre  :  le  jour  où  elle  arrive  eu: 
le  premier ,  fauf  à  examiner  (i  elle  fe 
doit  compter  dès  la  conjonction  de  la 
Lune  avec  le  Soleil ,  ou  dès  la  première 
Phafe,  ou  li  elle  eft  arrivée  avant  ou 
après  midi. 

§.   XXXIV. 

Que  le  jour  de  Pâque  &  le  premier  jour 
des  Azymes  entrant  l'un  dans  Vautre  , 
ils  fe  communiquoient  mutuellement 
leurs  noms.  Que  le  jour  de  Pâque  né- 
toit  point  Fête.  Que  le  foir  du  13  ,  le 
pain  levé  n  étant  ni  défendu  ni  dé- 
truit j  Jefus-Chrifl  auroit  pu  s'en  fer- 
vir  dans  rEuchariflie.  II.  III.  IV* 
Conféquences. 

La  II.  Conféquence  qui  fe  tire  de  la 
diftinction  des  jours  de  Fête  ou  légaux, 
&  des  jours  Civils  de  Tufage  ordinaire, 
eft  que  fans  doubler  avec  les  Rabbins 
le  premier  jour  des  Azymes  ,  on  peut 
expliquer  dans  un  fens  fort  naturel  le 
texte  des  trois  Evangcliftes ,  qui  porte 
que  c'étoit  le  jour  où  fon  immoloit  la 
Pâque _,  &  où  félon  la  Loi  il  falloit  im- 
moler la  Pâque.  Je  prétends  avec  l'Au- 
reur,  que  ce  jour  de  l'immolation  ctoic 
Je   14  du   mois  Nifan  ,  &  contre  lui 

Xvj 


49 i  Dissertation  XXlX. 
que  ce  premier  jour  des  Azymes  étoîc 
le  1 5 ,  quoique  l'immolation  &  les  Azy- 
me s  (oient  attribués  au  même  jour  par 
leslivangéliites  :  Comment  cela  fe  peut- 
il  accorder  ?  Je  fuppofe  donc  ,  dira- 
t-on ,  que  le  14  &  le  1 5  étoient  le  mê- 
me jour.  Cela  paroît  en  effet  tenir  du 
Paradoxe  ,  Se  rien  cependant  n'eft  plus 
aifé  à  comprendre.  Si  on  vouloit  fe  fou- 
venir  de  ce  qu'on  fait  bien,  il  ne  fe- 
roit  pas  difficile  d'en  trouver  la  raifon  : 
mais  puifqu'on  n'en  prend  pas  la  peine, 
je  réponds  que  cela  fe  fait  par  la  commu- 
nication dçs  noms  entre  deux  jours  qui 
s'entrefuivent  immédiatement,  &  qui, 
félon  divers  termes  ,  avancent  l'un  dans 
l'autre;  ôc  cette  communication  eft  fon- 
dée fur  cette  figure  très-familiere  dans 
le  langage 'qui  appelle  un  tout  3  comme 
efl:  un  jour,  du  nom  d'une  de  [qs  parties 
plus  remarquable  que  les  autres. 

A  proprement  parler  le  14  du  mois 
de  Nifan  eft  le  jour  de  Paque  où  Ton 
immoloit  l'Agneau,  &  le  15  eft  le  pre- 
mier des  Azymes  où  on  le  mangeoit  : 
mais  comme  le  1 5  étoit  Fête  ,  il  com- 
mençoit  dès  le  foir  du  14,  après  le  So- 
leil couché ,  &  que  c'étoit  alors  le  tems 
de  la  manducation  :  ainfi  ces  deux  jours 
avançoient  l'un  dans  l'autre  de  fix  heu- 
re:. Le  jour  de  Paque  entroit  dans  1» 


Dissertation  XXIX.  49* 
Tète  des  Azymes  depuis  le  coucher  du 
Soleil  jufqu'à  minuit ,  de  le  jour  des 
Azymes  éroit,  pour  ainfi  dire  ,  enclavé 
dans  les  fix  dernières  heures  du  jour  de 
Pâque.  Faut  -  il  donc  s'étonner  fi  ces 
deux  jours  fe  communiquoient  récipro- 
quement leurs  noms ,  &  fi  ce  dernier 
quart  du  14  jour,  célèbre  par  la  man- 
ducation  de  l'Agneau  Pafchal  &  des 
Azymes ,  &  par  le  commencement  de 
la  Fête,  donnoit  quelquefois  par  ana- 
logie le  nom  de  jour  des  Azymes  à  tout 
le  14  jour  ï  L'abrègement  des  expref- 
fions  li  naturel  à  toutes  les  langues  y 
demande  cela  néceiïairement,  &  on  n'a 
qu'à  contidérer  l'ufage  de  la  nôtre  pour 
en  trouver  cent  exemples. 

En  voici  un  tout  femblable  parmi 
nous.  Le  jour  qui  précède  une  Fête  fo- 
lemnelle  ,  s'appelle  dès  le  matin  la  Vi- 
gile :  il  n'y  a  pas  grand  rapport  entre 
ces  deux  termes  de  Vigile  &c  de  jour  r 
puifqu'on  ne  veille  proprement  que  pen- 
dant le  tems  deftiné  au  fommeil,  c'eft- 
à-dire 5  pendant  la  nuit  :  cependant  la 
veille  qu'on  faifoit  a  Jtrefois  pendant  une 
partie  de  la  nuit ,  a  fait  donner  le  nom 
de  Vigile  à  tout  le  jour  civil  qui  précè- 
de quelque  Fête.  Y  a-t-il  rien  qui  ref- 
femble  mieux  à  un  jour  auquel  l'ufage 
des  Azymes  j  qui  commence  à  fou  der- 


^94      D  ISSERT  ATI  O  K    XXlX* 

nier  quart  ,  communique  le  nom  du 
jour  des  Azymes  ? 

Mais  fouvent  il  nen  faut  pas  tant, 
une  feule  action  remarquable  ,  à  quel- 
qu'heure  qu'elle  fe  fa  (Te  ,  fuffit  pour 
qualifier  tout  le  jour.  On  dit  le  jour  dut 
Jugement,  un  jour  de  confeil ,  un  jour 
de  fpectacle  ,  un  jour  de  Proceflion  ,  Se 
cent  autres  femblables ,  qui  s'appellent 
d'une  action  qui  fe  doit  faire  à  quel- 
qu'une de  leurs  heures.  Pourquoi  donc 
les  Evangéliftes  n'auroient  -  ils  pas  pu 
dire  du  1 4  jour ,  que  le  premier  jour  des 
Azymes  arriva ,  ou  il  falloit  immoler  la 
Pâque  \  puifque  l'immolation  &  la  man* 
ducation  de  la  Pâque ,  Se  Tufage  des 
Azymes  arrivoient  dans  la  durée  du  14 
jour,  je  dis  de  ce  14  jour  qui  duroic 
jufqu'à  minuit?  Pourquoi  Jofeph  n'au- 
roit-il  pas  pu  dire  :  Nous  faifons  la  Fê- 
te des  Azymes  pendant  huit  jours  ; 
puifque  le  premier  ufage  s'en  faifoit  dès 
la  veille  depuis  fix  heures  du  foir  où 
commençoit  la  Fête,  jufqu'à  minuit  ?  Or 
cette  veille  jointe  avec  les  fept  jours 
faifoit  huit  jours  d'Azymes.  Il  pouvoir 
aufli  dire  fans  aucune  contradiction  :  Le 
lendemain  de  la  Fête  de  Pâque  _,  fa- 
voir  le  quinzième  ,  on  fait  la  Fête  des 
Azymes  qui  dure  fept  jours.  Antiq.  1. 
3 ,  c  io;  parce  que  dans,  ce  partage  il  ne 


Dissertation  XXIX.  495 
confidere  la  Fête  des  Azymes  que  com- 
me le  lendemain  de  la  Fête  de  Paque* 
Ainfi  il  ne  comprend  pas  celle-ci  dans 
celle-là;  car  certainement  le  lendemain 
ne  commence  pas  à  6  heures  du  foir  3 
mais  à  minuit  :  or  depuis  minuit  il  n'y  a 
plus  que  fept  jours  d'Azymes.  C'eft  par 
la  même  raifon  qu'Origene  compte  le 
jour  qu'on  immoloit  l'Agneau  Pafchal , 
pour  un  des  fept  jours  où  Ton  uloic 
des  pains  fans  levain  j  parce  que  cet  ufa- 
ge  commencent  à  la  fin  de  ce  jour-là. 
Ce  que  l'Auteur  lui  impute  à  une 
grande  ignorance. 

J'avoue  donc  fans  peine  à  l'Auteur 
p.  183,  que  les  Ap 'êtres  qui  ont  écrit 
lorfque  Jofeph  vivoit ,  ne  pouvoient  pas 
parler  un  autre  langage  que  lui ,  &  qu'ils 
ont  pu  appeller  le  14  du  premier  mois  le 
premier  jour  des  Azymes  :  Mais  ce  n'eft 
pas  par  ces  raifons  chimériques  dts  Rab- 
bins, p.  179,  que  tout  le  i^étoit  em- 
ployé à  exterminer  le  pain  levé  j  que  dès 
le  foir  du  1 3  3  ou  commencoit  le  14,  on 
en  f ai f oit  la  recherche  _,  qu'on  le  brûloit 
à  midi ,  que  depuis  une  heure  jufquau 
foir ,  la  Loi  defendoit  d'en  manger  fur 
peine  de  mort  ;  qu  enfin  les  Docteurs  ne 
le  permettoient  pas  après  dix  heures  du 
matin»  Ce  font  des  imaginations  creu- 
(e§  &  des  rêveries  dont  il  n'y  a  aucuQ 


4ç)6  Dissertation  XXIX. 
vertige  dans  l'Ecriture  ni  dans  l'Hiftoi- 
re ,  &  qui  font  nées  pltifieurs  fiecles 
après  les  Apôtres  dans  la  tète  des  Rab- 
bins qui  ont  voulu  fe donner  à  eux  &  aux 
autres  Juifs  des  airs  de  fainteté  qui  ne 
leur  coutoient  guère.  Les  Apôtres  n'ont 
jamais  confidéré  le  premier  jour  des 
Azymes  que  dans  le  fens  de  l'Ecriture 
qui  l'attache  au  1 5  du  premier  mois  : 
mais  parce  que  la  Fête  en  commence  dès 
la  1 9  heure  du  1 4  ,  c'eft  -  à  -  dire  ,  a  6 
heures  du  foir  ,  ils  ont  pu  étendre  à  tout 
le  14  le  nom  du  premier  jour  des  Azy- 
mes, par  cette  figure  qui  donne  à  un 
tout  le  nom  de  fa  partie.  Dénomination- 
qui  ne  double  point  ce  premier  jour 
comme  les  Rabbins  font  ridiculement, 
mais  qui  en  avançant  la  Fête  dans  la 
dernière  partie  du  jour  précédent ,  fait 
que  cette  partie  de  celui-ci  en  étend  aufïl 
le  nom  à  celui-là  tout  entier. 

La  III.  conféquence  eft  que  le  1 4  jour 
n'étant  pas  réellement  le  premier  jour 
des  Azymes  ,  mais  feulement  par  une 
extenfïon  de  nom  ,  qui  de  fa  quatrième 
partie  fe  communiquoit  à  tout  le  jour; 
ce  14  n'étoit  point  Fête  dans  fes  trois 
premières  parties,  c'eft- a-dire ,  depuis 
minuit  jufqu'à  6  heures  du  foir  :  (  Car, 
comme  je  l'ai  dit,  depuis  ces  6  heures 
la  grande  Fête  des  Azymes  cormnen-, 


Dissertation  XXIX.  497 
çoir.  )  Ainii  on  ne  peut  nullement  dite 
qu'il  commençât  dès  le  13  au  coucher 
du  Soleil  ;  mais  il  fuivoit  la  règle  des 
jours  ouvriers  ou  ordinaires,  qui  com- 
mencoient  a  un  minuit  &c  tiniiïoient  à 
l'autre. 

Il  eft  vrai  que  l'Auteur  de  l'Harmo- 
nie met  d'abord  fans  reitriction  le  14 
au  rang  des  Fèces;  cV  ce  qui  eft  merveil- 
leux ,  après  avoir  cite  le  Livre  des  Nom- 
bres,  c.  28  ,  v.  \G  ,  qui  attribue  feule- 
ment la  Pâque  au  14  du  premier  mois, 
6v  la  Fête  folemnelie  au  15,  pour  infi- 
nuer  que  le  1  4  riétoit  point  Fête  :  Men- 
fc  mit  cm  prhno  ,  14  die  menfis  _,  Phafe 
Domini  erit  &  1 5  die  folemnitas.  Tr. 
Hift.  p.  186,  il  ne  laifte  pas  d'aiTurer 
que  le  14  ctoit  Fête.  Dieu  le  dît  dans 
V Exode  _,  dit- il  j  Vhoftie  de  la  Fcte  fo^ 
lemnelle  de  Pâque  ne  demeurera  point 
che^  vous  jufqu'au  matin.  11  cite  encore 
Ezcchiel  ck  Jofeph,  qui  appellent  la  Pâ- 
que une  Fcte  :  mais  pour  l'Exode  il  ne 
parle  de  la  Pâque  que  dans  le  tems  où 
l'on  mangeoit  la  victime  ,  puifqu'il  dé- 
rend d'en  garder  aucun  refte  pour  le  len- 
demain. Or  il  eft  confiant  que  ce  tems 
de  la  manducation  de  l'Agneau  Pafchal 
ctoit  Fcte;  c'eft  alors  que  commençoic 
la  Fcte  des  Azvmes.  Ce  palfage  donc 
ne  touche  feulement  pas  la  queftion  qui 


498  Dissertation  XXÎX. 
eft,  fi  tout  le  14  étoit  Fête  :  De  plus 
cette  dernière  partie  du  14  qui  étoit  Fê- 
te ,  fufïit  encore  pour  juftirler  les  ex- 
preflions  d'Ezéchiel  &c  de  Jofeph ,  com- 
me il  eft  aifé  de  voir. 

L'Auteur  s'objecte  le  filence  de  l'E- 
criture touchant  la  Fête  du  14,  &  la 
défenfe  du  travail  reftrainte  au  1 5 ,  mais 
1.  fa  réponfe  ne  fatisfait  pas.  Etoit-  il 
néceffaire  ,  dit-il ,  que  Dieu  défendit  les 
œuvres  ferviles  dans  le  tems  que  les  Juifs 
étoient  occupés  de  la  folemnité  de  la  Fâ- 
que  ?  Si  j'entens  bien  cette  réponfe  j  elle 
fuppofe  que  la  Pâque  étoit  une  Fête 
folemnelle  indépendamment  de  la  dé- 
fenfe des  œuvres  ferviles  :  cependant 
c'eft  cette  défenfe  même  en  partie  qui 
établit  la  Fête  j  c'eft  donc  comme  s'il 
difoit,  p.  187,  Etoit-il  néceffaire  que 
Dieu  fit  la  Pâque  une  Fête  folemnelle  , 
dans  un  tems  où  les  Juifs  étoient  occupés 
de  la  folemnité  de  la  Pâque  ?  Ce  qui  fup- 
pofe la  queftion. 

2.  Je  répons  que,  félon  l'Auteur  mê- 
me, il  n'y  avoit  que  la  1 5  ou  20  par- 
tie du  peuple  qui  fût  occupée  l'après- 
midi  dans  le  Temple  à  la  folemnité  de 
la  Pâque.  N'ctoit-il  donc  pas  néce(Taire 
de  régler  (i  le  refte  du  peuple  pouvoit 
ou  non  faire  alors  des  œuvres  ferviles  ? 
L'Ecriture  ne  le  défend  point  j  niais  au 


Dissertation  XXIX.  490 
défaut  de  l'Ecriture  les  Rabbins  n'y  ont 
pas  manqué.  Ils  ont  excommunié  par 
toute  la  Judée  ceux  qui  auroient  fait 
cet  après-midi  aucune  œuvre  fer  vile.  A 
Dieu  ne  plaife  qu'il  eût  ratifié  dans  le 
Ciel  ces  cenfures  téméraires ,  qui  con- 
damnoient  ce  qu'il  ne  condamnoit  point: 
il  les  faut  ranger  parmi  ces  fardeaux  in- 
fupporrables  ,  dont  Jefus  -  Chrift  die 
qu'ils  chargeoient  les  épaules  des  hom- 
mes. 

3.  Ceux  même  qui  travailloient  dans 
le  Temple  à  l'immolation  de  la  Paque 
ne  reconnoifïoient  point  cette  Fête  pré- 
tendue j  ou  ils  la  violoient  (i  elle  étoit 
effective  j  puifqu'ils  y  faifoient  plusieurs 
œuvres  ferviles  &  incompatibles  avec  la 
Fête.  Jefus-Chrift  l'a  afïuré  des  Prêtres 
qui  facrifioient  le  jour  du  Sabbat,  avec 
cette  différence  que  ce  violement  ne  leur 
étoit  point  imputé  à  péché  :  Sacerdotes 
in  Templo  Sabbatum  violant  _,  &  Jine 
cri  mine  funt. 

4.  Enfin  l'Auteur  avoue,  que  comme 
cette  folemnité  ne  fe  faifoit  que  Vaprcs- 
midi  du  14,  la  matinée  pouvoit  être  li- 
bre. Je  voudrois  bien  qu'il  nous  mar- 
quât dans  l'Ecriture  quelque  exemple 
ou  quelque  ordonnance  de  ces  demi- 
Fêtes  ,  qui  ne  commençoient  qu'à  midi  : 
car  aujourd'hui   on   n'elt  guère  d'hu- 


500  Dissertation  XXIX. 
meur  à  fe  payer  de  l'autorité  chancel- 
lante  des  Rabbins.  Je  ne  vois  pas  mê- 
me qu'en  cela  il  foit  bon  ménager  de 
fes  intérêts,  puifqu'en  mettant  le  14 
au  Vendredi ,  il  objecte  à  ceux  qui  en^ 
font  le  1 5  ,  c'eft-à-dire  la  Fête  des  Azy- 
mes,  tous  les  travaux  6V  toutes  les  œu- 
vres fervilès  qui  fe  firent  par  les  Juifs 
pendant  la  Palîion  de  Jefus-Chrift ,  lui 
qui  tombe  dans  le  même  inconvénient. 
11  lui  eCt  donc  avantaeeux  que  tout  le 
14  ne  foit  point  Fête,  afin  que  les  Juirs 
ayent  pu  le  14  crucifier  Jefus-Chrift 
fans  violer  aucune  Fête  :  mais  enfin  je 
me  contente  de  ce  qu'il  nous  accorde 
de  ion  bon  gré  ,  qui  eft  qu'il  n'étoit 
point  Fête  le  matin  _,  ni  à  plus  forte  rai- 
fon  dès  le  foir  du  1 3 ,  &  j'efpere  en  dé- 
cider toute  cette  queftion  à  l'avantage 
de  la  dernière  Pâque  de  Jefus-Chrift. 

La  IV.  conféquence  eft  que  le  14 
n'ayant  commencé  qu'à  minuit  &c  non 
dès  le  foir  précédent,  parce  que,  de  l'a- 
veu même  de  l'Auteur  >  il  n'étoit  pas 
encore  Fête,  ce  foir-là  précédent  le  pain 
levé  n'avoit  point  encore  été  ni  recher- 
ché ni  détruit.  Il  étoit  permis  à  tout  le 
monde  d'en  manger  impunément  à  fou- 
per  y  Jefus-Chrifl  en  mangea  donc  ci  la 
dernière  Cène,  parce  qu'il  n'y  avoir 
point  encore  de  pain  Azyme ,  &  il  celé- 


Dissertation  XXIX.  501 
bra  l'Euchariftie  en  pain  levé  _,  contre 
le  fentiment  de  l'Eghfe  Latine  qui  cé- 
lèbre les  iaintsMvfteres  en  pain  Azyme, 
parce  qu'elle  croie  que  Jefus-Chrill  les 
y  a  célébrés  la  première  rois.  Pourquoi 
abandonner  ainfi  de  gaieté  de  cœur  aux 
Schifmatiques  un  point  dont  nous  dis- 
putons avec  eux  ,  qui  pour  n'être  pas 
une  matière  de  fchifme  ,  ne  lailTe  pas 
d'être  très-important.  On  me  dira  que 
ce  point  n'eft  qu'un  rite  qui  ne  touche 
point  la  foi  :  &  comme  du  le  Cardinal 
Bona ,  La  différence  des  rîtes  ne  peut 
caufer  de  différence  dans  la  doctrine.  Je 
l'avoue  ,  mais  cela  ne  regarde  point  la 
queftion  que  nous  agitons.  Il  y  a  bien 
de  ia  différence  entre  condamner  de 
fchifme  les  Grecs ,  parce  qu'ils  em- 
ployent  le  pain  levé  dans  les  Myfteres, 
qui  eft  ce  que  ce  Cardinal  défend  ;  & 
réfuter  le  fondement  de  cet  ufage,  qui 
eft  la  fuppodrion  que  Jefus-Chrift  s'eft 
fervi  de  pain  levé  en  inftituant  l'Eu- 
chariftie  :  Et  c'eft  ce  que  font  tous  les 
jours  les  Docteurs  Catholiques. 

On  m'avouera  peut-être  que  Jefus- 
Chrilf  a  pu  fe  fervir  de  pain  Azyme. 
Il  ne  fu Mît  pas  qu'il  ait  pu  s'en  fervir 
pour  jultiher  la  pratique  de  l'Eglife,  qui 
en  cela  n'imite  pas  ce  que  Jefus-Chiilt 
a  pu  faire  3  mais  ce  qu'il  a  fait  actuelle- 


joi  Dissertation  XXIX. 
ment.  Voici  donc  comme  l'Auteur  dé- 
montre ce  fait  :  C'eft  que  ceux  qui  man~ 
geoient  du  pain  levé  lorfquc  le  14 
commencoit  _,  ne  le  faifoient  que  dans  un 
coin  de  la  chambre  _,  prenant  garde  qu'il 
nen  tombât  quelque  miette  _,  p.  32.6,  de 
peur ,  fans  doute  3  que  les  fouris  ne 
ï'emportafTent.  Or  nous  ne  voyons  point 
que  Notre  Seigneur  ait  inftitué  l'Eu- 
charifiie  dans  un  coin  de  la  chambre  ; 
mais  il  fe  mit  à  table  _,  &  il  prit  le  pain 
qui  y  étoit  expofé.  On  ne  peut  pas  rai- 
sonner plus  julte  pour  le  compte  des 
Grecs.  Cette  raifon  ne  prouve  pas  feu- 
lement que  Jefus-Chrift  n'a  point  infti- 
tué  l'Euchariftie  en  pain  Azyme  ;  elle 
convainc  encore  qu'il  ne  l'a  pu  faire  , 
puifqu'il  auroit  dû  pour  cela  s'alïujettir 
au  plus  extravagant  précepte  qui  foit  ja- 
mais forti  de  l'Ecole  des  Rabbins  j  ce 
qui  étoit  impoflible  à  la  Sagefle  incar- 
née. 

Car  fur  quoi  étoit  fondée  cette  obli- 
gation à  tous  ceux  qui  mangeoient  du 
pain  levé  le  13  après  le  Soleil  couché, 
de  ne  le  manger  pas  au  milieu  de  la 
chambre  ni  à  table,  mais  dans  un  coin 
de  la  chambre ,  dans  l'obfcurité  ,  Se 
comme  à  la  dérobée.  Etoit-ce  pour  n'a- 
voir pas  les  yeux  fouillés  par  la  vue  du 
pain  levé  f  Mais  il  étoit  permis  de  voiç 


Dissertation  XXIX.  505 
ce  que  la  Loi  permetcoit  de  manger  :  Si 
les  yeux  euflent  contracté  quelque  fouii- 
lure  par  cette  vue;  combien  plus  les 
mains,  la  bouche  &  l'eftomach  enflent- 
ils  été  fouillés  par  l'ufage  ?  D'ailleurs 
cette  précaution  étoit  fort  inutile,  puif- 
que  dans  les  coins  aufli-bien  qu'au  mi- 
lieu de  la  chambre ,  on  foupoit  à  la  clar- 
té des  flambeaux. 

Etoit-ce  donc  pour  empêcher  qu'il 
ne  tombât  des  miettes  de  pain  levé,  ou 
qu'étant  tombées  elles  ne  fuflent  apper- 
çues  dans  l'obfcurité  par  les  fouris,  qui 
les  auroient  emportées  dans  leurs  trous , 
inacceflibles  à  toute  la  fagacité  des  ex- 
terminateurs ?  Mais  on  voit  au  contraire 
que  rien  n'étoit  plus  fur  pour  prévenir 
ce  funefte  malheur  ,  que  de  manger  à 
table   le  pain  levé  ,  fur  laquelle  il  efl: 
aifé  de  ramafler  les  miettes ,  ou  s'il  en 
tombe  quelques-unes,  de  les  apperce* 
voir  dans  le  milieu ,   qui  efl:  l'endroit 
le  plus  éclairé  de  la  chambre ,  6c  de  les 
jetter  dans  le  feu  après  les  avoir  balayées} 
au  lieu  que  dans  des  recoins  obfcurs  on 
nepouvoit  ni  les  voir  ni  les  balayer  exac- 
tement ,  ni  empêcher  les  fouris  de  les 
emporter.  S'il  y  a  quelqu'autre  raifon 
de  ce  précepte  Rabbinique ,  c'efl;  à  l'Au- 
teur à  nous  la  marquer  ;  car  je   fais  de 
bonne  foi  tout  ce  que  je  puis  pour  le^ 


504  Dissertation  XXIX. 
deviner  routes  :  mais  un  Grec  lui  fou- 
tiendra  par  avance  que  rien  n'eu:  plus 
ridicule  que  ce  précepte  j  que  c'eft  avoir 
bien  oublié  tout  ce  qu'on  fait  des 
mœurs  &  de  la  conduite  de  Jefus-Chriit, 
pour  s'imaginer  qu'il  y  ait  pu  avoir 
aucun  égard  ,  &:  que  il  l'inftitution  de 
l'Euchariitie  en  Pain  Azyme  dépend  du 
poids  cV  de  la  valeur  de  cette  raifon ,  qui 
eft  que  le  Pain  qu  il  prit  &  qu'il  bénit  ^ 
nepouvoit  pas  être  levé,  parce  qu'à  cette 
heure-là  ,  c'eit-à-dire  24  heures  avant 
que  Dieu  défendît  d'en  ufer  ,  &  16 
heures  avant  la  défenfe  des  Rabbins  , 
on  n'expofoit  pas  le  Pain  qui  étoit  levé  ^ 
on  le  tenoit  caché ,  p.  327.  Non-feule- 
ment Jefus  Chriit  n'a  point  célébré  l'Eu- 
chariitie en  Pain  Azyme,  mais  cela  lui 
a  été  impoiîible,  parce  qu'il  n'eût  pu 
éviter  le  Pain  levé  que  par  une  honteufe 
fuperftition. 

§.  XXXV. 

Qu'il  s'enfuit  que  Jefus  -  Chrift  a  célébré 
la  dernière  Pâque  ,  puifquil  Vavoit 
exprejfément  commandée.  Providence 
de  Dieu  dans  la  différence  de  la  Tra- 
dition d'avec  la  Loi  touchant  la  der- 
nière Pâque, 

11  eft  tems  de  conclure  de  tout  ce 

que 


Disse  rtation  XXIX.  505 
que  nous  avons  établi  jufques  ici  que 
Jefus-Chrift  a  mangé  la  dernière  Pâque 
avec  (es  Difciples  ,  une  Pâque  qu'il  a- 
voit  fi  exprehément  commandée.  On 
me  dira  que  la  préparation  qu'il  com- 
manda le  Jeudi ,  n'étoit  que  pour  le 
lendemain,  &  qu'il  ne  l'anticipa  d'un 
jour  que  pour  s'accommoder  à  l'igno- 
rance de  îes  Difciples ,  qui  ne  fâchant 
pas  que  le  lendemain  il  devoit  être  atta- 
ché à  la  Croix  à  l'heure  qu'on  immoloit 
la  Paque  ,  &  être  couché  dans  le  tom- 
beau lorsqu'on  la  mangeroit ,  lui  en 
firent  dès  la  veille  la  propofition. 

Je  réponds,   comme  j'ai  déjà  fait, 
que  les   ordres  exprès   Se  pofiufs  qu'il 
leur  donna  d'apprêter  le  fouper  Palchai , 
ne   peuvent  s'accorder  avec  cette  difli- 
mulation  qu'on  lui  attribue.  Dire ,  allâr9 
prépare^  -  nous   toutes  chofes  j  afin  que 
nous  mangions  la  Pâque  :  ce  n'eft  pas 
feulement  permertre  aux  Difciples  de  la 
préparer ,  c'eft  témoigner    qu'on    veut 
la  manger  d'une  volonté  réelle  £c  effec- 
tive \  &    h  on  n'a  pas  cette  volonté  , 
on  ne  parle  pas  comme  on  penfe  ;  & 
c'en:  un  défaut  contre  la  fîncérité  ,  dont 
Jefus-Chrift  la  fouveraine  Vérité  étoit 
incapable.  Si  donc  les  Difciples  apprê- 
tèrent la  Paque,  je  demande  qui  em- 
pêcha Jefus-Chrift  de  la  manger  avec 
Tome  IK  Y 


506    Dissertation    XXIX. 
€ux  y   ou  s'ils  ne  l'apprêtèrent  pas  ,  je 
demande  qui  les  empêcha  de  lui  obéir. 
Je  fuis  très-perluadé  qu'on  ne  peut  rien 
répondre  a  cela  qui  ne  foit  de  la  der- 
nière foi'olefle,  &  qui  ne  tombe  de  foi- 
même.  Combien  de  fois,  dit  l'Auteur  , 
avoit-il  tenu  un  langage  dont  les  Apô- 
tres ne  pénétrèrent  le  fens  qu'après  fa 
mort  ?  Cela  eft  indubitable  du  dogme  , 
6c  des   prédirions ,   dont  fouvent  les 
métaphores  obfcurciftoient  le  fens  :  mais 
il  ne  leur  a  jamais  fait  de  commande- 
ment qu'il  ne  leur  fût  aifé  d'entendre , 
ou  qu'il  ne  leur  ait  expliqué  au  même 
tems.  Or  qu'y  a-t-il  d'obfcur  ou  de  fi- 
guré dans  celui  -  ci  :  Parate  nobis  Paf- 
cha  ut  manducemus  ?  On  ne  dira  pas  , 
fans  doute  5  que  cette  Pâque  eft  méta- 
phoriquement l'Euchariftie  ;  car  com- 
me c'ell:  la  même  dont  il  eft  dit  tout  de 
fuite  :  Et  paraverunt  Pafcha  ;  ce  feroic 
une  grande  abfurdité  de  dire  que  Je- 
fus-Chrift  leur  commanda  de  préparer 
l'Euchariftie  ,  &  qu'ils  la.  préparèrent. 
Cette  Pâque  eft  donc  littéralement  l'A- 
gneau Pafchal. 

Avant  que  de  finir  je  ne  puis  omettre 
ici  une  railon  remarquée  par  Janfenius 
de  Gand ,  que  c'a  été  une  providence 
particulière  de  Dieu ,  que  l'année  où 
Jefus-Chrift  devoit  être  immolé^  il  fc 


Dissertation  XXIX.  507 
foie  trouvé  deux  jours  de  Paque  ,  8c 
félon  divers  comptes,  deux  14  jours 
de  la  Lune  .,  un  véritable  j  &:  l'autre  lé- 
gitime félon  la  Tradition.  Par  ce  moyen 
Jefus-Chrift  accomplit  dans  le  premier 
le  facrifice  de  la  Paque  légale,  &  infti- 
tua  un  nouveau  facrifice  'y  &c  dans  le 
fécond  il  s'offrit  foi-mème  à  Dieu  ,  com- 
me étant  le  vrai  Agneau  Pafchal.  Ainfi 
d'un  coté  l'immolation  du  vrai  Agneau 
répondit  au  figuratif,  &  de  Pau  are  celle 
de  l'Agneau  figuratif  précéda  le  vérita- 
ble. Or  ces  deux  chofes  ne  pouvoient 
s'accomplir  que  dans  deux  jours  14  de 
la  Lune  ,  qui  fe  fuivoient  immédiate- 
ment :  Les  trois  premiers  Evangéliires 
ont  écrit  ce  qui  arriva  le  premier ,  & 
faint  Jean  ce  qui  fe  paffa  dans  le  fécond , 
pour  répondre  aux  objections  qu'on 
pouvoit  tirer  des  trois  autres  contre  ion 
Hiftoire. 

Car  on  pouvoit  lui  demander  com- 
ment il  fe  pouvoit  faire  que  Jefus-Chriit 
ayant  fait  la  Paque  avec  fes  Difciples  le 
14  jour ,  conformément  au  rapport  de 
trois  Evangéliftes,  les  Juifs  l'eullènt  pu 
crucifier  le  lendemain  1 5  qui  étoit  la 
plus  grande  Fête  de  l'année.  Cela  trouve 
fa  réponfe  dans  ce  que  faint  Jean  re- 
marque ,  que  c'étoit  alors  le  jour  de  Li 
vréfaration   de  la  Pâque  ;  c'eft-a-dke 


508  Dissertation  XXIX. 
pour  les  Juifs  :  Erat  autem  parafceve 
Pafchii,  Ce  qu'il  paroîr  n'avoir  remar- 
qué que  pour  répondre  à  la  difficulté 
qu'on  pouvoit  tirer  des  autres  Evangé- 
liiles. 

§.  XXXVI. 

Conclujîon.  Combien  il  eft  dangereux 
de  troubler  les  fentimens  que  FEglife 
tient  par  tradition.  Deux  conditions 
des  nouvelles  découvertes,  La  certi- 
tude &  V utilité. 

Je  finirai  cette  Differtation ,  qui  n'eft 
que  trop  longue ,  par  cette  réflexion  , 
qu'il  n'efl:  pas  avantageux  de  troubler 
la  porTeflion  où  elt  l'Eglife  depuis  les 
premiers  fîecles  ,  de  certains  fentimens 
conformes  aux  expreffions  de  l'Ecriture, 
8c  qui  font  une  partie  de  la  créance  des 
peuples.  On  me  dira  que  fi  ces  points 
n'appartiennent  point  à  la  foi ,  de  qu'ils 
ne  touchent  point  les  mœurs,  il  a  tou- 
jours été  permis  d'en  rechercher  la  véri- 
té ,  ôc  de  propofer  au  public  les  nou- 
velles découvertes  qu'on  y  auroit  pu 
faire  j  parce  qu'on  ne  preferit  jamais 
contre  la  vérité,  &  qu'étant  un  bien  pu- 
blic ,  on  fait  tort  à  la  fociété  civile  , 
lorf qu'on  la  retient  dans  les  ténèbres* 


Dissert  ati  on  XXIX.  5  09 
Or  la  queftion  Ci  Jefus-Chrift:  a  fait  la 
dernière  Pâque  eft  de  ce  caractère. 

je  ne  fais  déjà  fi  des  pa(Tages  de  l'E- 
criture  5  qui  regardent  une  matière  fort 
importance  ,  ne  font  pas  une  partie  de 
la  foi ,  lorfqu'ils  font  expliques  uni- 
ment &  en  un  même  fens  par  toute  la 
Tradition  des  Pères  de  l'Eglife  :  Mais 
quoi  qu'il  en  foit ,  je  voudrois  mettre 
deux  conditions  à  cette  recherche. 

La  1.  efb  qu'il  y  ait  quelque  utilité  dans 
cette  découverte  qui  récompenfe  le  trou- 
ble que  caufe  la  nouveauté.  Or  a  quoi 
fert  d'apprendre  fi  tard,  contre  ce  qu'on 
a  toujours  cru  ,  qu?  Je  fus  -  Chrift  n'a 
point  fait  la  dernière  Pâque/  Cela  11'eft 
capable  que  de  troubler  des  âmes  foi- 
bles  qui  croyent  simplement  que  tout 
ce  que  l'Eglife  chanre  eft  vrai  comme 
i 'Evangile  ,  ni  que  de  donner  lieu  à  des 
efprits  téméraires  de  fufpendre  leur 
créance  pour  des  dogmes  bien  plus  im- 
portans ,  puifqu'on  a  découvert  la  fauf- 
feté  de  ce  qui  avoit  toujours  pafle  pour 
véritable. 

Cela  fert  ,  me  dira-t-on  encore  ,  à 
concilier  faim  Jean  ,  qui  nie  cette  der- 
nière Pâque,  avec  les  trois  Evangéliftes, 
qui  femblent  l'aifurer. 

Mais  comment  faint  Jean  nieroit-il 
une  chofe  dont  il  ne  parle  point  :  Or 

Y  lij 


510  Dissertation  XXIX. 
quand  la  contradiction  apparente  con- 
jifte  en  ce  que  trois  Evangéiiftes  aiTu- 
rent  formellement  un  point  que  le  qua- 
trième a  iupprimé  :  ce  n'eft  pas  une 
conciliation  recevable  de  donner  la  gène 
aux  trois  pour  les  faire  parler  comme 
le  quatrième  }  mais  c'eft  ce  que  nous 
examinerons  ailleurs. 

La  i.  condition  eft,  que  cette  nouvelle 
découverte  foit  fi  certaine  &  fi  évidente , 
qu'elle  accable,  pour  ainfi  dire,  l'efprit 
de  lumière.  Car  alors  on  peut  dire  qu'on 
n'eft  pas  en  état  de  fufpendre  fon  ju- 
gement fur  cette  vérité ,  &  qu'on  en  parle 
farce  qu'on  a  été  perfuadé ,  Credidi 
propter  quod  locutus  fum  :  Mais  lors 
qu'on  n'a  pour  l'appuyer  que  des  conjec- 
tures probables,  la  prudence  &  la  cha- 
rité obligent  à  fupprimer  ce  qu'on  en 
croit  favoir  ;  &  félon  la  règle  que  faint 
Paul  a  faite  pour  ceux  qui  parlent  des 
Langues  étrangères  fans  Interprète,  on 
n'en  doit  parler  que  pour  Dieu  8c  pour 
foi  -même  :  Si  autcm  non  fuerit  inter- 
pres  _,  taccat  in  Fcclefia  ,  fibi  autcm  lo- 
quatur  &  Deo.  i.  Cor.  c.   14.  v.  28. 

Les  démonftrations  font  les  interprè- 
tes naturels  des  vérités  inconnues  ;  fi 
on'en  manque,  il  vaut  mieux  les  diiîî- 
mnîer  que  de  les  produire.  Car  enfin  , 
probabilités  pour  probabilités,  les  an- 


Dissertation  XXIX.  ^  1 1 
ciennes  qui  font  en  poflelîïon  de  la 
créance  du  public ,  valent  mieux  que  les 
nouvelles,  qui  n'étant  pas  plus  certai- 
nes, font  plus^odieufes  &  plus  choquan- 
tes. Que  fera -ce  donc  fi  elles  ne  font 
appuvées  que  fur  de  foibles  conjectures , 
fur  des  fens  de  l'Ecriture  forcés  &:  arbi- 
traires, Cm  de  taux  raifonncmens?  Mais 
qui  en  fera  le  juge  ?  Chacun  croit  avoir 
fa  raifon  de  fon  coté  f  Aucun  ne  fe  don- 
nre    le  tort  :  Les   deux   partis  font   les 

mes  plaintes  contre  la  préoccupation 
des  préjugés  _,  qui  ferment  l'efprit  à 
toutes  les  raifons  contraires  j  6c  il  n'y 
en  a  point  qui  foient  plus  éloquens  en 
cette  matière  que  ceux  qui  font  le  plus 
entêtés  de  leur  fyftême. 


DISSERTATION    XXX. 

Joan.  C.  XIII.  v.  i.  Antè  diem 
fejiwn  Pafckce,  &c.  Concord. 

c.  cxxix. 

A  Près  avoir  établi  le  fait  de  la  der- 
nière Paque  de  Jefus-Chrilt  ,  il 
s'agit  maintenant  d'examiner  en  quel 
tems  il  l'a  faite  *,  C\  c'a  été  le  mcme 
tour  que    fgs  Juifs ,  ou  le  jour  précé- 

Y  iv 


512  Dissertation  XXX. 
dent  y  enfin  fi  l'un  anticipa  la  Fête  ou 
fi  [qs  autres  la  différèrent  :  &  fur  tour 
cela  le  partage  des  opinions  eft  encore 
plus  grand  que  fur  le  fait ,  foit  qu'on 
ait  égard  aux  motifs  ,  qui  d'abord  pa- 
roiffent  à  peu- près  de  même  force  j  foie 
qu'on  regarde  le  nombre  des  opinans 
qui  fe  trouve  prefque  égal  de  part  & 
d'autre.  Car  au  lieu  que  dans  la  queftion 
du  fait,  toute  l-Egli(e,ou  plutôt  toutes 
les  Sociétés  Chrétiennes  font  d'un  côté, 
&  un  petit  nombre  d'Auteurs  de  l'au- 
tre ,  la  plupart  inconnus  &:  mal  renom- 
més j  ici  tout  au  contraire ,  les  Auteurs 
Catholiques  font  tellement  partagés, 
qu'à  ne  fuivre  que  l'autorité,  on  feroit 
affez  en  peine  à  prendre  parti.  Les  uns 
enfeignent  que  Jefus-Chrifl:  &  les  Juifs 
firent  la  Pâque  le  même  jour  du  Jeudi 
au  foir  ,  &  que  le  lendemain  Vendredi , 
qui  étoit  la  grande  Fête  des  Azymes  , 
Jefus-Chrift  rut  attaché  à  la  Croix.  En- 
tre ceux  qui  les  féparent  ou  qui  met- 
tent leurs  Pâques  en  des  jours  différens, 
les  uns  la  font  anticiper  d'un  jour  par 
Jefus-Chrift  &  par  les  Apôtres ,  &  ils  la 
lui  font  célébrer  a  la  fin  du  1 3  jour  de 
la  Lune  6v  au  commencement  du  14;  les 
autres  au  contraire  veulent  que  cette 
année- là  les  Juifs  pour  profiter  incef- 
famment  de  l'occafion  favorable  qu'ils 


Dissertation  XXX.  5 1 3 
avoient  de  faire  mourir  Jefus-Chrift , 
Payent  différée  jufqu'au  jour  du  15,  & 
qu'ils  ayenr  de  même  transféré  au  16  la 
folemnité  des  Azymes. 

Toutes  ces  idées  font  fauffes  j  parce 
qu'elles  fuppofent  que  Jefus-Chrift  6c 
les  Juifs  s'accordoient  à  compter  de 
même  manière  les  jours  de  la  Lune  ,  Se 
que  par  exemple  fur  la  même  nouvelle 
Lune  ils  prirent  le  Jeudi  pour  le  1 3  ,  le 
Vendredi  pour  le  14,  &  le  Samedi  pour 
le  15.  11  n'en  eft  pas  néanmoins  ainn*  ; 
Jefus-Chrift  tk  les  Juifs  firent  leur  Pâ- 
que ,  chacun  dans  le  14  qui  répondoic 
à  lanouvelle  Lune  Pafchale  qu'ils  avoient 
comptée.  Le  Jeudi  fut  le  14  pour  Jefus- 
Chrift  &  le  Vendredi  pour  les  Juifs, 
parce  qu'ils  avoient  compté  diverfement 
le  premier  jour  du  mois ,  Jefus-Chrifl 
par  la  conjonction  de  la  Lune  avec  le 
Soleil  ,  de  les  Juifs  par  la  tranflation. 
Ainfi  on  peut  dire  que  Jefus  Chrift  an- 
ticipa la  Pâque  à  l'égard  des  Juifs  _,  Se 
que  les  Juifs  la  différèrent  à  l'égard  de 
Jefus-Chrilt  _,  parce  qu'ils  la  tirent  en 
divers  jours  qui  s'einrefuivoient  ;  mais 
à  l'égard  de  la  Ncomenie  qu'ils  avoient 
prife  ,  il  n'y  eut  ni  délai  d'une  part>  ni 
anriciparion  de  l'autre. 

En  effet ,  quel  fens  y  a-t-il  de  dire  que 
Jefus- Chrift  ht  par  avance  la  Pâque  ,  dès 

Y  Y 

I 


514  Dissertation  XXX. 
le  foir  du  13,  parce  que  c'étoit  le  com- 
mencement du  14  qui  eft  le  jour  où  elle 
étoit  fixée/  Ces  Auteurs ,  par  un  cer- 
tain équivoque  ,  n'ont  point  entendu  la 
Loi  de  la  Pâque,  Exod.  u,  v.  6.  Elle 
ordonne  d'immoler  l'Agneau  le  foir  du 
1 4  ,  &  de  le  manger  à  l'entrée  de  la  nuit 
fuivante  ,  qui  commençoit  le  ^.C'eft 
ce  que  porte  l'Hébreu  j  lntcr  duas  vef- 
peras  ,  c'eft-à-dire  j  entre  le  foir  du  So- 
leil couchant  &  le  foir  du  Soleil  cou- 
ché. Cette  immolation  devoit  donc  fe 
faire  le  fécond  foir  du  14,  avant  que  le 
Soleil  fût  couché.  Qu'ont-ils  fait  ?  Ils 
ont,  contre  l'Ecriture,  placé  l'immola- 
tion de  l'Agneau  dans  l'entrée  de  la  nuit 
qui  commençoit  le  14,  pour  le  manger 
fans  doute  14  heures  après,  à  l'entrée 
de  la  nuit  qui  ouvroit  le  1 5. 

Quel  fens  y  a-t-il  encore  à  dire  que 
les  Prêtres  &  les  Pharifiens  pour  ne 
manquer  pas  l'occafion  qui  fe  préfentoit 
de  faire  mourir  Jefus-Chrift,  différèrent 
la  Pâque  au  lendemain  Vendredi,  qui 
étoit  pour  eux  le  1 5 .  Etoient-ils  fi  peu 
zélés  pour  l'obfervation  des  Loix  de 
Moïfe  f  Oui,  dira-t-on  ,  quand  il  s'a- 
gilfoit  de  fatisfaire  leur  haine  Se  leur 
vengeance  contre  Jefus-Chrift.  Mais  ce 
grand  peuple  a(Temblé  de  toute  la  Judée 
4  Jérufalem  ,  qui  n'avoir  pas  les  me- 


Dissertation  XXX.  5 1 5 
rues  engagemens  qu'eux,  transféra-t-il 
aufli  la  Pâque  au  lendemain.^  Quelle 
brouillerie  de  quel  défordre  cela  devoir-» 
il  caufer  dans  la  ville  ?  Ces  Auteurs  ne 
comptent  cela  pour  rien  ,  pourvu  qu'ils 
fe  tirent  d'affaire  aux  dépens  de  qui  il 
appartiendra  ,  tant  les  engagemens  8c 
les  préjuges  ont  de  force  dans  le  choix 
des  opinions. 

Il  s'agit  dans  cette  difpute  de  conci* 
lier  faint  Jean  avec  les  trois  Evangé- 
liftes  qui  l'ont  précédé  ;  Ôc  les  divers 
moyens  qu'on  a  pris  pour  en  venir  à 
bout  ,  font  voir  combien  certe  entre- 
prife  eft  difficile.  Le  premier  femblô 
nier  que  Jefus-Crrrift  ait  fait  la  dernière» 
Pique  ;  les  trois  autres  au  contraire  ferrv» 
blenr  l'alfurer  très  pofirivement.  Les  uns 
pour  les  accorder  réduifent  les  trois  an 
texte  du  quatrième  ,  &  ils  font  tous  les 
efforts  pour  empêcher  qu'ils  ne  difent 
que  Jefus-Chrift  a  fait  la  dernière  Pi- 
que. C'eft  lé'  parti  qu'a  pris  l'Auteur  de 
l'Harmonie  avec  le  fuxcès  qu'on  a  ptl 
voir  dans  la  DitTertation  précédente. 
Les  autres  qui  font  le  plus  grand  nom- 
bre réduifent  fainr  Jean  aux  trois  autres 
Evangéhftes ,  &  ils  prétendent,  quoi 
qu'il  puilfe  dire ,  que  Jefus-Chrift  ayant 
célébré  le  Jeudi  la  dernière  Pâque,  les 
Juifs  la  firent  le  même  jour  que  lui. 

Yvj 


506    Dissertation    XXIX. 
«ux  ;   ou  s'ils  ne  l'apprêtèrent  pas  ,  je 
demande  qui  les  empêcha  de  lui  obéir. 
Je  fuis  très-perfuadé  qu'on  ne  peut  rien 
répondre  a  cela  qui  ne  fait  de  la  der- 
nière foiblefTe,  &  qui  ne  tombe  de  foi- 
même.  Combien  de  fois,  dit  l'Auteur  , 
a\  oit-il  tenu  un  langage  dont  les  Apô- 
tres ne  pénétrèrent  le  jens  qu  après  fa 
mort  ?  Cela  eft  indubitable  du  dogme  , 
de  des   prédictions ,   dont  fouvent  les 
métaphores  obfcurcifToient  le  fens  :  mais 
il  ne  leur  a  jamais  fait  de  commande- 
ment qu'il  ne  leur  fût  aifé  d'entendre , 
ou  qu'il  ne  leur  ait  expliqué  au  même 
tems.  Or  qu'y  a-t-il  d'obfcur  ou  de  fi- 
guré dans  celui  -  ci  :  Parate  nobis  Paf- 
cha  ut  manducemus  ?  On  ne  dira  pas  , 
fans  doute ,  que  cette  Pâque  eft  méta- 
phoriquement l'Euchariftie  j  car  com- 
me c'eft  la  même  dont  il  eft  dit  tout  de 
fuite  :  Et  paraverunt  Pafcha  ;  ce  feroic 
une  grande  abfurdité  de  dire  que  Je- 
fus-Chrift  leur  commanda  de  préparer 
l'Euchariftie  ,  &  qu'ils  la.  préparèrent. 
Cette  Pâque  eft  donc  littéralement  l'A- 
gneau Pafchal. 

Avant  que  de  finir  je  ne  puis  omettre 
ici  une  railon  remarquée  par  Janfenius 
de  Gand ,  que  c'a  été  une  providence 
particulière  de  Dieu ,  que  l'année  où. 
Jefus-Chrift  devoit  être  immolé  ^  il  & 


Dissertation  XXIX.  507 
foie  trouvé  deux  jours  de  Paque  ,  8c 
félon  divers  comptes,  deux  14  jours 
de  la  Lune  j  un  véritable  j  de  l'autre  lé- 
gitime félon  la  Tradition.  Par  ce  moyen 
Jeius-Chrift:  accomplit  dans  le  premier 
le  facrifice  de  la  Paque  légale,  &  infti- 
tua  un  nouveau  facrifice  'y  &c  dans  le 
fécond  il  s'offrit  fo  i-mème  à  Dieu  ,  com- 
me étant  le  vrai  Agneau  Pafchal.  Ainil 
d'un  coté  l'immolation  du  vrai  Agneau 
répondit  au  figuratif,  &  de  l'autre  celle 
de  l'Agneau  figuratif  précéda  le  vérita- 
ble. Or  ces  deux  chofes  ne  pouvoient 
s'accomplir  que  dans  deux  jours  14  de 
la  Lune  ,  qui  fe  fuivoient  immédiate- 
ment :  Les  trois  premiers  Evangclilles 
ont  écrit  ce  qui  arriva  le  premier ,  & 
faint  Jean  ce  qui  fe  paifa  dans  le  fécond , 
pour  répondre  aux  objections  qu'on 
pouvoit  tirer  des  trois  autres  contre  ion 
Hiftoire. 

Car  on  pouvoit  lui  demander  com- 
ment il  fe  pouvoit  faire  que  Jefus-Chriit 
ayant  fait  la  Paque  avec  fes  Difciples  le 
14  jour ,  conformément  au  rapport  de 
trois  Evangéliftes,  les  Juifs  l'eulfent  pu 
crucifier  le  lendemain  1 5  qui  étoit  la 
plus  grande  Fête  de  l'année.  Cela  trouve 
fa  réponfe  dans  ce  que  faint  Jean  re- 
marque ,  que  c'étoit  alors  le  jour  de  la. 
préparation   du  la  Paque  ^  c'eft- à-dure 


508  Dissertation  XXIX. 
pour  les  Juifs  :  Erat  autem  parafcevc 
Pafchd.  Ce  qu'il  paroîc  n'avoir  remar- 
qué que  pour  répondre  à  la  difficulté 
qu'on  pouvoit  tirer  des  autres  Evangé- 
liiles. 

§.  XXXVI. 

Concîujion.  Combien  il  ejl  dangereux 
de  troubler  les  fentimens  que  FEglife 
tient  par  tradition.  JDeux  conditions 
des  nouvelles  découvertes.  La  certi- 
tude &  futilité. 

Je  finirai  cette  Differtation ,  qui  n'eu: 
que  trop  longue ,  par  cette  réflexion  , 
qu'il  n'eft  pas  avanrageux  de  troubler 
la  porTeflïon  où  elt  l'Egiife  depuis  les 
premiers  fiecles  ,  de  certains  fentimens 
conformes  aux  expreffions  de  l'Ecriture , 
êc  qui  font  une  partie  de  la  créance  des 
peuples.  On  me  dira  que  fi  ces  points 
n'appartiennent  point  à  la  foi ,  6c  qu'ils 
ne  touchent  point  les  mœurs,  il  a  tou- 
jours été  permis  d'en  rechercher  la  véri- 
té ,  6c  de  propofer  au  public  les  nou- 
velles découvertes  qu'on  y  auroit  pu 
faire  >  parce  qu'on  ne  preferit  jamais 
contre  la  vérité,  6c  qu'étant  un  bien  pu- 
blic ,  on  fait  tort  à  la  fociété  civile  , 
lorfqu'on  la  retient  dans  les  ténèbres» 


Dissertation  XXIX. 

Or  la  fefus-Chrift  a  tau  la 

dernière  Pâque  eu  de  ce  c 
s  l'ai;  déjà  ii  îles  pafl 
criture  ,  qui  regardent  une  'orc 

tont  pas  une  partie  de 
la  .  r {qu'ils  font   expliqua  .    uni- 

fens  par  toute  1 1 
IVad  des  Pères  de  1*1  :  Mais 

i  qu'il  en  fc  voudrais  me. 

.x  conduit  tte  recherche. 

La  i.  eft  qu'il  y  ai: 
cet:  .  ;tequ 

ble  que         s  li  nou  |uoi 

fert  d'app;  ud ,  contre  c.  i 

a  toujours  cr  I  Je  as     Chrift  n'.i 

point  raie  la  j?  Cela  n*eft 

:ble  que   de  tr.        51  des  auie^  foi- 

»  qui  croyant  fimplement  que  tout 

jue  l'I  .    eft  vrai  comi 

îonner  lien 
de    fui        Ire   ler.c 
es  bien  plus  im- 
porta ns  ,  ;  rauf- 

toujours  pafle  pour 
le. 
(  ra-r-on   encore 

,  qui  nie  ier- 

I 
l'allui 

M  i.  comment  laine  Jean niecoir-il 
:u  il  :  point  :  Or 

î  iij 


5io  Dissertation  XXIX. 
quand  la  contradiction  apparente  con- 
jifte  en  ce  que  trois  Evangélifles  aiïu- 
rent  formellement  un  point  que  le  qua- 
trième a  fupprimé  :  ce  n'eft  pas  une 
conciliation  recevable  de  donner  la  gêne 
aux  trois  pour  les  faire  parler  comme 
le  quatrième  ;  mais  c'en:  ce  que  nous 
examinerons  ailleurs. 

La  2.  condition  eft,  que  cette  nouvelle 
découverte  foit  fi  certaine  &  fi  évidente , 
qu'elle  accable,  pour  ainfi  dire,  l'efprit 
dé  lumière.  Car  alors  on  peut  dire  qu'on 
n'eft  pas  en  état  de  fufpendre  fon  ju- 
gement fur  cette  vérité ,  &  qu'on  en  parle 
f>arce  qu'on  a  été  perfuadé ,  Crcdidi 
propter  quod  locutus  fum  ;  Mais  lors 
qu'on  n'a  pour  l'appuyer  que  des  conjec- 
tures probables,  la  prudence  &  la  cha- 
rité obligent  à  fupprimer  ce  qu'on  en, 
croit  favoir  \  &  félon  la  règle  que  faint 
Paul  a  faite  pour  ceux  qui  parlent  des 
Langues  étrangères  fans  Interprète,  on 
n'en  doit  parler  que  pour  Dieu  Se  pour 
foi-même  :  Si  autem  non  fuerit  inter- 
pres  _,  taccat  in  Fcclefia  ,  Jibi  autem  lo- 
quatur  &  Deo.  i.  Cor.  c.   14.  v.  28. 

Les  démonftrations  font  les  interprè- 
tes naturels  des  vérités  inconnues  ;  (1 
on'en  manque,  il  vaut  mieux  les  difli- 
mttler  que  de  les  produire.  Car  enfin  , 
probabilités  pour  probabilités,  les  an- 


Dissertation    XXIX.    ^  1 1 
ciennes    qui    font  en  pofleflïon  de    Li 

:nce  du  public  ,  valent  mieux  qu_ 
nouvelles,  qui   n'étant  pas  plus  certai- 
nes, font  plurodieufes  &  plus  choquan- 
Que   fera -ce  donc    li  elles  ne  (ont 
appv  j  fur  de  roibles  conjectures , 

Ecrituce  forc<         Boi- 
res, lurd-  :aifonncmens  ?  Mais 

qui  ci:  ' 

_  don- 
• 

_,   qui    ferment  ic  à 

es  les  .  \s  contraii  il  n'y 

en  a  point  qui  foient  plus  éloquens  en 

cette  matière  que  ceux  qui  lom  le  plus 

entêtés  de  leur 


DISSERTATION    XXX. 

Jonn.  C.  XIII.  v.  i.  Antè  diem 

■'c.  Coiicord. 
C.  CXXIX. 

APt  i  '    !  i  d 

]  i  il 

! 

s     il   1  uume 

l   Ri    J  .  >ui  pi,. 

Y 


512  Dissertation  XXX. 
dent  y  enfin  fi  l'un  anticipa  la  Fête  ou 
fî  les  autres  la  différèrent  :  &  fur  tout 
cela  le  partage  des  opinions  eft  encore 
plus  grand  que  fur  le  fait,  foit  qu'on 
ait  égard  aux  motifs  ,  qui  d'abord  pa- 
roiiïent  à  peu-près  de  même  force j  foie 
qu'on  regarde  le  nombre  des  opinans 
qui  fe  trouve  prefque  égal  de  part  ÔC 
d'autre.  Car  au  lieu  que  dans  la  queftion 
du  fait ,  toute  l 'Eglife  ,  ou  plutôt  toutes 
les  Sociétés  Chrétiennes  font  d'un  côté, 
3c  un  petit  nombre  d'Auteurs  de  l'au- 
tre ,  la  plupart  inconnus  &:  mal  renom- 
més ;  ici  tout  au  contraire ,  les  Auteurs 
Catholiques  font  tellement  partagés, 
qu'à  ne  iuivre  que  L'autorité*  on  feroic 
affez  en  peine  a  prendre  parti.  Les  uns 
enfeignent  que  Jefus-Chrift  &  les  Juifs 
firent  la  Pâque  le  même  jour  du  Jeudi 
au  foir  ,  &  que  le  lendemain  Vendredi , 
qui  étoit  la  grande  Fête  des  Azymes , 
Jefus-Chrift  fut  attaché  à  la  Croix.  En- 
tre ceux  qui  les  féparent  ou  qui  met- 
tent leurs  Pâques  en  des  jours  dirTérens, 
les  uns  la  font  anticiper  d'un  jour  par 
Jefus-Chrift  Se  par  les  Apôtres ,  &  ils  la 
lui  font  célébrer  à  la  fin  du  i  3  jour  de 
la  Lune  de  au  commencement  du  14;  les 
autres  au  contraire  veulent  que  cette 
année- là  les  Juifs  pour  profiter  incef- 
famment  de  l'occafion  favorable  qu'ils 


Dissertation  XXX.  11$ 
avoient  de  hure  mourir  Jelus-Chriit  > 
l'a)  e  jtrfqu'aq  joue  da  1 5  , 

qu'ils  ayenr  de  même  transfère  au  16  L 
des  Azymes. 
Toutes  ces  1  lées  font  faiilTes^  parce 
qu'elles   fuppofent  1  ùis-Chrilt  êv 

.1  compter   de 

même  manière  les  jours  de  b  Lune  ,  >c 

que  pai  -  la  même  nouv 

Lune  ils  prirent  le  Jeudi  pour  le  1 5  ,  le. 

idredi  pour  le  14»  &  le  Samedi  pour 

le  1 $.   Il    1  ^  néanmoins  ainli  ; 

.luilt  ce.  les  Juifs  firent  leur  Pa- 

,  chacun  d.ms  le  :  4  qui  ioic 

à  la  no  U  !  une  Pafchale  qu'ils  avoienC 

com|  tce.1     J    idi  tu:  le  14  pour  Jt 

Chi  .    \  .    1  pour   les  Ju.     , 

Îiptc*  diverfem 
e  |  ne  du  ..'..(    itï'X 

i  i  I  une  avec  le 
;s  Juif*  par  1  lariocu 

Ainfi  on  peu: 

pa  la  P  ;ard  des  J  lifi  ,  Se 

?' 
l'tls  la  fii  rai 
fui  voient;  mus 

'.voient 

part,  ni 

!    t 
I 


514  Dissertation  XXX. 
le  foir  du  13,  parce  que  c'étoit  le  com- 
mencement du  14  qui  eft  le  jour  où  elle 
étoit  fixée/*  Ces  Auteurs ,  par  un  cer- 
tain équivoque  5  n'ont  point  entendu  la 
Loi  de  la  Pâque ,  Exod.  12,  v.  6.  Elle 
ordonne  d'immoler  l'Agneau  le  foir  du 
14  ,  &  de  le  manger  à  l'entrée  de  la  nuit 
fuivante  ,  qui  commençoit  le  1 5.  C'eft 
ce  que  porte  l'Hébreu  j  lnter  duas  vef- 
peras  ,  c'eft-à-dire  _,  entre  le  foir  du  So- 
leil couchant  &  le  foir  du  Soleil  cou- 
ché. Cette  immolation  devoir  donc  fe 
faire  le  fécond  foir  du  14,  avant  que  le 
Soleil  fut  couché.  Qu'ont-ils  fait  ?  Ils 
ont,  contre  l'Ecriture,  placé  l'immola- 
tion de  l'Agneau  dans  l'entrée  de  la  nuit 
qui  commençoit  le  14,  pour  le  manger 
fans  doute  14  heures  après,  à"  l'entrée 
de  la  nuit  qui  ouvroit  le  1 5. 

Quel  fens  y  a-t-il  encore  à  dire  que 
les  Prêtres  &  les  Pharifiens  pour  ne 
manquer  pas  l'occafion  qui  fe  préfentoic 
de  faite  mourir  Jefus-Chrift,  différèrent 
la  Pâque  au  lendemain  Vendredi ,  qui 
étoir  pour  eux  le  1 5.  Etoient-ils  fi  peu 
zélés  pour  l'obfervation  des  Loix  de 
Moïfe  ?  Oui,  dira-t-on  ,  quand  il  s'a- 
giiïbit  de  fatisfaire  leur  haine  &  leur 
vengeance  contre  Jefus-Chrift.  Mais  ce 
grand  peuple  aiïemblé  de  toute  la  Judée 
a  Jérufalem  ,  qui  n'avoir  pas  les  mè- 


Dissertation    XXX.     5 1  < 
tries  _;emens  qu'eux  ,  transfcra-t  il 

aulli  la  Pâque  au  lendemain'  (^aelle 
brouillerie  êc  quel  dcfordre  cela  devoir- 
il  caufer  dans  la  ville  ?  Ces  A  tueurs  ne 
comptent  cela  pour  rien  ,  pourvu  qu'ils 
fe  tirent  d'affaire  aux  dépens  de  qui  il 
appartiendra ,  tant  les  engagernens  c\: 
les  préjuges  ont  (té  force  dans  le  choix 
des  ris. 

Il  dans  ce:te  difpure  de  conci- 

lier faint  Jean    avec  les  trois  Evifl 
!     .s   qui  l'ont  précédé;  <5c  les  divers 
1  a  pris   pour  en  venir  a* 
bout  mbien  cette  entre- 

ficile.  le    premier   femblc 
que  Jefus  Chrift  ait  fait  la  derniers 
LU  contraire  fertv 
irlalfu  rmetti. Les  uns 

..   les  accordée  réduifent  les  trois  aa 
c\:  Us  font  tous  les 
:rs  poui  ils  ne  di' 

]         I     .  L  dernière  Pi- 

:  qu'a  -enr  de 

rmoni  -  n  a  pa 

1   d.ins    la   1 1  Jtnte. 

;i  fout  le  plus  grand  nom- 

aurref 
i  nr ,  quoi 

me 
1  ie,  les 

c  lui. 


$\G  Dissertation    XXX. 

Mais  comme  les  uns  Se  les  autres» 
font  violence  aux  paroles  des  Evangé- 
liftes ,  pour  leur  faire  figniher  toute  au- 
tre cliofe  que  ce  qu'elles  expriment ,  je 
prendrai  le  milieu  entre  ces  deux  extré- 
mités, ou  plutôt  je  fuivrai  le  tempéra- 
ment dont  je  me  luis  déjà  fervi.  J'ai 
prouvé  le  fait  de  la  dernière  Pâque  par 
les  textes  formels  des  trois  premiers 
Evangéliftes  j  &  je  vais  montrer  que 
Jefus-Chrift  &  les  Juifs  ont  fait  chacun 
la  leur  en  des  jours  dirférens  _,  Jefus- 
Chrift  le  Jeudi ,  &  les  Juifs  le  Vendre- 
di. C'en:,  ce  me  femble  ,  la  feule  voie 
de  concilier  les  contrariétés  apparentes 
qui  fe  trouvent  entre  faint  Jean  &:  les 
autres  Evangéliftes  ;  cettQ  voie  eft  d'au- 
tant plus  raifonnable  qu'elle  garde  à 
leurs  exprelîions  le  fens  naturel  qu'elles 
portent,  au  lieu  que  les  autres  leur  don- 
nent la  gène ,  en  leur  fubftituant  des  fens 
qu'elles  n'ont  prefque  jamais  eus  dans 
l'Eenture.  Elle  eft  encore  d'autant  plus 
aifée  ,  qu  elle  fait  évanouir  tout  d'un 
coup  toute  cette  contrariété  prétendue. 
Car  les  trois  Evangéliftes  attirent  que 
Jefus-Chrift  a  fait  la  dernière  Pâque. 
Saint  Jean  qui  n'a  rien  écrit  de  cette 
Pâque  de.  Jefus  -  Chrift  ,  n'a  garde  de 
le  nier.  Celui  ci  fait  entendre  que  le 
matin  du  Vendredi  les  Juifs  n'avoient 


Di$«i*TÀfion  xxix  ht 

encore  point  rait    la  P 

auti  i    pais  , 

n'ont  point  pa  I 

Où   elt  donc  la  contrariété  ?  Eft  -  ce 

qu'on  nie  ou  qu'on  aifure  une  chofc  donc 

on  ne  f.ik        i  tention?  Elle  n'èft  pas 

dans  les  tern  s        s  Evan 

coir  .   n'-j'l  ; 

livoque  ;  elle  n\ 

dans  Ls  a  ans 

poui  e  ries  autres»  je  dis  qu'on 

tire  de   faim  '  que 

•  lit  n'a  point  taie  [ne  ,  cV 

our  prouver  que 

ns  que 

lui  \  au  heu  qu'il  faut   i 

,  que  Jefu    l  It  la 

nie  ,  c<  ians  la 

rertatioo  :  de   faint 

1  j  ,i  qu'il  ne  our 

que        '  cenfé- 

queu,         '.>  faut  n  ablir. 

I.    A   I  que 

it  ,     il 

odeotq 


çi8  Dissertation  XXX. 
la  Pâque  le  Jeudi  au  foir  comme  Jefus- 
Chrift,  il  paroît  néanmoins  de  cela 
même  que  c'eft  un  avis  qu'il  donne  à 
fes  Apôtres,  qu'il  ne  parle  point  de  la 
Pâque  des  Juifs.  Car  à  quel  propos  leur 
donne-t-il  cet  avis  ?  £ft>ce  que  les  Apô- 
tres ne  favoient  pas  une  chofe  qui  au- 
ïoit  été  connue  de  tout  le  monde  ? 
D'ailleurs  quelle  néceflité  y  auroit-il 
de  les  en  avertir,  puifqu'ii  ne  leur  com- 
mande rien  ?  Le  moins  qu'on  en  pui(Te 
dire  elt  que  cet  avis  auroit  été  inutile , 
Se  n'auroit  eu  aucun  but.  Dieu  nous 
garde  de  penfer  que  Jefus-Chrift  ait  ja- 
mais dit  des  paroles  perdues.' 11  ajoute, 
&  le  Fils  de  f  homme  fera  livré  pour 
être  crucifié.  On  ne  voit  point  quel 
rapport  ou  quelle  dépendance  il  y  a  de 
la  Pâque  des  Juifs  à  ia  Paflion  de  J3fus- 
Chrift  j  foit  que  l'une  &  l'autre  foient 
arrivées  en  deux  jours  confécutifs,  félon 
quelques  Auteurs ,  ou  dans  le  même 
jour  félon  les  autres. 

11  faut  donc  rapporter  ces  paroles  de 
Jefus-Chrift  à  la  Pâque  qu'il  devoit  cé- 
lébrer ,  pour  y  trouver  une  jufte  né- 
ceflité &  une  liaifon  naturelle  de  la  Pâ- 
que avec  fa  Paflion.  C'eft  un  avis  qu'il 
donne  à  fes  Difciples ,  que  dans  deux 
jours  il  fera  la  Pique  avec  eux,  parce 
que  le  troifieme  il  fera   attache  à  te 


DlÇÇFRTÀTIOtf     XX\'.    Çî£ 

1  :        '     mme,  félon  l'Ecriture,  il d 
ctre  immole,  lorfque  les  Juifs  immo- 

\  ,  1!  I  Ati 

e  d'un  en 

mourir  au  tems  no- 

Pour  m  cerre    liaifoti  ,    on 

doir  rc  fonction  6V:  comme 

lonl'ufagedes 
Hél  té  la  ^riode 

•n.     A.  a     que 

?  </<:  tHontn 

Ce  fera 
ufs  t 
Il  vis  de  Jefus  Chrilt  aux  A: 

as  2  un  autre  I); 
•ie  m  i  qui  coi  îrc- 

ns  que  ;  B   lui  .ii   donné.  11  lui 
envoya  1  . 

ut  ion  au:  ' 

vous  c:.  - s  ejl  proche  9 

aujourd'hui  la  P 
mes  D  l  I  ro- 

t.iic 
ie  de  1 
• 
menr  qui  v    cft 

il   pour  |  ift  de  faire  !a 

I 

dire  le 

c  li  f 

Il  \  en  a  qui  n'y  crt >!  .:  d'an- 


520  Dissertation  XXX. 
tre  liaifon  que  la  familiarité  de  Jefus- 
Chrift  avec  ce  Difciple  chez  qui  il  s'in- 
vitoit  foi -même  de  faire  fon  dernier 
fouper  ,  &  la  liberté  avec  laquelle  il 
alloic  à  la  mort,  dont  il  prévoyoit  le 
tems  &  les  autres  circonftances.  Quel- 
ques autres  ajoutent  feulement  à  ce 
Commentaire  cette  liaifon ,  qu'étant  fur 
le  point  de  partir  du  monde,  il  vouloit 
lui  donner  cette  dernière  marque  de  fon 
amitié,  comme  pour  lui  dire  adieu;  que 
fans  attendre  d'en  être  prié  ,  il  iroic 
prendre  chez  lui  fon  dernier  repas. 
Selon  les  autres  ,  c'eft  une  excufe  que 
Jefus-Chrift  fait  à"  ce  difciple  inconnu , 
de  l'importunité  ou  de  la  dépenfe  qu'il 
lui  caufe  en  faifant-  toujours  la  Pâque 
chez  lui  :  Je  ne  vous  lerai  guère  plus 
incommode  pour  ce  fujet  ni  à  vous  ni  a 
mes  autres  Difciples  :  Moi  qui  fuis  fur 
le  point  de  quitter  le  monde  ;  avant 
néanmoins  que  je  m'en  aille ,  j'ai  réfolu 
de  célébrer  ma  dernière  Pâque  chez 
vous.  Le  tems  de  mon  départ  qui  me 
preife  vous  doit  adoucir  ce  commande- 
ment j  fi  vous  n'êtes  un  Difciple  in- 
grat j  vois  ne  devez  rien  faire  de  moins 
pour  votre  Maître  avant  qu'il  vous  foie 
ravi.  On  voit  déjà  que  la  proximité 
dii  départ  ne  faifoit  rien  pour  confoler 
ce  Difciple  de  la  dépenfe  de  la  Pâque, 


Dissertation    XXX 
:oit  feulement  qu'elle  dev  *  la 

demie:  o  cçtte  conjecture 

fus-Chnlt    lui  devoil  dire   :  Âpttà 

-n. 

I  explications  (ont  fort  hu- 
maine* ,  ev   il  n'y  a  gr. 

que  Jefus-Chrifl 

biei  m- 

-  !  nous  eulieut  app 

Difciple ,  on  jugeroii  avec  plus  d 
de  b  valeur  de  ce  (  îommenraire. (  9 

qu'on  en  peut  de-,  i.'ier i  elquc  pro- 

babilité ,  eft  que  c'etoit  un  b         s  ri- 

.  commode:  ,    chez    qui    JefttS- 

Chrifi  av(  ii  déj  1  tait  les  Paquej 
dentés  j  &  i'il  eft  permis  d     M 

:01c  li  Mai  fou  d'Al- 
phee  &  de  Marie,  père  es:  mère  d 
ques  le  Mineur.  Or  on  ne  trouve  ail— 
me  m  1 

i 
fondei.  :  il  s'afi 

II  cil  1!  que 
ii  liai  ion  entre  la  célébrai 

nie 

I    i.tns 
te  fa 
Dtfcipu 
il  ;  afl  famine  D 

par  i  -jx  Dil  qui 


52i      Disse  rtaîion    XXX. 
alloient  actuellement  préparer  la  Pâque. 
Selon  cette  idée  ,  c'eft  une  excufe  que 
Jefus-Chrift:  lui  fait,  de  ce  qu'ayant  juf- 
qu'ici  célébré  les  autres  Pâques  le  mê- 
me jour  que  les  Juifs ,  il  la  prévenoit 
maintenant  d'un  jour  à  caufe  de  la  pro- 
ximité du  tems  de  fa  mort ,  comme  s'il 
difoit  :  Je  fuis  prelïé  du  tems  de  mon 
départ  hors  de  ce  monde,  &  je  ne  dois 
pas  partir  fans  avoir  fatisfait  au  devoir 
de  Pâque,  qui  doit  être  fi  cher  a  toute 
notre  nation.  Mais   comme  les  Juifs , 
félon  la  coutume,  la  différeront  jufqu'à 
demain  ,  je  n'ai  pas  le  loifir  d'attendre 
fi  long -tems;  je  veux,  conformément 
à  la  Loi_,  la  célébrer  dès  aujourd'hui  : 
comme  j'ai   choifi  votre  maifon  pour 
cette  cérémonie ,  voila  deux   de   mes 
Difciples  que  je  vous  envoie  pour  nous 
préparer  toutes  les  chofes  néceftaires. 

Voilà  le  vrai  fens  de  ce  pafTage  de 
faint  Matthieu ,  qui  fait  voir  d'un  côté 
que  les  Juifs  n'ont  point  fait  leur  Pâque 
le  même  jour  que  Jefus-Chrifl; ,  &  de 
l'autre  que  ce  jour  des  Azymes,  où 
félon  le  même  Evangélifte  ,  &  félon 
faint  Marc  &  faint  Luc  ,  on  immoîoit  la 
Pâque  &  oh  Von  devoit  l'immoler,  c'é- 
toit  le  jour  où  la  Loi  obligeoit  de  l'im- 
moler, Se  où  Jefus-Chrift  l'immola  pac 
les  mains  de  fes  Apôtres. 


DlSSB&TATtO 

î  I  l.    Saint   ] 
prelîions,  «5c  qui  n'a  parte  de  la  P.ique 

Îue  comme  elle  ctoir  ccL  pat  les 

uirs ,   a  rtionrqaé  q  fa  Peu  de 

:ue  y  Antc  dicmjejlum  I  ,  JefdS 

Ce  ion  venant  qu.  >on  retour 

■  ■■  .         ■ 
>ut  aux   fien  -  pal  l   de 

Jeu: 

charifti 

Eju'il  v. 
rer  le  Je  .idi  au  foii  m- 

5  dèl  les  fil  h jures  du  loir,  c'eîl- 
i-dire  ,   depûb  detlt  heures,   puifqu'il 
la  bah  il  initr 

charifti j.  Si  donc  1  :s  ont  fait 

h  Pâque  en  même  rems  que  lui ,  on 
peut  dire  au(Yi  qu'ils  l'ont  :  :  la 

/       de  Pâque,  On  l'a  pu  cott- 

.    -   .     I   ■  nies  que  les  Juif>  ont 
Jamais  v  '  la  jarr 

dire  qu'on  fait  avant  One  1  -  iofl 

ii  commence  8t  qu  leal 

I 
Les  1  u  à 

Ion  le  ■ 
jonc j i  ;ue 

1  Mit  cor, 

a ur oient  I 
Riumoi  ; 


524  Dissertation  XXX. 
de  Pâque  ?  Cette  exprelïîon  eft  inouïe 
dans  l'ufage  de  l'Eglife  ,  &  elle  Peft 
d'autant  plus  dans  le  ftyle  de  l'Ecriture, 
qu'on  n'y  en  trouvera  pas  un  feul  autre 
exemple  que  celui  qui  eft  en  queftion. 
Je  dis  plus  :  Elle  eft  contraire  à  la  Loi 
Pafchale.  Exod.  23.  5.  6.  Le  premier  mois 
le  1 4  jour  au  foir  Je  fait  la  Pâque  du 
Seigneur ,  &  le  15  jour  du  même  mois 
eft  la  Fête  des  Azymes.  Or  cette  Fête 
commençoit  dès  la  veille  au  Soleil 
couchant,  toute  la  nuit  fuivante  étoit 
donc  une  partie  de  la  Fête  :  Ainli  faine 
Jean  ne  pouvoit  pas  dire  que  l'Eucha- 
riftie  ,  qui  avoit  été  inftituée  environ 
deux  heures  dans  cette  nuit-là  j  l'eût  été 
avant  la  Fête  de  Pâque. 

Cela  répond  par  avance  à  toutes  les 
défaites  qu'on  allègue  pour  éluder  la 
force  &  la  clarté  de  ces  paroles.  Les  uns 
les  expliquent  avant  le  poinç  du  jour  ou 
le  lever  du  Soleil  de  la  Fête  de  Pâque  ; 
antè  lucem  fejlivitatis  Pafchalis.  Les 
autres  avouent  que  dès  le  foir  du  Jeudi 
la  Fête  étoit  commencée  ;  mais  ils  pré- 
tendent qu'elle  devoit  être  aujfi  -  tôt  en 
quelque  forte  interrompue  par  la  nuit 
fuivante.  Je  n'ai  jamais  oui  dire  que  les 
ténèbres  de  la  nuit  interrompiftent  les 
Fêtes ,  comme  fi  en  cachant  le  travail 
elles  en  ôtoient  la  défenfe.  Les  autres 


Dissertation    XX  525 

cnhn  ,  comme         donat ,  difent,  c^ue 

'cil    fj.1- 

jour  de  la  !  is-Chrift,  fi  on. 

entend  le  jour  naturel ,  «S:  ;•  nr, 

fi  on  l'en:.  ici. 

Tour  lis-  je ,  a  déjà  fa  réponfc j 

parce  que  l'Original  ne  porre  point, 
comme   a   tivuiuic    1  ;    Interprète  , 

t.: me  d:cm  fcjlun:  r:t    U  jour  de  /a 

mais  amplement  ,:r.u  fejlum 

PjJl'  £    Vil     J;     TU  fi  Txya. 

! 
vuK]ue,c.  lis  les  jours  de  I 

:  naturels,  &: 

. ,  qui  :u  de- 

puis un  foir  jufqo'i  l'autre  ,  j  vefpcra 

S 
e  donc  des  jours 
rifici 
ige, 

rf ,  que 
J  e  f  il  s  - 

D  u  trois  he 

qae  1 1 

ju'il 

:1  eu:  maii- 

.  agneau  1  1  \  &  de  dire 

;   par  u: 
il!  des  A; 

idunfti  u  la  Fctc  de 


516    Dissertation  XXX. 
Pâque ,   antè  dictn  fejlum  Pafch&. 

Puis  donc  qu'on  ne  peut  pas  dire  fans 
abfurdité  que  Jefus-Chrift  ait  prévenu 
la  Fête  de  Pâque  ,  à  l'égard  de  celle 
qu'il  avoit  déjà  célébrée j  il  faut.nécef- 
fairement  féparet  la  Pâque  des  Juifs  de 
celle  de  Jefus-Chrift,  en  les  plaçant  en 
des  jours  difFérens ,  8c  expliquer  ce 
paflage  de  faint  Jean  par  ce  Commen- 
taire qui  n'y  laifte  pas  la  moindre  obs- 
curité :  Que  Jefus-Chrift  fe  fou  venant 
qu'il  devoit  mourir  le  jour  même  où 
les  Juifs  célébroient  leur  Pâque  ,  la  pré- 
vint par  la  tienne  8c  par  l'inftitution 
de  l'Euchariftie.  Et  avant  ta  Fête  de 
Pâque  qu'ils  dévoient  célébrer  le  foir 
du  lendemain ,  il  lava  les  pieds  à  (es 
Apôtres  pour  les  difpofer  à  recevoir 
fbn  Corps  8c  {on  Sang.  Cela  fuppofe 
ce  qui  fera  foutenu  dans  la  fuite  ,  que 
faint  Jean  ne  parle  ici  de  la  Pâque  que 
d'une  manière  populaire ,  8c  félon  l'or- 
dre public  ^  qui  avoir  transféré  la  Pâ- 
que de  fon  jour  naturel ,  qui  étoit  le 
Jeudi  ,  au  lendemain  Vendredi ,  &  la 
Fête  des  Azymes  du  Vendredi  au  Sa- 
medi. 

IV.  Avant  que  de  propofer  les  preu- 
ves personnelles  que  nous  fournirent  les 
Prêtres ,  les  Pharifiens  8c  Judas  ,  il  eft 
bon  de  remarquer  qu'il  y  a  des  demonf- 


Dissertation    }  j  :  - 

(rations ,  t  coru 

auiîi  certaines  Se  iuffi  infaillibles  que 

celles  -  |ue.  Elles  I  ■■.:  : 

>  lur  l'amour  néced 

que  clucun  fe  pori  - 

ices  les  •  qui  nous 

fur  5  n  le  degré    de  leur 

proximité ,    : 

que     nous    nous     portons.     1 
(ait  le  poids  qui  r.ur  E 
de  1  nomme  ,    on  ne    m;  nais 

d'en  découvrir    tous    II  ms  , 

par,  le  ccrur  :  ou  joui  s  à 

ce  qu'il  aime  oc  aux 

der.  El  cotr  tù   un   principe  de 

Phyfique  ,  n  ne  Je 

un   d< 
fait  ru  que  toutes 

ons  d  rappoi  I  ce 

que  nous  'n. 

Or  il  y  a  trois  ou  quatre  amours  qni 
dépendent  de  cec  amoi; 
qui  font   les 

de  la  vie-   I  OUI 

reconnoiilcnc  quclq  raie  on 

faufle.  I  i  i.  m  l'asnoa  our 

tous  les  hommes.  Le  ;.  l'amour  de  nos 
ches  qui  I    i  toute  la  pal 

NU  qui  ont  quelque  loin  de  leur 
IiJiineur.  Le  4.  eti  l'amour  d.  ;lû- 


52.8  Dissertation  XXX. 
modités  8c  de  fes  intérêts  particuliers. 
Et  dans  l'égalité  des  circonftances ,  les 
hommes  ne  manquent  jamais  de  fe  dé- 
terminer au  parti  le  plus  favorable  à  ces 
trois  ou  quatre  panchans  j  8c  les  Hifto- 
riens  même  comptent  fur  ces  princi- 
pes ,  lorfqu'iis  expliquent  à  quoi  fe 
îbnt  portés  les  hommes  dans  les  occa- 
fions  où  ils  font  engagés  par  ces  grands 
intérêts. 

Cela  fuppofé ,  je  vais  faire  voir  que 
Judas ,  les  Prêtres  8c  les  Pharifiens 
étoient  engagés  par  tout  ce  qu'ils  avoient 
de  plus  cher  au  monde  à  ne  pas  choiiir 
le  jour  de  la  grande  Fête  des  Azymes 
pour  prendre  8c  faire  mourir  Jefus- 
Chrift.  Ils  y  étoient  obligés  par  l'a- 
mour qu'ils  avoient  pour  leur  Judaïfme, 
pour  leur  patrie,  pour  leur  honneur, 
pour  leur  vie  même.  Chacun  de  ces 
intérêts  étoit  capable  de  les  en  détour- 
ner j  quel  pouvoir  donc  leur  jonction 
devoit-elle  avoir  fur  leurs  efprits  ? 

V.  Les  Prêtres  8c  les  Phanfiens,  ou- 
trés de  la  liberté  avec  laquelle  Jefus- 
Chriifc  le  Mardi  leur  avoit  reproché 
leurs  vices  ;  8c  voyant  que  le  lendemain 
il  n'avoit  point  paru  au  Temple  ni  dans 
la  ville  ,  ils  s'arfemblerent  ce  jour  là  en 
Sanhédrin  pour  délibérer  enfemble  com- 
ment ils  pourroient  fe  faifir  de  lui  8c  le 

faire 


D I S  S  t  A  t  A 1 

Ils    cm;  .:   qu\ 

émotion  populaire  : 
Tau:  ! 

i.  lh  troarerent  -la  deux  r. 

ces  a 

regardoit  la  capture  ,  do  Pari 

adroitement ,  en  la  ant  qa 

! 

!    . 

conde  ,  qu 

fur  :  e  la  fi 

de  peur  q  le   ind 

ir    fie 

/77ù.  A 

le  i  (     rift 

.  m.iis  q 
du  Gouverneur  , 

cv  :  la 

vi 1 1    I  de  l.i 

craindre  de  la y.\ 
.duiroi 

I 


530     Dissertation    XXX. 
teroit  les  Juifs  amis  ou  ennemis  de  Je- 
fus-Chrift  ,  à  toutes  les  extrémités  ,  au 
péril  même  de  leurs  vies. 

Dieu  voulut  que  le  fuccès  répondît  à 
leur  attente.  Du  Mercredi  jour  de  leur 
confultation  jufqu'au  Samedi  le  jour  des 
Azymes ,  ils  n'avoient  que  deux  jours 
en  leur  difpofition  j  le  tems  preftbitjÔC 
ils  craignoient  que  Jefus-Chrift  ayant 
fait  fa  Pâque  avec  fes  difciples  ne  re- 
tournât auiîi-tôt  en  Galilée  ,  6c  ne  leur 
échapât  jufqu'à  la  Fête  prochaine.  Mais 
lorfqu'ils  étoient  encore  atfemblés  >  Ju- 
das leur  vint  offrir  fon  fervice  ,  &  il  fe 
chargea  de  le  remettre  fans  bruit  entre 
leurs  mains  ,  moyennant  une  honnête 
récompenfe.  Ravis  d'une  fî  heureufe 
rencontre ,  ils  lui  promirent  tout  ce  qu'il 
leur  demanda.  Pour  lui  il  s'acquitta  fore 
à  leur  gré  de  fa  promette  :  il  le  fit  pren- 
dre hors  de  la  ville  &  en  pleine  nuit , 
ôc  lorfqu'on  étoit  déjà  couché  ,  com- 
me il  paroît  par  faint  Marc  ,  14,  5 1,  Le 
lendemain  Vendredi ,  qui  étoit  la  veille 
de  la  Fête  ,  ils  le  firent  condamner  par 
le  Gouverneur  6c  exécuter  par  les  Sol- 
dats ,  fans  qu'aucun  témoignât  être 
blefle  d'une  îi  criante  injuftice.  Ainfl 
Dieu  leur  applanit  toutes  les  difficultés, 
3c  ménagea  toutes  chofes  pour  faire 
tomber  la  mort  de  fon  Fils  au  mêm$ 


DlSSïRTATION      XXX       J  ;  T 

jour  &  a  la  mime  heure  ou    ils  îmr. 
loient  les  11  de  Ij  Puquc  ,  afin  que 

cette    concurrence  de   facn 
nèfne  jour  leur  ouvrit  les 

Dans  cette  fap|  te  fond 

fur  l'Ecriture  ,  il  eft  clair  que  le  Vi 
li  eu  Jelus  Clintr.  fut  crue. 

des  Azymes,  m.  îs  la  veille 
ou  lei  Jmtb  dévoient  immolet  b  Ptqnes 
&:  paiconfcquent  Jeius  Clinlt  qui  l'a 
immole  des  le  Jeudi  précédent  j   i 

5uitta  de  ce  ci  _ .  .>ir  un  jour   avant  les 
uifs. 
Que  peut-on  oppoferù  une  il  grande 
leoce  f  (  ;i  mettent  a,. 

U  P  ft ,  cv  au  Vendredi  li 

mes  , 
.:1a  première  vue  c 
Pharifiens  fui  d  c  foin  de  raire 

'  .huit  le  jour  même  de 
la  1  ;r  ne  I    pas    lieu   au 

peuple  de  s  émouvoir  :  m. 

itioo  de  Judas  ,  6ù  la   |  r\  nielle  de  le 
rre  lans  1  leUTl  mans,  '      : 

fit  changer  de  mefurc  ,  qu'une  occaiïon 
lit.         le  dulipa  en  an  moment  toote 

la  crainte  du  , 

qui  vouloir  que  J  »!t  mourût  le 

jour  même  de  la  1  été  |  es  ,    fit 

vo;  Juifs  que  I  à  lui   Se  non 

....  UI  ,  1  heure  ,    le 

^ 


532.  Dissertation    XXX. 
lieu  j  ôc  la  manière  donc  cette  fainte  Vic- 
time lui  devoit  être  immolée. 

Nous  venons  de  voir  que  la  veille  de 
la  Fête  étoit  un  jour  d'autant  plus  pro- 
pre à  cette  exécution  ,  qu'il  étoit  de  la 
fageife  de  Dieu  de  faire  immoler  la 
vraie  Pâque  ,  le  véritable  Agneau  ,  le 
même  jour  &c  à  la  même  heure  que  les 
Juifs  immoloient  tous  les  Agneaux  de  la 
Pâque  figurative  ,  afin  de  faire  éclater 
plus  vivement  la  vérité  par  Foppoiuion 
de  la  figure. 

Mais ,  i  °.  L'amour  qu'on  ne  peut  leur 
difputer  pour  tout  l'extérieur  de  leur 
Religion  ,  ne  leur  permettoit  pas  de 
choifir  pour  cette  exécution  le  jour  des 
Azymes*  On  n'a  qu'à  fefouvenir  a  quels 
excès  les  a  portés  l'amour  de  leur  Re- 
ligion ^  félon  l'idée  qu'ils  s'en  étoient 
formée.  Ils  ne  pouvoient  fouffrir  que 
les  Aigles  Romaines  futfent  déployées 
dans  toute  la  Judée  ,  parce  que  c'étoienc 
des  figures.  C'eft  même  ce  zélé  mal  en- 
tendu qui  lesavoient  foulevés  contre  Je- 
fus-Chrift  ,  parce  qu'ils  s'imaginoient 
fautfement  qu'il  étoit  oppofé  à  la  Loi 
de  Moïfe  ;  8c  que  fi  tous  les  Juifs 
croyoient  en  lui,  il  ne  rçfteroir  plus 
perfonne  pour  défendre  la  Ville  &  le 
Temple  contre  les  Romains. 

Ils  lui  avoiçnt  fait  un  crime  des  gué- 


D'il  M  1  HT  A  T  I  G 

riions  miraculeul-js  qu'il  i 

du  Sabbat  ,  p  net   U 

i  hideux  du  fàpi 
1  >il  leur  z^le  pour    la    !  de 

I 

olemei  i 

i.i  dep 
I 

. 

en   dv 

- 
■ 

de  | 

ent 

1    plait   a  ce* 
:  com- 
• 

i  amoi  :  leur  R  i , 

oient  ; 
. 
tjuel  redore  peuc  rc  :r  hu* 

iij 


554     Dissertation  XXX. 
main,  fi  celui-ci  ne   le  fait  agir.  Les 
Juifs  avoient  reçu  cTÀugufte  le  privilè- 
ge de  ne  pouvoir  être  cités  en  Jugement 
le  jour  du  Sabbat  ^  ni  d'aucune  autre 
Fête.  Tibère  qui  lui  fuccéda  ne  changea 
lien  dans  cette  conceflion  ,  non  plus  que 
dans  fes  autres  Actes  qu'il  révéroit  com- 
me des  oracles;  &  Tite  long-temsaprès, 
pariant  aux  Juifs  j  leur  reprocha  que 
les  Empereurs  Romains ,  n'avoient  don- 
né aucune  atteinte  à  leurs  Loix,&  qu'ils 
leur  avoient  permis  de  vivre  félon  leurs 
Coutumes.  C'eft  Grotius  qui  fait  cette 
remarque.  Peut- on  s'imaginer  après  cela 
que  le  Sanhédrin ,  la   plus  noble  partie 
«les  Juifs  y  eut  été  aiTez  lâche  pour  tra- 
hir l'intérêt  &  la  caufe  commune  de  leur 
nation  ,  de  pour  donner  eux-mêmes  aux 
Romains  l'exemple  de  violer  leurs  pri- 
vilèges ,  en  traînant  Jefus-Chrift  au  Tri- 
bunal de  Pilate  le  jour  même  des  Azy- 
mes ,   ôc  en  obligeant  ce  Gouverneur 
malgré  lui  à  le  condamner  à  la  mort 
par  des  inftances  &  des  crieries  impor- 
tunes depuis  le  matin  j  ufqu'à  midi  f  Si 
on  me  l'avoue  y  c'eft  que  rien  ne  coûte 
pour  foutenir  ce  qu'on  a  une  fois  avan- 
cé. Qu'importe  en  effet  à  ces  Auteurs 
que  les  Pharifiens  foient  perhd^s^  a.  leur 
Nation,  gens  brutaux  &  bourrus  jufqu'à 
la  folie  ?  Ces  Juifs  ne  font  pas  ici  poux 


Dissertation  XXX.  5  j  5 
k  détendre  &  pour  les  démentir.  Mais 
ces  Auteurs  devroient  fe  fouvenir  que 
dans  l'Hiftoire,au  défaut  de  la  vente  qui 
nous  eft  fouvent  inconnue  ,   il  faut 

ICI  àcequieft  le  plus  vrailembi.tble  , 
&  faire  agir  les  gens  fcl  >n  leur  caractère. 
FtatC  de  cette obfervation  j  leur  (!om- 
uaire  n'auroit  pas  même  l'autorité 
d'un  Roman  dont  la  première  condition 
eft  la  vraisemblance. 

11  e't  vrai  qu'ils  crovenr  trouver  dans 
l'Ecriture  quelque  exemple  fembUble  & 
certe  précipitation  des     Pharifiens*    Ils 

ut  le  Livre  des  Nombres ,  c .  1  |  , 
}      :i  prouver   que  le  jour  du  S.ibb.u  on 
les  criminel  >    ils  fop- 

pléent  du  leur  ce  qui  m  i  l'Hr. 

re  ,  que  cet  homme  ,  qui  fut  furpris  le 
jour  du  S.ibbar ,  ranuilant  du  bois,  tut 
lapide  le  même  jour  qu'il  C  arrêté. 

(     :it  ce  que  k :  1  ••     I  Nombres 

dit  pas. 

30.  11  falloit  au  moins  quclqu'autrc 
motif  pins    puilîant    fur    L       I  que 

l'amour  de  leur  honneur  cV:  de  leur  pa- 

v)ir   iU 
Ç   telle  nécelfité  do».     I  leur. 

>fotl  il  par  1 

les  mefures  qu'ils  ..  Ils 

nanquerci  lui  dé< 

c  qu'ils  >iDr 

Z 


5$£  Dissertation    XXX. 
me  une  condition  à  la   prife  de  Jefus, 
Car  pourquoi  la  lui  auroient-ils  difli- 
mulée  ?  11   paroît  par  les   Evangéliftes 
qu'il  s'engagea  à  l'obferver  ,  parce  que 
fans  limiter  aucun  tems  fixe  pour   s'ac- 
quiter  de  fa  prome(Te  ,  il  fe  chargea  feu- 
lement de  le  leur  livrer  fans  tumulte  Se 
fans  bruit,  &  par  conféquent   hors  du 
jour  de  la  fête  où  l'émotion  étoit  inévi- 
table.   1/ le  promit  ,   dit  faint  Luc;    & 
dès  lors  il  ne  cherchoit  plus  quune  occa* 
Jion  favorable  de  le   leur  livrer  fans  tu- 
multe.   Les   deux    autres  Evangéliftes 
difent  la  même  chofe  ;  Se  on  peut  dire 
que  Jefus-Çhrift  voyoit  cette  inquiétude 
dans  i'cfprit  de  Judas  ,   lorfque  pour  le 
déterminer  au  jour  fuivant  ,  il  le  preffa 
d'achever  au  plutôt  ce  qu'il  avoit  com- 
mencé :  Quod  facis  j  fac  citius. 

Comment  donc  peut-on  fe  perfuader, 
que  Judas  qui  avoit  le  choix  de  tous  les 
jours  qui  lui  feroient  les  plus  commo- 
des pour  exécuter  fa  promette  j  c'eft-à- 
dire  ,  pour  faire  tomber  Jefus- Chrift 
fans  bruit  entre  les  mains  de  fes  enne- 
mis ,  ait  juftement  choifi  pour  cela  le 
jour  de  fête  qu'ils  avoient  excepté  dans 
leur  convention  ,  Se  où  la  fédition  ne 
pouvoit  s'éviter  r1  Comment  cet  homme 
avare  quifavoit  que  fon  payement  dé- 
pendoit  du  fucecs  de  fa  trahifon  ,  fe  fe- 


DlS  SERT  ATI  \'. 

roic-il  expulc  au  luzard  d 
trei 

ie  eu  un  ten  .  oie  croire 

raifonoablemem  qu'ell  - 

que 

Jih, 

le  Jeudi  i 

im- 

Au  moins  il  n  i  peiroi 

con  ir  l'amour  que  les  Plmu 

jiî- 
iû  > 
il  efi  vrai.  Ibancoieni  acheté  fa  n 
le  i  enraplc  , 

1  ir  le  leur  livrer  ,   je 

immoh 

ce  ,   ils  ai. 

leui  ils 

[uc  le  peu 

!  leur  d 

,  que  leur 

- 


5jS!    Dr  s  s  e  il  t  a  t  ra  n  XXX. 
pUbem.  Je   cherche  donc   fur  quoi  fie* 
fondée  cette  nouvelle  aifurance  du  San- 
hédrin ,  ou  quelle  nouvelle   raifon  il 
avoir  après  fon  pacie  avec  Judas  de  ne 
craindre  plus  le   peuple  ,    &  je  ne  la 
trouve  point.  Le  peuple  n'étoit-il  pas- 
toujours  enclin  aux  féditions  y  fur-tout 
dans  le  tems  de  Pâques  _,  où  toute  la  Ju- 
dée écoit  ralfemblée  dans  les  murs  de 
Jérufalem  ,  &;  où  toutes   les  Galieries 
du  Temple  étoient  remplies  de  foldats 
Romains  pour  retenir  les  Juifs  dans  le 
devoir  ?  Prompts&  enclins  à  fe  révol- 
ter pour  des  fujets  de  rien  ,   étoient-ils 
d'humeur  quels  qu'ils  fulTent  ^  amis  ou 
ennemis  ,  ou  indifïerens  ,   à  voir  fans 
émotion  &  de  fang  froid  la   profana-  , 
tionde  leur  grande  fête  par  la  condam- 
nation ôc  par  le  fnpplice  de  trois  per- 
fonnes  ?   Il  faut  bien  que  les  Auteurs 
que  je  réfute  trouvent  moyen  de  les  ap* 
paifer  ,  jufqu'à  fourTrir  paisiblement  ce 
vilain  fpecracle. 

Mais  empêcheront-ils  que  les  Prêtres 
&  les  Pharifiens  ne  foient  toujours  les 
mêmes.  Des  long-tems  ils  avoient  cons- 
eil le  delfein  de  faire  mourir  Jefus- 
Chrift,  mais  la  crainte  du  peuple  leur 
avoit  toujours  lié  les  mains.  Celaparoît, 
Mat  th.  c.  n  3  46.  Marc  11  ,,  %&.Imc~ 
j>q  i  19,  Jodh,  7  j  jQ.  ÔC  Gtt  plufieuxf 


D    I    S  S  E  R  T  A  T   1  C   H     XXX. 

Autres  endroits.  Ils  n\ 
félon  leur  créance  3   que  I  .  de 

une  invention  h  .    de 

peur  d  erre  lapid  le  *,  Ôc 

on  s'n;  ue  devenus  plus    tiers 

ex  plus  hardis  ,  ils  taraient  ofc  conduire 
Jelas-Chriftaafappl  midi , 

le  pro[  te    des 

bien  t  I  Tes 

i  omment  donc  ,  dira-t  on  ,  purent- 
ils  impunément,  irde  la  veille 
faire  a:-  U)J  qr.  - 
;                               i  e  (a  aifi 

:  bien  difl  ird  de 

] .       (  Ihrift  2  1  de  roat  c<  qui 

rdoii  la   Religh  m.    I  es 
i  ntoient  . 

:enc 
vec  joie   , 
nt  aucun  inii  .  ;  ..  !  Uir- 

* 

racfani  ip 

qiu  de    le  .drc 

avcL    |  hrift  dans  le  fopplice ,  afin 

?|lle  :C  pen- 

crainte  de  fauver  a \ 

ncls  qui  i  la  mort.    Aucun 

voulu: 

*-.  : I  -.  k  plus  f-iinc  &  le  I  tK> 


S 40    Dissertation    XXX. 
cent  de  tous  les  hommes. 

Mais  tous  les  Juifs  étoient  zélés  jus- 
qu'à la  fureur  quand  il  s'agifïoit  de  dé- 
fendre le  Temple  ,  leurs  Loix  ,  leurs 
Coutumes ,  la  fainteté  de  leurs  Fêtes  , 
&  généralement-  tout  ce  qui  regardoit 
la  Religion  de  Moïfe.  Ainfi  la  veille 
de  Pâque  ils  n'eurent  à  craindre  que  les 
Difciples  de  Jefus-Chrift  ,  parti  peu 
nombreux  6c  peu  formidable.  Mais  le 
jour  même  de  la  fête  ils  auroienteu  fur 
les  bras  toute  la  Nation  Juive.  Com- 
me donc  il  eft  certain  par  la  Tradition 
qu'ils  firent  mourir  Jefus-Chrift  le  Ven- 
dredi ,  il  s'enfuit  que  ce  n'étoit  point 
le  jour  de  la  fête  des  Azymes  ,  mais 
feulement  la  veille  qui  n'étoit  point  fête. 
On  doit  compter  pour  autant  de  dé- 
monstrations ces  preuves  fondées  d'un 
côté  fur  l'Ecriture  ,  de  de  l'autre  fur  les 
relïbrts  qui  font  agir  le  cœur  humain. 
On  ne  peut  leur  oppofer  que  des  pro- 
babilités languifTantes  ,  ou  plutôt  qu.e 
des  poflibilités  en  l'air  qui  ne  font  ca- 
pables de  leur  ôter  ni  la  certitude  ni 
l'évidence. 

6°.  Ce  jour-là  où  Jefus-Chrift  fut 
crucifié  ,  les  Juifs  tant  ennemis  que  fi- 
dèles, firent  quantité  d'œuvres  ferviles 
que  les  uns  ni  les  autres  n'auroient  point 
été  capables  défaire  un  jour  de  fête,  &c 


DlfliaTATIO  ' .      .41 

:c  moins  le  l  -i"  jour 

la  plus  -•  lcurb 

1 .  La  nuit 
furent  ta  1    avec    n 

îdre  Je 
Oli  >  y 

mdanc  au 

qui  | 
Chriû  a  t  ne  li  I 

de  Pâque  [Qc  la  fete  ne 

comme  qu'à  minuit  ^  '^uc  ce 

qui  uiCj 

• 
la  d 
Il  auroii  le  droic  ci 

iuic  ,  (  uuoic  | 

.  Mais  en  allceuam  ,  il 

f.illoit  qu'il  et  >k  foa- 

I 

I 

un    J 

■ 

1 

.    1 


54i  Dissertation  XXX. 
devant  Hérode  ;  ils  le  firent  condam- 
ner à  la  mort  juridiquement ,  8c  avec 
toutes  les  formalités  ordinaires  ,  ils  le 
firent  attacher  à  la  Croix  ,  toutes  œu- 
vres plus  que  ferviles  ,  ôc  qui  auroient 
violé  toute  la  faintété  de  la  Fête.  L'Ab- 
bé que  j'ai  déjà  cité  ,  avoue  que  les 
Grands-Prêtres  furent  certainement  cou- 
pables de  la  profanation  de  la  fête  f. 
mais  il  ne  s'en  met  guère  en  peine.  Que 
veut-on  qu'on  y  fane?  Et  que  lui  im- 
porte que  les  Grands-Prêtres  ayent  violé 
la  fête  des  Azymes  ?  tant  pis  pour  eux  \ 
ce  n'efi:  pas  là  fon  affaire  3  Se  il  n'en 
doit  pas  répondre. 

3.  Mais  que  dira- t-il  donc  au  viole- 
ment  que  les  Difciples  ,  qu'il  n'aban- 
donnera pas  fans  doute  ,  en  auroient 
fait  félon  fon  fyftême/*  Ce  jour- là  Jo- 
feph  d'Arimathie  acheta  un  linceul  ,  Se 
Nicodeme  cent  livres  de  myrrhe  Se 
d'Alocs  ;  ils  détachèrent  de  la  Croix 
le  Corps  de  Jefus-Chrift ,  ils  le  portèrent 
dans  le  tombeau  de  Jofeph  ,  ils  l'em- 
baumèrent ,  ils  Tenfevelirent  3  ils  en 
fermèrent  l'entrée  par  une  grotte  pierre 
ou'ils  y  roulèrent  :  Se  ils  fe  hâtèrent  de 
faire  toutes  ces  actions  ,  parce  qu'ils 
étoient  prêtés  par  la  fête  du  Sabbat  qui 
commençoit  à  fix  heures  du  foir  %  Se 
tjui  auroit  rendu  tous  ces  devoir*  ilii; 


Disse: 

,  Q ..:  •     .    ir  que  ce 
pis  ftte,  paifqtTits  auraient  tour 

.  pal  1  du 

Que  dira- 1- il  .uix  offi  js 

femmes  ,  qui  du  Calvaii  ur- 

chez  1  nt  l.i  fin   du 

joui,        itèrent  oa  préparèrent  les  par- 
fums q  • 

baamei  le  (  le  Jefu  .  ifin 

que  dira- 1- il  i  la  a 
,  qui  voyant  qu< 
1  .das  de    t 
quY  ,  crurent  qu'il  lui  donnoit 

iicrer    le 
pOOf  h  ftre.   ( 
qui 

Il  répond  fur   !a   foi  du  Rabbin    Jacob 
i  Juda  ,  les   oc.. 

morts 

tr, 

mettre   en   terre  , 

ient  des  œuvres  permil  de 

jues,   v  u  tenir 

au  tén  itUte  ,  qu'au  rap- 

poi  ■  »    Rabbins.   hl!c  porte 

exprclicmenr  qi.  iet  &  le    I 

mes  or. 
cane  cruv 

préparation  du  i 

t.r  op fis  j  txi 


544    DISSERTATION    XXX, 

qu<&  ad  vefcendum  pertinent,  Exod.  1 1  J 
16. 

J'infère  de  tous  ces  exemples  que  le 
Vendredi-Saint  n'étoit  point  fête  cette 
année- là,  ni  par  conféquent  la  grande 
fête  des  Azymes,  mais  qu'elle  fut  tranf- 
ferée  au  lendemain  Samedi. 

VI.  Il  ne  faut  pas  oublier  que  dans 
faint  Jean  ce  lendemain  efl:  appelle ,  le 
grand  jour  du  Sabbat  ;  hrat  eriim  ma- 
gnus  dies  ille  Sabbati  \  ce  qu'il  donne 
pour  le  motif  de  l'emprefiement  avec 
lequel  les  Juifs  demandèrent  à  Pilate 
qu'on  avançât  la  mort  aux  crucifiés  , 
afin  que  leurs  corps  ne  demeuraient  pas 
fur  la  croix  un  jour  fi  faint  &  fi  folem- 
nel  ,  où  il  ne  feroit  pas  permis  de  les 
dépofer.  Or  ce  jour-là  ne  pouvoit  être 
plus  faint  ni  plus  folemnel  que  les  au- 
tres ,  que  par  la  concurrence  de  la  fête 
du  Sabbat  ,  avec  celle  de  la  Pâque  dans 
"un  même  jour. 

Les  Auteurs  de  l'opinion  contraire 
n'en  demeurent  pas  d'accord  j  mais  ils 
croyent  que  ce  jour  du  Sabbat  eft  appel- 
lé  grand  ,,  parce  qu'il  fe  trouvoit  dans 
la  Semaine  des  Azymes.  Mais  ils  ne 
confiderent  pas  que  cette  raifon  étoit 
inutile  pour  prefter  la  mort  des  Patiens. 
Il  étoit  défendu  de  les  dépofer  un  jour 
<ie  Sabbat  ordinaire ,  au  lieu  que  cela 


I  S  SB  A,  X  AT  1    )M    XXX.      543 

.nuis  plulieurs  autr. 

ne 
:ion  d'un  de  ces  jours  avec  la  I  âe 
bac  pour  emp  'J-poû- 

-!i  du  tout  :   cV  elle  eut 

.u  l'E- 
Lcdeur ,  comme  la  : 
ton  de  leur  denu  au- 

jours  nés 

m- 

:r  rail 

I 

du 

la  1  loit  donc 

ron  >ur 

Us 

:ion  ,  j 
VII.  S  I  :    OÙ 

de  1 

Ui  [  midi  i 


54^  Dissertation  XXX. 
Pafch&  hora  quafi  fexta.  Les  Juifs 
donc  n'avoient  pas  encore  fait  leur  Pâ- 
que. C'étoit  néanmoins  le  lendemain 
du  jour  que  Jefus-Chrift  avoit  fait  la 
iienne  avec  fes  Difciples.  11  n'en  fau- 
droit  pas  davantage  pour  être  perfuadé 
que  Jefus-Chnft  &  les  Juifs  firent  cha- 
cun leur  Pâque  en  deux  jours  difterens, 
mais  qui  £e  fuivoient  immédiatement 
l'un  l'autre .,  c'eft- à-dire  >  le  Jeudi  &  le 
Vendredi. 

On  répond  que  fi  ce  jour  s'appelle 
Parafceve  Pajcha  _,  ce  n'eft  pas  parce 
qu'on  y  préparoit  les  chofes  néceûaires 
pour  la  Pâque  ,  qui  fans  doute  étoit 
alors  paffée  pour  les  Juifs  j  mais  parce 
qu'étant  aufîi  la  veille  du  Sabbat  ou  Ton 
apprêtoit  les  vivres  pour  le  lendemain  , 
il  fe  trouva  cette  année-là  que  la  Pâque 
tomba  dans  cette  veille.  Maldonat  ré- 
plique agréablemenr  que  c'elr  la  même 
chofe  que  il  la  Fête  de  faint  Jean  Bap- 
tifte  étant  arrivée  un  jour  avant  la  Fête 
Dieu  ,  quelqu'un  appelloit  la  première 
la  veille  de  faint  Jean  :  non  parce  que 
ce  feroitla  veille  même  de  faint  Jean  , 
mais  parce  que  la  veille  delà  Fête-Dieu 
feroit  tombée  dans  cette  Fête.  Qui  ne 
riroit,  dit-il,  d'un  fi  nouveau  diction- 
naire ?  Quis  ita  loquentem  non  déride- 
nt f  En  effet  l'Evangélifte  par  une  &- 


Dissertation  XXX,  $47 
gure  un  peu  extraordinaire  ,  au  lien  do 
dire  ,  cr^t  autem  Pii/cha  in  parai 
c'etoie  alors  la  Pique  qui  tomba  au  jour 
de  la  préparation  du  Sabbat  ,  auroitren- 
!  exprellion  >  en  difant  que 
c'etoit  la  préparation  de  la  Pique  :  trot 
autem  pdr.jfy.cvc  Paj^ht. 

Ylll.  Ce  qui  convainc  que  le  Ven- 
dredi au  matin  les  Juin  n'avoiem  point 
encore  (ail  la  PaqtM  que  le  manu 

ayant  traduit    Jelus-Ouilt  au  Tribunal 
de   Pilace  ,  la   contrairr  1  outra, 

quelque    fouillure   légale    qui  les  mie 
hors  d'état  de  m  la  Pique  vers   le 

foir  ,  les  empêcha  d'en  .'ré- 

toire  ,  parce  que  l'impureu  !  duroic 

un  jour  tout  entier  ,  BC  qu'entre  I 
commerce  avec  Pilate  <3c  le  tems  d'im- 
moler ou  de  manger  la  Pique  ,  il  n'y 
avoir  pas  alfezde  tems  pour  Lur  donner 
I  de  Te  purifier.  11  eftdooc  viiibleoue 
les  Juifs  n'avoient  pas  encore  céleb: 
Va  ]uc  dans  un  jour  ou  JefttJ  C  21>riil  s'é- 
toir  d  de  la  11 

On  répond  te  raifbu  palpai' 

.  la  Pique  en 

ma  r  préa  ;'oui 

d'autres  Victinu 

dint  toute  la  femai:  aux- 

quelles l'on  ne  pouvoit  participer  I 


548     Dissertation  XXX. 
qu'on  avoit  contracté  quelque  fouillure. 
Ces  Victimes  font  marquées.    Deut.  c. 
10  ,  2.  &  il  en  eft  fait  mention  dans  la 
Pâque  de  Jofias  ,  Parai ip.  c.  35,8. 

Mais  i.il  n'y  a  point  d'apparence  que 
faint  Jean  ,  écrivant  pour  les  Grecs  fi- 
dèles ,  eût  voulu  donner  par  équivoque 
le  nom  de  Pâque  à  d'autres  Victimes. 
qu\i  l'Agneau  Pafchal  ,  connu  par  tout 
fous  ce  nom-là  ,  fous  prétexte  que  dans 
quelque  endroit  écarté  ,  Moïfe  n  tiroir, 
donné  en  palfant  le  nom  de  Pâque  à 
ces  Victimes.  Que  fera- ce  donc,  (i  l'en- 
droit même  du  Deutéronome  qu'on  cite 
pour  cela  ne  le  dit  point  clairement ^ 
félon  l'Original  ?  Car  au  lieu  de  dire 
comme  la  Vulgate  :  Immoiabifque  Phafe 
Domino  Deo  tuo  de  ovibus  &  de  hobus  : 
Vous  prendre^  des  brebis  &  des  bœufs 
pour  en  faire  la  Pâque  _,  que  vous  immo~ 
lere%  au  Seigneur  ;  l'Hébreu  porte  .• 
Vous  facrifiere^  au  Seigneur  votre  Dieu 
la  Pâque ,  des  brebis  &  des  bœufs  j  c'eft- 
à-dire  ,  pour  accompagner  la  Pâque. 
Sacrificabis  Phafe  Domino  Deo  tuo  j 
oves  &  boves  j  &c\ 

Il  y  a  plus  encore  que  tout  cela.,  Se 
on  ne  peut  qu'on  n'admire  ici  le  peu 
d'attention  de  ces  Auteurs  à  examiner 
les  paffages  qu'ils  citent  pour  eux  ;  ils 
prennent  avidemment  tout  ce  qui  leur 


Dissertation*     XXX.      < 

ie  croyént  Les  Ju 

qui  n'entrèrent  p 
pouvoi. 

oui   on 

fut  donc  pas  i 

mai  •  .   cv 

- 

C.  mon  fe  c! 

deux  niions  ;  ie.  La 

i  -  -.  .  . 
jour  ci 

comptées  ,  qu'on  ne  pou 

bœufs  ,  ui 

. 
:ion  du  I    i 

?uelle  qualité*  ces J 
. 
de  j 

de  d 

au. 


j5o  Dissertation  XXX. 
quand  on  eft  prelTé  ?  Mais  je  foutiens 
que  tous  ceux  qui  le  diront  n'en  croiront 
rien.  C'eft  ici  où  les  Rabbins  ne  man- 
queroient  pas  d'admettre  le  miracle  de 
la  multiplication  :  autrement  on  pour- 
voit dire  ce  que  faint  André  dit  à  Jefus- 
Chrift  touchant  les  cinq  pains  :  Queji- 
ce  que  cela  pour  tant  de  monde  ?  Quid 
h&cfunt  inter  tantos  ? 

11  n'importe,  il  fe  trouvera  peut-être 
quelque  Philofophe  qui  prétendra  par 
la  divifibilité  du  continu  à  l'infini ,  que 
plufieuis  millions  d'hommes  pouvoienc 
participer  à  onze  victimes  :  Mais  la  fé- 
conde raifon  ne  laiiïe  aucun  lieu  à  cette 
nouvelle  relïburce.  C'eft  qu'excepté  le 
chevreau  qui  s'offroit  pour  le  péché ,  les 
dix  autres  Victimes  étoient  des  holo- 
cauftes  qui  fe  confumoient  tout  entiers 
par  le  feu.  L'Ecriture  y  eft  expreffe  : 
Vous  offrirez  en  holocaujle  au  Seigneur 
deux  jeunes  bœufs  tirés  du  troupeau  ^ 
un  bélier ,  &  fept  agneaux  fans  défaut , 
de  lamente  année  :  Offeretifque  inçenfum 
holocaufium  Domino  3  vitulos  de  armento 
duos  j  arietem  unum  j  agnos  anniculos 
immaculatos  feptem.  Je  ne  vois  pas  com- 
ment ,  fans  un  grand  miracle,  tout  un 
peuple  auroit  pu  participer  à  des  Victi- 
mes que  le  feu  auroit  dévorées  ',  &  je 
yojs  encore  moins  comment,  fans  blefler 


DlSSîRTÀTIOV     XXX.    <  Ç  t 

le  refpeU  qu'on  doit  à  un  ;clilte  , 

on  oie  attribuer  a   laine   Jean     d'à. 
donne  une  caule  null'i  chimérique  de  la 

rapuleufe  des  Juifs  à  l'ég 
du  Prétoire  ,  que  l'e  .1  l'obligation 

de  participe!  a  de*  Vi.mr.es  réduites  en 
cendre. 

Lod  aux  igneam  6c  aux  boeufs  , 
que  le  H  ;  |  ;  9  les  Oficieri  do  Iun- 
ple  6c  quelques  Princes  des  Lévites 
fournirent  pour  !  I. Parai ip. 

plicarion  la  plus  coron  I  ,  que 

les  ;x  Servirent  pour  le  lacri 

de  1  5c  les  bcsnri  p  >ui  le  Feftin 

Palcnal,  parce  qu'un  agneau  nefofil 

fiai  pour  le  fouper  de  dix  hommes  pour 
e  moins  ,  ex:  quelquefois  de  quin/.e  6V: 
de  vingt. 

11  v  .1  des   Affrcurs   qui    fe  défunt  de 
ces  \  ies  Pafchales  ,  expliquent  an 

hasard  :uc  de  faint  Jean  ,  1 

j  rain  ,  dont  l'ofage  regnoit 

Îate  la  ne  des 

'avoue  maintenant  que  las  Juif 

t  :  je  craindi  le- 

comme  les  impuretés  I 

étoieni  longuet  6c  fori 

Auteurs  fins  y  pen'er  & 
I 

luflj   mcomn 

eu  11  o*.  .-iU  daus  IL 


'5  5*  Dissertation  XXX. 
nouvelle  Loi  cérémoniale,  que  les  Juifs 
atteints  de  quelque  impureté  légale  >  ne 
pouvoient  manger  du  pain  fans  levain 
dans  une  femaine  où  il  n'y  en  avoic 
point  d'autre  ? 

IX.  La  Loi  commandoit  que  le  len- 
demain de  la  Fête  de  Pâques  ou  des  Azy- 
mes on  offrît  à  Dieu  la  première  gerbe. 
Qui     (    Sacerdos  )  elevabit  fafciculum 

coram  Domino altero  die  Sabbatu 

Que  depuis  ce  lendemain  de  Pâque  in- 
clufivement,  on  comptât  fept  femaines 
entières  ,  ou  quarante-neuf  jours  juf- 
qu'au  lendemain  de  la  feptieme  inclufî- 
vement  ,  qui  fera  le  cinquantième.  Nu- 
merabitis  ergo  ab  altero  die  Sabbati  in 
quo  obtulijlis  manipulum  primitiarum  , 
ftptem  hebdomadas  plenqs  ufque  ad  al- 
térant diem  expleticnis  nebdomadœ,  fep- 
tim&  ,  id  ejl  quinepuaginta  dies.  Et 
qu'enfin  dans  ce  cinquantième  jour, qui 
eft  celui  de  la  Pentecôte  ,  on  offriroit 
au  Seigneur  un  facriflce  nouveau  rire  des 
nouveaux  fruits  de  Tannée  ;  &  fie  offle~ 
retis  facrificium  novum  Domino.  Levir. 
c.  2?  ,  10,  1 5  3  16.  Ainfi  il  eft  vifibleque 
le  premier  éc  le  dernier  de  cette  cin- 
quantaine de  jours  retombent  dans  le 
même  jour  de  la  femaine. 

Or  la  Tradition  confiante  de  l'Eglife 
éotte  ,  que  l'année  de  la  mort  de  Jefus- 

Chrift 


D  I  s  c  F  R  T   A  T  :  .'  X .         | 

Chrift  le  cinquantième  joui  , 

■ 
tenu  -  1 
.  - . 
qu'elle 

le 

lei 

ces  cinquante  !  H- 

l 

il  cira 
fon-li  .  I  ».   un- 

'    uf- 
Chrift, 

bc  l  tuf- 

■ 

h  1  des 

Azymes  : 

A/  i  le 

I 
V   adredi   pi  de 

1 

au' 

1    ■ .:    1  /  '.  Ai 


554  Dissertation  XXX. 
admettant  l'Ecriture,  avouent  aufîi  la 
Tradition  ,  qui  porte  que  la  defcente 
du  faint-Efprit  &  la  Réfurrection  du 
Seigneur  tombèrent  cette  année-là  au 
Dimanche  :  mais  ils  en  nient  cette  par- 
tie j  que  la  Pentecôte  Judaïque  foie 
arrivée  le  même  jour  que  la  defcente  du 
Saint-Efprit  ou  la  Pentecôte  Chrétienne. 
Ils  prétendent  au  contraire,  que  la  Fête 
des  Azymes  ayant  été  célébrée  le  Ven- 
dredi ,  on  commença  le  lendemain  jour 
du  Sabbat,  à  compter  cinquante  jours  , 
qui  fe  terminèrent  aufti  à  un  jour  de 
Sabbat  j  qui  fut  pour  les  Juifs  le  jour 
de  la  Pentecôte ,  ôc  que  le  lendemain 
Dimanche  le  Saint-Efprit  defeendit ,  ÔC 
ce  fut  la  Pentecôte  Chrétienne  ,  le  cin- 
quantième jour  après  laRéfurrettion  du 
Seigneur.  Que  cfeft-là  précifément  ce 
que  faint  Luc  a  voulu  dire  par  ces  pa- 
roles :  Cum  complercntur  dies  Pente- 
cojles ,  faclus  eft  repente ,  &c.  Adb.  c. 
2.  i.  Lorfque  les  jours  de  la  Pentecôte 
furent  accomplis  &  paffés  ,  il  fe  fit 
tout  d'un  coup  le  lendemain  un  grand 
bruit ,  &c. 

Tout  dépend  donc  de  favoir  quelle 
eft  la  force  des  Verbes ,  compleri  &  con- 
fummari  j  tjvp.mh.^fov  çBat ,  tzKnQiçQcLi  , 
auxquels  ils  donnent  en  cette  occasion 
le  fens  d'un  cems  fini  ;-révolu  de  même 


Dissertation     XXX 
entièrement 

con:  qu'en  matière  d  de 

:ant  au  préfent , 
enk  dans  !  us  la  d ,  _•  la 

pli.   Ainli  ,     ( 

oclo  ,  veut  dire  y  le  hà 

am\  -.    Cum  c, 

:  Lorfqut  Je 
quel     il  dt 

• 

:  Cum  i  es: 

I  les  /« 

i  le  de:  \  t  un  ji- 

l  s   le   r. 

chofe  qu  ic  dit  l'Abbé  Barcoli     i 

ai  pi  m  <  jouis  de  la 

icniîblcnicm  que  d.;ns  Pcra- 
bl:                                               I 

en  qu  te  la  w- 

rit<  j<  ur , 

Il  a  \  oolu  que 
ne  heure  qu  on 

le   la  l  iqoe  , 


5  $6  Dissertation  XXX. 
par  fon  Sang  nous  délivre  du  glaive  de 
l'Ange  exterminateur  :  Qu'il  retïuicitâc 
le  même  jour  qu'on  élevoit  devant  Dieu 
la  première  gerbe  des  fruits  nouveaux  j 
pour  nous  apprendre  qu'il  eft  les  prémi- 
ces de  la  Réfurrection  gloneufe  :  Que 
le  Saint- Efprit  defcendît  fur  l'Eglife  le 
jour  de  la  Pentecôte  Judaïque  j  pour 
faire  voir  qu'il  imprimoit  au  fond  des 
cœurs  cette  Loi  que  Dieu  avoit  gravée 
ce  jour- là  pour  les  Juifs  dans  la  pierre, 
ôc  qu'il  leur  avoit  publiée  au  fon  des 
trompettes. 

Mais  que  devîendroit  alors  le  fyftême 
de  ces  Auteurs?  Comme  il  ne  s'accorde 
point  avec  cette  conduite  de  Dieu  j  il 
leur  a  plu  de  féparer  la  Vérité  d'avec  la 
figure,  au  hafard  d'ôter  à  la  figure  fa 
lignification ,  8c  de  dépouiller  la  vérité 
de  (qs  preuves.  Si  nous  les  en  croyons, 
Dieu  a  établi  les  Myfteres  le  lendemain 
de  leurs  repréfentations;  &"  par  ce  délai 
il  a  obfcurci  les  rapports  que  les  uns 
avoient  avec  les  autres. 

Après  cela  il  ne  fera  pas  difficile  d'é- 
claircir  les  difficultés  dont  on  veut  em- 
brouiller cette  matière  ou  décrier  ce 
fyftême.  On  lui  reproche  i.  qu'il  re*- 
tombe  dans  l'opinion  des  Grecs  ,  qui 
fondés  fur  les  paffkges-  de  faint  Jean 
Croyenc  que,  Jefu§-Cluift  aflûc-ipo/d-UJi 


Dissertation    XXX 

jour  la 

I 
1  bruit  contre 

ire. 
1  e  que 

;  mine 
i  au 
monde  pour  la  détruire 

• 
poi: 

'. 

doni 
prochet  èV 

• 

is.  Que  CL 
ticipafion 

,  auî  p  Je- 

ce  j 

du  14 
dors  qu 
ob! 

1 

. 

:jU- 
A  ■  nj 


5$3    Dissertation  XXX. 
chant  le  pain  qu'on  doit  offrir  à  la  Mef- 
fe  ,  &c  qu'ils  prétendent  devoir  être  du 
pain  levé. 

Mais  toutes  ces  allégations  odieufes 
font  d'autant  plus  inutiles  ,  qu'elles  ne 
touchent  feulement  pas  le  point  de  la 
queftion.  Elles  fuppofent  que  Jefus- 
Chrift  &  les  Juifs  comptaient  le  même 
jour  pour  le  14  ,  par  exemple  le  Ven- 
dredi :  qu'ai n fî  Jefus-Chrift  ne  pouvoir 
le  prévenir  d'un  jour,  qu'il  ne  fît  laPâ- 
que  le  1  3  ,  contre  l'ordonnance  exprefte 
de  la  Loi.  Et  pour  réfuter  cette  erreur  , 
nos  Auteurs  triomphent  à  peu  de  frais 
par  l'obéiffance  de  Jefus  -  Chrift  aux 
Loix  de  fon  Père.  A  quel  propos  objec- 
ter cette  obéifFance  à  ceux  qui  enfei- 
gnent  que  Jefus  -  Chrift  n'a  prévenu  la 
Pâque  des  Juifs  que  pour  obéir  aux  ter- 
mes de  la  Loi  ?  L'objedfcion  tombe  donc 
de  foi-  même.  Le  14  du  mois  dépend 
du  premier.  Or  Jefus-Chrift  &  les  Juifs 
ayant  fixé  le  premier  ou  la  néomenie 
en  divers  jours,  l'un  au  jour  de  la  con- 
jonction de  la  Lune  avec  le  Soleil  ;  les 
autres  au  lendemain  ou  à  la  première 
apparition  du  Croiftant  ;  cette  diverfité 
de  compte  leur  donnoir  le  14  en  deux 
jours  confécutifs  j  pour  Jefus-Chrift  le 
Jeudi  2  Avril,  parce  que  le  jour  de  la 
nouvelle  Lune  étoit  tombé  le  Vendredi 


Dis  s  sut  ATi  <  c.j 

v    .rs  :  m.ns  parce  que  I 

.ne   transfère  b  nouvel!.-  Lune  au 
tain    11   Macs  i  cett 

1,  un  jour 

ni  que 
1 

i  s   1 1  ; 

,  ni 
qu'il   a  :   la 

Loi  p  14. 

To,  .  8c  ne  : 

: ,  ni  !•- 
le  fait 
rir  \    chacun  a   I  ]ue  dans   . 

14 ,  âme  il 

nedemor: 

chai ,  h 
fus 
|       tant  le 

1. 
O  re  que  ]  i(l 

:  r  que  fi 

• 

quer  en 
•;  pour  d 

l'il  lem  me 

1 

Ce  de  lit 


j 6b     Disse  rtation    XXX. 

Or,  pourfuit-on,  Barrabas  fut  déli- 
vré, félon  la  coutume,  le  grand  jour 
de  la  Fête  de  Pâque  ou  des  Azymes.  Ce 
font  les  trois  premiers  Evangéliftes  qui 
l'affûtent  :  Per  diem  folemnem ,  per  diern 
feftum  :  Et  par  conséquent  ce  fut  ce 
jour-là  que  Jefus-Chrift  fut  attaché  à 
la  Croix. 

Je  réponds  déjà  que  ce  diem  n'efr. 
peint  de  l'Original ,  qui  porte  feulement 
xctre/'  JV  t«c  ijçiw.Per  fejlum.  Il  faut 
donc  juger  du  tems  de  cette  délivrance 
par  la  nature  de  la  propofirion  kclto! 
qui  étant  jointe  à  l'accufatif  j  marque 
d'ordinaire  quelque  rapport  de  proxi- 
mité ou  de  convenance  avec  le  mot 
qu'elle  gouverne.  Ainfi  cette  expreflion 
ne  f  gnifie  pas  pendant  la  durée  de  la 
Fête,  mais  à  caufe  ou  à  raifon  de  la 
Fête  ,  ainfi  qu'on  dit  ^a,7et  rowvç  fé- 
lon la  nature  ou  la  Jltuatïon  des  lieux. 
Comme  cette  délivrance  pouvoit  être 
accompagnée  de  conteftations  Se  de  dif- 
putes,  les  uns  fe  déclarant  pour  un  cri- 
minel, cV  les  autres  pour  un  autre;  elle 
demandoit  des  informations  _,  ou  des 
procédures  que  la  Fête  ne  fouffroit  pas. 
D'ailleurs  on  faifoit  fans  doute  le  pro- 
cès au  criminel  ,  &  on  le  condamnoit 
par  les  formes  ,  afin  que  fon  élargitfe- 
ment  parût  une  véritable  grâce,  comme 


Dl^ERTATION      X]  <G\ 

on  en  ufe  en  qu~  ice, 

où  de  pareils  pr; 

plu  >our  touu 

que  la  1  h 


DISSERTATION      XXXI. 

Luc   XXII.  v.    19.   Hoc   c(l  Cor- 
t  m  eu  m  qh  l    vobis  da- 

•.  Concord.  (  K. 

APrèl   avoir    traire   la    pr,  de 

ichariftie  dans  b  Différai     1 
fur  le  Ch.  m  de  (aim  '  afte 

JirtU  : ( 

obliei  .  >  Se 

ton:  tirutioQ 

L  El  U 

e  l'ordre 
i  ;>0- 

1  I  tire 

1 

Le  doaaé 

À  a  v 


5(^2  Dissertation   XXXI. 

qu'une  figure  pour  une  autre,  cet  ordrg 
n'étoit  nullement  néceflaire ,  &  il  fem- 
ble  que  la  nouvelle  qu'il  avoit  en  vue 
devoit  naturellement  palTer  devant  l'an- 
cienne. 

Jefus-Chrift  prit  du  pain  de  du  vin 
pour  la  matière  de  ce  Sacrement,  com- 
me étant  très-propres  à  marquer  les  vé- 
rités qu'il  contient.  Le  pain  fignifie,  i. 
par  fa  diftinction  d'avec  le  vin  la  répa- 
ration du  Corps  de  Jefus-Chrift  d'avec 
fon  Sang  dans  fa  Paiîion  future,  i.  Par 
la  vertu  qu'il  a  avec  le  vin  de  nourrir 
l'homme ,  il  femble  nous  dire  que  le 
Corps  &  le  Sang  de  Jefus  Chrift  fonc 
l'aliment  de  nos  âmes  pour  la  vie  éter- 
nelle, &  la  refîource  de  nos  corps  con- 
tre la  mort  3'.  Par  leurs  fubftances  com- 
pofées,  Tune  de  plufieurs  grains,  l'au- 
tre de  plufieurs  grappes .,  ils  marquent 
l'étroite  union  que  ce  Sacrement  doit 
opérer  entre  les  Fidèles  par  le  lien  de 
la  charité.  4.  Jefus-Chrift  a  choifi  les 
alimens  qui  nous  font  les  plus  familiers, 
pour  s'accommoder  à  notre  foiblefie  ,  &C 
pour  nous  épargner  l'horreur  naturelle 
que  nous  aurions  à  manger  de  la  chair 
ôc  à  boire  du  fang  fous  leur  propre  ef- 

1>ece.    5.   Enfin   il  choifit  du  pain  fans 
evain  ,  pour  fignifier  la  fincérné  &  la 
vérité  qu'y  doivent  apporter  ceux  qui 


DftS lut  ation    XaX!     ;6} 
participent  à   un   fi  pan  1  m 

11.  11  rendit  grâces  il»  m  Paie 

qu'il  lui  a  •     ' 
de  v  :  are 

k  il  ilomu  la 
ion  au   pain  &  ta    fia,   poilf   y 

e  par  un  i 

nmi  il  bénit 

multipliée 

I 
.n s  un  erre  in 

prie ,  d 

ou 
pour  le  île. 

: 

gnarion,  uc 

iir  Je  l'homme, 
uni 

pui 

.    .  . 
ze 

i 

>rp$  de 

UIC1* 

A 


5 ^4  Dissertation  XXXI. 
nature  que  le  pain  ordinaire ,  &  que  la 
bénédiction  y  avoir  fait  un  changement 
réel  &:  indépendant  de  l'efpnt.  Car  il 
ce  n'eût  éré  qu'un  être  repréientatif,  il 
n'eût  point  été  néceffaire  de  Te  fervir  du 
même  pnin  rompu  en  plufieurs  parties. 
Tous  les  pains  ou  les  morceaux  de  pain 
qui  refroient  fur  la  table  du  louper  pré- 
cédent pouvoient  avoir  la  même  repré- 
fentation.  Si  donc  la  fraction  du  même 
pain  apparent  étoit  nécelfaire  ,  c'elt  une 
conviction  que  ce  pain  apparent  étoit 
d'une  nature  &  d'une  dignité  qui  n'é- 
toit  pas  commune  aux  autres  pains. 

IV.  Après  en  avoir  pris  une  portion 
pour  lui-même,  Ipfe  conviva  &  con- 
yiyïum  _,  ipfe  comedens  &  qui  comedi- 
îur ,  dit  faint  Jérôme,  Ep.  ad  Hedib. 
il  le  donna  à  Tes  Difciples  en  leur  di- 
fant  :  Prene^  &  mange\.  Or  fi  ce  n'eût 
été  qu'un  pain  figuratif  de  fon  Corps  j 
cette  msnducation  d'une  fimple  fleure 
par  celui  qui  en  etoit  la  vente,  auroit 
eu  quelque  chofe  de  peu  férieux  ck  gra- 
ve ;  au  lieu  que  fi  c'étoit  (on  propre 
Corps  fous  une  efpece  étrangère ,  il  re- 
joignoit  la  vérité  à  la  vérité.  A  l'égard 
des  Difciples,  il  n'y  avoit  gueres  moins 
d'incongruité.  Qne  pouvoir  ajouter  la 
manducation  d'un  figne  ,  d'un  corps 
fyrribolique  à  la  polfeiîion  qu'avoieoc 


I  )  |  S  S  E  R  T  A  T  '  ,\i.      | 

du  \  I         Chrifl  ceux  qui 

>yoicm  de  le 

.irs   01 .  u- 

choîeni  de  leoi  s  mains  ,  comm  inc 

]  -         '  us  ,  quod  vidimu  s 

cuiiâ  noftris  ,  qitod  pt 
• 
|  ic  iU  h 

t'en  toutes  ces  maniei 

l'en  lifani  fa  parole  ai  m  Af- 

cenhor. 

mai  iu  Patch  \\  qui  1  (cn« 

toir ,  rien  n'étoii  \  de 

lui  lui  .     ;ns. 

Fie  re  ,  I  A  .'lus 

i  \  me 

d  «t  ,  plus  nourri 

(impie  p.im  -, 
ardeni 

du 

fuii  !  vm ,  -  b  dam 

t  r  id  i 

fui  lui  ar- 

me. 
\  .  N 

|  (    luilr   dans 

1  i  i  de 

h 
1       . 

oui  uu 


$£<>      Dissertation  XXXI. 

lubftantif  qui  fe  réfout  par  h&c  res,  cette 
chofey  ou  ceci  ;  &c  enfuite  il  a  fallu  dif- 
purer  avec  eux  de  ce  qu'on  devoit  en- 
tendre par  cette  chofe.  Les  Docteurs  Ca- 
tholiques font  demeures  dans  cette  dé- 
signation vaçue  &c  indéterminée  d'une 
fubftance  commune  au  pain  &"  au  corps. 
Les  Miniftres  au  contraire  l'ont  déter- 
minée à  fignifier ,  les  uns  le  pain  que 
Jefus-Chrift  tenoit  entre  fes  mains  _,  les 
autres  toute  l'action  &c  route  la  cérémo- 
nie :  Et  fur  cela  ils  entalfenr  des  argu- 
mens  fans  nombre  &  fans  fin  contre  la 
préfence  réelle,  toujours  fondés  fur  ce 
que  Hoc  fe  prend  pour  un  fubftanrif. 

Cependant  il  eft  étrange  qu'ils  ne  s'ap- 
perçoivenr  jamais  que  tous  les  raifonne- 
inens  qu'ils  font  fur  ces  paroles  _,  Hoc 
ejl  corpus  meum,  n'ont  aucun  lieu  dans 
celles  -  ci ,  Hic  eft  fanguis  meus ,  qui 
néanmoins  dans  le  Grec  &  par  confé- 
quent  dans  le  Latin  ont  la  même  conf- 
trudhon  8c  la  même  analogie  :  leur 
Grammaire  les  a  abandonnés  en  ce 
point  capital ,  eux ,  dis-  je ,  les  meilleurs 
Grammairiens  du  monde  j  ou  plutôt  ils 
l'ont  abandonnée  volontairement  en 
cette  occafion  ,  parce  qu'ils  ont  bien  vu 
que  l'explication  des  Docteurs  Catholi- 
ques qui  prenoienr  comme  eux  Hoc  pour 
un  pronom  fubiianuf  j  leur  ouvriroiï 


Dissertation  XXXI.   <  T7 

un  plus  1  champ  pour  li  difpute. 

tombei  *.ip 

tour  :ire 

en  c.  nt  par  i  .  ms 

?o    3  û  u  x  ust,    7  *  ;  s   i    r  t  7  3    *.i'  p*  uov9 

le  pi  ;*t>c(Ï  un  ad; 

tir  1 

■ 
en  nomt 
cie  â  . 

K76(,    «     tt'Jin       I  70      «U707- 

comme  lave 
ginal ,  il  eft  «.1 

non  ,  //  j  un 

pro:, 

Quii  ne 

anal  ns 

^  /i'.  ]UC 

T«  7 

; 

-77  ^  Ao*.  n 

;  !    il 

: 

( 

Jliû  j  hir.  5. 


$68   Dissertation    XXXI. 

Il  y  en  a  mille  exemples  dans  l'Ecri- 
ture. Hic  ejl  panls  de  cœlo  defcendens  , 
h<zc  ejl  vita  dterna ,  Hic  ejl  h&res  j  hic 
ejl  omnium  Dominus.  Dans  tous  ces 
paffages  l'ancien  Auteur  n'a  jamais  tra- 
duit le  pronom  ktc?  par  le  fubftantif 
neutre  hoc,  ceci  :  mais  par  le  pronom 
adjectif  dans  le  même  genre  que  le  nom 
auquel  il  eft  joint.  Comment  donc  n'au- 
roit-il  pas  rendu,  félon  la  même  ana- 
logie, cette  propoilrion  Hoc  efi  Corpus 
meum  f  h  au  lieu  de  Corps  ,  Jelus- 
Chrift  eut  employé  celui  de  chair,  com- 
me il  le  fait  fouvent,  en  faint  Jean  Ch. 
VI.  &:  qu'il  eût  dit  dans  les  trois  autres 
Evangéliftes  a?vm  <£<ri  »  <rctp%.  Peut- 
on  feulement  s'imaginer  que  l'Interprè- 
te eût  rendu  cet  endroit  par  ce  folécif- 
me ,  Hoc  ejl  caro  mea  ?  Si  quelqu'un 
étoit  tenté  de  lui  attribuer  une  Ci  étran- 
ge verfion  ,  il  n'auroit  qu'à  fe  fouvenir 
qu'il  devoit  donc  mettre  auffi  Hoc  ejl 
Sanguis  meus ,  ce  qu'il  n'a  pas  fair. 

Ces  propositions  étant  réciproques, 
ont  cette  propriété  de  n'attribuer  au  fu- 
jet  que  le  fujet  même,  qui  en  cette  oc- 
casion tient  lieu  d'attribut.  Il  en  efl:  de 
même,  que  lorfque  Jefus-Chnft:  mar- 
chant fur  les  eaux  ,  &  après  fa  Réfurrec- 
tion  j  dit  à  fes  Difciples ,  qui  le  pre- 
noient  pour  un  fantôme  ou  pour  un 


Df  S  S 1  *  T  A  T 10  N     XXXI      5  G) 

cfpnt  :  /  m  :  C'cfl  m  ne , 

nonftratÎTC  rV  récipro- 
donc  le  1  9  attribue 

ne. 
Or  eil  cela  il  n*l  int  de  r.rutolo- 

.1  dire  . 

,  conr 

.  eft  plus  obfi  ,  «5c 

at ,  il  ci:  plasc 
a'il  pai  :  fqa*on 

firion  :  ^.ir  hoc  cjl  t  meum  doit  fe 

cette  d 

meum.    II  gu:s    mou  , 

ejî  meus.   B  rro  mca ,  h*c 

ces  proposions 
rifl  foppofe  potti  lujet  que  ce 
qu'il  tient  c\\  Ml  ,   de   H  chair  & 

du  f.ir.  pour  attribut  que 

ce  corps  ou  ce  î  m  ,  6c  que 

cette  chair  eft  U  *  I    i  ;^s  > 

cette  cluir  &:  ce  (kng  font  quelque  chofe 
de  pi  non  corps ,  ma  chair 

.luire  un  exemple  , 
clair,   il   en    efl  B  la 

ou- 

ur  , 

ienc  les 

uns  - 

i  île  la 
ce    une  de 


|70   Dissertation    XXXÏ. 

graine  de  coriandre  ?  Moïfe  leur  répon- 
dit :  IJle  efi panis  quem  dédit  vobis  Do- 
minus  ad  vefcendum  :  C'ejl  ici  le  vain 
que  le  Seigneur  vous  donne  à  manger. 
Cela  fe  doit  réfoudre  j  hic  panis  ejî  is 
quem  dédit  vobis  Dominus,  Propor- 
tion qui  fuppofe  pour  (on  fujec  que  ce 
qu'ils  voyoient  éroit  du  pain  ,  &  qui 
énonce  pour  (on  attribut  qu'il  étoit  don- 
né aux  Juifs  pour  leur  fervir  de  nour- 
riture. Ce  pain  ejî  celui  que  le  Seigneur 
vous  donne, 

Ain{î  lorfque  les  Apôtres  fe  deman- 
doient  les  uns  aux  autres ,  ou  qu'ils  dou- 
toient  chacun  en  foi-même  ce  que  c'é- 
toit  que  ce  que  Jefus-Chrift  tenoit  entre 
{es  mains,  ce  qu'il  avoit  béni  après  l'a- 
ction de  grâces ,  ce  qu'il  avoit  rompu 
en  autant  de  parties  qu'ils  étoient  de 
perfonnes ,  &  ce  qu'il  leur  préfentoit  à 
manger  comme  quelque  chofe  de  fingu- 
lier  :  Quid  efi  hoc  ?  Eft  -  ce  du  pain 
comme  il  le  paroît  ou  quelque  autre 
chofe,  Jefus-Chrift  leur  répondit  :  Hoc 
efi  corpus  meum  :  C'ejl  mon  propre  corps. 
Cette  réponfe  réfute  déjà  l'apparence  ÔC 
la  fépare  d'avec  la  vérité.  Elle  fuppofe 
de  plus  que  c'eft  un  corps  humain  indi- 
viduel ,  de  elle  attribue  ce  corps  humain 
à  Jefus-  Chrift.  Elle  fait  enfin  le  même 
{qiis  que  fi  Jefus-Chrift  fe  montrant  & 


I)  I  S   <   P  R   T   A   T   I    ON    JCXXl. 

fe  touchant  loi  même  pre  ef- 

pece  ,  eût  dit    aux  Dii 
mor.  que  je  touche  ,  hoc  cj: 

:  ce  que  Cari 
pris  pour  ni  de   i  les.  U 

an  *  >llement, 

ne  ilu  Ion 

Coi 

fen  nier  qu'il  ter,  i 

cor.  .  main  ex  qu'il  le  le. 


toit  a  mai. 


ions  démonf- 

:    leur   iujet  que 
I  un  vrai  v  ;r  ,  de 

nfuit    *. 
ou', 
de  Jefus  C  luiit  ii  [œ 

11e- 
t    le    I  le  Jcfus- 

I 

qui  ci 
nmfl  le 
• 

cv  i  u'il    Inint    le   p 

in  ,  y 

pa- 
role I    les  p  on 

,  qu'il  avoit  rompu  ffpt 

pout  le  diftnbuei    - 


572  Dissertation  XXXï. 
Corps  étoit  donc  déjà  produit  avant 
qu'il  le  rompît  en  plufieurs  parties  :  Se 
par  conféquent  il  fut  produit  par  la  bé- 
nédiction qui  précéda  la  fraction.  Jefus- 
Chrift  voulut  montrer  en  cette  confé- 
cration  qu'il  ne  dépendoit  point  des  for- 
mes; quoique  i'Eglife ,  inftruite  par  la 
tradition  des  Apôtres ,  ait  appris  à  fes 
Ivliniftres  d'attacher  la  confécration  aux 
paroles.  Je  fais  auiîi,  comme  je  l'ai  dit, 
que  pluiîeurs  Théologiens  Catholi- 
ques prennent  Hoc  pour  un  fubftantif , 
qui  lignifie  cette  chofe  indéterminément. 
Mais  en  cela  ils  ne  fuivent  point  la 
Grammaire  :  Se  comme  cette  analogie 
n'a  point  de  lieu  dans  la  confécration 
du  Calice ,  Se  que  d'ailleurs  c'eft  la  four- 
ce  inépuifable  6qs  chicanneries  éternel- 
les des  Miniftres ,  rien  n'empêche  que 
nous  ne  fuivions  l'expofition  des  autres , 
qui  étant  fondée  fur  les  principes  de  la 
Grammaire,  les  retranche  dès  la  racine. 
Car  que  s'enfuit-il  de  cette  expofîtion  ? 
C'eft  que  cette  foule  de  fens  bizarres  Se 
forcés  que  les  Proteftans  ont  donnés  à 
cette  proposition  hoc  ejt  corpus  meum  j 
s'évanouit  Se  fe  diîfipe  d'elle  -  même. 
On  ne  la  traduira  plus  avec  Luther  :  Ce 
pain  contient  mon  Corps  ;  avec  Bucer, 
cette  action ,  cette  cérémonie  repréfente 
mon  Cor/ttjavecZuingle,  cepainjfïgni- 


I);     SERT  ATI  [XXI. 

I 

77 mé  r         v. 

m  cft  en  figure  n 

C  JTXC 

eff: i  pré  fente  mon  c  i . 

a  qu'i  apphq 

tion 

l'abfurdité    palpabl 

iét- 

les  pu  .2  Jefu    I 

n  i  1 1 
la 

deux  proposition*  ,   ils 
d'une  ma 

:  coiiv 

s  du   [ 

qu'ils  prennent    ici  pour  un  fui 
ut   l'ul 

.  heu  q 

hoc 
i  [Ht  l'attribue  t 

(  mr 

[UC   la 


574  Dissertation  XXXI. 
d'eux-mêmes  par  terre.  Ils  n'allégueront 
plus  ces  proportions  métaphoriques  :  La 
Circoncifwn  ejl  P  Alliance  ;  l'Agneau 
Pafchal  ejl  le  pcijfage  ;  la  pierre  étoit 
Chrijl.  Les  fept  vaches  font  fept  années  , 
lafemence  ejl  la  parole  de  Dieu.  Je  fuis 
la  porte  _,  je  fuis  la  vraie  vigne.  Tout 
cela  feroitfauiTement  allégué,  pour  prou- 
ver que  Hoc  ejl  corpus  meum  eft  auflî 
métaphorique  j  parce  que  cette  dernière 
eft  réciproque  ,  ce  que  ne  font  pas  les 
autres ,  dont  le  fujet  ôc  i'attribur,  bien 
loin  d'être  la  même  chofe,  font  telle- 
ment incompatibles  entr'eux ,  qu'ils  ne 
peuvent  être  attribués  l'un  à  l'autre  que 
par  métaphore.  Car  qui  peut  dire  qu'un 
tel  corps  &  un  tel  fang  ne  peuvent  être 
le  Corps  &  le  Sang  de  Jefus-Chrift  que 
par  figure  \  c'eft  la  même  chofe  que  (1 
on  prétendoit  que  Jefus-Chrift  parloir 
par  figure  <k  métaphore,  lorfqu'il  difoic 
aux  Apôtres ,  qui  le  prenoient  tantôt 
pour  un  fantôme ,  &  tantôt  pour  un 
efprit  :  C'eji  moi  -  même  ,  ne  craigne-^ 
point  :  Ego  fum  :  Ego  ipfe  fum. 

Tout  cela  eft  fi  évident ,  que  Pafor  ha- 
bile Grammairien  a  reconnu  ,  in  voce 
rfuToz/pag.  cji.  que  dans  t«to  art  to 
ç-u'fj.et  jaov  ,  tkto  n'eft  pas  feulement 
démonftratif,  mais  encore  un  relatif  qui 
doit  s'accorder,  en  nombre  &  en  gciuç 


i 


Dlf  SIHTÀTÎO  r      57J 

ave           m  auquel  ilferapp<  m- 

i             le  voir  pi  ?o- 

t\\  or- 
re  .i                               un  peu  plus  h. 

«5c  i  im- 

Sur  quoi  il  it  cette 

objection   fans  réplique  â  que  (î  7«"t« 

le  rappor:  au- 
roit                            ifcûlin  . 

lilS  il  if , 

en  difant  que  c'eft  un 
genre,  an. 

des  .  du  N 

ent ,   donc    il   s  i  ::rc 

.1  \'i  Ufltf 

ÀûtaTOLTU       Kl        i    C  Six      T&'JJA 

Six    t*7« 

enc 

ih  ,  fui 

.  ni   <f  liTK  x<   &    il   IC   tr.l- 

'crmoi. 

.  -.    11   a  bien  vu 
. 
il  eût  etc 
d'atuibuerauidifcouti  saillie  inutile*» 


57^  Dissertation  XXXÏ. 
d'attirer  la  colère  de  Dieu  fur  les  inn- 
delles ,  ôc  non  aux  fornications  &  aux 
autres  crimes  que  faint  Paul  avoit  mar- 
qués dans  le  verfet  précédent.  Pafor 
a  donc  tronqué  le  paffage ,  afin  que 
«T/ct  TdvTct ,  propter  h&c  ,  pût  être  rap- 
porté ZKivoTi  k oyoïçinanibusfermonibus. 
Mais  pour  lui  rendre  inutile  cet  arti- 
fice de  mauvaile  foi ,  il  n'y  a  qu'à  rap- 
porter tout  entiers  les  verfers  5.  &  6. 
Sache^  que  nul  fornicateur ,  nul  impu- 
dique y  nul  avare  ,  ce  qui  ejl  une  idolâ- 
trie _,  ne  fera  héritier  du  Royaume  de  Je~ 
fus-Chrift  &  de  Dieu.  Que  perfonne  ne 
yous  féduife  par  de  vains  difcours  \  car 
ç  ejl  pour  ces  chofes-là  mêmes  £1  cl  recv  ta 
que  la  colère  de  Dieu  tombe  fur  les  hom- 
mes rebelles  à  la  vérité.  Qui  eft  le  petit 
Ecolier  qui  ne  voie  que  ces  chofes  qui 
ont  fait  tomber  la  colère  de  Dieu  fur  les 
infidelles  ,  ne  font  pas  ces  vains  dif- 
cours ,  dont  ils  ne  font  pas  coupables , 
3c  que  l'Apôtre  ne  leur  attribue  pas , 
mais  ces  fornications,  ces  impudicités, 
ces  avarices  ,  ces  idolâtries  qu'ils  ont 
commifes  ?  Cet  exemple  eft  donc  fort 
mal  propre  à  établir  l'irrégularité  de 
genre  que  Pafor  trouve  dans  ces  paroles 
hoc  eft  corpus  meum.  Mais  on  ne  doit 
plus  s'étonner  de  rien,  après  que  dans 
cette  proportion  de  faint  Marc  t«Vo' 


Dm  ht  atiow  XXxl     jTf 

r  t«  *r p«  p«v,  il  rapp 

pas  à  */V*  qui   eft  fcnt,   mais  à 

twoTiipiot  qui  n'cft  point 
&  qui  n  que  d..  I  uc. 

redonner  i 

pour  faire  ports  de  l'ad- 

jectif ,  qui  cit  d.ms  on  Auteur,  aufub- 
iiantir ,  qui  fi 

Le  II.  .:n 

folccifme  dans  1 .  . •  ,  e!t  ce  que  die 

Jefiis-(.hrirt  e  « i  «'*>.«<  i;e^i'ctr 

/xiror    <ti  '.9«r  ,  pour   <T«J  e^/irr  ,  ilil-il  , 

parce  qu'il  le  rapporte  à  t  ;«//*. 

..  Auîli  il  n'y  a  q 
que  à  il  cukrzt  i. 
a  *  comme  il  prétend  ,  nuis  i  ?£t#f  , 

la  m,  n'ifi  dejuyer  : 

ette  c\ 
danslc  Nouveau!  ettarnen:  um 

•th. 
ii./  «m    c(l 

ut  in  cum  i 

L  »   :p. 

VI    l  afin  rien  ne  prot  :c  plus 

d'évidence  h  Ile  que 

fuit  les  paroles     hoc  tfl 

:tc  ,    félon  î  nal , 

lib 


578    Dissertation    XXXI. 

quod  pro  vobis  frangitur  j  &  faint  Luc, 
quod  pro  vobis  datur  :  Jefus-Chrift  a 
die  l'un  ÔC  l'autre  ,  parce  qu'il  a  faic 
l'un  &  l'autre.  Après  la  bénédiction  il 
rompit  ce  qu'il  avoit  béni  ,  &c  après  la 
fraction  il  le  donna  à  (es  Difciples  :  Le 
premier  a  été  exprimé  par  faint  Paul  , 
8c  le  fécond  par  faint  Luc  fans  aucune 
contradiction.  Je  dis  qu'il  n'y  a  rien  de 
plus  exprès  pour  la  préfence  réelle  :  car 
puifque  Jefus-Chrift  déclare  que  ce  qu'il 
venoit  de  rompre  étoit  fon  Corps  :  Quod 
pro  vobis  frangitur  ,  il  eft  vilible  que 
la  fraction  ne  tombe  pas  fur  le  pain  , 
mais  fur  le  Corps.  Or  il  diftribua  aux 
Apôtres  ce  qu'il  venoit  de  rompre;  c'eft 
donc  fon  Corps  Ôc  non  du  pain  qu'il 
leur  diftribua.  Si  on  agifïoit  de  bonne 
foi  ,  cette  raifon  perfuaderoit  tous  les 
efprits  raifonnables.  On  l'a  touchée  ail- 
leurs en  peu  de  mots  ,  mais  il  eft  bon 
de  la  remettre  ici  en  état  de  convaincre 
les  plus  incrédules. 

Les  Miniftresn'ofent  pas  nier  la  fra- 
ction du  Corps  contre  des  paroles  fi  clai- 
res ;  mais  ils  la  lui  attribuent  à  la  Croix 
Ôc  non  pas  dans  la  Cène,  parce  qu'il  fut 
attaché  à  la  Croix  avec  des  clous  par  les 
mains  &:  par  les  pieds  ,  8c  que  fon  côté 
fut  ouvert  par  un  coup  de  lance. 

Mais  comment  n'onc-ils  pas  de  honre^ 


DlSSERTATlo  \  1 . 

non-feulement  d'ajouté 

ils  OTOJ  i 

bien  davantage  ,  d 
de  l'aci  I 

allure  p  i 

lat-Chriftne  tue  poiai  ron 

Afin  dont  ,  ci i r  il ,  çtti  (es  i 

mw.  ( 

r<MJ  Pi  lace  de  Uur  f. 
rompre  les  jambes  &  de   les   ôiet 
I  i    romvir<. 

.    | 

lui. 
Enfin 

a  mon  .  rent 

:[  les  jambes  ,  mais  un  des  Ji  Idats  lui 
ouvrit  le   i 
/ 

i 
point    les  os   de 

après  cela  les  Minifti  nt-ilsp 

i  piller! 
ntre  11 
Croix  le  (  I 

cr.i  ini  qu'ils  n'avent   traite 

<      :  :  loni  ils 

ont  rompu   par   leur  f<  l'unité  & 

l'i: 

lemancîera  p<.  tie  quel- 

le  <  ;x>ur  eux 

.  . .    raôu  L..c  i 

b. 


580  Dissertation  XXXÏ. 
y  va  de  tout  pour  eux.  Ils  ont  voulu 
éviter  l'absurdité  infupportable  ,  qui  , 
félon  leur  Commentaire  ,  s'enfuivroit 
de  la  fraction  de  la  Cène  ,  qui  eft  que 
le  Corps  de  Jefus-Chrift  y  étoit  rompu, 
parce  qu'on  y  rompoit  du  pain  qu'on 
prenoit  pour  fa  figure,  à  peu  près  com- 
me Ci  en  rompant  une  porte ,  on  difoit 
qu'on  rompt  le  Corps  de  Jefus-Chrift, 
parce  qu'il  a  dit .,  Je  fuis  la  porte.  Mais 
quoiqu'ils  faftent ,  ils  ne  peuvent  éviter 
la  fraction  du  Corps  de  Jefus-Chrift 
dans  la  Cène  ,  qui  eft  (1  distinctement 
marquée  par  trois  Evangéliftes  &  par 
faint  Paul.  Voici  les  paroles  du  dernier 
félon  l'Original  :  Je/us  prit  du  pain  ,  & 
ayant  rendu  grâces  ,  il  le  rompit  :  Pre- 
nez ,  leur  dit- il  _,  &  mange^  ,  ceci  ejl 
mon  Corps  ,  qui  efl  rompu  pour  vous. 
Qui  ne  voit  que  ce  terme ,  ejl  rompu  ,  fe 
rapporte  à  ce  qu'il  venoit  de  dire  un 
peu  plus  bas  ,  il  le  rompit  ?  Que  s'il 
eut  parlé  de  la  fraction  prétendue  qui 
fe  devoit  faire  à  la  Croix  ,  Jefus-Chrift 
l'auroit  exprimée  par  le  futur  ,  qui  fera 
rompu  pour  vous.  Mais  ce  futur  même 
n'eût  point  été  conforme  à  la  vérité  ; 
puifqu'attacher  un  corps  par  les  pieds 
&  par  les  mains  avec  des  clous  ,  cV  y 
faire  une  ouverture  entre  deux  cotes  , 
n'eft  point  ce  qu'on  appelle  en  François, 


DltS  lit TÂTIO  \'ï.       581 

ni  en  aucu 

s  ,  bnjcr  Us  os  1  ys  ,  félon  la 

tomrnr. 

ne  .ui  moi 
fâtnt  Paul  dans  un  autre  endr 
par 
24.   Lt  que  nous  rompons  ,  ritj 

Je* 

, 

•  .  ? 

comme  nous  U  // 

é/?  \  Croix  i 

■ 

Tt  a  dit   :    l'ous  ne 
■    1 
fouffer: 

.    I. 
mer  qu'on  . 
• 

chaq  M 

que  U  le  voile 

le. 
\  1 1 .  1 1  i  i  c  i  p  1  u 

Mi- 


5 Si  Dissertation  XXXI. 
niftres  comme  étant  femblables  à  celui 
dont  il  s'agit  ,  Hoc  ejl  corpus  meum  ; 
Se  dans  lefquels  le  verbe  fubftantif  ejl 
fe  prend  vifiblement  pour  jignifier  ou 
repréfenter  ;  corn  m  e ,  Je  fuis  la  porte  j  La 
fémence  ejl  la  parole  de  Dieu» 

Lorfqu'ils  font  cette  objection  ,  ils 
font  voir  qu'ils  n'ont  jamais  bien  com- 
pris la  nature  des  proportions  figurées 
ou  métaphoriques.  Il  y  en  a  de  deux 
fortes.  La  première  eft  de  celles  où  la 
ligure  eft  attribuée  à  la  vérité  ,  comme  , 
Je  fuis  le  pain  vivant.  La  i.  eft  de  celles 
où  la  vérité  eft  attribuée  à  la  figure  , 
comme  ,  La  fémence  ejl  la  parole  de 
.Dieu,  Les  Moiffonnenrs  font  les  An- 
ges, La  pierre  étoit  Chrijl.  L*  Agneau, 
ejl  la  Phafe  ou  le  paffage  du  Seigneur. 
La  Circoncifon  ejl  l'alliance.  Les  fept 
bxufs  font  fept  années.  11  y  a  cette  diffé- 
rence entre  ces  deux  fortes  de  propor- 
tions ,  que  dans  la  première  où  la  figu- 
re eft  attribuée  a  la  vérité  _,  le  verbe  fub- 
ftantif fe  prend  pour  rejfembler  ,  avoir 
quelque  chofz  de  femblable.  Jefus-Chrijl 
ejl  l'Agneau  de  Dieu>  veut  dire  Jefus- 
Chrift  eft  femblable  à  un  Agneau  3  &c. 
an  lieu  que  dans  les  fécondes  où  la  vérité 
eft  attribuée  à  la  figure  ,  le  Verbe  fub- 
ftantif fe  prend  pour  être  jigne  j  figni- 
fier  ,  repréfenter  ;  la  pierre  étoit  Chrijl , 


Dissertation'    SOOtL 

veut  dire  ,   /  Jejus- 

Cknjl. 

Sous   1 1  •  deux  c  î  .1 1  Te  s  de 

r-il   maintenant  r.inger 

[ueftton  ,    ;  pus 

■ 

1  .1  |  '  :  . 

;lt  n'eft 

pas  la  >:t    une 

ride  in<  de  h  réfoadre  en 

termes  :  Ce  .   ou  ejl 

'  ifiil  Luit  que 
les  Minières  retranchent  du  nombre  de 
leurs  r        ■  ou  la  .  cft 

attribuée  a  la  vente  op~ 

pofcnr  fans  ce  L-  ,  comme  ce 

fuir.  :e.  Je  J  v.    Je- 

le  lion 
de  lu  Tribu  à      '        .    Il   fautt   d  HK    i 

,  //,  .  e/0  d  r  |  Ions  la  fé- 

conde c l.i (le  ,  où  li  • 
à  la  figWt  ^  comme  ,      /  'pierre 
Ch'      .     ■:  l'expliquer  aii  Ce 

^wr  je  tiens  cfl  le  de 

1 

ces  n 
lieu  q '.: 

it   cn- 
run  de  ihn 

i  ,11  y  a  une  grau 

Bb   iv 


584      Dissertation  XXXI. 

entre  une  pierre  &  Jefus-Chrift  :  on  a 
donc  pu  dire  métaphoriquement  ,  La 
pierre  étoit  Chriji.  Mais  cette  figure  n'a 
aucun  lieu  dans  les  proportions  récipro- 
ques &  démonftratives  ,  où  le  fujet  ÔC 
l'attribut  font  la  même  chofe.  Ce  n'efl: 
pas  une  métaphore  que  de  dire  fimple- 
ment  :  C'ejl  ici  le  pain  que  Dieu  vous 
donne  à  manger.  C'ejï  ici  mon  Sang  que 
je  vous  donne  à  boire  ;  ni  par  confé- 
q,uent  celle  dont  nous  parlons  :  Ceft  ici 
mon  Corps  que  je  romps  pour  vous.  La 
raifon  de  celaeft: ,  que  rien  ne  s'attribue 
a  foi-même  par  métaphore,  mais  dans 
un  icns  propre  de  littéral.  Cette  régie 
fejuftifle  dans  toutes  les  proportions 
figurées.,  &c  même  dans  celle  où  la  fi- 
gure efl:  attribuée  à  la  vérité. 

2.  Pour  détruire  fans  reflburce  cette 
««explication  ,  Ce  pain  figure  ou  repréfente 
mon  Corps  j  que  les  Miniftres  s'obftinent 
de  donner  à  Hoc  eji  Corpus  meum ,  cotv- 
tre  l'analogie  des  autres  proportions  du 
même  genre  ;  il  faut  établir  cette  fé- 
conde différence  ,  que  les  proportions 
métaphoriques  du  premier  genre  ,  c'eft- 
à-dire  ,  qui  attribuent  la  figure  à  la  vé- 
rité ,  ou  font  expliquées  par  ce  qui  fuit 
immédiatement  ,  ou  bien  on  en  laiiïe 
l'explication  à  chercher  au  Lecteur  ju- 
dicieux  :   Je  fuis  la  porte  ,  eft  expliqué 


Dissertation  XXXI.      585 
b  fuite  :  Si  que/qu'un  entre  par  moi 9 
il  Jl  Je  fûts  la  vraie  vigne  , 

mot:  cjl  le  vigneron  ,  trouvent 

explication  dans  ce  qui  fou  ;  h 

ihera  toutes  les  hanches  qui  ne  portent 

:t  de  fruit  en  me:  ;  ex  plus  bas   :    Je 

la.  vigne  >  &  :es  les  branches, 

11  v  en  I  d'au  .renr    (ans 

Aciiion  y  parce  qu'elles  font  aifées  i 

1 
Dieu  par  l'immolation  qui    l'en  doic 
us  fon  te 

Mais  il  1  le  même  des  pro- 

pofitions  du  fécond  :ri- 

QC  le  nom   de  la    vc 
Elles  font  tOOJOnrs  tn  contraire    l'es 

\encc  tfi  i  '                  :mp 

ejl  le  m  les 
es  y   expl 

La     L  eft   le  figne  de 

fi  le  pajjû 

s  mtnao- 

i'immola- 
•' 
Ch  -rtc 

Mébreai  ,  & 

.m  y   il   Ci 

ainh 

Si  d  (  une 

.    v 


i' 


586  Dissertation  XXXÎ. 
proportion  figurée  ,  où  la  vérité  eft  at- 
tribuée à  la  figure  ,  cJeft-à-dire  le  corps 
au  pain  ,  quelle  eft  cette  parabole  pré- 
cédente dont  elle  eft  l'explication  r  Si 
Jefus-Chrift  ayant  pris  du  pain  eût  dit 
à  fes  Difcipies  :  Voyez-vous  ce  pain  qui 
a  été  femé  dans  la  terre  j  battu  dans  la 
grange  ,  moulu  &:  réduit  en  farine ,  pétri 
par  la  main  des  Boulangers  ,  8c  cuit 
dans  le  four,  ceft-là  mon  Corps  ,  ou  ce 
pain  repréfente  mon  Corps  ,  qui  doit  en 
fa  manière  recevoir  toutes  les  façons  du 
pain  :  Je  n'aurois  rien  à  dire  pour  em- 
pêcher que  cette  proportion  ne  fût  mé- 
raphorique  ,  &  que  la  vérité  n'y  fût  at- 
tribuée à  la  figure.  Mais  il  n'y  a  ici  rien 
de  femblable.  Jefus-Chrift  prend  du 
pain  ,  &  après  l'avoir  béni,  il  déclare 
que  c'eft  fon  Corps.  C'eft  donc  un  chan- 
gement d'une  fubftance  dans  une  autre  , 
&  non  l'explication  d'une  Parabole. 


Dissertait  XXII.     587 


1)1  RTATIO  N     X  XX  I  I. 

Matth.   X\\  [.   v.    2S.    Hic 

enim  :is  novi    1 

■;;: ,   qui  pro  mal  ils  cffundc- 
in  remijUoriem  lorum. 

Concord.  1 

Jintinuerri  pir  la  ce  :ion  du 

1  qui 
la  pré- 
nçé    la 

i  ini  1 1  un. 

I.    '  \rijt prit  -vc  U  ( 

a  prêt  fouper.    Le 

îftic  fui 

•ûre 
1 
rite  .il.  ' 

ne  it   que  du  vin  qui 

ir ,  en  :  il 

du  d  b  <ii<  de    li  ^Ue 

qu'il  .1 

I 
ir  cou 
gui 

IL   //  rendu  grdca  Perc  | 

15  b 


588  Dissertation  XXXII. 
qui  enferme  auflî  la  bénédi6tion.  II  y 
produifît  donc  un  changement  réel.  Ce 
ne  fut  pas  dans  la  quantité  par  la  mul- 
tiplication ,  ni  dans  la  qualité  par  l'a- 
mélioration du  goût.  Ce  fut  donc  dans 
la  fubftance  par  une  vraie  converfion  de 
la  fubftance  du  vin  en  celle  de  fon  Sang. 
Si  on  met  le  changement  dans  la  ligni- 
fication ,  c'eft  un  changement  imagi- 
naire &c  arbitraire,  qui  dépend  du  bon 
plaidr  de  l'homme  ,  &  qui  ne  demande 
pas  une  puiflance  infinie. 

III.  Buve^-en  tous  ,  car  c'eft  ici 
mon  Sang  j  hic  eft  enim  fanguis  meus.  Il 
paroît  claitement  ,  comme  je  l'ai  die 
dans  la  Di(Tertation  précédente,  que  Hic 
eft  l'adjectif  de  Sanguis  ;  ce  qui  fait  cet- 
te proportion  réciproque,  hic  fanguis 
eft  fanguis  meus  :  Cefangeft  mon  pro- 
pre Sang  :  &  que  par  conféquent  Hoc 
eft  aufli  Tadjeàif  de  Corpus  :  parce  que 
la  même  conftrudHon  fe  trouvant  dans 
les  deux  proportions  ,  fi  le  pronom  eft 
fubftanrif  dans  l'une  ,  il  ne  peut  pas  être 
adjectif  dans  l'autre. 

On  n'en  peut  mieux  juger  que  par  les 
paroles  de  Moïfe ,  d'où  celles  de  Jefus- 
Chrift  ont  été  empruntées.  Ce  Prophète 
établiftant  l'ancienne  alliance  de  Dieu 
avec  les  Juifs  prit  du  fang  dans  une 
coupe  j  &  en  les  arrofant ,  il  leur  dit  : 


l)l  Ifl  JLTATtOM  XXXII.      jtf? 

1  ici  le  fang  de  l'alliance  c.      Dieu  M 

faite  avec  vous.  11  eft  viiiblc  «que  cela  fe 

doit  tcloudte  par  ces  paroles   :    Ce  / 

ejl  le  jang  de  l'alliance    ,     6c,     Un    y 

luppole  que  le  (angen  eft  le  fujec  ,  éc 
on  affirme  que  c'efl  le  ;         !  l'alliai 

11  Faut  donc  rcioudte  en  i  >rte 

la  propolîuon  de  J<         Chrifl      H.,  cft 

^uis  rr.c  I  ejlamcnti.  Ce  fan g  cft 

monpropn  ,Jur  lequel  je  Jonde  la. 

nou\  icc, 

IV .  Un  peur  encorerirer  decetteallu- 
fionauxparo  iié ,  un  argument 

:.i  dern  nce  pour  1  :kc 

le.    Le  (ang   du    vieux    I  (  .  nr  , 

dont  Moile  atrola  11   peuple  un 

\  .  A  plus  fb«C  raifon 

le  fane  de  la  nouvelle  alliance  ,    d 

1  I  :oic  la i  (es 

Dii  pas  un  fang  iymholicjue 

ou  figurât  il 
d'une   vîâime  rcelie.   (le 

du  vin  qui  figure  du  i  ai 

!   [     mê- 
me lu  a  la  y 

■ 
ne.  in  Qui 

.au  .i  la  (  JOUI  ,    •• 

lefus-Çipin  :  c 


59^      DlSSERTÀTTON     XXXI. 

vrai  fang  qu'il  donne  à  boire  dans  la 
Cène  ,  &  non  pas  du  vin. 

VI.  LaConfécration  du  Calice,  félon 
faine  Luc  ,  ne  marque  pas  feulement  la 
préfence  réelle  ,  elle  démontre  encore 
le  facriflce  dans  l'action  de  la  Cène  : 
mais  il  faut  auparavant  remarquer  ,  que 
félon  les  Evangéliftes ,  elle  fe  lit  en  deux 
manières.  Saint  Matthieu  &  faint  Marc 
la  conçoivent  ainii  :  Hic  efl  fan  guis 
meus  novi  Tejlamenti  ,  qui  pro  multis 
effunditur.  Cejl  ici  mon  fang  ,  le  fang 
de  la  nouvelle  alliance  ,  qui  efl  répandu 
pour  plufîeurs.  Saint  Matthieu  feul 
ajoute  :  In  remiffionem  peccatorum  ,  en 
la  remiffion  des  péchés  :  ni  l'un  ni  l'au- 
tre ne  font  aucune  mention  du  Calice. 

Mais  faint  Paul  &  fon  Evangélifte 
fàint  Luc  l'ont  écrite  en  ces  termes  : 
Hic  efl  Calix  novum  Tejlamentum  in 
meo  fanguine  :  Ce  Calice  efl,  la  nouvelle 
Alliance  en  mon  Sang.  Saint  Luc  ajoute 
feul:  Qui  pro  v  obis  ejfunditur  :  Lequel 
Calice  efl  répandu  pour  vous.  Il  ne  fe 
fait  ici  aucune  mention,  de  la  rémillion 
des  péchés.  Ainfi  ces  deux  confécrations 
différent  entr'elles ,  en  ce  que  la  féconde 
fait  mention  du  Calice  dont  la  première 
ne  parle  point:  &  que  la  première  étend 
*  plufîeurs ,  pour  la  rémiiîîon  des  pé- 
chés, l'efFufi on  du  fang  que  la  féconde 


Dissertation    XXXII. 

traîne  iimplement  aux  Apôtres.  I 
diri  -les  ;   ex    fan* 

donner  l.i  ces   deux   co.. 

expliquer    l'une     par 
1     icrc  »  rien  lus  naturel  que 

due  que  Jetus-( Juilt  les  a  pronorK 
touces  deux  comme   elles  font  rappor- 
tées vains  qu'il  a 
vou                 lec  deu                  |   cft  niions 

(ba  la:  fur  la  Crois  ,   U 

feint  int Marc,   q 

ten  pluheurs   pour    la    remit: 

de  leurs  pécnéf  :  l'aa  ni  la  Ceœj 

félon    faim   Paul  6c  ftini  l  oc  ,  q  li  en 

failanr  .'ion  du  (  .  ilice  , 

ce  le  U  du 

fang  ■HZ  fi  la  eij 

mec  i  eth, 

lellement  dans  le  Calice  , 
fled         icedaoi  11  boache  des  A 
ire*  pal  la  (.  'ommur. 
il  v  a  erhilion  de  m    les    l.om- 

I        ,  il  y  a  un  vrai 

peut  c  menr  I 

Luc,  qui  i 

ilice,  < 
l'Ori  •...!    1     l  nda 

r  nous  t  il  n  I  ; 

qu  ce  qu  il  t 

s'il  croit  vuide  ,  on  lue 

qu'il  tut  répandu.  (  raifon 


'592  Dissertation  XXXIT. 
du  vin  dont  il  feroit  plein.  Ce  feroit 
une  folie  de  dire  que  le  vin  a  éré  ré- 
pandu pour  nous.  C'eft  donc  à  caufe  du 
Sang  de  Jefus-Chrift  _,  &  par  confé- 
quent  le  Sang  de  Jefus-Chrift  eft  réelle- 
ment dans  le  Calice  ,  ce  qui  fuffit  pour 
la  préfence  réelle  ;  Se  ce  fang  eft  répan- 
du pour  nous ,  ce  qui  eft  nécefTaire  pour 
le  facrifice.  C'eft  le  même  fang  ,  qui 
félon  les  Evangéliftes  j  a  été  répandu  à 
la  Croix  &  dans  la  Cène  ;  avec  cette 
différence  ,  qu'à  la  Croix  il  a  été  ré- 
pandu fur  la  terre  pour  la  rémiflion  des 
péchés;  &  que  dans  la  Cène  il  eft  ré- 
pandu dans  le  Calice  par  la  tranfubftan- 
tiation  du  vin ,  &  du  Calice  dans  la 
bouche  des  Apôtres  par  la  Communion  > 
pour  leur  donner  part  à  la  nouvelle  al- 
liance dans  ce  gage  facré. 

On  voit  clairement  que  Jefus-Chrift 
dans  route  cette  action  fait  allufion  à 
celle  de  Moife  ,  qui  remplit  une  coupe 
non  du  vin  ,  mais  du  fang  des  animaux  > 
Ôc  qu'il  répandit  fur  le  peuple  ,  en  di- 
fant  :  C'efl  ici  le  fang  de  l'alliance  ou 
du  Teftament  que  Dieu  a  fait  pour  vous. 
Comme  fi  Jefus-Chrift  difoit  :  Autrefois 
Moife  a  célébré  l'ancienne  alliance  de 
Dieu  avec  vos  Pères  ,  lorfqu'il  répan- 
dit fur  eux  des  coupes  pleines  du  fang 
des  animaux,  Et  moi  je  fais  la  nouvelle 


Disserta  tion    XXXII.   5 9 j 
alliance  avec  vous,  en  répandant 
fur  vos  Imbus  ,  mais  dans  vos  corps  ce 
Calice  plein  ,  non  du  1.  animaux, 

mais   de  mon  propre    Sang.  L'allufion 
tt  I  rre  les  coupes  de  Moïfe  c\:   le 

Calice  du  v  ;ir ,  entre  l'cfluiion  | 

s  &  l'efl  :eure  ,    entre 

le  fang  des  animaux  foj- 

Chnft  j  cri- 

de  Moïfe  &  le  (acrifice  de  Jefus- 

ilt.    Que   ii    au    lien    1  Sang 

tàCté    les  Miniït:  ltituent  du  vin  , 

qu'.ls  an  Eu  iboliqoet 

2  en  6g  .;  j  ,    q 
a-t-il  de  plus  fioul    ! 
fane   que   toi:  :e  allai 

que  Moïfe   aura   établi   l'ancien  Telta- 
ment  avec  de  vr .  ;  ,    &  que  Jefus- 

(  hrilt  n'aura  :  m'avec 

du  vin  qui  n'clt  du  lang  qu'en  pein- 
ture &  par  fuppolition? 

(^uq  répondent  à  cela  les  Minières  ? 
Ils  n'ofenc  pas  rap;  au 

vin,  qui  M  fe  rroir.  e  ni 

ni  dan  ;  au 

1  de  la  rapporter  au  (  toit 

:  &  ci  1  mains   de    Je! 

(  ni  pal  le  tutur  au 

■ 

!  i  fernbfa  uic 

.  tiaduu  amii  l'Ç 


594  Dissertation  XXXII. 
ginal  ,  In  meo  fanguine  qui  pro  vobis 
Jundetur ,  où  le  pronom  qui  femble  fe 
rapporter  à  fanguine  ,  qui  précède  im- 
médiatement, ck  le  futur  fundetur  ne 
paroît  fîgmfier  que  l'efrufion  future  à  la 
Croix. 

Pour  commencer  par  ce  futur ,  rien 
n'empêche  qu'on  n'entende  FefFufion 
Sacramentelle  qui  ne  fe  faifoit  pas  en- 
core au  moment  où  Jefus-Chrift  par- 
loir ,  mais  quil  ailoit  faire  incontinent 
après  par  la  Communion  des  Apôtres, 
Mais  comme  lavulgate  n'a  point  d'au- 
torité parmi  les  Proteftans  ,  il  efl:  éton- 
nant qu'ils  l'appellent  à  leur  fecours  , 
lorfque  l'Original ,  lequel  feul  efl:  leur 
Ecriture  Canonique,  les  condamne  vi(î- 
blement.  11  le  faut  donc  confulter  pour 
terminer  ce  différend. 

Il  porte  tovtq  <&o'ansipioVy  »  Katvti'  «T/- 
<&9h ki)  iv  Ta  ai [aati  ^tou,  ra>  t/«"*p  vfxav 
iK-^wofxîvov.  Ce  que  l'ancien  Interprè- 
te ,  en  exprimant  le  verbe  qui  efl:  fous- 
entendu,  atournéen  cette  forte  :  Hic  eft 
Calix  ,  novum  Teftamentum  in  fanguine 
tneo  j  qui  pro  vobis  fundetur»  lia  rendu 
le  préfent  i*y^vvôpivov  par  le  futur  fun- 
detur ^  qui  peut  fe  traduire  par  un  tems 
qui  tienne  le  milieu  entre  l'un  &  l'autre , 
qui  va  être  répandu  pour  vous  :  Mais 
ce  n'eft  pas  la  plus  grande  difficulté. 


Dissertation  XXXII.  < 9 f 
Celle!  uioi    le  rapporte 

«c  pronom  cV:  ce  verbe    qui  jundit:. 

jtofAtrzv.  On  avoue  ,  qu  1   le 

Latin,  il  fe  peut  coaftruin  CaltM 

ou  avec  Sanguine,  Selon  le  premier 
rapport  ,1  .iro- 

pour  les  traduire  :  Hu  I 

pro  vobis  fund;i ur  y  no  vu  m 

m  mec  uuu.   Selon   le  fécond , 

que  les  Mimihes  foutiennent  ,    il  hu- 

droit  lire  ,//'..  C  l  eftan: 

tum  ejl  in  mco  J.  1  oèis 

fundstur.    11  n'y  a   que    l*(  il    qui 

puille  déterminer   leqi. 

rapi  .    cV  l'on    voie 

d'abord  que  c'clt  le  premier  ,  parce  que 

I         Movîtot  fe  rapporte  à  wot  *ip/or,quî 

eft  au  même  cas  t  Bc  DC  le  peut  conftruirc 

:  &i*  y.*i  1  ,  on  D  vec  un   Z- 

blatif.   Ainfi  il  faut    traduire,  ic  t\:fic€ 

qui  vj  être  repandu  1  us  efl  le  nou- 

cjlcrm  s  mon  S 

Quelque  icre  que  loit  cette  com 

s   qui    s'en  font 
ics  ne  la  1 
hir.    I!  ntironc   jamais  que    le 

(  du  Sang  idu    dam    la 

(  j       pour  i  ,  ili 

plui  1  UC  ,  le   plus  ^ 

ir  un  i 
nie-  qu'ils  font ,  l<  tique 


59<>  Dissertation  XXXII. 
pour  empêcher  l'efFufion  du  Calice  ,  ils 
fe  fauvenc  encore  ridiculement  dans  le 
foiecifme  iv  t&  df(j.a,Tt  iv.yyvoiJ.ivov  , 
c'eft- à-dire  ,  dans  la  conftruclrion  d'un  a- 
blarif  avec  un  nominatif,  Infanguinemeo 
effundendus.  11  eft  vrai  que  pour  excufer 
un  peu  cet  Evangélifte  ,  ils  lui  cherchent 
des     exemples    femblables.    Mais  par 
malheur  pour  eux  ,   ils  n'ont  rien  de 
commun  avec  celui-ci.  Ce  font  des  fo- 
lécifmes  apparens  ,  où  l'on  fous-entend 
toujours  quelque  chofe  qui  empêche  le 
vrai  folécifme.  Centauro  invehitur  man- 
gna  ,  fup.  Nave.  In  Eunuchium  fuam  , 
fup.  Comœdiam  :  Comme  nous  difons  , 
au  terme  de  lafaint  Martin ,  de  la  faint 
Jean  ,  de  lafaint  Michel,  en  fous-enten- 
dant  la  Fête.  Mais  dans  le  folécifme 
prétendu  de  faint  Luc  ,  il  n'y  auroit 
rien  de  fous-entendu  ,  &  le  nominatif 
iv.yyvott.ivov  fe  conftruiroit  crûment  a- 
vec  l'ablatif  af^cnt  :  faute  groflîere  con- 
tre la  Grammaire,  dont  faint  Luc  n'étoic 
point   capable  ;     ou   plutôt  infortunés 
Grammairiens  ,  qui  ne  fe  laiflTent  point 
d'autre  reffource  pour  le  faiut  que  dans 
la  prétention  que  le  plus  élégant  de  tous 
les  Evangélifles  a  fait  un  vilain  folé- 
cifme. 

De  plus  ils  allèguent  de  faux  folécif- 
mes  dans  le  genre  j  pour  en  excufer  un 


Dissertation    XXXII.    < 97 
le  dans  le  cas.  Ils  CICCDI 
la  l'Apocalyplc  c.  1 .  v. /. at'    u-.    rvl't#« 
Xpi<«  0'  'wapTup  0'  *w/f  :<  ,  poarairc 
t2  ;■  »  Mais  cela  n 

plus  preflànr,  parce  que  l'ai  prend 

bavent  la 

ex'  (ans  aiîei  plus  loin  on  1; 
plus  bas  ,  Kat)    t«  ô    «r,  K«t;  0   nt  ,  **/  •* 
11  a.  A  mil  la  t:  .qui 

emploie  un    cal  pOBJ    un  aut;  roit 

une  (on  1  ine  dans  le   livle   d'un 

I    rirain  aulli  pu         tuflS  coxreâ  que 

faim  lue. 

Puis  donc  que  pour  déterminer 
ex  prenions   équivoques    dune    veriion 
comme  eft  la  \ 

cour^  .1  l'Original  ,  où  la  mèmeambi* 

pur  :  ,  il  efl  1  lair  que 

ces  mots  :  Q  qui 

ibleni  fe  rapp  5  ,  com- 

•Q  pli; 

efte  |uoique  plus 

parce  que;  (,vr«ptM<  ne  le  peut 

conftruire  qu'avec  -woTHp/or. 

Il  1  luteui  qui   attribuant 

.nt    au 

i.uilent  pas  de   la  rapp 

celle  qui  s  Mail       j. 

il   d'une  extrême    duretc  i   car 

ore  qu  lans  le  (  .dite 

a  la  CCOÎS  ,  ou   M   ptttl 


598  Dissertation  XXX1Ï. 
néanmoins  dire  de  bon  fens  :  Ce  Calice 
fe  verfa  à  la  Croix  ,  puifqu'il  n'y  fera 
pas  porté.  C'eft  comme  Ci  un  Pourvo- 
yeur du  Roi  difoit  à  un  de  (es  amis , 
cette  bouteille  de  vin  que  je  vous  donne 
fera  verfée  à  la  table  du  Roi, parce  que 
c'eft  du  même  vin  qui  y  fera  fervi. 

Les  Miniftres  objectent  que  lorfque 
Jefus-Chrift  difoit  aux  Apôtres  :  Bibite 
ex  eo  omîtes  :  Buve^-en  tous  ;  il  ne 
montroit  encore  que  du  vin  qui  étoic 
dans  le  Calice  ,  &  il  les  invitoit  par  ces 
paroles  à  en  boire  ,  parce  qu'alors  les 
paroles  de  la  confécration  n'étant  pas 
encore  prononcées  ,  le  fang  n'étoit  pas 
encore  produit.  Les  Apôtres  donc  ne 
burent  que  du  vin  _,  parce  qu'ils  ne  bu- 
rent que  de  ce  qu'il  les  avoit  invités  de 
boire  ,  c'eft-à-dire  ,  du  vin.  Ils  peuvent 
dire,,  &  ils  difent  en  effet  la  même 
chofe  de  la  confécration  du  pain.  Les 
Apôtres  mangèrent  ce  que  Jefus-Chrift 
les  invita  de  prendre  &:  de  manger  _,  par 
ces  paroles  :  Accipite  &  comedite.  Or 
il  ne  tenoit  alors  que  du  pain  en  fes 
mains  ,  ôc  il  ne  les  invitoit  à  manger 
que  ce  qu'il  tenoit.  Ils  ne  mangèrent 
donc  que  du  pain. 

Mais  ces  deux  argumens  ne  prouvent 
rien  dans  la  fuppofition  que  Jefus-Chrift 
a  confacré  le  pain  &  le  vin  par  fa  bé+ 


DlSSFRT  ATION     XXXiî.     <  f)f 

ncdi  (    ue  l'invitation  a  man 

a  boire    tue   pofterieure  à  cette  b 

ce  ;    &  par  conféqaooi  le 

lin 
itation.     ) 
pain  j  il  h  &  le  romy 

à  Je  s   4  P-cr. 

de  m  [    lice  y  il  rendit  v  il 

leu'  en  to.. 

11  faut  donc  recon  ;ns  la 

confécration  da  Calicejefa 
île  une  nouvelle  tlli  dont  il  prend 

fon 

ou  L  i  ,  cV  le  C  ! 

poi:: 

que  l'un   ex  l'autre  cil  le 
l'ail.  unerc 

comme  de  la  Circon 

ic  un  ' 
allianc  s  entre  I  Do 

alliance  était  cou 

horooM  »  Du  îles 

n  pli  lie; 
cor.  elle  exigeoit  d'eux, 

me  donc  1  d'une 

ni 1 1  naturels  ,   la 

ne. 
11  en  cil  dis   je  ,   lie    nu  me   en  cette 
occalîon.    |  blff    IVCÇ    lc9 

lumuuv*  unealluiiwC  ;vu  il  lau  M  lm* 


&oo  Dissertation  XXXII. 
faveur  un  Teftament ,  dont  le  fceau  efl: 
fbn  Sang  ,  &  dont  l'inftrument  eft  le 
Calice  plein  de  ce  Sang  précieux.  C'eft 
en  ce  fens  que  Jefus  Chrift  dit  à  {es 
Difciples  :  Ce  Calice  qui  efl  répandu 
pour  vous  ejl  la  nouvelle  alliance  en  mon 
Sang,  La  condition  du  coté  de  Jefus- 
Chrift  eft  l'erïufion  de  fon  Sang  dans 
le  Calice.  Celle  qui  regarde  les  Fidèles, 
c'eft  d'en  boire  \  de  ainfî  le  Calice  eft  un 
infiniment  commun  aux  deux  parties 
qui  contractent ,  pour  accomplir  chacun 
fa  condition  ,  &  en  tout  cela  il  n'y  a  ni 
figure  ni  métaphore. 


DISSERTATION   XXXIII. 

Matth.   C.  XXVI.  v.    29.  Dico 

autem  vobis  :  non  bibam  amodo 
de  hoc  genimine  vitis  ,  ufque  in 
die  m  illum  ,  ciim  illud  bibam 
vobifeum  novum  in  regnoPatris 
mei.  Concord.  C.  CXXX. 

J'Expliquerai  en  mème-tems  avec  ce 
partage  de  faint  Matthieu  deux  autres 
de  faint  Luc  j  qui  y  ont  du  rapport , 
Chap.  XXII.  v.  16  &  18.  Le  premier 
regarde  l'Agneau  PaJfchal  que  Jeius- 

Chrift 


DlSSF  RT  A  TION  MI.        60 1 

Cluiit  ;  ir  ird<  m  fou- 

han  i        pies ,  | 

ce  qu'il  n'en  i  ii  j  Lis  jufqu1 1 

que  ims  le 

K      .    .  1 

/      .    ! 

1     us-Ci 
l.i  cal 
: 

tour  ,  pari  Ju 

fruit  de  l.i 

de  Dieu    !  i 

que 

ium  I)  I  ^ur 

_  j'ai  mil  a  lu  tète  ii 
i. 
II  v  .i  i!c  rident 

le  p  lui 

i  un  Se 

gale  qui  le  du 

comme   bint  Matthieu  l'.i   placi 

.i  élOll  pleine 
du  v  ;it  j    il  leur   plaie 

qu'il  ..  cela  une  récapitulai 

ai:  tancer. 

ivanc  l'écablifleroem  c: 

l 
l  onu  il 


<i02    D  I  SSERTATION    XXXIIL 

On  voit  déjà  combien  ce  dérange- 
ment eft  violent.  Qui  pourroit  fouftrir 
cette  fuite  qu'ils  attribuent  à  faint  Mat* 
thieu  l  Buve%  tous  de  ce  Calice.  Car 
c'ejl  mon  fan  g  y  le  fang  de  la  nouvelle 
alliance  qui  fera  répandu  pour  plufîeurs 
pour  la  rémiffion  des  péchés.  Je  vous 
afjure  que  je  ne  boirai  plus  du  vin  de  la 
coupe  légale  ,  dont  fai  bu  tantôt  _,  juf- 
quà  ce  jour>  &c.  Qui  ne  feroit  ,  dis- 
je  ,  choqué  de  ce  changement  de  dif- 
cours  qui  pa(Te  tout  d'un  coup  du  Sang 
de  Jefus-Chrift  au  vin  de  la  coupe  lé- 
gale qui  étoit  paffé  il  y  avoir  du  tems  , 
ôc  dont  il  n'étoit  plus  queftion  l  Ce 
n'eft  pas  ainfi  qu'il  faut  attribuer  des 
récapitulations  aux  Evangéliftes.  Mais 
pourvu  qu'on  fe  tire  d'un  mauvais  pas , 
on  ne  fe  met  guère  en  peine  des  confé- 
quences  ,  &  fi  le  bon  iens  n'y  eft  point 
intérefTé. 

Ce  n'eft  pas  ici  la  feule  difficulté 
que  ces  Auteurs  ont  à  dévorer.  Il  faut 
encore  qu'ils  paftent  par-deiïus  toutes  les 
différences  qui  féparent  ces  deux  pafta- 
gçs  &  les  empêchent  de  fe  confondre. 
Saint  Luc  dit  en  général  :  Je  ne  boirai 
plus  du  fruit  de  la  vigne.  Non  bibam 
de  peneratione  vitis.  Saint  Matthieu  au 
contraire,  ajoute  le  pronom  demonltra- 
tif  pour  marquer  un  vin  particulier.  Jc> 


Dissertation   XXXIII,     i 
ne  boirai  plus  de  ce  (t.. 
Selon  le  p:  :  inn- 

plemenc  «S:  ablolumcnr  qu'il  n'en  boi- 
ra plus  jufqu'a  CC  que  le  règne  df  1  ) 

Del  reniât.  (  !c  qui  I  U*il 

en  ait  bu  après  ce4 

île   donc,  i  le 

iriftmarqu  oncrai- 

re  un  :  .1  il  allure  q 

boira  :  Non  è  i        

m  illud  bit  dm.  Enfin  , 
uini  Matthieu  r  lu'il  le  boira  noo- 

fd   1  <    Jans    le 

91  /7/W  /•. 
.  •     •    -  ••. .  .  s. 

Luc   ne    dit  nui    d 
pour  confondie  cnlemble  ces  deux  | 

s  on  u*a  (  -s  deux  mots 

qui  leur   (bienc  communs.  Je  m 

I  ,  B0A  ,  CC  qui  B*eû  p.is  confi- 

dcrable.  Au  lieu  qu'on  a  tffoîl  on  qua- 
tre différences  pour  tes  distinguer,  fans 
compter  l'interruption  à  contre  tems  du 
diL  Ifucfa  ui     efi    la 

choie  du  monde  la   plus  choquante. 

P        faire  donc  un  fens  commode  H 
une  fu  n  n'a  q 

laitier  chaque  pafTage  en  la  place 
ont  mis  les  I  liftes.  1  r  de 

iiuu  Lu*  |  avant  la   manducai 

(    . 


£04  Dissertation  XXXÎIT. 
l'Agneau  Pafch.il.  Le  fécond  du  même 
Evangélifle ,  à  la  fin  du  fouper  ou  de  la 
Cène  légale.  Le  troisième  qui  eft  de 
faint  Matthieu  ,  après  la  Cène  Eucha- 
riftique.  Et  ces  3  palTages  ainfi  difpofés 
fe  communiqueront  une  lumière  mu- 
tuelle. Ce  qu'ils  ont  de  commun  ,  qui 
éd.  que  Jefus  -  Chrift  déclare  qu'il  ne 
inaugura  plus,  ck  qu'il  ne  boira  plus  j 
c'étoit  pour  difpofer  de  plus  en  plus  fes 
Difciples  à  la  féparation  prochaine  qu'ils 
n'avoient  jamais  voulu  comprendre. 
Mais  les  deux  premiers  qui  regardent  la 
Cène  légale  ,  les  préparent  particulière- 
ment au  Myftere  de  l'Eucharistie  qu'il 
alloit  établir  immédiatement  après;  &C 
ils  préviennent  leur  efprit ,  fur  tout  le 
fécond  ,  contre  le  rapport  des  iens ,  qui 
n'y  dévoient  appercevoir  aucun  change- 
ment fenfible. 

Dejiderio  dejideravi  hoc  Pafcha  mari' 
ducare  vob/fcum.  11  témoigne  qu'il  avoit 
toujours  fouhaité  avec  ardeur  de  man- 
ger cette  dernière  Pâque  avec  eux,  non 
précifément  parce  que  c'étoit  la  dernière, 
ce  qui  n'étoit  pas  une  matière  de  ïou- 
hait  \  mais  parce  qu'étant  une  figure  il 
devoit  l'accomplir  par  l'ufage  de  la  tou- 
te-puiiîance  &  de  la  fouveraineté  que 
Dieu  lui  donnoit  fur  les  créatures ,  eu 
les  changeant  jufques  dans  le  fond  de 


DlSSFRT ATIO 

le ii  (t  ce  q  le  It 

plu 

m   rè- 
gne :uc  je  n'en 

qu\  de 

l 

: 

S  p  Trie  qui 

eft 

liftinû 
l  eft  a 

.  :ie  ,  que  I 
gne.ui  Pu'  fur  \\ 

cres 

orc 
a  coup 
inter   v\  s   quod 

nec 
Dt  !  i  ?cte 

i 
je  ne  ,  i    <ta  /^u/V  </<- 

^a<r  /*  fcgnc  de  ! 
(      nme  il  n 

j  ,  il  .  ilumeoc  le 

Ei  il  .  J 

ni 


6oS  Dissertation  XXXlIl. 
boira  plus  du  tout  jufqu'à  l'avènement 
du  règne  de  Dieu,  c'eft-à-dire  jufqu'à 
rétabliflfement  de  l'Euchariltie  où  il  de- 
voit  changer  le  vin  en  fon  Sang.  Parce 
que  la  coupe  légale  dont  les  Apôtres 
buvoient  l'un  après  l'autre  _,  étoit  la 
dernière  circonftance  de  la  Cène  Paf- 
chale  ,  Se  qu'elle  fut  immédiatement 
fuivie  de  TEuchariftie. 

Qu'y  a-t-il  donc  de  plus  exprès  que 
cet  avis  qu'il  ne  boiroit  plus  de  vin  , 
pour  prouver  la  préfence  réelle  de  fon 
fang ,  Se  pour  prévenir  £es  Apôttes  con- 
tre les  apparences  fenfibles  du  vin?  De- 
puis cette  déclaration  ils  lui  virent  ver- 
fer. du  vin  dans  la  même  coupe  j  il  en 
but  le  premier ,  Se  enfuite  il  la  leur  pré- 
fenta  à  boire.  Mais  ils  étoient  avertis 
que  déformais  jufqu'au  règne  de  Dieu 
il  ne  boiroit  plus  du  fruit  de  la  vigne. 
Ainfi  ils  étoient  perfuadés  que  ce  qu'il 
alloit  boire  dans  la  coupe  Euçharifti- 
que  j  &  ce  qu'ils  alloient  boire  après 
lui,  n'étoit  point  du  vin  comme  il  l'y 
avoit  verfé  _,  quoiqu'il  en  gardât  encore 
toutes  les  apparences,  mais  que  c'étoit 
fon  propre  Sang,  ain(i  qu'il  l'appella  : 
Hic  eflfanguis  meus.  Et  cette  particule 
jufques ,  donec ,  n'efl:  pas  une  preuve  qu'il 
a  bu  du  vin  dans  ce  qu'il  appelle  le  rè- 
gne  de  Dieu,  On   fait  que  parmi  les 


STATION   XXXIII. 
Hébreux   elle    marque   la   continuai      I 
d'une  achun  ne  ounllion 

un   certain   ternie  ,  nie    l'une    ou 

l  autre  continue  tp  it  qu'elle  foie 

interrompue  ,    parce    qu'on    n*a 
qu'  .me  qui  naturellement  au; 

pu  l'inccffompi 

itin  après   ces  deux  préparations  j 

l'une  par  I  pour  la  pro- 

liotl   d  (     >rps  j   i  :   la 

coupe   légale,  |  de 

(on  .    il  inftitlli  l'Eu  i<    lan$ 

tvoii  bu  de 
. 

ex  hoc 
cmnes  ;    il    leur  déclara  dans  le 
h    ,:,  que  d  is   il  ne  c 

plus  ce   Mvlk-re    avec  >  fa 

réfane&ion.  Je  \    .s  affure  ,  !  •  il , 

que  je  ne  plus   jV  :  la 

\ igné  y  jmfqttà  ce 
nouveau    «:  dans  le 

de  mon   Père.   Dico   auten: 
bibam  amodo  de  hoc  genim 
in  diem  illum  ,    cùm 
cum  novum  in  regno  Partis  met. 

Dans  ce 
en  f>>nt   toute  la  difficulté  >  c  ont 

>in  dexp 
I       premier 
I         s'il  a  n  le  la  cou- 


£08  Dissertation  XXXIII. 
pe  légale  ,  pourquoi  ,.  dira-t-on,  chan- 
geroit  -  il  cette  expreflion  littérale  en 
métaphore,  pour  l'attribuer  à  Ion  Sang? 
Ce  feroit  une  pure  équivoque.  C'eft 
donc  une  marque  ou  qu'il  n'y  avoit  à  la 
lettre  que  du  vin  dans  la  Coupe  Eu- 
chariftique  ,  comme  le  prétendent  les 
Pioreftans ,  ou  comme  croyent  des  Au- 
teurs Catholiques  ,  que  ce  partage  de 
faim  Matrhieu  ne  regarde  point  la  cou- 
pe Euchariftique,  mais  la  coupe  légale  3 
&  qu'il  dit  la  même  chofe  que  celui  de 
iaint  Luc  ,  qui  avec  quelques  différen- 
ces regarde  uniquement  la  coupe  lé- 
gale. 

Mais  comme  ces  différences  font  ef- 
fentielles,  il  n'y  a  pas  moyen  de  con- 
fondre ces  deux  partages.  Et  fans  fortir 
du  terme  que  nous  expliquons  j  Jefus- 
Chriit.  appelle  fon  Sang  du  même  nom 
métaphorique  dont  il  avoit  littérale- 
ment exprimé  le  vin  matériel.  Mais  il 
y  a  une  grande  différence  entre  le  fruit 
de  la  vigne  en  général ,  non  bibam  de 
generatione  vitis ,  Se  ce  fruit  de  la  vi- 
gne en  particulier,  non  bibam  de  hoe 
genimine  vitis.  Le  premier  fans  reftric- 
tion  ne  peut  être  que  du  vin  matériel 
&  littéral;  mais  le  fécond  qui  eft  déter- 
miné i.  Par  le  pronom  démonftratif,  de 
lioc  genimine  vitis  ;   i.  Par    un  certain 


:SSERTA7I0N      XXXIII.     609 

jour  prcrlx  ,  où  il  en  doit  boire  encore 
avec  le  u/aue  l:l  &*m  '//- 

ran\  •:  illud  .  novum.    1     ut  ce- 

la, [ue  un  certain  fin  par- 

ticulier d  it  au:r 

eft  pas  de 
véritable  vin.  11  ci    iicule  de  dire 

cjue  Jefas-Cbrift  la  vin  n 

&tour  -  dupreToir  dans  le  Ro\ 

n  a  vin  mé- 

:]uc. On  n'en  peut  marquer  que 


les 


« 


'1rs  de  la  rcli  I 

:  plus  bas  que  I  irift  n'a  point 

. bue  ce  fruit  lîrs 

été:  Il  ne  refte  donc 

|  .  quoi  -tte 

exp. 

ChriOlui 
. 
.s  la  fuite  la  réruai   - 

féconde        f 

ic  : 
/ 

l 

ns    le  I 


6io  Dissertation   XXX1IL 

il  eft  refTufcité  immortel ,  glorieux ,  fpi- 
rituel  :  &  l'on  peut  dire  que  c'eft  ce  vin 
nouveau  de  l'Evangile,  dont  les  Chré- 
tiens étant  enyvrés  par  la  communion 
avant  que  de  s'engager  dans  la  carrière 
du  Martyre ,  n'ont  point  fenti  les  plus 
cruels  tourmens.  La  réfurrection  géné- 
rale rendra  le  Ciel  &  la  terre  tout  nou- 
veaux, &  celui  que  Saint  Jean  vit  aflls 
fur  le  trône ,  déclara  qu'il  alloit  faire 
toutes  chofes  nouvelles  :  Ecce  nova  fa- 
cio  omnia.  11  ne  faut  donc  pas  trouver 
étrange  que  Jefus  -  Chrift  repréfente 
comme  du  vin  nouveau  ,  fon  Sang  re- 
nouvelle par  fa  réfurreétion. 

La  troifieme  difficulté  regarde  ces 
mots  :  dans  le  règne  de  mon  Père  ,  in 
regno  Patris  mel.  Mais  après  ce  que 
nous  venons  de  dire,  il  eft  aifé  de  ju- 
ger que  c'eft  l'état  glorieux  où  Jefus- 
Çhrift  eft  entré  par  fa  réfurrection.  Le 
règne  de  Dieu  ejl  l'ufage  &  l'exercice 
que  Dieu  fait  de  fa  toute  puiflance  &  de 
fa  fouveraineté  abfolue  fur  les  hommes 
Se  fur  les  créatures,  dans  la  nature  par 
les  miracles  &  les  prodiges  j  dans  la 
grâce  par  la  converïion  des  âmes  ,  ôc 
dans  la  gloire  par  la  communication 
immuable  defoi  même,,  félon  laquelle 
Dieu  fera  tout  en  toutes  chofes.  Les 
exemples  de  ce  fens  du  règne  de  Dieu 


Dissertation   XXXIII.   tu 
fe  trouvent    par-tout  dans  le  nou% 

:atnenr.  Pour   la  nature  ,  .nts 

dans  l'Apocalvpfe  rendent  grâces 
de  ce   qu'enfin   il    a  voit  \  ion 

de   fa  gnnde  pui 
c  tmmençou  a   : 
te  m    tu  a  m  :m    &  rei 

Chrift  appelle  b  u!  LKre&l  ■  :: 
la  gloire  de  Dieu.  /  I 

!  choft  que  1-  Pour 

la   B  la    coi  .unes  e(t 

ouj  lins  tout  1  El 

!  que  Jclus- 
Chnit  <it   la   proximité  du  re 

de  Dieu  ,  t  'tgnur: 


parce  au'al   !>   Dieu   règne    lur 
I       I  ;  t    i  ,  fur  le  ccrur  >S:  ! 
i'aino-.:  :  l'homme  m 


&'  extérieur   par  1'.  Poui  la 

5.1 
,    !.i    J 
gurarion  qui  n'était  qu'il  >u- 

Ôc  qui   le   cru 

iae  &  nnmenfe  j 
tm    <Pei     ver. 
il.    ^  W- 

*  "G 

^fîguri* 
don  ^loticuf»-  de  Jefu  - 


6n  Dissertation  XXXI1Ï. 
gne  de  Dieu  _,  combien  plus  Te  fera  fa 
réfurrection  ,  dont  la  Transfiguration 
n'éroit  qu'un  léger  elîai  ?  Et  n  la  con- 
verfion  du  pain  &  du  vin  en  fon  Corps 
&  en  fon  Sang  ,  eft  un  des  plus  grands 
effets  de  l'empire  de  Dieu  fur  les  Créa- 
tures ,  pourquoi  l'Euchariftie  ne  fera- 
t-elle  pas  en  ce  fens  le  règne  de  Dieu? 
Et  pourquoi  Jefus  -  Chnft  .  n'aura-- 1- il 
pas  pu  dire  en  parlant  d'elle,  qu'il  ne 
mangera  plus  de  l'agneau  Pafchal  ,  & 
qu'il  ne  boira  plus  de  la  coupe  légale 
jufqu'à  ce  que  l'un  &  l'autre  trouvent 
dans  le  règne  de  Dieu  (  je  dis  dans  l'Eu- 
chariftie )  la  vérité  qui  les  accomplira. 
Donec  ïmpleatur  in  regno  Del  _,  donec 
reonum  Dei  reniât.  Il  elt  au  moins  très- 

a 

probable  que  c'eft  le  vrai  fens  de  ces 
trois  palTages  j  &  il  eût  été  à  fouhaiter 
que  nos  Interprètes  n'euffent  pas  privé 
la  préfence  réelle  d'une  preuve  fi  confi- 
dérable,  en  fe  déclarant  pour  un  autre 
fens  aufli  forcé  que  celui-ci  eft  naturel. 
Ils  prennent  ce  fruit  de  la  vigne  dans 
faint  Matthieu  pour  le  vin  de  la  coupe 
légale  dont  parle  Saint  Luc.  Mais  com- 
me Jefus-  Chrift  déclare  qu'il  n'en  boira 
plus  jufqu'à  ce  qu'il  foit  dans  le  Royau- 
me ou  dans  le  règne  de  fon  Père,  c'eft- 
u-dire  félon  eux  dans  le  Ciel  \  il  paroît 
déjà   que  cette  déclaration  eft  fauffe, 


^ERTATION     XXX'III.     6\) 
puiiqu'au  rapport  de  Sauu  1  il  a  bu 

&    mai  . 

furrection  ,  àc    avant  qu'il  montât  au 
Ciel    :    Qui  -:us 

Ces  ÀuCCUfl  \  :  bien  nier  qu'il 

eût  bu  du  vin.  Mais  au  pis  aller  ils  i 
pondent  que  Je  lu  s  Chri  n*â 

;       bu  comme  a  s  pour  ire 

a  l.i  la  nature  ,  mais  en  pal- 

fant ,  a  \\  d  ns  en  tenu , 

pour  prou.  >n, 

• 
Ain  nie   q  lut  de 

la  ne  ou  d\. 

à  la  1  du  Tour.  Il 

I    la 

ne  raifi  n  qu  j  il    n'a 

poinr  bu  a  is-Chrift  a 

I 

finis 
e  (  loiquM  en  ait  bu  depuis  a 

i.  J,  «  l  ire  que  dam  le 

ne   il  de  bo        ( 

u'il  n 

I 


2 


6i4  Dis  sut  atiok  XXXIII. 
le  boira  tour  nouveau  ,   en  îniinuant 
qu'il   l'avoit  bu  vieux  dans   la  Cène, 
deux  circonfbnces  auiîi  faufTes  quelles 
font  vaines  &  frivoles. 

Pour  éviter  cette  idée  ridicule,  nos 
Auteurs  laiflfent-  là  le  vin  de  la  coupe  lé- 
gale, qui  ne  fe  pourroit  plus  foutenir. 
Ils  rapportent  ce  fruit  de  la  vigne  à  la 
vie  heureufe  du  Ciel  ;  Ôc  pour  juftifier 
ce  fens  ,  ils  allèguent  que  lorfque  l'E- 
criture parle  du  Royaume  de  Dieu  fous 
l'idée  d'un  feftin  ou  d'un  grand  louper, 
elle  entend  toujours  la  félicité  du  Ciel. 

Mais  il  efl  aifé  de  leur  répondre  que 
cela  n'eu:  vrai  que  lorsqu'elle  le  propofe 
fous  l'idée  d'un  grand  repas  ou  du  boi- 
re &  du  manger  en  général ,  comme  il 
paroît  dans  Saint  Luc ,  quelques  ff.  plus 
bas.  Je  vous  de/Une,  je  vous  prépare  le 
Royaume  ,  comme  mcnPcreme  l 'a prépa- 
réj  afin  que  dans  mon  hoyaume  vous 
tfiahgie\  &  luvie%  à  ma  table.  Luc, 
cap.  xxii.  19.  Mais  que  cela  n'a  point 
de  heu  lorfqu'il  s  ogit  d'un  mets  ou  d'un 
breuv.ige  particulier  &  individuel  com- 
me étoit  cette  coupe  légale  ,  parce  que 
les  pronoms  démonfcra»  ifs  hoc  &  illud9 
qui  fe  rapportent  au  même  vin  de  la 
coupe  légale,  empêchent  qu'on  ne  la 
puilTe  expliquer  d'aucune  autre  chofe. 
Sur  cette  fuppoiîrion  on  peut  faire  cet; 


Dissertation    XXXîlî.    C\) 
argument  très  -  abfurde  &:  n  ms 

uns  réplique.  Le  vin  dont  Jefus  Ciuilt 
tém  qu'il  boita  da  ici  elt  le 

me  me  vin  individuel  ou  fpécihque  donc 
il  déclare  qu'il  ne  boira  plus  julqu'a  ce 
qu'il  y  ioit  arrive.  Or  le  vin  donr  il  ne 
boira  plus  jufqu'alors  elt  le  vin  de  la 
coupe  légale.  C'e.t  don^  le  vin  même 
de  la  cou.  .le  dont  Jefus  -  Chrift 

boira  dans  le  Royaume  de  Ion  Père  ,  ce 
qui  elt  de   la  dernière  abCuidicé.  (^ 
qu'on  :  m   ne  peut  l'éviter   qu 

h       -  Ckf  i  ce 

R         .  i   Père  pour    l'tuclu- 

js  Auteurs  n'ont  ai  ré- 

pondre lii.  le  rap- 

porte à  hv  au 

• 

ns  ne  Te  rapportent  p  -me 

lividuel 
h  v  -  de 

vjn  mera- 

ph 

vin  n'a  point  de  lieu    ici  ,  puifque  Je- 
fus  <  1  h  r  1 1  :  MM  de    vi 

tenr  pot  Joat 

pendant  to.. 


i 


ri£  Dissertation  XXXÏÎÎ. 

C5eft  difpofer  fouvèrainement  du  fens 
des  termes  que  de  répondre  en  cette  for- 
te j  mais  pour  en  voir  la  nullité,  on  n'a 
qu'à  considérer  que  Jefus  Chrift  dévoie 
donc  faire  la  même  application  de  l'A- 
gneau Pafchal ,  qu'il  avoit  faite  félon  ces 
Auteurs  de  la  coupe  légale ,  &  aiïiirer 
fes  Difciples  que  déformais  il  ne  man- 
geroit  plus  de  l'Agneau  Pafchal ,  jufqua. 
ce  jour  ou  il  le  mangeroit  avec  eux  tout 
nouveau  dans  le  Royaume  de  fon  Père  3 
entendant  par  cet  Agneau  la  poffeflion 
de  tous  les  biens  de  Dieu,  8c  Taccom- 
plifTement  de  tous  leurs  deilrs.  Ces  Au- 
teurs accorderont  peut-être  qu'il  pou- 
voit  l'aiïurer ,  par  la  même  raifon  qu'il 
Ta  fait  de  la  coupe  légale.  Cependant 
il  ne  l'a  pas  fait ,  8c  on  peut  au  con- 
traire les  alîurer  eux-mêmes  qu'il  ne  le 
pouvoit  faire,  parce  qu'il  n'y  auroit  pas 
de  bon  fens  dans  cette  proportion. 

Mais  que  feront-ils  de  cette  qualité  de 
nouveau  que  Jefus-Chnll  donne  au  vin 
qu'il  doit  boire  ?  En  quel  fens  la  gloire 
eft  elle  un  vin  nouveau.^  ils  répondent 
que  félon  le  langage  des  Hébreux  c'eft 
la  même  chofe  qu'un  vin  excellent  8c 
précieux  ,  &  ce  terme  marque  la  per- 
fection 8c  le  bonheur  incomparable  de 
la  vie  à  venir.  Mais  on  peut  aiTurer  que 
ce  fens  n'a  aucun  fondement  dans  l'E- 


Dissertation  XX XI II.    C\y 
encore  i  &  qu'elle  n'employé  le  terme 

m  ,   que   p  r  ce 

qui  t  & parfi 

ont  des  idees  rterentes.  Cir  il  efl 

i  qu'il  j  s  excellent 

I  nivelles,  comu  .  1.  <  lanri 

veau,  le  nouveau  reftamenc,  n- 

mandement  i  ivel  ho 

me.  Mais  ce  n'eft  i 
leur  nouveauté  :  Car  r 
non  excellence 

mo  l)it/.\ 

.  it  pal   M  rcccntt) 

venerw.  non    . 

lui. 

Enfin  on    n'a    qu'a  traduire   tout  ce 
pa(Tage  en  ex:  tiquant  les  r 

Auteurs  leur 
dor. 

«.      licatio:  I 

bu    le   premier  de   la  coupe  légale  : 
\    ■   :     ,     dit  -  il    à     Ci 
rlus  du  vin  . 

tbttu    le 
c     /    des 

Au- 
ucl 
t  ?  Avec  queli 

fquel   i  quelle 

lai  n  de  1.. 

t  On 


*i8    Dissertation    XXXIV. 
ble  lui   attribuer  rien  qui  fou  plus  in- 
digne de  fa  divine  fagefle. 


DISSERTATION    XXXIV. 

Joan.  Cap.  XIII.  v.  23.  Erat 
ergo  recumbens  unus  ex  difcipu- 
lis  ejus  infinu  Jefu^  &c.  v.  25.  * 
Itaque  cîim  recubuijfet  Me  fit- 
prà  pecîus  Jefu.  Concord. 
Cap.  CXXXI. 

L'Explication  de  ces  deux  ff.  dé- 
pend de  favoir  la  pofture  que  les 
anciens  tenoienr  à  rable.  Ils  éroient 
couchés  fur  des  lirs  qui  renoient  d'or- 
dinaire trois  perfonnes,  &  dont  la  pla- 
ce du  milieu  étoit  la  plus  honorable. 
Celui  qui  l'occupoit  étoit  couché  fur  le 
coté  gauche  ,  êc  tournoit  le  vifage  vers 
celui  qui  étoit  à  fa  droite.  Cette  place  à 
droite  s'appelloit  le  fein  du  Père  de  fa- 
mille ou  de  celui  qui  étoit  au  milieu  ;  & 
c'eft  par  cette  analogie  que  dans  Saint 
Luc  le  pauvre  Lazare  eft  porté  dans  le 
fein  d'Abraham  ,  c'eft-à-dire  dans  le  lieu 
le  plus  proche,  &  fous  les  yeux  de  ce 
Patriarche. 

Dans  le  dernier  fouper  il  paroît  que 


D  :  T  A  T  !  \IV. 

faine  Jean   fur  p!  mmen 

ai  i  l.i  droite  de  J  i  ce 

*  ûa'il   nomme  le  fcïn  de  Je/us  ,  qui 
fur  le   COU  I  roui  né 

vers  lui.  S  une  Pierre  croit  à  ( 
cV  }  brift  lui  tournoie  le  ors 

donc  que  J.         Chrift  <  lire  qu'un 

des  douze  le  tr.ihiroit,  cV  que  tous 

irdoienc  les  uns  les  autres  d'etor. 

m  ,  la  nu  Pierre  fe 
-  en  (on  féant  derrière  Je  fus  Chi 
1      i  de  lai  dem 
r.Ce  D 

i     nt  placé  p  fur 

rtch  cle  (on  Mait;  n  dît  tout 

Seigneur ,    qui    efl-ce?    Et  il   ne 

deil  ifture  qu'autant  de 

I  qu'il  en  fallut  pn 

la  reponfe  :  cir 
il  leva   lafE-tÔt    la  :  r  celui 

]  1    ::nft   lui  dcfignerQÎI  par  le 

morceau  rren. 

C'efl  ainfi  qu'on   peur  très-vrai' 
blahiement  fe  repre  :  _rre  luitoire, 

fans  dérèrmin  inmoini  q  i         il  la 

.erre  ou  de 
r  Jean; 

elle  même ,  pourvu 

'  en- 

tre 

] 


6iç>     Dissertation  XXXÎV. 

Nos  Interprètes  n'en  ont  pas  eu  cette 
idée.  Ils  ont  pris  pour  la  même  chofe 
ce  qui  eft  rapporté  ,  v.  23.  Erat  ergo  re- 
cumbens  unus  in  Jinu  Jefu  ,  &  ce  que 
porte  le  v.  25.  Cum  recubuiffet  ille  fupra 
pecius  Jefu.  Ils  traduifent  l'un  &  l'autre 
dans  le  même  fens.  L'un  d'eux  .... 
étoit  couché  fur  le  fe'in  de  Jefus.  Et  le 
Difciple  donc  qui  fe  repofoit  fur  le  fein 
de  Jefus.  Car  être  couché  Se  fe  repofer 
font  alfez  équivalens  &  fynonimes.  Ce- 
pendant les  verbes  Grecs  qui  leur  ré- 
pondent ne  le  font  pas.  Ils  font  auflî 
difîérens  que  le  peuvent  être  deux  ac- 
tions ,  dont  l'une  dure  allez  long-tems, 
&  l'autre  eft  pafïagere.  Dans  le  ir.  23  , 
on  lit  nv  «T«  ctv'eiKîi '[xévoç  a  rcov  ^cl- 
6>  av  cLvtk  zv  T»  ko  Kt)G>  e?»  i'mo*«. Cequi 
fîgnfie,  l'un  deux  étoit  couché  dans  le  fein 
de  Jefus ,  en  prenant  le  fein  de  Jefus 
pour  îe  coté  vers  lequel  il  étoit  tourné. 
Ej  le  ir.  25  porte  (<j^in7H(râv  «Ts  z<7isi  to 
cQyi&oç  <rk  I'»tr«j  ce  qui  veutdire  à  la  let- 
tre incumbens  ou  inclinans  fe  Ce  Difciple 
donc  fe  panchant  ou  s3 appuyant  la  tête 
fur  la  poitrine  de  Jefus.  Ainfi  a.v'*Kii(j.ivoç 
recumbens ,  marque  la  pofture  dans  la- 
quelle Saint  Jean  fut  pendant  tout  le 
fouper  ,  &  Ko\<&oç  le  rang  ou  la  place 
qu'il  tenoit  auprès  de  Jefus.  Au  lieu 
quW/irefl-iyV  incidens  >   incumbens ,   fi- 


DlS<FRTÀTÎON  'V.      <!  I 

gnil 

fur  l'eftomath  d 

11  f.uir  :r  certc 

I 

- 
«S:  enc 

«t/x    Tut 
de  don 

bes  v  in  ver    -  que  l'an- 

:  prere  a  empl  ex- 

Mi- 

tonniirej   qui 
dlfl  it  leur»  malgré  la  l 

■ 
1  '.  fort  i  -  celui  de 

■  c. 

1.  On  '  (      rid  une 

dant  tour   le 
mme   *r  ■  rc- 

ous 
qu'on  renoic  ju- 

|*f    T»   0  i><w*   1 

.  de 

|  •  lit  ,  cV  11  *r*«  jh/  tm 

\fim%0m\  « **  1  té»'  c 

• 

1  r  le  fein  de 

M  it  le  repii  1  ce  <jui 

le. 


6 2i    Dissertation    XXXI V. 

3.  On  fait  commettre  à  ce  Difciple 
fi  refpe&ueux  une  incivilité  fort  inutile. 
Car  il  paroît  par  le  texte  qu'il  ne  repofa 
fa  tête  fur  le  fein  de  Jefus  que  pour 
obéir  au  %ne  que  lui  avoit  fait  Saint 
Pierre  de  lui  demander  fecrettement  qui 
étoit  le  traître  :  Innuit  ergo  hulc  Simon 
Pecrus  .....  Itaque  cîim  recubuiffet  illc 
fuprà  pecîus  Jefu ,  dicit  ei  ,  cVc.  Cette 
action  étoit  inutile  avant  ce  (igné  :  com- 
ment donc  la  lui  fait- on  faire  pendant 
tout  le  fouper  qui  fut  affez  long/* 

4.  Ce  qui  augmente  cette  difficulté  efl: 
que  Saint  Pierre  ne  lui  fit  figne  de  de- 
mander qui  étoit  le  traître ,  que  parce 
qu'il  étoit  couché  dans  le  fein  de  Jefus. 
C'eft  le  fens  du  texte,  Erat  rccumbens 
unus  ex  Difcipulis  in  finu  Jefu,  Innuit 
ergo  huic  Simon  Petrus ,  &c.  Cet  ergo 
marque  manifeitement  cette  raifon  à 
ceux  qui  connoiiïent  le  ftyle  de  S.  Jean. 
Et  cependant  félon  le  texte  même, Saint 
Jean  ne  fe  coucha  dans  le  fein  de  Jefus 
que  pour  fatisfaire  au  defir  de  S.  Pierre; 
Innuit  ergo  huic  Simon  Petrus  ....  Ita- 
que cîim  recubuijjet  die  fuprà  peclus  Je- 
fu j  dicit  ei ,  Domine  quis  efl  ?  Cet  ita- 
que exprime  clairement  cette  fuite.  Ainfî 
le  fîgne  de  Saint  Pierre  &  l'action  de 
Saint  Jean  auroient  été  caufe  l'un  de 
l'autre.  Saint  Pierre  auroic  fait  figne  à 


Dlf  SERT  ATI  ON      X  '.      olj 

un 
ont 
I 

resG  -  r  <  «/  % 

-JW13  1  ynir  comme  deux  .. 
diti.  ..  El  ii  -•  l*a  ta  b  i«i  ■         rit- 

comn  \  chol 

O;  «r'^fti/Vl 

^^rcf  m  fi/m,  de  la  place  honorable 
i  rem  pi  ni 

que  Jefus  Chrift  r.nfou  i. 
n  é ,  8c   lue  le  1 

Ciplc    :  r*- 

Scns  un  us  ex  Di^iyai  i 

/J  I ,    que- 

1CÔ 

i  dans  le  fein        I         l  la 
nelle  d 

du 

*/r/z  '  n    fin 

l'  •       1)      .  i   Dci 

y  l  //- 

/z/i  ,    T.-  cd  in  fi'. 

Il  la  c  -•  encore  .i  l'cuMidc-r. 

de    I  dans    le    fein  d'Abr.dn 

&   il   louuenr  ce  qu'il  en  .uoit  dit  ail- 
«contre  l*  Critique  d'un  in    taon 
qu'il  rapporte  en  ces  termes  :  ô:  L.i 


6*4     Dissertation   XXXIV. 

étoït  couché  dans  le  fein  d'Abraham  ,  & 
s'il  avoit  fuccédé  à  quelque  autre  >  il 
s'enfuit  que  lors  qu'un  autre  Jujle  mour- 
ra ,  le  pauvre  à  fon  tour  lui  cédera  la 
place.  11  répond  que  parler  ainfi  ,  c'eft 
ne  favoir  pas  qu'une  infinité  de  Juftes 
peuvent  fe  repofer  enfemble  dans  le  fein 
d'Abraham.  Tout  cela  repréfente  non 
une  action  palTagere ,  comme  eft  sJ 'ap- 
puyer ,  s'incliner,  Je  pancher ,  mais  un 
létar  durable  comme  eft  d'être  couché. 

Saint  Chryfoftome  demande  pour- 
quoi Saint  Jean  n'eft  pas  feulement  cou- 
ché dans  le  fein  de  Jefus ,  mais  qu'il 
s'appuie  encore  &  fe  panche  fur  fon 
eftomach.  Illud  autem  qu&fitu  dignum 
fuerit ,  quid  fit  quod  Joannes  in  finu 
Jefu  recumhit ,  &  non  rccumbit  folum  , 
fed  &  illius  peclori  incumbit  &  inniti* 
tur.  On  voit  qu'il  diftingue  ces  deux 
actions  comme  des  chofes  dont  la  fé- 
conde ajoute  8c  enchérit  fur  la  pre- 
mière. 

11  continue  cV  il  amure  que  ce  Difci- 
pîe  n'eût  point  rapporté  dans  fon  Evan- 
gile une  circonftance  auili  glorieufe  pour 
lui  qu'eft  d'avoir  été  couché  dans  le 
fein  de  Jefus ,  s'il  n'y  eût  été  obligé  par 
la  néceilité  de  nous  expliquer  pourquoi 
Saint  Pierre  s'étoit  plutôt  adreiré  à  lui 
par  un  figne  qu'à  un  autre ,  pour  de- 
mander 


DlSSERTAT!»'  \!V.         615 

mail  lit  qui 

cre.  Xcjuc  ' 

\     cnim  . 
rci  Pctrum    J  (de 

\orc  )    1/ 

I 

■ 

»r  que 
Clin!  Pi  :inr   J. 

I    hriil  |e 

ir  l'entendre  corn  m  ir , 

que    in  Si 

fur 
'  ns  lu  p 

>ltomc  qu 
couché  penduic  tout  le  foui 

ut  Jefus -(  Mi\\\  qu  1. 
•uitant  1 
I 
que  en  CCI 

C^hnlt  av.  ir  lui  ,    P 

■'     .     . 

.ire  cène  ilifiï- 
cultc  ,  efl  que  t 

. 
1    •:.  ir.  '  1)  d 


6i6  Dissertation  XXXIV. 
ciple  s'appuie  ,  ou  fe  panche  fur  le  pro- 
pre fein  de  Jefus.  Cur  autem  etiam  in- 
cumbit  peclori  ?  Il  diftingue  manifefte- 
ment  ii<m>rxi  tsthv  réf  o-foôs/  ,  d'avec 
ctvcLKa<rQcLi  iiç  Ko'h<œoV)  par  les  ques- 
tions différentes  qu'il  en  propofe  ;  autre- 
ment il  retourneroit  fur  fes  pas ,  Ôc  traite- 
roit  deux  fois  les  mêmes  chofes. 

Il  répond  que  ce  panchement  iW^ri^ 
nsTitv  y  venoit  d'un  excès  de  familiarité 
qui  ne  répondoit  pas  peut-être  affez  à 
la  haute  opinion  que  les  Apôtres  dé- 
voient avoir  pour  Jefus-Chrift;  ce  qu'il 
ne  dit  pas  d'*  cLKiî'ibcti  _,  puifqu'il  fal- 
loit  bien  que  quelqu'un  fut  couché  à. 
côté  de  Jefus-Chrift.  Nondum  de  Mo 
magnifiée  fentiebant.  Il  en  donne  pour 
2  raifon  que  Jefus-Chrift  permit  à  S. 
Jean  d'appuyer  fa  tête  fur  fa  poitrine  , 
ïçwitûi  emriiv  Tsôa  TffnSe/,  pour  adoucir 
un  peu  la  profonde  triftefte  qui  lui  faifoit 
pancher  la  tête  :  Pr&terea  ira  mœrorem 
Lenit.  Nam  admodum  confèntaneum  eji 
tune  vultuprdt  tnjlitia  demi ffb  ae  prono 
fuiffe.  Igitur  eos  verbis  demulcens  per- 
mittit  Joanni  _,  &  quajî  viam  aperit  ut 
peclori  fuo  incumbat.  Or  cette  triftelTe 
n'avoit  pa's  de  heu  quand  on  fe  mit  à 
table  ,  ce  qui  lignifie  a,v'a.KirçQcti.  Mais 
elle  ne  commença  que  loifque  Jefus- 
Chrift  leur  découvrit  la  trahifon  qu'un 


Dissertation  XXXIV.      6%j 
d'cntr'eux    lui   falloir. 

I  hcjphiljÉre  propofe  auîTî  aprî 

Ma  \ deux  aueftiom  :  meut , 

tl  tourne  ainli  la  i.  7Îro<  <Ti  l'rtfttf» 
>r  «i«nif  •  <-»/  7*  fuju  T. 
Pourquoi  cjî  -  ic  que  J.:  onfejctU 

le  fem  de  Jej.. 

II  :  ;  eque  recumbe 
in  fi  nu                   a  rAKî'iff^aLt   %r   7*   xc/.«« 

îicitic  r: 
I 

hrill  dans  la  place  \ 
relie  il  étoit  r  >n- 

Q     I)      :  .■       foi  rc- 

:•  infinujeju  ,    quia  ad  iatus  cjus 
in  men 
qui 

m  ad 
fur   in  fir.u    précède  • 

•Sfervc  encore  parmi  n 
.es   exprtllions.    Cet  homme 
mo  ri  s  de  Jj  •  r  f- 

K  uhcl  difoit  en  parlant   de  fa  | 
vante  ,   *//  pana:  genua  mca.   Au 

lieu  qiû(»»Tit T«fr  t»~  fur!/,  que 
l'ancien  Interprète  a  traduit  par  le  même 
vcihe   recum:  0fc  qtM    I  oler  a  t 

aufl»  p  mecholc  qu'at  * '«>6«# 

/  fignitie  r,  ou  pamher  fit 

ic  r  Icindejcj 

DJ    i. 


6i$  Dissertation  XXXV. 


DISSERTATION    XXXV. 

Joan.  C.  XIV.  v.    31.  Surgite , 

eamus  hinc.  Concord. 

C.    CXXXIII. 

AVant  ces  mots  on  met  ordinaire* 
ment  un  point  qui  ferme  la  pério- 
de à.  fie  facio.  Cette  ponctuation  eft 
d'autant  plus  mauvaife  qu'elle  laifTe  la 
première  partie  de  ce  t.  imparfaite  de 
fufpendue  ,  &  qu'elle  rend  la  IL  fans 
liaifon  &  fans  fuite,  comme  îlparoît  par 
cette  Traduction  :  Mais  afin  que  le  mon- 
de connoijfe  que  j'aime  mon  Père  ,  &  que 
je  fais  ce  que  mon  Père  m'a  ordonné. 
L'efprit  du  Lecteur  attend  là  quelque 
chofe  qui  ferve  de  moyen  à  cette  fin- là. 
On  ajoute  ,  leve^-vous  ,  fortons  d'ici. 
On  ne  fait  pourquoi  Jefus-Chrift  die 
cela  en  ce  lieu  plutôt  qu'en  un  autre  , 
de  on  le  fait  d'autant  moins  que  félon 
plufieurs  Auteurs  ,  Jefus-Chrift  ni  fes 
Apôtres  ne  fortirent  point  alors  de  la 
falle  du  fouper,  mais  feulement  à  la  fin 
du  ch.  XVII. 

Mais  qu'on  joigne  enfemble  ces  deux 
parties  en  changeant  le  point  en  une  fin>. 


DlSSl  R  TA TIOI  XV 

pie  virgule  ,  la  I.   trou-. 

fon  appui  dans  la  11.  &  I.i    IL   c: 

ù  railou  dans  la  I.    «S:  toutes 

ht  un  fens  admirable  qui  fait  voir  la 

( 
obc  n'a   l.i 

que  11    . 

de  t  ide  qui  v: 

ne  lui  lai  formais  ! 

leur  p..  s  cju'il'  ail  au 

;:  fur  1  ,  ni  qu'il  v  ail  t  ien  en 

lui  qui  lu  lit- 

il  y  q^c  U  moi.  me  mon 

Pcre  julqu'a    fuufinr  Li  d  .'il  m'a 

ne  meurs  ,  ni 
ice  comme  étant  coupable  ,  ni  p.ir  la 
violence  de  Satan  cV:  de  mes  is  , 

ni  par  furprife  comme  i 
à   l'improvise,  ni  enfin  par  foiblcfiV 

ombint   ma  ou 

au  DOmtx  ie  je   meurs 

ement , avec  une  pleine  nce, 

&  par  le  mont  de  mon  amour  6c  de  mon 

obeiiTance  envers  monP  ust 

Allons  au  Prirt- 

.    . 

dansle  lieu  où  ils  fe  d 

une  Auguftin  fur   le 
! 

Dd 


?$o  Dissertation  XXXVI. 


DISSERTATION  XXXVI. 

Marc.  C  XV.   v.    25.   Et  erat 

hora  tertia,  &crucifixzrunteum. 

Concord.  C.  CXLIII. 

L  y  a    ici  une  grande  difficulté  pour 
concilier  faint  Marc  avec  faine  Jean. 
Le  premier  témoigne  que  Jefus-Chrift 
fut  crucifié  à  la  troifîeme  heure.  Le  fé- 
cond au  contraire  ,  porte  qu'il  fut  con- 
damné par  Pilate   à  la   fixieme.   Erat 
ûiUcrn   parfeeve    hora    quaji  fexta*    Il 
fembleroit ,  félon  ces  deux  fuppofitions> 
que  Jefus-Chrift  auroit  été  crucifié  trois 
heures  avant  que  d'être  condamné.  Mais 
comme  cela  eft  contraire  au  rapport  de 
tous  les  Evangéliftes ,  qui  mettent  la  con- 
damnation   avant  le    crucifiement  ;   il 
femble  qu'il  ne  refte  plus ,   finon   que 
faint  Marc  ait  avancé  l'heure  du  cruci- 
fiement jufqu'a  la  3.  heure  du  jour  ,•  qui 
dans  l'équinoxe  où  arriva  la  Pafiion  de 
Jefus-Chriit ,   repondoit ,  félon  notre 
ufage,  a  l'heure  depuis  8    jufqu'a  9,  ou 
que  faint  Jean  ait  retardé  la  condamna- 
tion jufqu'a  la  6.  heure  _,  qui  duroit  de- 
puis nos  il  heures  jufqu'a  midi.  Mais 


Dissertation  XXXVI.    6$t 
le  rapport  délai:  i  elt  entiérenu 

aux  autres  Evanj  . ,  fans 

en  excepter  n  .in:  M.iv.    1,,  mer- 

a  la  6 

clçvc 
en  croix  y  il  paroîtpar  leur  u  âge 

qu'il  y  tut  attache  un  pc  :  le  point 

de  midi  ,  qui   elt  la  rin   Je  la 

place  la  condamnation  •©■ 

heure  auparavant   ,    Liiqu'il 

dit  qu'il  ctoi:  re  j 

:-a-dire,  qu'ellecommenym  lorfquc 

Pilate  livra  Jefus  Chrift  aux  Juifs,  r. 

?'l  fexti.  Ainli    iaint  Jean  s'acco: 
ort  bien  avec  les  autres,  <3c  toute  la  diffi- 
culté retombe  iur  laint  Marc. 

Pour  concilier  cette  contradiction  ap- 
parente ,  <  rtde  p  rs  moyens. 

.  >  expliquent  ce  crucifiement  de 

violence  &:  de  I  3 

>ur  fui  virent  la  mort  de  : 

M  IMate  d'  heure  du 

jour  :  tems  facre  ,   ou  ils  dévoient  etre 

occupés  aux  fonctions  du   I  cmple  dam 

une  rient  cn- 

.  de  la  précip  avec  laquelle  ils 

it  > 
des  ment  de  l-.-ar  .îllemblcc 

à  la  j 
le  pi  ont  etreexe- 

Dd    1. 


'6$i  Dissertation  XXXVI. 
curés  que  vers  la  fin ,  &  lorfqu'ils  étoient 
fur  le  point  de  fe  lever.  11  n'y  a  point  de 
fens  a  cela  ,  puifque  ce  fut  Pilate  qui 
Condamna  Jefus-Chrift  à  être  attaché  à 
la  Croix ,  &:  que  les  Juifs  n'y  eurentque 
la  part  de  furieux  accufateurs  ou  de  par- 
ties implacables. 

Les  autres  foupçonnent  que  le  pre- 
mier Copifte  de  l'Original  de  faint  Mare 
a  mis  tJYth  pour  î%t«  :  mais  les  cara- 
ctères ne  fe  refTemblent  gueres ,  pouf 
avoir  donné  lieu  a  cette  méprife  ;  &  pour 
la  commettre  il  falloir  être  terriblement 
âbftrair. 

Le  moyen  le  plus  ordinaire  eft  de  fup- 
pofer  que  les  anciens  ,  tant  Juifs  que 
Romains  ,  divifoient  le  jour  artificiel  en 
quatre  parties  égales  ,  dont  par  confé- 
quent  chacune  contenoit  trois  heures 
communes  :  que  la  première  commùn- 
çoit  au  leyer  du  Soleil  ,  c'eft-à-dire  ,  à 
nos  fix  heures  pendant  l'équinoxe  ,  8c 
finKToit  à  nos  neuf  heures.  La  féconde 
s'étendoit  depuis  neuf  heures  jufquM 
midi.  La  rroifieme  depuis  midijufquxà 
trois  heures  ;  de  la  quatrième  depuis 
trois  heures  jufqu'à  fix  ou  au  coucher 
du  Soleil.  Que  ces  quatre  parties  du  jour 
s'appelloient  des  heures  ,  quoique  cha- 
cune en  comprît  trois  communes  ,  & 
qu'elles  ne  fe  nommoient  pas ,  félon  h 


D  1 1  i  1  a  T  A  T I  O  N  XXXVI.    '  y  $ 
g  oa  l'ordre  qo'c  .:  ta* 

le,lar 
.;  laquarricm 
la  rroifieme  >  la  Gxieme  ,  oc  la  ir-u  . 
me  :  Parce  que  chacune  (  hormis  la  pre- 
:e  )  tiroir  Ton  nom  de   l'heure  com- 
mune tprès  laquelle  elle  commencoir* 
Que  ci     •  '•  I   \  heures-li  étoiemde 

ruelles  revenaient  tou- 
i ours,  e\:  i  par* 

prefqtie  point  des  heures  communes; 
cV  qu'ainh  lorfque  les  heures  lont  mar- 
quées dans  l'Ecriture  ,  ce  forr  in- 
des  ex  non  les  communes  qu'il  faut 
tendre.  Q  >ient  les  quatre 
heures  de  prière  ieni  en  u! 
parmi  les  Jtlift, 

f  >ns  de  '  qui 

B  au 

i'C  publiq 

I  lela  loi  le  partage  de  faint  Marc 

s'explique   d  ..    1   l  me 

gra'  uis  no  ieu- 

julqa'i  midi.  Jel 

fie  un  peu  avant  n  'ans 
l'efpace    de  la    troificmc    heure  avant 

qu'on  eût  donne  au  Tcmpl  1  de 
xicme  1k  are  de  pn 

.n(i  le  |             en  qu<  La 
ne  hcw                                       filêti 
tri.           .:. 

n  d  t 


634  Dissertation  XXXVI. 

En  vérité  ,  c'eft  dommage  qae  tout ce 
fyftème  n'eft  autîî  folide  qu'il  eft  heu- 
reux Se  commode  pour  concilier  cette 
contrariété  apparente.  Mais  par  malheur 
il  n'a  pas  l'autorité  d'un  feul  ancien. 
C'eft  un  ouvrage  en  l'air  Se  une  machi- 
ne faite  à  plainr  fur  le  modèle  des  qua- 
tre veilles  militaires,  pour  démêler  l'em- 
barras de  ces  deux  partages.  11  eft  inoui 
dans  toute  l'antiquité  Eccléflaftique  ôc 
prophane  ,  qu'aucun  Auteur  ait  feule- 
ment fait  mention  de  ces  grandes  heu- 
res ,  dont  il  n'en  falloit  que  quatre  pour 
faire  un  jour.  Il  eft  inoui  qu'aucun  Père 
&  qu'aucun  ancien  Interprête  ait  em- 
ployé cette  explication  pour  accorder  ces 
deux  Evangéliftes,&  qu'ils  avent  jamais 
parlé  des  heures,  foit  canoniques  ou  de 
prière,  foit  populaires  &  civiles,  que 
comme  d'heures  communes  ,  dont  il  en 
falloit  douze  pour  le  jour  &  douze  pour 
la  nuit.  C'eft  le  fentiment  de  plufieurs 
favans  Auteurs ,  comme  de  Tolet  .,  de 
Janfenius  d'Ipre  ,  &c.  En  effet  fi  on  le 
regarde  de  près  ,  on  verra  qu'il  n'y  a 
îien  de  plus  mal  concerté. 

Car  1.  Pourquoi  ne  les  a-ton  pas  di- 
stinguées .comme  les  quatre  veilles  de  la 
nuit  par  Tordre  qu'elles  obfervent  en- 
truelles;  &  qu'après  la  première  on  ne 
les  a  pas  nommées  la  féconde  >  l&  uqî~ 


DlSSU    TATl  :  < 

la  quatrième  do  jair. 

divilc  un   I  .  e  par:;  ;  le 

comptaient   comme   celle- l1  ,    don;    la 
première  étante:  ^ompree  pour  la 

,  les  trois  autre  >uc 

tou:  iqIç  '  i  onde  pour  la 

rroi  fc  la  hxieme  , 

&  la  quatrième  pour  la  ncuvic  ela 

le. 
(  ii-pn  ,    qv.  une  tire  Ton 

nom  de  li  de:  ommunequi 

la  I  :    P  .  ,  h  premier f 

grande   lie  me  heure 

commune.     Donc    la    i 

•  îcure. 
cft  d'au- 
tant  moins  raifonnabtc  qu'il  valoir bi 

er  chaque  grande  heure  par 
roiscomi 
nés  qu'elk  r  ,  que  pjr   une 

- 
Cp|  :  s .  I  )  '  •. ,  i  v  c    pas 

DC  £tandc 

ôc  qu'au    contraire 
e  dan. 

Vis 
a  ne 

la  pre- 
a  Uquc  -  ûc  dontic  poinr  le 

l>d        I 


C^G    Dissertation  XXXVI. 

De  plus  cette  étymologie  fe  trouvera 
fauife  dans  la  première  ,  qui  ne  tiroit 
point  fon  nom  de  celle  qui  l'avoit  pré- 
cédée ypuifque  c'étoit  celle  de  l'Auteur. 
Elle  fe  trouvera  encore  faulTe  dans  la  9  , 
dont  la  dernière  heure  étoit  l'heure  du 
foir  ou  des  Vêpres.  Enfin  on  ne  peut 
mieux  réfuter  cette  imagination  que  par 
les  veilles  même  de  la  nuit  ^  dont  îa 
première  commençoit  à  la  première 
heure  de  la  nuit  ou  au  coucher  du  So- 
leil ;  la  2.  au  commencement  de  la  4. 
heure,  la  3. au  commencement  de  la  7. 
■&  la  4.  au  commencement  de  la  1  o.  Ce- 
pendant on  ne  s'eft  jamais  avifé  de  nom- 
mer ces  4  veilles  du  nom  de  ces  4.  heu- 
res avec  lefquelles  elles  commençoienr, 
la  1.  la  4.  la  7.  la  10.  veille  de  la  nuit  ; 
ni  du  nom  des  4.  heures  ^  à  la  fin  def- 
quelles  elles  commençoient,en  les  nom- 
mant la  1.  la  3.  la  6.  la  9.  veille  de  la 
nuit.  Pourquoi  n'en  a-t-on  pas  ufé  ainfi 
en  faifant  ce  partage  prétendu  du  jour 
en  4  parties  égales  ? 

11.  On  dit  qu'on  ne  faifoit  prefque 
mention  que  de  ces  4  grandes  heures 
célèbres  ;  ce  qu'on  prétend  prouver  par 
l'Ecriture.  11  n'y  a  qu'à  s'en  rapporter 
à  fes  yeux  pour  fe  convaincre  du  con- 
traire. On  lit  en  faint  Jean,Ch.  1.  v.  39^ 
qu'il  étoit  environ  la  io,  heure  du  jour  > 


DlSSÎRTAT  IC 

lorfque  deux    Difciples  de    faine  J 
B.ipnrte  iuivircnt  Jefus  -  CJhriil   :    / 

l.    IV.    $. 
Que  la  fièvre  qu  fils  dv 

•ment  1  la  7.  Il  Q        icri 

hora  Je  quit  cum  fch- 

Match.  Ch.   >  X         6.  Que  .  de 

fan:  <  la  11.  heure  ,    &:  que 

erj  de  la  11.  heure  fur< 
compenlcs  comme  les  |  rs  :   C 

undcamjr 
cïrnam   /n  encrant.   Si    L  îgc- 

tic  par. 
tendu  du  jour  en  4  grandes  h.  il* 

aur  autem  erat    q 

herï  hora  ftxta    rei 
ht  pour  la  féconde  i\  no- 

111.  Ol  »U  moins  que  c< 

les  rois  qu'on  crouve  dans  ire  Ao- 

horâfi 

-andes  heures  qu 

Amlï  v 

■  t(i  fuc  cru  juf- 

qn  li. 

cet 

Ai. 

M  .  plitl  l  I 

•' 
1 ..       \curx 


€$%  Dis$|rtation  5JXXVL 

étant  accomplie  (  c'eft  le  fens  defacîa  ) 
les  ténèbres  Je  répandirent  par  tout. 
Cette  6.  heure  étoit-elle  l'heure  com- 
mune qui  dure  depuis  nos  11  jufqu'à 
midi  ,  ou  une  des  grandes  heures  ,  qui 
s'étendoit  depuis  midi  jufqu'à  nos  $  heu- 
res f  ils  ne  balancent  pas  à  dire  que  c'é- 
toit  une  (Impie heure  commune.  Autre- 
ment les  ténèbres  n'auroient  commencé 
qu'à  5.  heures  après  midi ,  &  auroienc 
duré  jufqu'à  G  heures  du  foir.  Ils  doi- 
vent dire  la  même  chofe  de  cette  9.  heu- 
re dont  parlent  trois  Evangélifres  :  De- 
puis la  6.  heure  jufqu'à  la  9.  les  ténè- 
bres fe  répandirent  par  toute  la  terre.  Ils 
font  obligés  d'avouer  que  Tune  &  l'autre 
font  des  heures  communes,  fous  peine 
de  fe  brouiller  avec  toute  la  Tradition, 
qui  porte  que  Jefus-Chrift  expira  à  la  9. 
heure  j  c'eft- à- dire,  à  nos  5  heures  après 
midi.  Pourquoi  donc  prennent-ils  la  £♦ 
heure  de  faint  Marc  comme  une  grande 
heure  qui  en  comprend  trois  ,  lorfqu'ils 
font  contraints  de  prendre  la  6.  &  la  9. 
du  même  faint  Marc  &  des  deux  autres 
Evangéliftes  pour  des  heures  communes? 
Qui  ne  voit  que  cette  différence  n'ed 
fondée  fur  aucune  raifon  ,  &  qu'ils  ï}fi 
fe  déterminent  à  ce  parti  que  par  l'en- 
gagement de  leurs  principes ,  8c  en  fuj> 
jpofam  ce  qui  ,eft  en  queftion  ? 


DlSSlUTATXON    XXXVI. 

I\r.   Il  ert  vilïble  que  ces    4.   hc. 

brouillent  &  confondent  tous   les  tems 

rmtcju;  heure 

uni    Jeaq  ,   ("h.    IV  :  hora. 

,  en  comprend    5   au- 

\   quelle  heu, 

I  a^  ob  f 
!u:  ou  le  croit  d'or- 

dm 

Tout  cela   eft  compris   dans  la    grande 
C.  heure  ,  &c   on  en  a  le  choix.  ( 
danr  oq  n'a  j.im  .  ,:c  que  ce 

idi.  On  11  :   des   4  gran- 

itc  lorfqu'il    s'agit  cjeiplî- 
;  le  pj  ini  Marc  que  nous 

is. 

BC  ailleurs  elles  (on:  furannees 
ex  hors  >re  un  exe 

■ 
velle   ima 

dir  des 

Juif 
dit  :  Ces  gens  tmi 

la  3.   4 

\  -  J  • 

heure  la  1 

. 
n'arToi';  w  feulement  la  r.uiun  de 

rulra  entier  6» 


640  Dissertation  XXXVï. 
re  grande  heure  duroit ,  comme  on  pré- 
tend ,  depuis  9  heures  jufqu'à  midi ,  qui 
cft  le  tems  où  l'on  dîne  ,  &  où  le  dîné 
même  finit  :  eft-ce  qu'il  ne  pouvoit  pas 
fe  trouver  des  gens  qui  s'enyvrafTent  en 
dînant  avant  midi  ?  11  y  en  a  eu  des 
exemples  dans  tous  les  fiécles  &  dans 
tous  les  païs.  Mais  fi  l'on  prend  cette  3. 
heure  pour  une  heure  commune  ,  qui 
dure  depuis  nos  8  heures  jufqu'à  9  ,  la 
raifon  de  cet  Apôtre  fautoit  aux  yeux  de 
tout  le  monde  ,  &  ne  fourTroit  pas  la 
moindre  chicanerie. 

V.  On  me  dira  peut-être  qu'il  y  a 
une  grande  différence  entre  les  heures  du 
jour  &  les  heures  de  Prière.  Les  premiè- 
res ont  été  divifées  en  douze,  &  chacu- 
ne tire  fon  nom  du  rang  ou  du  nombre 
où  elle  fe  rencontre.  Mais  il  n'y  avoir 
que  4  heures  de  Prière;  chacune  en 
contenoit  3  du  jour,  &  duroit  jufqu'au 
commencement  de  la  fuivante. 

Je  répons  que  fi  on  fe  contentoit  de 
dire  avec  les  Pères  de  l'Eglife  ,  que  les 
anciens  Hébreux  ,  de  après  eux  l'Eglife  , 
ont  choid  entre  les  douze  heures  du  jour 
les  quatre  plus  célèbres  pour  les  confa- 
crer  à  la  Prière, qui  font  la  1  ,  la  3  ,1a  6 * 
&  la  9  ,  on  ne  diroit  rien  que  de  vrai  Se 
de  raifonnable  :  mais  en  donnant  3  heu- 
res d  étendue  à  chaque  heure  de  Prière  ^ 


Dissertât:  XXXVI. 

comment  ne  voit-on  pas  que  cecre  d. 
fion  fe  dérruit  ell  ju'cllede- 

vient  ablolument  muni 

4  font    i  i  ,    tes  4  heures  de   Pnete 

comprv  h  tour  le  jour.   Auili  les  11 

du  jour  écoieoi  s    à  la. 

Pn  lent  le  partage  du 

ar- 
quer le  tems  | 
il  une  pure   illuti    n  ,    puifqu'il 
avoir  point  d'heure  dans  le  jour9<ni 
Ion  ce  partage  même  ne  fut  une  heure 
de  prière  ,  parce  q             appartenoit  i 


quelqu'une  desquarre.  11  n'y  a  donc  rien 
déplus  chimérique  en  foi  que  ce   i 
tendu  partage  du  jour  en  4  grandes  heu- 


res ,   ni  de  plus  inutile  pour  cclaircir  la 
dirheu.  [arc,  ou  pour  le  con- 

cilier avec  les  autres  Ev.. 

Il  n'v  a,  ce  me  femble,  qu'un  moven 
pour  en  venir  a  bout;  c'elt  deretonnoi- 
;ne  faute  de  Copifte  dans  ce  pacage, 
&  de  lire  ,    /  Se 

d.\i:  .il   ft  i  %   m'fë  et  te 

err  i  i    pu    fe  glulcr  dans  le  texte 

Ii.  le  Copille  avant    lu   au 

:*pé 
de  ce  que  plus  bas  au  \v 
COte  yirauirt  Xi  mf*t    »«T*.    I 


6^1     Dissertation    XXXVI. 

horâfextâ  tenebr&  facb&  funt  ,  &c.  II 
crut  que  cette  répétition  de  la  même 
datte  j  fi  près  l'une  de  l'autre  ^  n'étoit 
point  naturelle  ,  &  qu'il  falloit  qu'il  y 
eût  faute  dans  l'une  des  deux.  Il  connut 
d'ailleurs  que  la  féconde  étoit  conforme 
au  rapport  de  faint  Matthieu  &:  de  faine 
Luc  ,  qui  mettent  les  ténèbres  à  la  6, 
heure  :  il  crut  donc  ne  pouvoir  mieux 
faire  que  de  corriger  la  première  >  &  de 
mettre  tcT'/tm  ,  au  lieu  de  s'xtw. 

Cette  raifon  eft  fi  fpécieufe  ,  qu'il  y 
a  des  Auteurs  qui  fe  fervent  de  la  6. 
heure  du  f.  33 ,  pour  confirmer  la  3. 
keure  du  $.  2^, par  la  différence  des  datâ- 
tes. 11  ya,difent-ils,  une  fuite  naturelle 
à  dire  que  Jefus-Chrift  fut  crucifié  à  la 
troifieme  heure  ,  &  que  les  ténèbres  fe 
répandirent  à  la  6.  Mais  de  dire  qu'il 
fut  crucifié  à  la  6.  heure  ,  félon  cette 
nouvelle  correction ,  &  un  peu  plus  bas, 
que  les  ténèbres  fe  répandirent  encore  à 
la  6.  heure,  c'eft  répéter  inutilement  la 
même  datte  j  car  après  l'avoir  marquée 
une  fois  pour  le  crucifiemenr ,  il  n'y 
avoit  qu'à  écrire  tout  de  fuite  les  ténè- 
bres ci  le  refte  qui  étoit  arrivé  depuis. 
Puis  donc  que  laint  Marc  a  mis  deux 
dattes ,  ce  ne  peut  être  la  même  j  mais  il 
faut  qu'elles  ioient  différentes. 

Mais  ces  Auteurs  j  non  plus  que  le 


Dissertation  XVI.  64) 

Copiée  ,   n'ont   pas  conhderc  qu'il  v  a 

ifie*  de  différence  entre  la  dette  do  % 

15.  Et  erat  horâ  fextà  ,    ôc  celle  du    tf. 

3$.   1:    ■         koréj  ,    pouf   donner 

heu  à  un  \  :  ï  d*en  turc  deux 

dattes  1  nés  ;  l'une  pour  le 

fiemeni  ,  ex'  l'autre  pour  les    ténèbres. 

I  .i  peemîei  1  de  la  6. 
heure  commencé  ,  Se  elle  fe  doit  tour- 
ner air.;:  :  /  .r  alors  la  6.  h<ur<  ;  ce 
cjui  fera  vrai  depuis  nos  1  1  heures  juf- 
cju'a  midi.  La  1.  defigne  fa  fin  ,  &  l 'ex- 
prime comme  paflee  par  cette  tradu- 
ction :  La  6.  heure  étant  acke\<e  j  ce 
qui  eit  vrai  précilcment  a  midi  &c  de- 
puis. Ainfi  on  voit  que  ces  deux  dattes 
peuvent  être  éloignées  d'une  heure  en- 
tière \  quoique  cela  ne  foit  pas  nécelTai- 
re  ,  puifque  la  6.  heure  aura  pu  I 
entamée  de  $  quarts  d'heure  »  qu 
pourra  toujours  dire      /  fûê  horâ  fextà  : 

II  etoit  alors  la  6. heure. 

La  11.  voie   de  c  »rion  cft  celle 

que  nous  fournir  fauu  Jérôme  ou  l'Au- 
reur  du  Commentaire  fur  les  Pfeaumes 
qui  lui  cft  unSbmii  1  •  ns  la  Prcfjce  fur 
le  Pfc.  -  :e cette  faute  1     - 

r  la  reircmblance  entre 

>ics  qui   lervent    de 

1er  $    cV    •     Li   pie- 

QD  ;  ,  &    la  lc«.onde   un       , 


^44  Dissertation  XXXVI. 
qui  comme  on  voit  ont  beaucoup  de  rap- 
port l'un  à  l'autre  ;  &  que  S.  Marc 
ayant  écrit  la  féconde  m  £*  «'pet  *  ,  le 
Copifte  l'avoit  prife  pour  la  première  ; 
ôc  ayant  écrit  nv  cN.  a  ça.  ï  dans  la 
première  copie  ,  la  faute  s'étoit  répan- 
due dans  toutes  les  autres. 

Quoi  qu'il  en.  foit  ,  on  peut  faire  ainfi 
la  concorde  de  toutes  ces  dattes.  Selon 
faint  Jean  j  Jefus-Chrift  fut  condamné 
hora  quajifextâ ,  environ  la  6.  heure 
commençante,  ou  un  peu  avant  qu'elle 
commençât  j  ce  qui  répond  à  nos  10 
heures  crois  quarts. 

Selon  faint  Marc,  rétabli  par  le  Com- 
mentaire attribué  à  faint  Jérôme, il  fut 
Crucifié  à  la  6,  heure  courante  &  fort 
avancée  :  Et  erat  hora  fexta  &  cruci- 
fixerunt  eum  \  ce  qui  peut  répondre  à 
nos  ii  heures  trois  quarts. 

Selon  faint  Matthieu  ,  faint  Marc  Se 
faint  Luc  ,  les  ténèbres  commencèrent 
à  la  6.  heure  complette  &  achevée  , 
facla  hora  fexta  ,  c'eft-à-dire ,  juge- 
ment à  midi.  Ils  ont  tous  eu  foin  de 
marquer  ce  moment  précis  des  ténèbres, 
pour  marquer  qu'elles  avoient  commen- 
cé au  moment  où  le  Soleil  eft  le  plus 
élevé  fur  l'horifon.  Et  c'efl:  apparem- 
ment cette  exactitude  qui  a  obligé  faint 
Marc  à  diftinguer  le  tems  du  crucifie- 


Dissertation   XXXVI. 
ment ,  du  iqu'ill 

ruiîentc  îvuondun  quart 

d'heure. 

Lestcnebrcs  durèrent  ja  nde 

la  9.  heure  ou  fafqa'api 
après  midi.    1 

i    eft  alors   que   Jelus  l  tarai  ; 

Ainii  il  a  iqi  a  i . 

trois  heures  .1  mort 

I         .  d'Arimathie  a! 

bêta  un   linceul  , 
t  de  la  Myrre  ex  ,  ce 

qui  emporta  s  :   Lt  ils  le 

mirent  dani  1  ;ue  ,  félon 

faur  I    .    ,  le  SaboatalloU  commencer: 
Et  Sa 

un  peu  environ  6  1  V.nh 

H  fut  6   heu  i  la 

ir. 


646  Dissertation  XXXVII. 


DISSERTATION  XXXVII. 

Joan.    C.  XX.    v.    i.    Una  au- 

tem  Sabbati  Maria  Magdalene 
venitmanè,  ciim  adhuc  tenebros 
effent ,  ad  monumentum. 
Concord.  Cap.  CXLV. 

L'Embarras  qui  paroît  dans  l'hiftoi- 
re  de  la  Réfurrection  a  partagé 
les  Interprêtes  en  plusieurs  opinions,  ÔC 
une  Difïertation  ne  fufriroit  pas  à  qui 
voudroit  concilier  toutes  les  contrariétés 
apparentes  qui  fe  trouvent  fur  ce  poinc 
entre  tous  les  Evangéliftes.  Il  y  en  a 
dans  le  nombre  des  femmes  qui  vinrent 
au  Sépulcre  de  Jefus-Chrift  :  Saint  Jean 
n'en  nomme  qu'une ,  qui  eft  Marie 
Magdelaine  :  Saint  Matthieu  fait  men- 
tion de  deux ,  qui  font  la  même  Marie 
Magdelaine  ,  3c  une  autre  Marie,  qui 
ne  peut  être  que  la  mère  de  Jacques  ÔC 
de  Jude.  Saint  Marc  en  marque  trois. 
A  ces  deux  Maries  il  joint  encore  Sa- 
lomé.  Enfin  faint  Luc  ne  les  compte 
point  j  &  il  n'en  nomme  aucune  au 
commencement.  Il  attribue  feulement 
cette  pieufe  vifite   aux    femmes  qui 


Dissertation   Xa.WII.      £4) 

IcpuiS  la  Galilée  : 

r  leur  :  rc»  il  Ici  lit    t  >ue  par  • 

,  par  Jeanne 
M  nu  n.'w-re  ik-  Jacquet  le    -       nr  ,  fie 

autres  qui  I  a 

cou  int 

u  marquer  p         a   nom 

que  celle  «  .ce 

pieux   i  ers  Jcfus  -  Chrtlt.    1 

lun  dévoient   aiitU 

:  faine 
Lu,  Luc  l'honneur  à  routes  de 

marquer  nu  n 

11  y    ptroit  des    contrariétés   dans   le 
rei7:  ,    nui 

ini  M  mlueu 
ble  di;  il  le  foif  n 

me  du  ^  ibbat 

i  .  n  f  après  que  . 

Saint  Jean  témoigne  que  Marie 
laine  '.  nu    1U    Sé|  Llla  S     i    :  i  ' 

•lttc 

I    :ide 

,   valdc   nutic  :  Lr    lam:   Marc 

feul  a;  ;  icllcs  arrivci  le  le 

Soleil  (e  levou  ,  t  :  il  a 

en  tout  cela  a  rrane- 

on  cherc!  G  d'une   fi 

«Bande  diligence  >   d    .  de 


648  Dissertation  XXXVII. 
voir  qu'elles  n'avoient  rien  fçu  de  la 
garde  qu'on  faifoit  au  Sépulcre.  Ainiï 
rien  ne  les  arrêtoit  de  ce  côté- là.  De 
plus  en  partant  avant  le  jour  elles  ne 
voulurent  être  apperçucs  de  perfonne  , 
pour  ne  donner  aucun  lieu  aux  Juifs  de 
dire  qu'on  avoit  enlevé  le  Corps  de  Je- 
fus-Chrift  ,  quoiqu'alors  elles  n'eurent 
pas  le  moindre  foupçon  de  fa  Réfur- 
redtion. 

Il  y  paroît  des  contrariétés  dans  le 
nombre  des  Anges  que  ces  pieu  Tes  fem- 
mes rencontrèrent.  Saint  Matthieu  & 
faint  Marc  n'en  mettent  qu'un.  Saint 
Luc  au  contraire  &  faint  Jean  en  mar- 
quent deux  ,  en  laiflant  en  doute  fi  ce 
font  les  mêmes ,  ou  du  moins  s'ils  pa- 
roiffent  dans  les  mêmes  occasions.  Cela 
fe  doit  régler  par  l'examen  de  toutes  les 
circonftances.  Il  eil  plus  probable  qu'il 
y  eut  deux  Anges,  dont  l'un  feulement 
parla  aux  femmes.  Saint  Matthieu  8c 
faint  Marc  n'ont  fait  mention  que  de 
celui  qui  leur  parla.  Et  faint  Luc  ainfi 
que  faint  Jean  attribue  à  tous  deux  ce 
qu'un  feui  leut  dit  touchant  la  Réfur- 
rection  du  Seigneur. 

Enfin  il  y  paroît  des  contrariétés  dans 
les  actions  &  dans  les  voyages  de  ces 
pieufes  Dames.  Ce  que  fait  Magdelaine 
n'a  prefque  rien  de  commun  avec  les 

autres 


OlSSERTATï 

autres.  Scion  faim  Jeta  il  îcmblequ 
le  va  tout.  en 

rev:  •   avec 

(tint  Pi 
lui  parlent   : 
dans  le  }à- 
i 
femmes.  I 

Chriil  in   qui   le 

| 

I  0- 

:  I 

à  l'en: 

,    .S:    1  I 

I 

i,eV  rrou . 

l.i  ro<  me  v 

faii.    I         !  cette  • 

rut  vers  le 

avo 

beau  ,   &  qa 

1Y 

M  nepe-  'ie 

i 

1  -  • 

II 


<>5o  Dissertation  XXXVU. 

fouviennenc-elles  pas  que  le  premier 
Ange  leur  a  annoncé  laRéfurrec-tion  du 
Seigneur  ,  Se  que  cette  nouvelle  leur  a 
été  confirmée  par  deux  autres  ?  C'en:  , 
difent  ces  Auteurs ,  pour  les  exeufer  un 
peu ,  qu'elles  ne  crurent  point  le  rapport 
des  Anges,  &  qu'elles  eurent  moins  d'é- 
gard à  tout  ce  qu'ils  leur  dirent  tou- 
chant fa  Réfurrection  _,  qu'au  vuide  du 
Sépulcre  ,  pour  juger  qu'on  l'avoit  dé- 
robé. 

Voilà  une  étrange  exeufe  :  On  les 
rend  obftinément  incrédules  pour  les 
difculper  de  l'infidélité  de  leur  mémoi- 
re. Elles  dévoient  au  moins  rapporter 
aux  Apôtres  cette  vifion  &  cet  avis  des 
Anges  :  &  leur  en  lailTer  le  jugement: 
mais  on  ne  peut  leur  pardonner  qu'elles 
ne  leur  ayent  communiqué  que  leurs  foi- 
blés  conjectures  touchant  ce  larcin  pré- 
tendu, en  fupprimant  ce  que  les  Anges 
leur  avoient  commandé  de  leur  rappor- 
ter ,  je  dis  la  nouvelle  de  la  Réfurre- 
ction. Elles  n'y  ont  pas  manqué  fans 
doute  j  répondent  ces  Interprêtes  ;  mais 
elles  infifterent  plus  fur  l'enlèvement 
qu'elles  croyoient  ,  que  fur  la  Réfurre- 
ction qu'elles  ne  croyoient  pas  :  Quoi- 
que le  texte  n'en  parle  nullement  ,  il  le 
faut  fuppofer ,  puifque  ces  Auteurs  l'af- 
furent.  Voyons  la  fuite. 


Dissertation     XX  i 

partir  aulli-tor  pour  alL  Je 

tour  pal  leurs 

dcrc  mpccf 

f>our  rien  ni  la   vifion  ni 

cur    • 

s'en  retouri 

I 
:ncs  qui  II  i   dein- 

ne  autour  du  ScpuL 
cIk:  une  r.  ht  mu- 

dans  le  Jardin  ,    ians   IVOII    i  .    ni 

•Dp  ent    le 

min  i!  le.  M 

qui  s'etoie  toujours  at:  I    m- 

is  lieu: 
le  Sépulcre  deux  An  •  i  lui  c 

ce  qu  en  fc 

limant  ,    elU 

la  nou 
Elle  rc 
qui  r.. 

ble  eurent  la 

parut  a  elles.  Voil  i  le  ; 

■ 

îut  remarquer  que  ti 
on  :  îvcra   i 

excei  -    M 

. 
1 


t 


6$i  Dissertation  XXXVIÏ. 
en  trouve  regarde  le  premier.  Or  il  n'y 
a  rien  qui  ne  démontre  clairement ,  i. 
qu'elles  rapportèrent  aux  Apôtres  lesvi- 
iions  des  Anges  ,  2.  la  nouvelle  de  la 
Réfurrection  qu'ils  leur  avoient  annon- 
cée ,  3.  la  perfuation  où  elles  étoient  de 
fa  Réfurre6tion.  On  n'a  qu'à  lire  ce  que 
dit  faint  Luc.,  Ch.  XXIV.  v.  10.  Celles 
qui  témoignoient  tout  cela  aux  Apôtres 
étoïent  Marie  Magdelaine  j  Jeanne  y 
Marie  mère  de  Jacques  ,  &  les  autres  qui 
étoient  avec  elles.  Or  ce  qu'elles  rappor- 
taient c'étoit  l'apparition  des  Anges  & 
l'afîurance  de  la  Réfurreclion  de  Jefus- 
Chrift  ,  qui  précèdent  depuis  le  v.  5 
jufqu'au  v.  8.  Cela  eft  confirmé  par  le 
rapport  de  Cléophas,  v.  22  &  23 ,  qui 
déclare  ,  fans  faire  aucune  mention  du 
larcin  prétendu  ,  que  les  femmes  leur 
avoient  dit  feulement  qu'elles  avoient 
eu  une  vifîon  d'Anges  qui  ajjuroient  que 
Je  fus  étoit  vivant. 

Après  cette  a(Turance  ,  fur  quoi  peut- 
on  fonder  l'imagination  qu'on  leur  at- 
tribue que  fon  corps  avoit  été  dérobé, 
de  cette  fan  (Te  allarme  qu'elles  en  por- 
tèrent aux  Apôtres  ?  Ce  ne  pourroitêtre 
que  fur  une  incrédulité  opiniâtre  ,  non 
feulement  à  l'égard  des  Anges  ,  mais  ce 
qui  eft  incroyable,  à  l'égard  de  Jefus- 
Chrift  même.  Cac  un  des  moyens  donc 


D  XXXVII. 

1  A  ir  leur  peifuadc 

Fui  de  !  !.i  prc- 

i  il  leui 

i  i  c  il,   de  quelle  ntàr. 

encore  en 
.    Il  I  que 

le    1 

ns  des  hommes   ;  «  rj   y    q  . 

\emc 
Saint  La  ire  ,    |u 

I  1    :     / 
ver.  .  v.  (     h     :    • 

tinfi  P  tel 

la  i 

ave 

i  fe 

. 
Ou  ilt  '.  enc 

é\o 

m  en  croît  ce?  loi 

! 

■ 

:  I 

les 
i  lui  il. 

Bi    h j 


6 54  Dissirtation  XXXVII. 
douleur  ,  ne  lui  reprochent-ils  pas  Tin- 
crédulité  qu'elle  avoir  pour  leur  témoi- 
gnage ?  Comment  Jefus-Chrift  qui  l'a 
reprochée  aux  Voyageurs  d'Emaiis  & 
aux  Apôtres  aflemblés  ,  ne  l'en  blâme- 
t-il  point ,  non  plus  que  les  autres  fem- 
mes qu'il  rencontra  en  chemin  r'il  n'y  a 
point  de  vrai-femblance  dans  toute  cette 
difpofition  :  &  toute  cette  brouillerie 
ne  vient  que  de  ce  qu'on  a  joint  mal  à 
propos  les  femmes  avec  Magdelaine  dans 
les  deux  voyages  ,  &  Magdelaine  avec 
les  femmes  dans  l'entretien  des  Anges. 
Les  autres  Auteurs  les  joignant  tou- 
jours enfemble ,  ont  cru  remédier  à  tous 
ces  inconvéniens  ,  en  retranchant  un 
des  voyages  &  en  ne  faifant  aller  qu'une 
fois  Magdelaine  au  Sépulcre  non  plus 
que  les  autres  :  mais  c'eft  encore  pis.  Ils 
difent  que  les  Anges  ayant  déclaré  à 
toutes  la  Réfurrection  de  Jefus-Chrift, 
&:  que  dans  leur  retour  Jefus-Chrift 
leur  ayant  apparu,  ôc  leur  ayant  confir- 
me par  fa  préfence  ce  que  les  Anges 
-leur  avoient  annoncé,  avec  ordre  de  dire 
de  fa  part  a  fes  frères  d'aller  l'attendre 
en  Galilée  ,  6V  que  c'éroit-là  qu'ils  le 
verroientj  au  lieu  d'obéir  a  cet  ordre 
de  Jefus-Chrift,  elles  donnèrent  cette 
fauife  alarme  aux  Difciples:  On  a  enlè- 
ve le    Seigneur   hors   du   Sépulcre  y    & 


DfSSIATATlOM    XXXVII. 

.  f  ne  /avons  Qqq 

.1 
fans  être  fui t  1  d'au- 

cune aiicr.  revim 

lit  ûinc 

-5   y 
I 

- 

que 
:  cela 

:c  , 

rtc    par  récapicolâ- 

tion.    On  ne  prouve  tous  ces  paradoxes 

iut  mieux  ex- 
plique: |  les  rrois  mitres 
tv.                            ces  tr  me 

confid 
fupj  •  cri 

que  ,  &  qu 

fl 

. 

tre 
rico! 

■ 

: 

iv 


Ctf  Dissertation  XXXVIÏ. 
peut  dire  que  fon  Evangile  peut  fervir 
de  flambeau  pour  porter  le  jour  dans  les 
obfcurités  des  autres,  de  de  règle  pour 
fixer  l'incertitude  de  leurs  dattes. 

Mais  qui  peut  feulement  entendre  , 
fans  fe  foulever,que  de  pieufes  femmes 
qui  ontappris  des  Anges  la  Réfurrection 
de  Jefus-Chrift,  qui  l'ont  vu  ,  entendu 
Se  touché  lui-même  ,  foient  allé  trom- 
per les  Apôtres  par  la  faillie  nouvelle 
de  fon  enlèvement.  Ou  étoit  leur  fin- 
cérité  &  leur  pudeur  ?  Où  étoit  du 
moins  l'obéiflance  qu'elles  dévoient  ren- 
dre à"  leur  divin  Maître  ,  fi  les  Anges, 
qui  leur  avoient  commandé  la  même 
chofe  ,  n'avoient  pas  aiTez  d'autorité 
pour  s'en  faire  obéir  ? 

On  leur  fournit  deux  exeufes.  La 
première  eft ,  qu'auiîi-tôt  que  Pierre  ÔC 
Jean  eurent  ouï  la  première  parole  de 
leur  rapport,  ils  ne  fe  donnèrent  pas  le 
loifir  d'entendre  le  reile  de  ce  qu'elles 
avoient  à  leur  dire,  mais  qu'ils  étoient 
partis  de  la  main  pour  courir  au  Sépul- 
cre ,  3c  voir  par  eux-mêmes  l'état  des 
chofes.  Qu'après  leur  départ  elles  avoient 
achevé  leur  difeours  _,  ôc  conté  aux  au- 
tres Difciples  la  viilon  des  Anges  ,  l'ap- 
parition de  Jefus  -  Chrift  ôc  tout  ce 
qu'elles  favoient  de  fa  Réfurrection. 
Cette  première  exeufene  difculpenul- 


DlSSIRT  A  TIOV    XXXVII 

lemenc    les    f<  s.  11  n'y  a   dam 

condur 

fiocérifé  m  charité.  Elle  ne  par 

paroles  :   Oh  .:  cmti  vt  U    S 

il  f.illoic  au  mu  Pierre  6c 

fauu  Jean  cullent  eoiei  I  prenueis 

,ar  harangue  a  .Icc 

i  elles  ne  I     no- 

rjrc 
vol  ne  les  A  e  qui 

. 
:  aofli  peu  de  chai 

CSy  jul  •  •  elles  l 

I   à* 

ne  appris  des 
An.  ur- 

eux  ce   faux    : 

;  i  il  leii.  llf- 

Cectc  ( 
i  ,  on  leur  i 

ne  vaur  gu  un 

pot 

lies 

:nmc  h  elles 

CTO  pul- 


6-58  Dissertation  XXXVlï. 

cre  ,  afin  de  les  exciter  à  y  aller  eux- 
mêmes  &  à  chercher  ce  faint  Corps 
mieux  qu'elles  n 'avoient  fait.  Elles  les  y 
portèrent  daas  la  croyance  qu'ils  ver- 
roient  comme  elles  les  Anges  ôc  Jefus- 
Chrift  j  ôc  qu'ainfi  petfuadés  par  leurs 
proptes  yeux  ils  n'auroient  plus  befoin 
de  leur  témoignage.  Mais  par  malheur 
Cléophas  brouille  &  déconcerte  tout  cet 
artifice;  car  il  témoigne  dans  faint  Luc 
que  les  femmes  leut  avoient  rapporté 
l'apparition  des  Anges  qui  aifuroient  la 
Réfurreâion  de  Jefus-Chnft.  On  ré- 
pond donc  que  les  autres  Difciples  ne 
s'en  étant  pas  remués  pour  cela  ,  les 
femmes  après  la  fortie  de  Pierre  &  de 
Jean  achevèrent  de  dire  tout  ce  qu'elles 
iavoient  de  fa  Réfurrection  ;  C'eft-à- 
dire  qu'elles  fe  rétractèrent  du  menfon- 
ge  qu'elles  avoient  avancé  d'abord  ,  en 
leur  faifant  accroire  qu'on  avoit  dérobé 
ce  faint  Corps. 

Rien  n'eft  plus  arbitraire  ni  plus  fri- 
vole que  toutes  ces  conjectures.  Car, 
eft-il  permis  de  mentir  pout  une  bonne 
fin  ,  comme  étoit  à  leur  gré  d'obliger 
tous  les  Apôtres  d'aller  voir  eux  mêmes 
le  Sépulcre  ?  i.  11  falloit  qu'elles  euf- 
fent  confpiré  toutes  enfemble  en  che- 
min de  faire  cette  tromperie  aux Apô- 
tces  ,  Ôc  de  leur  cacher  cette  heureufe 


DtSSlfcTATfOM   XXXVII.  r,\0 
aveHeqn'etlei 

drc 

i  6e  li  piété  de  es? 

fct  c  -lies  ne 

ne  s 
ce  qu'un  d(    1  K  de  Sai 

;u'ils   trouve: 

hui   un 

I  .ne    ne 

.ue  leur 

qu'il   lai 
ment  cor  11'il  a'éroil 

ble  que  d'<  i  1er 

voir  un  fcpuLre  on   a- 

voit  enlevé  le  corps.  A  k-i.ip- 

;ue    let 
deui  foc* 

fe  pai 
&   t  qu'il  nv 

avoir  U  n  r  eux  ,   ne    l'cÉ 

ucren-  '  .nt    au  c 

que  le  nlus 

1  le  tranf- 

>ut   ce  qu'cl- 
I  11  vu ,  }  ili  au- 

ne ap- 
i.  c 


66o  Dissertation  XXXV1L 
pantion  de  Jefus-Chrift  Se  des  Anges  ? 
11  ne  refterien  à  répondre  à  cela  ,  finon 
que  c'étoient  de  bonnes  femmes  qui  ne 
raifonnoient  pas  bien. 

Mais  d'autres  Auteurs  ont  trouvé  ce 
menfonge  fi  groiîier  qu'ils  leur  ont  fait 
commencer  leur  rapport  par  les  nou- 
velles de  la  Réiurrecîion  ,  Se  par  les 
preuves  démonftratives  qu'elles  en  a- 
voient.  Mais  ils  ajoutent  que  trouvant 
les  efprits  des  Apôtres  fermés  à  cette 
merveille  furprenante  ,  elles  avoient 
changé  de  ton  j  Se  qu'elles  leur  avoient 
débité  l'enlèvement  du  Corps  de  Jefus- 
Chrift  pour  fe  conformer  à  leur  opi- 
nion. 

11  y  a  toujours  pour  elles  dans  cette 
explication  un  menfonge  de  moins  que 
dans  la  précédente  :  Se  je  fais  bon  gré  à 
ces  Auteurs  de  le  leur  avoir  épargné. 
Mais  à  cela  près  il  n'y  a  pas  plus  de 
probabilité.  Eft-il  croyable  qu'elles  euf- 
fent  renoncé  à  tout  ce  qu'elles  avoient 
vu  Se  entendu  touchant  la  Réfurrection 
de  Jefus-Chrift ,  Se  à  l'épreuve  même 


Apôtres  qi 
voient  rien  ?  Se  peut-il  faire  qu'elles 
ayent  préféré  cette  injufte  défiance  à  tant 
de  preuves  fenfibles  Se  palpables  dont 


Dissertation  WXVII. 
elles  a'.  icnc  y 

lu  loilir  &c 
eursquc  lire 

J'ajouterai  1-  ~nt  qu'on  n 

le  bon 
d 
Qu'elle  hc 

.les  A 

que  leur 

-Ut    OU 

pourri  LUS  la  R 

,  «S:  dans  le  r.ipj 
..un  aux  A. 
point  n 

i:::  il  ra  par 

abrège 

i.    i  ces  en  1 

blc  au  fépulci  ai  (roi. 

ifljS debon  lur  la  pierre  ne    le  !:: 

ne  trouvèrent 
inc  le  t 

:il.|u'.i 

enc 
R  ce  que  «lit  I 

jrs 
aucun  . 

j.  i 
Uut  di 


^i  Dissertation  XXXVll. 
de  ce  qui  Te  palfoit  ,  les  priant  de  l'at- 
tendre là  de  pied  ferme  jnfqu'à  ce  qu'elle 
fût  de  retour.  Elle  y  courut  ,  elle  leur 
expofa  qu'ellesn'avoient  point  crouvéle 
Corps  du  Seigneur  Jefus  j  &  qu'on  Ta- 
voit  fans  doute  tranfporté  ailleurs  ,  qui 
eft  la  première  penfée  qui  leur  en  étoic 
venue  dans  l'efprit  j  &  la  feule  qu'elles 
en  dévoient  naturellement  avoir.  Jean. 
C.XX.v.i. 

4.  Pierre  &  Jean  partirent  aulîl-tôt 
fuivis  deMagdelaine,  &:  ayant  confidéré 
Fétatdu  fépulcre  conforme  à  ce  qu'elle 
leur  en  avoit  dit,  ils  ylaiîfcrent  les  fem- 
mes &  s'en  retournèrent  chez  eux  pleins 
de  l'idée  de  fon  enlèvement  8c  de  l'ad- 
miration comment  on  avoit  eu  la  har- 
dielfe  &  le  bonheur  d'exécuter  une  fi 
périlleufe  entreprife.  Jean.  C.  XX.  v. 

5.  Les  femmes  demeurèrent  là  tou- 
jours concernées  de  cet  accident}  mais 
s'étanr  féparées  pour  chercher  ce  pré- 
cieux dépôt ,  Magdelaine  fortit  la  pre- 
mière du  fépulcre  ,  &  s'avança  plus  loin 
dans  le  jardin  ,  pour  voir  fi  on  ne  Tau- 
roit  point  caché  dans  quelque  lieu  écar- 
te ,  en  attendant  qu'on  pût  l'emporter 
plus  commodément  quand  il  feroit  jour. 

6.  Les  autres  fortirent  peu  après  Mag- 
delaine  pour  faire  aulîi  cette  recherche 
chacune  de  leur  côté.  Mais  elles  furenc 


/ 


DtSSlfcTATI  XXXYIt      tfj 

I  dans  .  :  dans  la  pi 

miere  g  par  deux  A  [uifen 

.:U   II  d  JCS 

;ts  d'une  bUnchtui  fciarimt.   Luc. 

in  d'eux  ,  le  B   qui  s'ctoit 

(ur  L  .  prit  la  parole  ,    il   les 

ralïura  de  leur   t  ,   leur  témoig 

l 

ir   |*CI  pat    leurs 

i  lumière 
qui  ut   roucc   la  grotte  :    il    leur 

mon  uns  le 

Co:  ir  tour  ii  h- 

que 

I  liqueurs  ,  qui   eur  I 
tab; 
Ils  ;  mmuiere 

fur-to  .  I  m. 

v.  j.  M  •  «•    Elles 

rerr  >ulcre  avec  une  I 

de  *K« 

8.     M   ?d  :laine  aprci  une  rc 
inuule  revint  au  pour  c 

de  nouveau  U  vilitr 

i  la  lumicie  du  |oiM  qui 
nde  ,    elle  j  deui 

Ai  rH  appaiç^Uiinenc  lc\ 

ient  a} ,         iux  auucv  icuv 


fcr4  Dissertation  XXXVII. 
mes.  Elle  les  prit  pour  des  gens  incon- 
nus  qui  eroient  entres  la,  par  ordre  y  de- 
puis qu'elle  en  étoit  fortie.  Elle  les  quit* 
ta,&fe  retournant  elle  vit  Jefus-Chrift 
qu'elle  prit  d'abord  pour  le  Jardinier.  Il 
l'envoya  porter  à  fes  frères  la  nouvelle 
de  (on  Afcenfion  prochaine  ,  parce  que 
celle  de  la  Réfutrection  leur  devoit  être 
portée  la  première  par  fes  compagnes 
qui  l'avoient  précédée. 

9.  Jefus  leur  apparut  lorfqu'elles 
étoient  encore  en  chemin  pour  s'en  re- 
tourner j  il  leur  commanda  de  dire  de 
fa  part  à  (es  frères  qu'ils  fe  rendirent  en 
Galilée,  ôc  que  c'eft-là  qu'ils  le  verroient: 
cet  ordre  regardoit  toute  la  troupe  des 
70  Diiciples. 

10.  Elles  firent  aux  Apôtres  le  rap- 
port de  tout  ce  qui  leur  étoit  arrivé  , 
Magdelaine  fuivenant  fe  joignit  à  elles 
pour  confirmer  leur  témoignage  par  le 
iien,  &  ils  eurent  la  dureté  de  rejetter 
l'un  &  l'autre. 

Il  n'y  a  rien  qui  fe  démente  dans  cette 
Concorde.  La  brouillerie  vient  de  ce 
qu'on  s'efl:  trop  hâté  de  faire  paroître 
les  Anges  aux  femmes,  Se  de  ce  qu'on  a 
mêlé  par-tout  Magdelaine  avec  elles.  Il 
n'y  a  qu'à  attendre  fon  retour  au  fépul- 
cre ,  &  toutes  chofes  fe  développeront 
d'elles-mêmes. 


Dissertation  XXXVIII.  66) 


DIS  SE  RI  A  T  ION    X         UL 

Joan.    I  X  .  V.     1 7.    DU  îi   ci 

J     .       A    //  me  tangere  ;  non- 
du  m    enim  a\\  P     rcm 

meurn.  (  onL  (      I    \  1  -\  • 

CEttc  l<  fcnfe  que  J  l  hrift  f.u't 

le  toucher  ,    & 

la  raifoa  lie- 
nt obf< 

de     loi 

Apôtres, 

chc\ 

qu'il  le  i   1  M 

1  )    ... 
snd«  il  -   (  du  il  y  M 

wersn 

VCC 

I 

1  ni  les  A  le  le  coucher.  Il 

le 

Il  cit 
bra  qu'il  cil 

ikâxiofieûd'u 


CSG  Dissertation  XXXVIII. 
quis'eft  imaginé  que  ces  paroles  regar- 
dèrent la  million  du  faint-Efpric  ,,  &  la 
promette  que  Jefus-Chrift  avoic  faite  à 
les  Difciples  qu'il  ne  les  laifleroit  point 
orphelins.  Que  c'eft-là  probablement 
que  fe  portoit  l'intention  ôc  l'efprit  de 
Magdelaine  lorfqu'elle  embranoit  {es 
pieds, c'eft-à-dire  qu'elle  lui  demandoit 
le  faint  Efprit.  Mais  lui  répondit-il,  il 
faut  que  je  remonte  vers  mon  Père  avant 
que  je  vous  donne  ce  que  je  vous  ai  pro- 
mis. Ne  m'arrêtez  donc  point  fi  vous 
êtes  dans  cette  attente  ;  mais  attendez 
plutôt  mon  Afcenfion  ,  6c  faites  à  mes 
frères  pour  leur  confolation  le  rapport 
de  ce  que  je  viens  de  vous  dire. 

Ainfi,  au  conte  de  cet  Auteur,Magde- 
laine  étant  allée  porter  aux  Apôtres  la 
nouvelle  de  rAfcenfion  future  de  Jefus- 
Chrift  ,  elle  avoit  dans  l'efprit  une  pro- 
mette qu'il  avoit  faite  trois  jours  aupara- 
vant à  fes  Apôtres  :  qui  très-apparem- 
ment n'y  fongeoient  pas  eux-mêmes  dans 
l'accablement  de  douleur  où  ils  étoient 
depuis  j  bien  loin  d'en  avoir  parlé  à 
Magdelaine  ou  à  quelqu'autre  que  ce 
fut.  Cela  ne  mérite  point  qu'on  s'amufe 
à  le  réfuter.  11  fe  réfute  alTez  de  foi- 
même. 

La  IL  explication  eft  que  Magdelai- 
ne croyant  que  Jefus-Chrift  étoit  reiTiu- 


Dissertation  XXXVIIÏ.     CCy 
,    a  peu  près   comir  .re  ,  y 

converfer  familièrement  l  i 

ciples  comme  auparavant  >  elle  I 

SI  pieds  pour  .1  le 

lui  permit  ahn  qu'elle  ne   doutât  nulle- 
ment   de    là    \ 

;s  comme  ell.  »  quitroil  point  , 

U  l'en  reprit,  6t  il    rue  ol  de    lui 

e  qu'ell  il  p.is  ,  e  autre- 

rois  s'atra 

voir  de  leçon,  ce 

:  encore  un  ( 

rourne 
vers  ion  Père.  Mais  qu'elle  devoir  fa- 
voir  qu'il  croit  r .  condi- 

tions plus  excellent.  .   ÔC 

ni  peu  il  mo  s  le  C 

le   tri 
plus  avec  cette  familial 

ordinaire  ,  elle  <k         le  quiti 
îrumci 

:  rl" 
; 

On  B  I  ne 

Ique  défaut  , 

* 

fur  cet   en  S*    cette   avidité 

avec  laquelle  elle  en  de 

H  le  rej  us 

cette  cxpl.  M  ..i» 


66%  Dissertation  XXXVIII. 
commode  eft  que  la  vraie  réponfe  de 
Jefus-Chrift  :  Je  dois  dans  peu  remon- 
ter vers  mon  Père  _,  eft  fupprimée  &  fous- 
entendue  :  &  que  ce  qu'il  répond ,  car 
je  ne  fuis  pas  encore  remonté  vers  mon 
Père  j  n'eft  qu'une  difficulté  &  comme 
une  objection  contre  fa  défenfe  &  fa 
vraie  réponfe.  Car  qui  ne  voie  qu'il  ne 
paroît  pas  de  fuite  à  dire  yje  ne  fuis  pas 
encore  monté  vers  mon  Père ,  vous  ne  de- 
rqr  donc  pas  me  tenir  les  pieds  embraf 
fés  \  puifqu'ii  étoit  aifé  à  Magdelaine 
de  tourner  cette  raifon  contre  lui-même. 
C'eft  tout  le  contraire.  Je  vous  dois  te- 
nir \çs  pieds  embraftes  pendant  que  nous 
vous  polfedons  ,  &  que  vous  n'êtes  pas 
encore  monté  vers  votre  Père. 

La  III.  explication  eft  encore  moins 
naturelle.  D'abord  Magdelaine  crut  que 
c'étoit  le  Jardinier.  Mais  aufli-tôt  que 
Jefus-Chrift  l'eûr  appellée  par  fon  nom 
elle  le  reconnut  pour  le  Seigneur.  Elle 
fe  défioit  néanmoins  de  fes  yeux,  en  le 
croyant  un  phantôme.  Elle  voulut  donc, 
en  le  touchant  des  mains,  effayerfi  c'é- 
toit véritablement  le  Seigneur.  Mais  il 
lui  dit,  Ne  me  touchez  pas.  C'eft-à- 
dire  ,  ne  m'éprouvez  point  en  me  tou- 
chant. C'eft  moi-même.  Car  je  ne  fuis 
pas  encore  monté  vers  mon  Père  ,  de  je 
fuis  encore  fur  la  terre.  Cette  explica- 


Dl^F  RTATIO 

:  qui  paroii  d'abord  tort  plauiîbU 

; 

i .  S 1  M 

I   huit  avant  qu 
pcll  M  iicre  ,  ce  I 

que  couleur.  Car  on  diroit  qtl'ell 

roit  reconnu  |  v  .1'- 

ellc 

uchant  île  (es  in.un 
Chntt   lui  m.  il    D 

ainli    :    Elle    l*ap 

ou  du 
en  iiu-i 

1s.   Car    J  huit    ne    lui 

me  (ou, 
cette  exel  .    :     V 

tencen  ni  ainli 

r 

Chrilt  :  ii  I 

cju'v  avoir  il  de  plus  conn  uic 

I 
i  i  elle  croie i     r  J         '     uit 

ulunr 
doute ,  par  un 

u  luoi  Jefui  ( 
le  le  Koochec  poui  i 

lui  1 

1  que   Map  Icta  i-li    le 

ntr  ur  un 

■c  ,  Se  celle-, i  I  HM 


€yoD  I  S  S  E  R  T  A  T  I  O  N    XXXVIII. 

explication  le  prend  pour  un  phantôme. 
Cependant  Jefus-Chrift  ,  ainfi  que  je 
l'ai  dit  plus  haut,  ne  permet  pas  feule- 
ment aux  Apôtres  de  le  toucher  pour 
fe  guérir  de  leur  erreur  :  mais  il  les  y 
exhorte  ,  il  les  en  prie  ,  palpate  &  vi- 
dete.  Et  lorfque  Magdelaine  veut  d'elle- 
même  s'apurer  de  la  vérité  par  cette 
voie,  Jefus-Chrift  la  rejette  &  lui  dé- 
fend de  le  toucher.  C'eft  une  autre  con- 
tradiction dans  la  conduite  de  Jefus- 
Chrift. 

3.  La  première  idée  que  ce  qu'on  voit 
eft  un  phantôme  ,  frappe  tout  d'un  coup 
Tefpritde  crainte  &  d'horreur.  Les  Apô- 
tres Féprouverenfjfelon  faint  Luc  :  Alors 
tout  troublés  &  effrayes  ils  s'imagi- 
noient  voir  un  efprit.  Voici  cependant 
une  femme  qui  fe  jette  fur  un  objet 
qu'elle  foupçonne  un  phantôme ,  pour 
éprouver  en  le  touchant  fi  c'eft  un  corps 
folide  ou  non.  Cette  femme  devoit  être 
bien  hardie. 

4.  On  ne  comprend  pas  la  raifon  de 
Jefus-Chrift  pour  empêcher  Magdelai- 
ne de  le  roucher.  N'éprouvez  pas  en  me 
touchant  fi  c'eft  moi  que  vous  voyez. 
C'eft  moi-même.  Car  je  fuis  encore  fur 
la  terre  ,  &  je  ne  fuis  pas  remonté  vers 
mon  Père.  Mais  cette  raifon  fuppofoic 
déjà  ce  qui  ctoit  en  queftion.  Car  ce 


F  R  T   A  T 

dont  M 
va   mort  I 

îve  du  I 

me 
■ 
la  <  qui 

pour  ce  qu'il 

;  lune  pour  y 

c'ej'  ,        .jue  je  j  ■ 

la  un    ,  I   i 

■ 

nature  le. 

La 

ne  lui  tenu  pas  le 

prc.  t  la  joie  de  le 

revoir  i  q  Til  n 

cor^  i    terounicr 

corc  plufk 

où  clic  aurou  le  loiûl  de  le  voir ,  mm 


r6yi  Dissertation  XXXIX. 
qu'elle  le  quittât  pour  aller  porter  à  fes 
Difciples  l'heureufe  nouvelle  de  fa  Ré- 
furreétion.  Un  des  fens  de  «tV-rêfô*/ 
eft  fe  lier  étroitement ,  s'attacher  avec 
ardeur ,  avec  avidité. 


DISSE  R  T  AT  I O  N  XXXIX. 

Joan.  XXL  v.  22.  Dicit  ei  Jefus: 
Sic  enim  volo  manere  donecve- 
niamy  quid  ad  te  ?  Tu  me  fe- 
quere.  Concord.  C.  CXLVIIL 

AVant  que  de  nous  engager  dans 
les  difficultés  de  ce  paftage  ,  il  eft 
bon  d'en  fixer  la  leçon  3  &  de  convenir 
de  la  lignification  des  termes.  Au  lieu 
de  Jlc  le  Grec  porte  ia.vs  Jî  j  ce  qui  fait 
une  proportion  conditionnelle  :  &  il  eft 
vifible  que  cette  leçon  eft  la  meilleure, 
non-feulement  parce  qu'elle  fe  trouve 
fans  variation  dans  tous  les  exemplaires 
Grecs  ,  &  même  en  quelques  manuf- 
crits  Latins  \  mais  parce  qu'il  paroît 
aufli  difficile  que  le  Grec  ait  pu  être 
altéré  par  la  diftradtion  ,  ou  par  la  té- 
mérité des  Copiftes ,  qu'il  étoit  aifé  que 
le  latin  put  l'être  par  les  mêmes  caufes. 
Rien  n'eft  plus  facile  que  de  faire^/fc  de 

A 


D  I  S  S  r  R  T  A  T  : 

i'unei 
dremêoie  enfeml 

Bcore  quelques  cxci 

.rnver   par  la  hardi 
d'un  Copiite , 

Niyfc  dans  les  au:  do 

ces   particules 
pour  taire  un  :  mplet  ,  &  q 

ajourer  celle  qui  maoquoic  a  celle 
qu'il  trouvoir  dan  xempi  ir- 

troi. 

I  importe  r  El 

i  de   manere.  Il   n'y  a    rien  en  cela 

Mus  il  n'étoic  pas  aitc  de  même  de 
changer  1*.  trou  cni*w  ,  t  :s  deux 

mo:  ifl  (truie    Itttrf 

mu  air  pu  ravonler   le  ;c- 

M  de  l'une 

D'ailleurs ,  l.i  ;  |/f,  ne 

s'accorde  guère  bien   avec  qu 

qu'v  a-r-il  île  pi 
je  V€k  v    «; 

la 

un  liommc  qui                       it  de 

toutes  fes  rift 

vouloir  q  '   Mais 

fai  c,ir 

cqu'i.  I 

pu 

/    ull 


674  Dissertation  XXXIX. 
bien  éloigné  de  cette  mauvaife  difpo- 
fïtion  _,  &  il  ne  méritoit  point  cette  du- 
reté. La  conditionnelle  y?  répond  mieux 
à  fa  demande  ,  Jï  je  veux  qu'il  demeure 
ainji ,  que  vous  importe  ? 

Enfin,  comme  Janfeniusde  Gand  Ta 
fort  bien  remarqué  _,  la  particuleyfc  , 
ainji ,  falfirie  la  réflexion  que  fait  faint 
Jean  fur  l'opinion  que  les  autres  Difci- 
ples  fe  formèrent  touchant  fa  mort.  Car 
la  proportion  étant  affirmative  ,  Jefus- 
Chrift  auroit  allure  pofitivement  que 
Jean  demeureroit  en  vie  jufqu'à  ion 
avènement ,  &  c'elt  en  effet  ce  que  les 
Difciples  en  conçurent.  Or  c'eft  cette 
opinion  que  faint  Jean  réfute  dans  la 
fuite  ,  lorfqu'en  lui  oppofant  les  pro- 
pres paroles  de  Jefus-Chrift ,  il  dit  qu'il 
navoit  pas  dit  que  Jean  ne  mourroit 
point.  Il  n'a  donc  pas  dit  comme  porte 
cette  leçon,  je  veux  qu'il  demeure  ainji _, 
oà  dans  l'état  où  il  ^  j  ce  qui  eft  une 
expreiîion  fynonime  à  celle  de  ne  mou- 
rir point. 

11  faut  venir  maintenant  au  fens  des 
termes  &  de  toute  la  période.  La  prin- 
cipale difficulté  connue  dans  le  fens  de 
mantre  &c  donec  veniam  ,  qui  étant  di- 
verfement  expliqués  produifentdes  fens 
dtfFerens  ;  &  il  faut  avouer  que  de  quel- 
que coté  qu'on  fe  tourne  on  ne  peut 


SS  F  R  T  A  T  10 

prefque  her  de  (e  brouill  - 

avec  is  ,  ou  avec  l'hii- 

la  nature  >  ou  enhn  avec  la 

;re. 

On  a  forme  (ur  ce  e  deux  o: 

uirraires  i  ' 

I  qu'il  n'elt   point  mon  fe 

prou  r  le  verbe  v.n    il 

Je  nom  .  .  .  J  'ianie: 
venc  pour   demeurer  en  vie ,    r 
/<r  /•  inc   en  afe  f 

Philip,  rn« 

~r>C 

.    /.    -     .  •  i    • 

que  je    C  et 

;    &    dans  cette 
a(ju-  e  de  m  .  j  t 

Mail  .rcurs  de  ce  fenriment  fe 

fonr  c!  en  deux  parties.   I  es 

:  que  les  anciens  raifoienc  meni 

du  tombeau  de  fa  il      '  ren- 

• 
commoder    la  lettre  de  l'Ecr.  vec 

l'hiftoire  ,  que  de  dire  qu'il   i:ok  c 
plein  de  vie  dans  fotl  : 

meil  y 

ferott  înrcîiompu  que  par  la  d 

trompeté  de   1  A  ;    cV:    ils  donnent 

pour  marque  de  e  que  dans 


676  Dissertation  XXXIX. 
cet  endroit  la  terre  fe  levé  &  s'abbailïe 
par  intervalles ,  ce  qu'on  ne  peut  attri- 
buer qu'à  la  refpiration  de  cet  Apôtre. 
11  faut  avoir  l'imagination  bien  déréglée 
pour  lui  avoir  fait  une  récompenfe  ôc 
un  effet  de  l'amour  de  Jefus-Chrift  en- 
vers lui  ,  d'avoir  été  enterré  tout  vif 
jufqu'au  jour  du  Jugement  ,  pendant 
que  faint  Pierre  &  fes  autres  Collègues 
dépouillés  de  leurs  corps  jouiffent  dans 
le  Ciel  de  la  gloire  de  Jefus-Chrift  jc'eft 
au  moins  le  fupplice  le  plus  affreux  que 
les  Poètes  ayent  pu  inventer  pour  punir 
le  Chef  de  la  révolte  des  Géans  contre 
les  Dieux  de  la  Fable, 

Les  autres  difent  au  contraire  ,  qu'il 
avoit  été  tranfporté  dans  le  Paradis  ter- 
reftre  où  il  demeure  avec  Enoch  &  Elie 
jufqu'au  fécond  avènement  de  Jefus- 
Chrift.  Qu'alors  il  reviendra  avec  eux 
dans  le  monde  pour  en  être  le  Précur- 
feur  (  qualité  honorable  que  lui  donne 
faint  Grégoire  de  Nazianze ,  Verbi  Pr&- 
curfor)  Se  qu'il  fouffrira  comme  eux  le 
Martyre  fous  l'Antechrift.  11  y  a  feule- 
ment cetzQ  différence  entre  les  Auteurs 
de  cette  opinion,  que  les  uns  pour  fau- 
ver  le  manere  de  la  prédiction  de  Jefus- 
Chrift  ,  le  font  enfermer  tout  vivant 
dans  fon  tombeau  .,  Se  en  fortir  de  mê- 
me qu'il  y  étoit  entré  j  parce  qu'ils  riQ 


Dit  SIH  T  AT  f  OH  XX 

peuvent    pas    concilier  avec   un        *  * 

n 
unit  lui 
Au  lie  les  aur  en- 

core moins  accorder 

i  eu- 
lerr  -    mort  'r</r 

me 
on  le  croît  de  1 1  • 
ex  les  autres  a 
\     ,    ;  le  :on  tombeau  : 
on  n'y  ave   •  m- 

CUr. 

(  : 

-  des  a 

k. 
iur  ce1 
rem  ,  de  1  hnus ,  An 

mtnor 

( 
en 

il  i 


678  Dissertation  XXXIX. 
6tion  de  Jefus-Chrift  touchant  fon  cher 
Difciple  ,  de  quelque  manière  qu'on  la 
life.  Si  on  Wtjtc  eum  voio  manere  _,  &c. 
pat  une  propoiition  abfolue,,  cette  leçon 
convient  fort  jufte  à  l'événement  :  la 
volonté  que  Jefus-Chrift  avoit  que  faint 
Jean  demeurât  comme  il  étoit  Jfc,c'eft- 
à-due  plein  de  vie  jufqu'à  fon  fécond 
avènement ,  nepouvoit  pas  s'accomplir 
plus  littéralement  qu'en  t*e  transportant 
dans  le  Paradis,  &  l'y  faifant  demeurer 
avec  Elie&  Enoch,  jufqu'à  ce  qu'il  en 
forte  pour  fouffrir  la  mort  fous  le  règne 
de  l'Antechrift. 

Si  on  fuit  la  leçon  Jl  eum  volo  ,  &c. 
ce  changement  de  la  propoiition  abfolue 
en  conditionelle  ne  met  aucune  diffé- 
rence dans  le  fens }  car  cette  condition- 
nelle eft  à  peu  près  équivalente  a  cette 
abfolue.  Dans  celle-ci  Jefus-Chrift  dé- 
clare qu'il  le  veut  biffer  en  vie  jufqu'au 
tems  de  fon  retour  _,  ôc  dans  celle-  là  il 
demande  à  faint  Pierre,  que  lui  importe 
s'il  le  veut  laiffer  dans  cet  état  jufqu'à 
ce  terme.  Cela  n'auroit  point  de  fens  fi 
Jefus-Chrift  n'avoit  la  volonté  abfolue 
de  l'y  laiffer  ;&fi  l'on  fuppofe  qu'il  avoit 
deifein  de  lui  envoyer  la  mort  com- 
me aux  autres  fes  Collègues ,  ôc  qu'en 
effet  il  la  lui  ait  envoyée  ,  on  ne  voit  pas 
pourquoi  il  demanderoit  à  faint  Pierre 


D'.^FRTATI^-.-     XXXIX. 

quel  1  il  prcnoit  àU  vi  ifl  , 

qu'il  n'avoir  : 

*  :c  ? 

marqu  iremeni 

y  ris  1.1  pi 

fl  • 
le  lort 
blable  au  lien  .    que 

la  le  contrait 
lui  juloit  le  en 

:it  U  durec  d  .  |ui 

l.i   fia  ,    ce  n'étoii  . 

&  qu'il  de  fui- 

• 

coûte  un  peu  d. 

i  exempec: 
1  ..  la   mon  a  van:  que    de    le 

;  dans  ït  l'ar.idis,  on  reproche 
ils  fe  brouillent  avec  h 

i ,    i» 
"»ofc  q 
Forme  en  le 

I 

un 
| 

;icrc  d.. 


6%o   Dissertation    XXXIX. 
Tranflation  ,  on  reproche  qu'ils  ne  jufti» 
fient  pas  le  mancre  donec  vcniam  ;   car 
enfin  ce  n'eft  pas  demeurer  en  vie  juf- 
qu/a  l'avènement  du   Seigneur  que  de 
mourir  auparavant  ,  quand  ce  ne  feroit 
que  d'une  mort  pafTagere  &  pour  quel- 
ques momens.  A  moins  qu'on  ne   pré- 
tende qu'une  fi  courte  interruption  de  la 
vie  ne  doit  pas  paffer  pour  une  mort  \ 
tout  de  même  que  faint  Paul  nous  ap- 
prend que  les  Elus  qui  fe  trouveront  à 
la  fin  du  monde  feront  emportes  tous 
vivans  en  l'air  au-devant  deJefus-Chiift 
qui  defeendra  pour  juger  les  hommes  : 
Simul  rapiemur  cum  illïs  in   nubibus  ob- 
yiam  Chrïfto  in  aéra  \  quoique  félon  la 
penfée  des  plusfavans  Interprêtes,  leurs 
âmes  feront  féparées  de  leurs  corps  dans 
ce  même  ravilfement  ^  tk   que  dans  le 
même  moment  eiies  leur  feront  réunies 
pour  continuer  leur  courfe. 

A  ceux  qui  après  avoir  fait  mourir  S. 
Jean ,  ôc  l'avoir  fait  entrer  mort  dans  le 
tombeau,  l'en  font  fortir  vivant  pour  le 
mettre  en  état  de  fourrrir  le  martyre  fous 
l'Antechrift  ,  on  peut  reprocher  qu'ils 
lui  donnent  une  réfurrection  mortelle  Ôc 
iemblable  à  celle  de  Lazare ,  quoique 
ceux  qui  refïufciterent  avec  le  Seigneur 
eutFent  repris  une  vie  incorruptible  ôc 
glorieufe  comme  la  Tienne.  Puifque  cet 


I  )  19 S  \   KTATIOV 

.   devoir  récoavi  d 

te  vie  coure  pareille  à  cell 

avoir  r 

,ns,qi. 
tire  m> 
nr  t  Pourquoi  lai 

à  li  nature  Sur  indil;  .e  que 

I  aurres  hommes  ne  fonr  < 

ju'une  pourquoi    le 

iem  qu  ;  qui 

(ans  pt(]  mbeau  furent  traaf- 

s  dans  le   P  i  .lis  | 
retire  ou  ils  continuent  leur  %  ;  ir- 

qu'clle  doir  h 
le  mar  en  pan. 

qu  |  îliir  ni 

B 
s   inutile  y  m  plu  gné 

I    pre- 
mière moi 

i'!(e  înllance. 
1   i     1  r.n:î. 

I 
du 
clivant  aui    V 


68i  Dissertation  XXXIX. 
quelques  Evêques  venus  d'Orient  à  ce 
même  Concile ,  qui  fe  plaignoient  qu'on 
les  avoit  empêchés  de  baifer  les  tom- 
beaux des  Martyrs ,  &  en  particulier 
celui  de  faint  Jean  l'Evangéiifte.  11  eft: 
vrai  que  ce  fécond  témoignage  eft  d'au- 
tant moins  preiïànt ,  que  le  tombeau  de 
ce  faint  Apôtre  pouvoit  toujours  con- 
ferver  fon  nom  ,  quoique  fon  Corps  n'y 
fut  plus  ;  comme  le  faint  Sépulcre  après 
la  Rédirrection  a  toujours  été  nommé  le 
fépulcre  du  Seigneur. 

Enfin  à  ceux  qui  font  mourir  faint 
Jean  avec  Enoch  &  Elie  fous  l'Ante- 
chrift  ,  on  reproche  qu'ils  ajoutent  aux 
deux  témoins  de  l'Apocalypie  un  troi- 
fieme  témoin  dont  û  n'y  eft  fait  aucune 
mention.  Car  encore  qu'une  Ange  l'a- 
vertiife  à  la  fin  du  Chapitre  10.  qu'il 
dey  oit  encore  prêcher  l 'Evangile  aux 
peuples  ,  aux  Nations  j  aux  hommes  de 
diverfes  langues  ,  &  à  plujieurs  Rois  _,  il 
ne  dit  rien  néanmoins  de  fon  martyre  , 
quoiqu'on  puifle  répondre  que  l'Ange 
par  un  fage  ménagement  de  fa  foiblefîe, 
lui  a  voulu  peut-être  diflimuler  une  nou- 
velle dont  il  auroit  eu  peine  à  porter  le 
poids. 

11  femble  que  pour  fe  fauver  de  tant 
d'inconvéniens  qui  font  attachés  à  la  vie 
&  à  la  réfurre&ion  de  faint  Jean,  il  n'y 


D I  FRT\-  XXXIX 

a  point  de  n  ru  a  prendre  que 

Fphefe  ,  fie 

ne  en  cet  cr.it  jufq .. 

fenriment 

1  1        -  is  les  ans  le 

fecours 
de  (es  prie  i  faim  qu 

I  pour 

-a m  de  ^es  des 

;ccurs  laftiqu 

roit   n- 

e,qu.- 
un  hasard   in  ce  ne  le 

parti  le  plus  véritable  ,   parce  q  Ton  ne 
|ue  ce  ne  fou  le  pu. 
>table. 
11  ulcment  averrirque  ce  pai 

^reen  d 

l'une  mon 
T»ii  ne  lui 

.  fie  naturelle. 

<ue  Jel  t  lui  S 

i  '■ 

!  •     un   -   >ui     :    n    <      '•    -  t 

• 
I 

■ 

: 
I 


684    Dissertation  XXXIX. 

leur  annoncer  une  morr  avancée  de  vio- 
lente: Et  comme  la  prédiction  a  déjà  été 
accomplie  en  ce  fens  dans  la  perfonne 
de  Jacques  _,  à  qui  Hérode  fit  couper  la 
tète  à  caufe  de  Jefus-Chrift  j  qui  peut 
douter  qu'elle  n'ait  reçu  le  même  ac- 
complilfement  dans  fon  frère  ? 

On  pourroit  peut-être  alléguer  qu'il  a 
bu  le  Calice  du  Seigneur  lors  qu'il   fut 
plongé  dans  l'huile  bouillante  ,  &:  qu'il 
fut  banni  dans  Flfle  de  Patmos.   IvJais 
cela  s'appelle  feulement  goûter  ,  &  non 
pas  boire  jufqu'au  fond;  &  quand  Je- 
fus-Chrift  exigea  des  deux  frères  un  té- 
moignage authentique  de  leur  amour  & 
de  leur  courage  ,  il  ne  leur  demanda  pas 
s'ils  pouvoient  goûter  de  fon    Calice  , 
mais  s'ils  le  pouvoient  boire  :  Potejlis 
bibere  caliccm   quem  ego  bïbiturus  fum  ? 
C'eft-à-dire ,  qu'il  ne  leur  demanda  pas 
s'ils  pouvoient  foufFrir  pour  fon  nom, 
mais  s'ils  avoient  le  courage  de  mourir. 
Au  moins  l'occafion  ne  leur  en  a    pas 
manqué.  Saint  Jacques  ,  comme  je  l'ai 
dit.,  l'a  trouvée  dans  la  haine  des  Juifs  ^ 
&  dans  la  perfécution  qu'Hérode  fit   à 
TEglife  pour  leur  plaire  ;    elle  ne  pou- 
voit  non  plus  manquer  à  fon  frère  qui 
eft  mort  au  commencement  de  l'empire 
de  Trajan ,  &  dans  la  perfécution  qu'il 
excita  dès  lors  contre  les  Cruéciens. 


Dissert  a  tiov 
Les  autres  en  p  nbre  ne 

utfnr  a  tain:    ' 
paiilble  ,   «S:  c'< 

qui   fe  tire  de  blanc  le 
■ 
marque  de  Maldoiur ,   que    fai; 
i. 

f\u  il  ne  m 
u  (  pan  du 

.  6c  L 
[a'il    n'croit  A  ; 

qu  wid 

il  i 

m  immoi 
Il  ne  relie  plusqua  jult 
te  mort  de  1  arriva  l'an 

de   Jefus-ChriB  .$  les  : 

cet 

tui 
de 

qu'il  marque  pour  i 

ffirti  L 

nenc 


616     Dissertation  XXXIX. 
jan  le  faffe  mourir  ,  que  vous  importe  ? 
Cette  réponfe  fuppofe  que  faint  Pierre 
♦  demandoit  à  Jefus-Chriit  fi  faint  Jean 
ne  mourroit  pas  aufli-tôt  que  lui.  Mais 
c'eft  à  quoi  cet  Apôtre  ne  fongeoit  pas, 
lui  qui  ne  favoit  pas  quand   il   mour- 
roit iui-jnême.  11  paroît  qu'il  demande 
feulement  à  Jefus-Chrift   quel    fera  le 
fort  de  fon  ami  en  général  ,  Se  s'il  finira 
d'une  mort  violente  comme  lui  ,  félon 
l'intelligence  qu'il  avoit  eue  de  la  pré- 
diction énigmatique  qui  le  regardoit  > 
c'eft  le  fens  naturel  de  ces  mots  hic  au- 
tem  quid  f  Vous  me  prophétifez  que  je 
mourrai  les  bras  étendus  en  Croix.  Et 
celui-ci  y  Seigneur,  que  deviendra-t-il  ? 
Cependant  un   Proteftanr  a  cru  que 
toute  la  curiofité  de   Pierre  ,  &  la  ré- 
ponfe de   Jefus  -  Chrift  ,  concernoient 
le  tems  où  faint  Jean  devoit  mourir. 
Quant  à  ce  que  vous  voulez   favoir  > 
lui  dit  Jefus-Chrift  félon  cet  Auteur, & 
que  vous  me  demandez  avec  tant  d'em- 
preiïement,  ne  vous  en  mettez  pas  en 
peine.  Il  demeurera  clans  le  monde  juf- 
qu'à  ce  que  je  vienne.  Mais  de   favoir 
quand  cela  arrivera  ,    cela  ne  vous    re- 
garde point.   Sur  cela  il  fait  cette  réfle- 
xion :  11  n'a  donc  pas  dit  que  Jean  ne 
mourroit  point ,  mais  il  a  caché  au  con- 
traire ce  que  Pierre  lui  demandoit  ,  je 


D  I    SSE   R   T  A  T    l   |  $g7 

ou    Jean  n:. 

ie  àoi.  !icu 

.  de  I 

que  cet  A  me 

ii  1 

a  i  nourri  ce  1  >: .^ iplc  qu 

i   donner 

M    Cil    dl 
i:    de 

tachée     I        uni 
i  pml- 
fan  : 

ir  la  dernière  dclolation  i\ 
- 
ius 

veux  que  mon  DiitipL 
i  fqu'a  Ii  ruine  ^u  remple  de 

I  : .  route  1. 

impori 

M  us  ponra  :  rrne 

de  1  une  Je 

le  m  (i 
ccque  famt  Picrt 
manière  qu'il  mourut  uip 

lui  ,  c  ie  Jean 

.    quelque    année* 

911   pas    qu  il  dut  uijuiii 


633   Dissertation  XXXIX. 

avant  le  fiége  de  Jérufalem  j  &  d'ail- 
leurs ces  vues  timides  &  intérelTées  font 
•entièrement  indignes  de  l'amitié  qu'il 
avoit  pour  fon  Collègue.  Ajoutez  à  cela 
que  faint  Jean  ,  qui  eft  mort  l'an  99  ,  a 
vécu  29  ans  après  la  prife  de  Jérufa- 
lem par  les  Romains  ,  qui  arriva  Tan 
70.  Comment  donc  peut-on  s 'imaginée 
que  Jefus-Chrift  eût  marqué  cette  prife 
pour  le  terme  de  fa  vie  ? 

11  y  en  a  qui  donnent  à  quoad  reniant 
le  fens  hyperbolique  du  jour  du  juge- 
ment ,  non  pour  marquer  précifement 
le  tems  de  fa  mort ,  mais  pour  expri- 
mer par  cette  manière  de  parler  fa  lon- 
gue vie.  Comme  nous  difons  quelque- 
fois pour  exprimer  une  longue  difptue: 
Je  crois  qu  ils  difputeront  jufqu3 au  jour 
du  jugement.  Ainfi  Jefus-Chrift  diroit 
à  faint  Pierre  ,  Si  je  veux  que  mon  Dis- 
ciple vive  _,  pour  ainfi  dire  ,  jufqu  à  ce 
que  je  vienne  dans  le  monde  _,  que  vous 
importe  ?  Il  fuffit  de  propoferce  fens 
pour  le  rejetter.  C'eft  mal  garder,  la 
bienféance,  que  de  mettre  dans  la  bou- 
che de  Jefus  Chriit  une  hyperbole  autîi 
outrée  que  de  comparer  environ  94  ans 
que  faint  Jean  a  vécu  ,  avec  toute  la  fui- 
te des  fiécles  jufqu'à  la  fan  du  monde. 

Quelques-uns  le  prennent  encore  d'u- 
ne aime  manière  pour  le  fécond  ayéne- 


Dissertation     XXXI X.     69$ 
ment ,  non  pour  y  tixcr  la  mort  d. 
Jeanj  ir  en  exclure  au  contrai 

julqu'a    la    fin    des  tems  ,  Se    tant   que 
durera  le  monde  ,  la  mon 

Si  je   veux   ,  |     us- 

Chrift  ,  qu'il  ne   meur  is    dune 

mort 

fens  il    équivalent  a   un    aune 

que  les  atll  renc  ,  parce  qu'il 

iffirmai  x  qu'il  demeure 

:nh  ,  cV  dans 
quel  intérêt  v  prenez-vou* 

Mus  il  raai  pom  ]ue  ces  Auteurs 

fe  réconcilient  malgré  bu  la  par- 

ient IK 
avec    bien  du  il. 

Jcius  C  hnlt   au  heu  de  c 
Ton  cmenr  ,   ne  s'cxpnrne- 

t  il  pas  hmpl 
jan:  .!c  proportion  v    a  :   il 

îondc, 
Il  exduit  de  cette  d  une  ch 

qu'il  veut  feulement  exclu 
\2  \  :nic  pr 

dre  le  m*  le  temj  ck 

rce  q. 
ft île  d 

cun  ei" 

Petite  cet  -Ht. 


6ç)o  Dissertation  XXXIX. 
Mais  il  eft  vifible  qu'ils  l'ont  évitée 
comme  un  écueil ,  de  peur  de  retomber 
dans  cette  proportion  qui  tient  du  ri- 
dicule :  Si  je  veux  qu'il  demeure  en  vie 
jufqu'à  ce  qu  il  meure  ,  cela  vous  regar- 
de-^ il? 

Un  autre  inconvénient  de  ces  expli- 
cations eft  que  les  Auteurs  n'y  ont  au- 
cun égard  à  ce  qui  fervit  de  fondement 
aux  Apôtres  pour  juger  que  ce  Difciple 
ne  mourroit  point.  Car  s'ils  comprirent 
que  ce  jour  du  jugement  (îgnifioit  feu- 
lement jamais  ou  toujours  _,  bornés  par 
la  durée  de  la  vie  de  faint  Jean  ,  com- 
ment demeurerent-ils  dans  la  fauffe  opi- 
nion de  fon  immortalité  jufqu'à  en  ré- 
pandre le  bruit  parmi  les  Fidèles  ?  S'ils 
n'y  virent  pas  ce  fens ,  eux  qui  étoient 
accoutumés  au  langage  de  Jefus-Chrift, 
quelle  afîurance  ont  ces  Auteurs  d'avoir 
mieux  pénétré  qu'eux  le  fens  de  fes  pa- 
roles. 

Enfin  un  autre  Auteur  regarde  ces  pa- 
roles de  Jefus-Chrift,  non  comme  une 
proportion  conditionnelle  qu'il  veuille 
en  effet  accomplir  ,  mais  comme  une 
fuppoiirionfauife  dont  il  fe  fert  unique- 
ment pour  mortifier  la  curiofitéde  faine 
Pierre.  Quand  je  voudrois  ,  dit- il ,  félon 
cette  idée  ,  quilne  mourut  jamais  j   de 


DlSSFRTATION     XXXIX.        <*1 

qu'il  demeurai  c 

^ur  du  jugement  ,    de  que 
}  (    l 
ne  dût  mourir  qu'alors  s    nuis   il  cxJut 
lement  la  more  pendant  COU  le  tenu 
ou  elle  ar 

n  feni  de  l'adverbe 
aV.\  ians   1  ;  e   , 

comme  elle  dit  que  Samuel  ne  vit  plus 
Saul  ju (qu'au  jo 
die  m  morcis  j:.  .    ÔC 

je  ne  a  .avoue., 

de  Jei 
(      .i:t  y   «\    (km  pie  dans  l'Ev 

gile,  qu'il  aiejamai  me  par 

lappoficion,  une  proportion  rauffe  ,  5c 
ii  n'an  lie  , 

itl'elle  .venir. 

le  fuites   mcommo- 

:nk parablea  de  1  opini  m  de  la 

mort  léhielU  Jenr  La 

probabil  il  .(qu'au 

ne  île  l'Ame, 

î'en  jupe  que 
I     i    1  I  •  :  :  ' 

li  »'il  viendra  un  ■  il 

ire  ,  «S:  OÙ  il  M  finira 

: 

que     1 


6 \)i    Dissertation    XXXIX. 
c'eft-à-dire,  par  le  fupplice  de  la  Croix. 
Pierre  jugeant  que  ion  ami  feroit  bien- 
aife  de  favoir  aufli  fa  dernière  avanrure, 
de  quoi  il  n'ofoit  peut-être  pas  s'infor- 
mer ,  demanda  à  Jefus-Chrift  ce    qu'il 
deviendroit  ,   c'eft-à-dire  ,  s'il   finiroit 
auMi  en  fon  tems  fa  courfe  par   le  mar- 
tyre. Jefus-Chrift    lui   répondit    qu'il 
vouloit  qu'il  demeurât  en  viejufqu'au 
tems  de  fon  fécond  avènement.  Mais 
parce  que  cette  volonté  ain(i  exprimée 
d'une  manière  abfolue  eut  étonné  faint 
Pierre  j  il  la  tourna  conditionnellement. 
Se  il  lui  dit  que  s'il  faifoit  ce  deftein  fur 
faine  Jean  ,   ce  n'écoit  pas   là  fes    af- 
faires ,   &   qu'il  devoit  fe  contenter  de 
le  fuivre  ,  c'eft  à-dire  d'imiter  jufqu'au 
fupplice  de  la  Croix  l'exemple  de  pa- 
tience Se  de  générofité  qu'il  lui  avoit 
donné. 

Saint  Pierre  néanmoins  Se  tous  les 
autres  Difciples  prirent  cette  volonté 
comme  abfolue  ,  Se  ils  répandirent  dans 
l'Eglife  le  bruit  que  Jean  ne  fouffriroit 
point  la  mort  ,  fondés  fur  l'équivoque 
de  Ja  particule  donec  ,  jufquà  ce  que  , 
qui  tantôt  enferme  le  terme  dans  le  fens 
de  la  proportion  ,  Se  tantôt  l'en  exclud  j 
Se  ils  crurent  ,  non  fans  quelque  raifon, 
que  la  vie  de  leur  Collègue  dureroitbieu 


DitsfJiTJ  XXXIX 

econda  icnr,  maisqu 

,  au  lie 
rifi   lui  raarquoii  en  i  s-11 

fin  cV:  le  terme  d 
|u  i 
lcu. 

ne  mour- 
!ir , 
iu*il  d< 
ten.  uuii  qu 

alors  qu'il  doit  i 

faini  Pi         l'a  fourl  r  la 

iupplice  d  pal  un  a. 

gC: 

11  n'y  aui  aux 

inc 

n  impomble.  Que  ii  cm  »n- 

rencoii  pi 

fou 

;i  rein. 
dans   tous  les   aurr  mes  , 

lui 

à  (aine  I 

nplati- 
fai:.  it  la  h 

parfaite  comme  elle  ctoit  ptodintcfm 

pai  (où 

il   1m  donnât   dam    .      i 

11  lui  Au 


6^4    DlSSERTATI  ON    XXXIX. 

lieu  que  la  vie  a&ive  que  faint  Pierre 
répreientoit  ne  doit  pas  demeurer  ici 
imparfaite  ,  ni  attendre  du  fécond  avè- 
nement ce  qui  lui  manque  :  mais  qu'elle 
doit  dès  ce  monde  tendre  &  parvenir  à 
fa  dernière  perfection. 


FI  N. 


TABLE 


T  A  B  L  E 

DES     CHAPITRES 

Uticles   du  quatriem 

\ 

IP.  (    \  XVIII.      /Il  M 
Chap.CX  6 

CflAP.  (  l  <; 

i.    c 
l.    C 

Ch  ci.  d 

&  1 1 

i .    Traître  ma»  :ué. 

L.  «S  16 

OCX  IL  Comttftûtiom  \  Rcnon- 

ment  y  17 

1 .    S        .i<r  difpmc 

ma  Un 

I        90*rIafoi  de  1 

Commundcmcr.t  no  .  JO 

4.  / 

5.  ire  fon 

I  CUL  5!mi 


TABLE 

i .   Confolation  des  Apôtres.        Ibid. 

i.  Efprlt   de   vérité.     Amour    obéifi 

faut.  42 

5.  Efprit     enfeignant     toutes     cho- 
fes.  46 

Chap.  CXXXIV.    Continuation  du  fer- 
mon,  49 

1 .  /.  C.  véritable  vigne ,  &  nous  [es 
branches.  Ibid. 

2.  Perféverer  dans  la  charité.  52 

3 .  Monde  ennemi  des  Fidèles.        5  5 

4.  Prédiclion  des  perfécutions.        5  8 
Chap.  CXXXV.  Seconde  fuite  du  fer- 

mon.  5  9 

1.  Confolateur  promis.  Ibid. 

2.  Promejfe  de  la  joie  éternelle.       61 

3.  Promejfes  des  faveurs  du  Père.    64 
Chap.  CXXXV1.  Prière  de  Jefus  avant 

fa  Pajfon.  6 y 

1 .  Pour  fa  propre  glorification.   Ibid. 

2.  Pour  le  falut  de  fes  Apôtres.        69 

3.  Pour  le  falut  de  tous  les  Elus.  74 
Chap.     CXXXV1I.  Jardin    des    Oli- 
viers, yj 

1.  Trijlejfc  de  Jefus.  Ibid. 

2.  Jefus  priant  &  agonifant.  8  1 

3.  Apôtres  endormis.  83 

4.  A  proche  &  baifer  de  Judas.  8  5 
§.  Juifs  renverf es  par  terre*  87 

6.  Oreille  coupée.  89 

7.  Reproches  de  Jefus  aux  Juifs.     92 

Chap, 


ITR? 

me- 

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fi 

1  de 

I.  1 

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(  '  . 

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4- 


T  A  B  l  E 

Jcfus  .  ta  Cm  14? 

Chap.      CXLill.     Cru  dfiemem     & 

"  :  n.  151 

E.  1      .   *nent de  la  .  Ibid. 

I.  L  y  regrets  des  femmes.     1  \  5 
3.   Premier    Breuvage.    Cr^cifiemc 

P.  1  56 

j..   Titre  de  la  Croix.  157 

5 .  Vêt  en:  znsaujbrt.  1  j  9 

6.  BUsfphemes  y  infultcs.  160 

7.  PoUars.  161 

8.  Paroles  de  Je  fus  à  fa  Mère.       165 

9.  7"c  E/L  i6  5 
i:    P                   ?rr.                        167 

II.  Prodiges,  d  -  renier.  Femme,    169 
Chap.    CXL1V.     Côté  percé.     Sépul- 
ture. 172. 

1 .  R  t  q u  été  des  Ja ifs.  I  nd. 

2.  Jofeph  d' A  rimât  i"3 
5 .  Qirye  t  u  rc  du  côté.  1 7  4 
4.  ZV/a  tVme.  Sépulture»                 177 

kP.    CXLV.  Réfurreclion.  184 

1.  T  dri  Femmes  au  fcpul- 
ckre.  Ibid. 

2.  Courfe  de  Pierre  &  de  Jean.      187 

3.  Premie-e  A  Jn   de  Jefus    à 

189 

4.  Femmes  :es  de  la    Réfurre- 

m  de  Jefus.  192 

5.  Seconde  Apparition  de   Jefus  c 

z  94 


DES    ChAP  I  TRIS. 

G.  Confeil  des  Juifs  pour  étouffer  le 

bruit  de  la  Refurreclion.  i  96 

Chap.  CXLVI.   Troijleme  &  quatrième 

apparition.  ico 

1.  Quatrième  Apparition  à  Emmaùs, 

lbid. 

2.  Troijieme  Apparition  à  Pierre.  207 
Chap.  CXLVII.   Cinquième  &  fixieme 

Apparition.  :    I 

1.  Cinquième  Apparition    aux   on^e, 

lbid. 

2.  Sixième  Apparition    aux  mêmes 
Apôtres  avec  Thomas.  214 

Chap.  CXLV1II.  Septième  Apparition 
fur  le  tord  de  la  mer.  2 1  % 

1 .  Seconde  pêche  miraculeufe.       lbid. 

2.  Je  fus  confie  fe  s  brebis  à  Pierre.  222 

3.  Prcdiclion  du  Martyre  de  Pierre. 

1x6 

Chap.  CXLIX.  Huitième  ,   neuvième  & 

dixiem e  Appariti on.  229 

1.  Huitième    Apparition  en  Gali. 

lbid. 

2.  Lr  :me   à  Jacques.  La  di.\ 
rr.e  dans  la  ville  de  Jerujalem.         230 

3 .  Prcmeffe  du  Saim-I  jj  2 3  3 
Chap.  CL.  Afccnf.on.  2;  5 

de  la  Table  des  Chapitres. 


;    TABLE 

DES    DISSERTATIONS 

du  Tome   quatrième 

Dissertât.    XXIX.       T     Uc.     Cap» 

JL  XXII.  y. 
15.  Dejîderio  dejîderavi  hoc  Pafiha 
manducarc  vohifcum ,  antequam  pa- 
tiar.  Concord.  Cap.  CXXVI1I.    1^9 

Dissertât.  XXX.  Joan.  Cap.  XIII. 
y.  1.  Ante  diem  fejlum  Pafckœ  ,  6'c. 
Concord.  Cap*  CXXiX.  5 1  1 

Dissertât.  XXXI.  Luc,  XXII.  y. 
19.  Hoc  efi  corpus  meum  quod  pro 
vobïs  datur.  Concord.  Cap.  CXXX. 

Dissertât.  XXXII.  Matth.  XXVI. 
y.  2  S.  Hic  efi  enim  fanguis  meus 
Novi  Tejlàmenti^qui  pro  multis  effun- 
detur  in  remijjlonem  peccatorum.  Con- 
cord. Cap.  CXXX.  587 

Dissertât.  XXXIIÏ.  Matth.  Cap. 
•  XXVI.  y.  29.  Dico  autem  vobïs  : 
non  bibam  amodode,  hoc  gerii mine  vi- 
ns y  ufque  in  diem  illum  _,  cùm  ïllud 
bibam  y  obi  fi  um  novum  in  regno  pa- 
tris  me'u  Concord.  Cap.  CXXX.  600 


..s     Jcfu.     C<  \p. 

XL 

I.       I 

cor 

DlSSfRT 


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LTvangile  analyse.  v( ( 

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